Chapitre 28 - Paul

« You lift me up when I'm down down down You lift me up before I hit the ground »
Tu me soulèves quand je suis au plus bas Tu me soulèves avant que je heurte le sol

Helium — Sia

J'ouvre les yeux et mes bras engourdis s'étirent lentement. Les cheveux de Fallen, couchée sur ma poitrine, me chatouillent le visage et je tente de les en retirer sans la réveiller. Son dos se soulève pour se baisser dans un soupir détendu alors que mes doigts frôlent son dos. Mon autre main vient se poser sur sa joue tandis que j'embrasse son crâne.

J'ai failli tout foutre en l'air, encore une fois. Je ne comprends pas la patience qu'elle a à mon égard... Si Fall était cabossée, moi je suis bon pour la casse. Pourtant, je n'arrive pas à m'éloigner d'elle. Je voudrais la rendre heureuse, avoir le mérite de lui suffire. Pourtant... je sais qu'à un moment donné, je devrai la laisser partir parce que peu importe ce qu'elle m'apporte, elle ne me soignera pas.

Ses avant-bras se hérissent sous mes caresses et un sourire prend naissance sur mon visage.

Oui, je devrais la laisser partir. Mais pas aujourd'hui. Ni demain.

Je pivote en la faisant glisser délicatement sur le côté et j'ai l'envie irrépressible ou plutôt le besoin vital de poser mes lèvres sur les siennes. Encore endormie, elle répond pourtant à mon baiser. Je ne parle pas, mais je communique. Mon baiser a pour objectif de lui faire comprendre tout ce qu'elle représente pour moi.

Je l'aime fort, je ne le lui dirai pas, mais je l'aime tellement fort que ça m'en fait mal. Ses mains se retrouvent sur mes hanches et empoignent ma peau. Avec délicatesse, je mets fin à ce baiser, le souffle court.

Mon visage s'éloigne du sien et mes yeux tombent sur son visage rayonnant. Les siens papillonnent lentement et se plissent lorsque la lumière du jour l'éblouit.

— C'est du réveil, murmure-t-elle la voix légèrement cassée.

Un léger rire m'échappe et mes doigts caressent sa nuque avant de saisir l'une de ses mèches.

— Tu veux faire quoi, aujourd'hui ?

Son front se plisse alors qu'elle réfléchit. Puis ses yeux se mettent à briller lorsqu'enfin une idée lui vient. La voir ainsi me réjouit, non plus que ça, il emplit mon cœur d'une chaleur qui avait longtemps disparu. Mon regard s'assombrit quand son visage se décompose légèrement.

— Quoi ?

— Rien, laisse tomber, me dit-elle honteuse.

Elle m'agace quand elle fait ça, quand elle se rétracte ou a honte de ce qu'elle est, de ce qu'elle veut.

— Dis-moi, ordonné-je.

— C'est que...

— Fall, lâché-je exaspéré.

— Hé ! Tu me parles autrement, se vexe-t-elle.

Je me détache alors et remonte les coussins contre la tête de lit et m'y adosse. Mes doigts s'enroulent autour de son bras pour qu'elle vienne à moi. Sans un mot et sans me lâcher du regard, elle vient se mettre à califourchon sur mes jambes. Je suis bêtement heureux de voir qu'elle ne se cache plus. Sa peau frémit, et ses seins durcissent, véritable plaisir pour les yeux. Mais j'ai beau avoir un melon comme pas possible, je sais que c'est dû à la fraîcheur de la pièce. J'attrape le drap et nous en recouvre.

— On dirait des enfants sous une tente, s'amuse-t-elle.

Son air enfantin me donne envie de la serrer dans mes bras et de l'embrasser à pleine bouche. Il me donnerait presque envie de pleurer. Putain, je suis sensible ce matin.

— Qu'est-ce que tu voulais faire ? la questionné-je en tentant de cacher mon trouble.

Non, la conversation n'était pas passée à la trappe. Ses joues rosissent et elle se met à gigoter.

— Dépêche-toi de me le dire parce que tes os du cul sont en train de s'enfoncer dans mes cuisses et crois-moi, ça n'a rien d'agréable.

Son rire couvre la fin de ma phrase alors qu'elle me tape la poitrine.

— T'es bête.

Mes mains se posent sur ses hanches et, d'un geste brusque, je la ramène à moi. Mon nez frôle le sien et mon regard se rive au sien. Je pourrais admirer ses yeux des heures, ils reflètent tellement de choses. Ils sont toujours transparents, ne mentent pas et ce matin, ils me crient qu'ils m'aiment. Un trou béant s'ouvre dans ma poitrine lorsqu'ils me fuient et se baissent.

— Tu vas trouver ça tellement con, chuchote-t-elle.

— Dis toujours...

— Je n'ai jamais eu de véritable petit copain alors...

— Tu n'as jamais eu de rencard, terminé-je pour elle.

Elle opine du chef et ma main se faufile dans sa chevelure complètement emmêlée.

— Moi non plus, lui confié-je.

Et c'est vrai. Avec Lisa, on ne peut pas dire qu'on ait vraiment eu une sortie en amoureux. On était bien trop jeunes et on passait notre temps avec notre bande de potes. Je n'étais pas porté là-dessus. Et avec Clara... avec Clara c'était encore différent.

— On va se lever, tu vas me faire des œufs brouillés, du café et des tartines si tu as puis...

— Du calme, Cro-Mignon, se moque-t-elle.

— On va aller se préparer le petit-déjeuner et...

— C'est un peu mieux, accepte-t-elle.

— Je vais te préparer le petit-déjeuner ? tenté-je.

— Parfait ! se réjouit-elle en effectuant des petits bonds qui directement me donnent l'impression de perdre mes jambes.

— Fall, tes os ! grogné-je.

— Merde ! Mon cul ! s'affole-t-elle en se détachant de moi.

Je l'attrape avant qu'elle ne descende et la couche sur le lit. Mon corps se retrouve sur le sien. Si au début, je voulais m'amuser, mon attitude change, mon cœur accélère et ma gorge se serre.

Fallen rit puis devient sérieuse lorsque ses iris se rivent aux miens.

— Paul ? me questionne-t-elle anxieuse.

— Embrasse-moi.

Ses sourcils s'arquent et je vois qu'elle cherche à lire dans mon regard.

— S'il te plaît.

Embrasse-moi. Ne me laisse pas chuter. Rattrape-moi.

Aime-moi. Ne m'en veux pas. Pardonne-moi.

Ne me déteste pas.

***

Comme promis, après notre douche, je nous ai concocté un petit déjeuner riche en calories puis nous sommes sortis. Ballade dans Paris, promenade sur les quais. L'air est frais mais pas désagréable. Fall a troqué son pull bien trop chaud contre un simple gilet en coton.

C'est parfait. Elle est parfaite.

Nous déambulons dans les rues lorsqu'elle s'arrête devant la vitrine d'un tatoueur. Je n'ai jamais pensé qu'elle serait du genre à se faire tatouer et je la dévisage tandis que son regard passe d'une photo à l'autre.

— Tu comptes te faire tatouer ?

— Non, du tout. Je veux que ça ait un sens et pour l'instant, je n'en ai pas trouvé.

­— Tu ne veux pas une étoile ? Une rose ? la taquiné-je.

— Non, me dit-elle en ricanant. Jamais de la vie.

— Un jour, tu trouveras un truc qui aura du sens pour toi, rajouté-je, sérieux.

Son visage se tourne vers moi et un sourire mélancolique s'affiche sur son visage lorsqu'elle me souffle un faible « oui ».

***

— Après je ne sais pas, l'Amérique Latine.

Nous sommes dans un glacier, en train de déguster une glace pour deux. Un truc de couple selon Fallen. Elle me parle du voyage qu'elle prépare.

— On irait au Machu Picchu ? me demande-t-elle en raclant le fond du verre.

— On ?

Son sérieux ne m'échappe pas alors qu'elle repose sa cuillère.

— Je sais que... tous les deux c'est tout récent et on apprend, petit à petit, et je ne veux pas que tu prennes ça pour un engagement ou que tu penses que...

— Fall, la coupé-je.

— Si je fais ce voyage...

— Quand, la corrigé-je.

— Quand je ferai ce voyage... tu voudras m'accompagner ? Et venir faire la gueule sur le Machu Picchu ? me supplie-t-elle en joignant ses deux mains.

— Je ne sais pas Fall, j'ai...

Cette proposition me rend nerveux. Je ne sais même pas où on en sera demain. Je ne sais rien du tout. Alors je ne peux pas... mais la détresse dans son regard me pousse à lui offrir une tout autre réponse.

— On verra.

Mon sourire se veut rassurant et je peux voir à son regard qu'elle le prend comme tel.

Nous nous levons et je m'approche du bar pour régler ma consommation lorsque je reçois un message. Je sors difficilement mon téléphone de la poche arrière de mon jean, tout en rejoignant Fallen, restée dehors.

Mon pouce déverrouille l'écran et j'ai l'impression que mon passé revient sournoisement me chuchoter qu'il est toujours là et qu'il ne me lâchera jamais. J'ai la sensation que mon monde s'écroule et que la seule chose qui pourrait m'empêcher de tomber, c'est elle. Mon regard se lève à sa recherche mais je ne la vois pas, nulle part. Elle n'est pas là. Elle est partie. Elle aussi.

Ma vue se brouille, ma cage thoracique se resserre et mon cœur bat trop fort dans mes oreilles. Je ne peux plus respirer et j'ai l'impression de me noyer. Où est-elle ? J'ai besoin d'elle, j'ai besoin de la voir, de la sentir. Fall ? Mes mains sont moites et mes cheveux à présent humides. Je voudrais hurler son nom, mais rien ne sort et alors que je pense être devenu complètement fou, deux mains se posent sur mes joues et enfin, mes poumons se remplissent d'air. Mon regard s'ancre au sien et je l'emprisonne dans mes bras, comme si elle était ma bouée, la seule qui pouvait me sauver.

— Paul, s'affole-t-elle.

— Je viendrai avec toi, lâché-je brusquement, la tête enfouie dans sa nuque. Me laisse pas.

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