Chapitre 1 [Partie 1 - Rebel]

 (Vous avez la possibilité pour chaque chapitre de lire en écoutant la musique associée juste au dessus , qui pour moi rajoute de l'immersion, j'essayerai d'en mettre une pour chaque chapitre !) 


"It's another day of suuuuun", comme tous les matins, c'est cette musique qui vient bercer les premiers moments de ma journée. A 7h41 précises, les horribles vibrations de mon téléphone portable sur ma table de chevet couplées à cette douce musique, censée me réconforter dans l'idée d'une belle journée, finissent par me tirer de mon sommeil. S'entame alors l'éternel combat de mon corps pour résister à la fâcheuse tentation de me rendormir. Dieu sait que j'aimerais me laisser tenter, comme tous les jours, mais bon, le camp adverse possède une arme que je ne peux malheureusement pas vaincre. Ma mère.

- "Roxanne chérie, il est bientôt 8h, tu vas être en retard " me dit-elle, entrant en trombe dans ma chambre d'un air beaucoup trop enjoué pour une heure aussi matinale.

Au même moment, je sens les premiers rayons du soleil venir titiller mes yeux, encore fermés. Le plaisir n'est que de courte durée, à peine le temps qu'il faut pour aller de la porte à la fenêtre, qu'elle a désormais ouverte en grand, et qui laisse les puissants éclats lumineux m'éblouir, d'une manière bien moins paisible ...

- "J'arrive j'arrive, laisse moi 5 minutes

- Tu me dis ça tous les jours, et tu sais très bien que si je veux que ma princesse reste la brillante élève qu'elle est, je me dois de ...

-  Veiller à ce qu'elle aille toujours en cours."

Non, je ne suis ni mentaliste, ni voyante, j'ai juste beaucoup trop entendu cette phrase, souvent à l'exacte même heure, depuis un an. On m'avait promis un brillant avenir dans le domaine scientifique, selon je ne sais quelles recherches et je ne sais quels tests qu'on m'avait fait passé l'an dernier. Je me rappelle les avoir réussi sans trop de complications, bien que je n'ai jamais réellement compris pourquoi on me les faisait passer, ni même pourquoi j'étais celle qu'on avait choisi. Ma mère avait pris cela beaucoup trop à coeur, alors bien sûr quand les résultats sont tombés et qu'on a appris que j'étais de ceux qu'on appelle "l'élite", elle a voulu que je devienne la fierté de la famille, celle qu'elle n'avait jamais réussi à être.

Je la comprenais, même si je ne l'acceptais pas. Elle qui avait toujours été la madame tout le monde, éternelle rêveuse d'une grande carrière au cinéma ou dans la chanson. Elle transposait ses rêves sur sa fille, à défaut de chercher à comprendre les siens ... Quoi que ... A quoi bon.

D'un coup de bras, j'écarte la couette qui couvrait mon corps vêtu d'un simple pyjama du froid provenant de la fenêtre, toujours ouverte. Cette fenêtre semblait presque être un stratagème pour me forcer à quitter la pièce, tant il m'était désagréable de rester ne serait-ce que 5 minutes au contact du vent glaçant. A peine le temps de sortir de ma chambre, encore assoupie, que je manque de tomber en bousculant ma mère, qui dans sa frénésie matinale, ne comprend pas qu'on soit aussi lents. Et pour cause, en l'espace de quelques minutes, je n'avais réussi qu'à me lever, alors qu'elle avait réussi à préparer mon petit déjeuner tout entier, et à engloutir le sien.

 Sa dévotion sans limite pour ses proches me laissait bouche bée. Elle qui était si malheureuse, ne vivait désormais plus que par procuration de sa famille. Un boulot de merde, une vie de merde, mais ses enfants pour la retenir. Comment suis-je censée me sentir lorsque j'entends que je suis la seule chose à laquelle ma mère se raccroche ? Comment imaginer que ma simple absence peut lui faire sortir de ses gonds ? C'est à la fois flattée et attristée que je me rend compte de cette situation au fur et à mesure des jours qui passent.

Une fois mon café, mon jus d'orange et mes tartines (fades) de beurre avalées, il est l'heure pour moi de libérer la cuisine, pour l'arrivée du second challenger, mon frère. Oh le voilà qui sort de sa chambre, probablement réveillé de la même manière que je l'ai été, à en juger par ses yeux à peine entrouverts et sa moue matinale. Le couloir était devenu la piste de sprint de ma mère, qui faisait désormais des aller-retours entre toutes les pièces pour ... je n'en sais rien à vrai dire, probablement pour s'occuper de quelque chose.

De retour dans ma chambre, je m'écroule sur mon lit, comme à la recherche du sommeil qu'il me manque, et cherche à attraper mon téléphone portable, toujours là où je l'ai laissé pour enlever ce foutu réveil. D'un geste brusque, je tire le chargeur de celui-ci pour ramener le portable à ma hauteur, et passer rapidement en revue les réseaux sociaux. Rien, rien et encore rien. Du moins rien d'intéressant. Non pas que je ne m'intéresse pas au nouveau couple du lycée, ou au nouveau pull à la mode, mais disons que je n'arrive pas à apprécier quelconque nouvelle qui ne me concerne pas. En reposant mon téléphone, j'aperçois l'heure, 8h14. Je vais devoir me dépêcher si je ne veux pas concéder mon 6ème retard du semestre, synonyme d'un 0, qui je le sais, briserait le cœur de ma mère.

Un détour par la salle de bain s'impose, et même si ce n'est pas le moment que je préfère, j'aime me sentir préparée, ou bien peut-être que j'aime tout simplement ressembler aux autres. Juste le temps d'enfiler ma veste, et il est temps de partir pour les cours. Poche droite de jean, téléphone, poche gauche, portefeuille. Jusque là, tout était à sa place. Dans les poches de ma veste devaient se trouver les derniers outils de l'attirail avec lequel je pourrais partir au bout du monde : Mes écouteurs, et mon stylo porte bonheur.

Papa me l'avait offert il y a quelques années, pour mon anniversaire. On ne le voyait plus trop depuis qu'il avait été embauché dans cette multinationale qui lui prenait tout son temps. Alors certes, on vivait bien, mais cela ne remplaçait pas la présence d'un père.

Tout était là, j'étais prête. Un dernier bisou à ma mère, un signe de main à mon frère, et c'est enfin l'heure de partir ! Oui, enfin, car le trajet vers l'école est probablement le moment que je préfère dans la journée. La musique à fond dans les oreilles, le monde qui se réveille autour de moi, mais surtout la tranquillité de n'avoir personne à qui rendre de comptes, personne à qui je dois me forcer de parler. Quelques secondes sur mon téléphone suffisent à trouver la musique que je cherche.

 Toujours cette même playlist, je la connais par cœur, quelles que soient les chansons. Je l'ai créée spécialement pour ce moment de la journée. Ce moment où je me réveille réellement, où je deviens vivante. En toute honnêteté, c'était probablement mon bien le plus cher. Je trainais cette playlist depuis plusieurs années, si bien qu'il me serait impossible de retrouver toutes les musiques si je venais à les perdre. Pourtant, dès les premières notes de chacune, j'étais capable de reconnaitre l'intégralité des 5 prochaines chansons qui se succédaient infiniment pour le plus grand plaisir de ceux qui les écoutent.

 Je connais par cœur le chemin, c'est celui que je prends tous les jours depuis maintenant 3 ans. A droite, la maison des Peters, le moment pour moi de changer de trottoir pour éviter les aboiements incessants de leur chiot, qui même si il est très mignon, n'a pas le droit d'interférer dans mon monde. A cet instant, personne n'en a le droit à vrai dire. En face, sur le trottoir assombri par l'ombre des pavillons, faisant face au soleil entamant son ascension vers le zénith, on trouve la maison de Max, le cancre de ma classe. Comme d'habitude, il est en retard, fait son sac en vitesse et se met à courir pour arriver à l'heure. Je me suis toujours demandé comment il faisait pour ne pas apprendre de ses erreurs. 

Je continue ma route ainsi pendant une dizaine de minutes, me permettant quelques détours pour prolonger ce plaisir, avant d'arriver devant l'enceinte de ma pièce de théâtre, celui qui abritait mon premier rôle au quotidien : Le lycée.

Il était temps de laisser tomber la Roxanne que j'étais, pour celle que l'on voulait. La Roxanne qui n'a de Roxanne que le nom.

Je regarde une dernière fois mon téléphone, avant de changer de musique. Finie la playlist de mes rêves, il était l'heure d'accueillir au sein de ce premier acte une des composantes majeures de notre pièce : Une playlist nommée sobrement "Lycée", remplie de toutes les musiques actuelles que les jeunes de mon âge aiment, au cas où quelqu'un me demanderait. Je me remets en marche pour entrer, d'un pas beaucoup moins élancé et assuré qu'auparavant, comme si quelque chose me retenait de rentrer, comme si la Roxanne que je voulais être ne voulait pas me laisser partir. C'était son heure à elle de dormir.

Alors que je passe la grille et entre dans la cour, je sens une main se poser sur mon épaule. Dans un sursaut, je me retourne. Il est là, en face de moi, celui qui tient les ficelles de la Roxanne du lycée. 

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