CHAPITRE IV - Ezra
⚠️ Violence ⚠️
Ville d'Austin – Deux ans auparavant.
La nuit enveloppe la ville.
La pluie tombe de plus en plus fort sur les routes chauffées par le soleil de la journée. Elle gronde, se déverse dans une cadence enchanteresse. Une mélodie envoûtante en symbiose totale avec mon état d'esprit du moment.
Agonie imminente, harmonie doucereuse. La mise à mort sera lente et surtout, douloureuse.
J'exulte.
Jubile.
Triomphe.
Appuyé d'une épaule sur l'encadrure d'une fenêtre privée de vitres, les doigts sous mon tee-shirt passent et repassent sur la lame aiguisée tandis que mon regard se perd sur un point invisible. Après plusieurs minutes, je stoppe mon geste et porte le couteau à hauteur de mes yeux vers les lumières artificielles de la rue. Plus aucune trace du liquide sirupeux ne l'habille. L'acier brille, scintille, irradie de la torture dont il est la cause, de la finalité qu'il va engendrer.
Encore un peu de patience.
Les événements tournent en boucle dans ma tête et le dernier scénario orchestré par ma vengeance, par ma haine, se concrétise.
Enfin...
Des gémissements dans mon dos me tirent de la vendetta presque silencieuse dans laquelle j'étais plongé. Il se réveille. Un rictus de satisfaction se greffe sur mon visage.
Assis sur une chaise au milieu de cette pièce, dans cet immeuble désaffecté, ses paupières engourdies peinent à s'ouvrir. Elles papillonnent, luttent sur ses traits tuméfiés aux tons bleutés. Sa bouche est gonflée, déformée et se distend par de fines coulées de sang à la jointure de ses lèvres. Un tableau bandant, joussif, et qui baignera dans l'apothéose une fois mon œuvre accomplie.
—Bien dormi ? le questionné-je en amorçant un pas vers lui.
Avec difficulté, paupières mi-closes, sa tête se tourne dans ma direction.
—Fils de pute, geint-il tandis qu'il tente de se lever.
—Je serais toi, je ne ferais pas ça.
Un faible rire de défi lui échappe.
—Va crever, rétorque-t-il dans un murmure.
Vacillant, il avance son buste pour se mettre debout.
Échec.
Un cri gorgé de douleur résonne entre ces murs abandonnés quand il prend appui sur ses pied avant de s'effondrer au sol. Le sang gicle de ses chevilles. Ses doigts se déforment, se tendent, se crispent sur le plancher poussiéreux.
—Putain, grogne-t-il.
Indifférent en apparence mais réjoui de l'intérieur, je finis de combler le vide qui nous sépare. Tête penchée sur le côté, je m'accroupis à ses côtés.
—Un problème ? lui demandé-je d'une voix neutre.
—Qu... qu'est-ce que tu m'as fait ?!
Détaché, apathique, je place les coudes sur mes genoux. Le poignard entre mes mains, dans une lenteur voulue et joueuse, j'appose la pulpe de mon index sur la pointe du métal acéré.
—J'aime beaucoup les armes blanches, lui confié-je sur le ton de la confidence. Silencieuses, vives... tranchantes.
Un bref instant mon regard dévie sur ses pieds ensanglantés, puis se reporte à nouveau sur son visage inquiet.
Le gibier est entravé, la proie condamnée.
À ma merci.
—Le tendon d'Achille n'est pas vital mais indispensable pour la survie, face aux prédateurs, enchaîné-je. Une partie du corps si précieuse. Sans lui, tes jambes ne te sont plus d'aucune utilité. Plus de fuite possible, plus d'échappatoire. Tu gis au sol. Ton instinct de survie te hurle de t'enfuir mais tu ne peux pas. Tu restes là, inerte, dans l'incapacité d'échapper au danger. Immobile devant la sentence.
—Bâtard, gémit-il.
Je ricane.
—Un peu de tenue, s'il te plaît. Je ne t'ai pas tué. Vois-ça comme un gage de ma bonne foi.
—Qu'est-ce que tu m'veux, merde !
Mon rire se prononce, augmente. Se fait de plus en plus malsain. Rédempteur. D'un geste plus machinal que volontaire, je passe mon pouce sur mes narines. La transe m'habite, la jubilation me consume.
—Où est-elle ?! claqué-je en appuyant le couteau sur sa jugulaire.
Lui-même se met à ricaner.
Il me défie, me brave.
Mauvais choix.
—Il est trop tard, Cannon, articule-t-il entre deux respirations laborieuses. À l'heure qu'il est, elle est certainement en train de danser à poil devant un vieux qui prend des pilules pour bander. La regardant comme un simple investissement à faire grandir.
La folie me guette et dévore mes entrailles, ma mâchoire se crispent comme jamais.
J'ai envie de l'égorger pour avoir prononcé ces mots, de le saigner comme un porc. Cependant, je m'abstiens. J'ai encore des choses à lui dire avant de lui offrir son dernier souffle. Amer mais concentré dans ma tâche, dans ma quête, mon couteau glisse de sa gorge à son flanc droit.
Il se crispe.
—Je vais t'avouer quelque chose, lui soufflé-je. Je sais que ton père est à la tête du réseau.
La joue écrasée sur le sol, ses yeux me scrutent avec interrogation.
La toile se resserre.
Il le sait.
—Un peu vilain pour un directeur de prison, ironisé-je. Pour un homme respecté et au-dessus de tout soupçon tel que lui.
Le glas s'apprête à tomber, mon jugement arrive.
—Tu préfères quoi, craché-je à quelques centimètres de son oreille, que je te perfore le foie et agoniser jusqu'à ce que ton sang noie tes poumons ? Une mort lente et suffocante. Ou bien alors, continué-je en remontant ma lame sur son dos, que je te sectionne les vertèbres et finir paralysé de ton corps mais pas de ta conscience ? Au choix.
Ses muscles atrophiés par la conclusion macabre qui se finalise sont durs comme de la pierre, sa respiration est chaotique.
Il panique.
Je me régale.
Mais des bruits de sirènes au loin viennent briser le moment.
L'espoir renaît sur ses traits.
—Le piège s'est refermé sur toi, Ezra.Tu vas croupir en taule.
Devant sa naïveté et sa stupidité flagrante, je soupire sans pour autant m'éloigner de lui.
—Mais j'y compte bien.
Sidéré, il me considère la bouche tremblante et entrouverte.
—T'es complètement barré, se moque-t-il, à bout de force. Tu sortiras jamais vivant de là-bas.
Mon couteau se positionne sous ses côtes.
—Tu sais ce qu'on dit. Sois proche de tes amis, mais encore plus de tes ennemis.
Ses traits se décomposent lorsqu'il comprend enfin mon but.
—T'es complètement fou !
—Chuuuut, intimé-je. Sois plus reconnaissant. Je t'offre le salut et en plus de ça, je vais m'occuper personnellement d'en faire de même avec ton paternel.
—Taré ! dit-il en essayant de se tourner sur le côté.
Mais je le retiens en agrippant son épaule.
—Quand Papa aura vu ce que j'ai fait à son fiston, nul doute qu'il me voudra entre ses murs. N'oublie jamais... pitoyable erreur que de s'en prendre à ma famille. Bon voyage en Enfer.
Des pas saccadés dans les escaliers ainsi que des éclats de voix me poussent à accélérer mon plan.
Cruelle, délivrante, meurtrière, ma lame glisse et s'enfonce dans ses chairs. Son souffle est difficile, la fin est proche.
—Crève, ordure, lui murmuré-je près de son visage.
—Plus un geste, Cannon !
Transporté par mon châtiment qui allait enfin pouvoir prendre vie, je donne une dernière pression fatale à ma victime avant de lâcher ma lame.
Dos aux fédéraux et les deux mains levées désormais, je me redresse sur mes deux pieds.
—Cette fois on te tient, crache l'un d'eux en me mettant les menottes.
Oh mais j'espère bien, imbéciles que vous êtes. J'espère bien...
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Hey les bébés !
Chapitre un peu court, j'en conviens, mais nécessaire pour la suite et la compréhension de ce «cher» Ezra.
À bientôt 💋
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