6. Un vieux réflexe

Thomas commence à faire les premières manipulations tandis que je le regarde. Ses gestes sont très précis, ses mains agiles. Contrairement aux autres qui ont besoin d'être à deux pour accomplir certaines choses, lui ne demande pas mon aide. Je comprends maintenant ce que voulait dire le professeur par « meilleur élément». Je lui propose tout de même de participer, ou plutôt je lui impose ma participation. J'attrape le fer à souder et un fil d'étain que je viens positionner sur la minuscule carte électronique. Je ne suis pas une professionnelle, mais je me débrouille plutôt bien.

- Pas mal... pour une fille.

Je lève la tête devant ce commentaire et en profite pour regarder autour de moi. Je constate qu'il n'y a aucune fille à part moi dans la classe. Les deux autres ont dû prendre une autre option. Je ne prends pas la peine de lui répondre.

***

Cela fait environ une heure que nous travaillons sur cette cette carte. Nous inversons souvent les rôles pour ne pas quel'un de nous s'ennuie, et c'est à mon tour de l'observer. Ils'occupe du système électrique de la puce, mais je ne suis pas certaine de ce qu'il fait.

- Tu devrais inverser le positif et le négatif et les raccorder ensemble, ça fonctionnera mieux, même si ce n'est pas entièrement faux ce que tu fais.

- Ce n'est pas logique, scientifiquement négatif plus positif donne un résultat nul, ça ne fonctionnera pas.

- Mais ce n'est pas scientifique, c'est technique. Il ne faut pas toujours utiliser la logique pour avoir une réponse à tout.

Il me regarde, embêté.

- C'est toi qui es censée m'écouter.

Je pose ma tête dans le creux de ma main en appuyant mon coude sur la table, me fixant sur mon idée.

- Si ça foire, ce sera de ta faute, conclut-il.

Je sais que cela va fonctionner. Je n'ai jamais créer de puces, mais j'ai eu maintes fois l'occasion de réparer mon téléphone et son système électrique fonctionne à peu de choses près comme cette puce. Je me suis même déjà aventurer dans de la modification de paramètres alors j'ai quelques connaissances dans le domaine.

Le temps s'écoule et nous avons déjà bien avancé.Thomas est allé chercher du plastique et du cuir afin de les assembler pour en faire une coque. Il revient de la salle des machines avec un stylo-graveur afin de nommer le gadget. Je le vois écrire les initiales M.A.P. en lettres fines sur le plastique.

- Pas mal non plus... pour un garçon, dis-je, lui faisant comprendre que sa même remarque précédemment était idiote. Mais pourquoi M.A.P. ?

- Je n'en sais rien, c'est ce qu'il faut marquer selon les instructions.

Je regarde la fiche que le professeur nous a donné en début de cours.

- Ce doit être le nom du robot, continue-t-il. En septembre, nous avions fait la même chose avec un robot ménager qui était dédié à un concours, c'est pour ça qu'il avait un nom particulier.

La sonnerie retentit. Cela fait trois heures que nous sommes revenus en cours et nous avons déjà finit. Cette fois, c'est moi ai terminé de ranger avant Jonathan. Je l'attends et il me questionne :

- Alors, comment ça s'est passé ?

- J'en sais rien, c'est censé être comment les cours habituellement ?

- Non, je veux dire... avec Thomas, me traduit-il avec gêne.

J'avais compris. Je voulais juste éviter la question. Je ne savais pas s'il avait remarqué notre hostilité, mais apparemment c'est le cas.

- Ça allait... disons que ça aurait pu être pire,mais comme tu peux le penser nous n'avons pas de... grandes conversations.

Il se relève et met son sac sur son épaule.

- Tu sais, Thomas est un mec sympa, mais il lui faut un peu de temps.

Je hoche la tête. Mais en vérité, du temps, je n'en ai pas, et quel que soit le degré auquel il m'apprécie, ça ne changera rien à mon comportement.

Nous sortons de la salle, et je me dirige à travers les couloirs du lycée avec les garçons. Lorsque nous sortons, je vais prendre ma moto.

- Au fait, s'écrie Jonathan de l'autre côté de la rue, j'ai tenu Genny au courant, la fête sera vendredi à partir de vingt-deux heures.

Je tends mon pouce en l'air vers lui pour lui indiquer que j'ai bien entendu, et m'apprête à mettre mon casque, quand je me rappelle d'une chose : Zoé. J'active le micro et prends mon téléphone à l'oreille pour faire semblant d'appeler.

- Zoé ?

Je n'entends aucune réponse.

- Zoé ! crié-je.

J'entends un énorme bruit de fracas dans l'oreillette ce qui me fais grimacer.

- Oui, qu'est-ce qu'il a ? balbutie-t-elle.

- C'était quoi ce boucan ? Attends, je rêve ou tu dormais ?

- Non, t'inquiète pas c'est rien, juste une cassette d'enregistrement qui est tombée. Ça fait plusieurs heures qu'on est là à germer dans la camionnette, alors oui je dormais ! Écoute, on va pas pouvoir faire ça très longtemps. Si Stevens m'avait appelé,je lui aurai dis quoi ? Que j'avais pas de nouvelles de toi depuis ce midi, et qu'à l'heure du déjeuner tu ne m'a absolument rien donné!

- C'était la première journée, il ne fallait pas s'attendre à une prouesse. Et puis il n'a pas téléphoné de toute façon. Je pense que ça va être plus compliqué que je ne le pensais.

- Comment ça ?me demande-t-elle sur un sursaut,comme si elle ne se réveillait que maintenant.

- Je l'ai observé toute la journée. Il n'a que deux amis, dont une qui va déménager et que de toute façon je n'aurai pas pu soupçonner parce qu'ils se connaissent depuis trop longtemps,et un autre qui n'a pratiquement pas ouvert la bouche, si ce n'est pour faire des remarques désagréables. C'est comme s'il devenait muet à chaque fois que j'approchais. Enfin bref, je n'ai vu que deux professeurs à part ça.

- Leurs noms !

- J'ai retenu M. Stelman, le professeur d'histoire absent de toute la semaine, un stage à ce qui paraît, M. Monroe, en littérature et M. Field en technologie.

J'entends Zoé taper bruyamment sur le clavier de son ordinateur. Elle me dit qu'il n'y a rien sur chacun d'eux dans les fichiers de l'état, mais cela ne m'étonne pas plus que ça.N'importe qui peut se trouver un faux nom, cependant je ne les soupçonne pas pour autant. Nous terminons la communication là-dessus, et je rentre enfin chez moi.

Arrivée à l'appartement, je fais le bilan de la journée. J'ai trouvé Jonathan, ou plutôt c'est lui qui m'a trouvé,je connais à peu près ses amis mais il y en a une qui va déménager donc par conséquent, je ne connais qu'une seule personne, Thomas. De ceux qui travaillent dans l'établissement, je n'ai vu que la secrétaire et deux professeurs qui n'ont montré aucun signe comme quoi ils étaient d'éventuels espions. Je suis déçue, concrètement je n'ai rien. La journée de demain devra être plus fructueuse ou je n'en aurai pas finis avant la fin de l'année.

***

Le lendemain, je me lève encore de bonne heure. Il faut que je m'organise, et je n'ai pas encore fait de tableau. Je m'installe dans mon bureau qui est la seule salle vraiment pas rangée chez moi, et je dois avouer que c'est la pièce où traînent le plus de papiers dans le monde. Je zigzague entre les dossiers, ça ne se voit pas, mais c'est très organisé... ou, disons-le à ma façon,j'arrive à m'y retrouver. Je me retrouve devant mon immense tableau blanc, prends le feutre et commence à écrire tous les noms que je connais, les lieux, bref tout ce qui me vient en tête, sans en oublier une miette. On dirait réellement le même tableau que dans une série policière : des noms entourés, des traits de partout pour relier les personnes entre elles ou à leur lieu de travail. Il est à l'image du bureau : fouillis mais organisé.

Je finis de me préparer et pars pour le lycée. Arrivée là-bas, je vois Jonathan avec d'autres garçons que je ne connais pas. J'en profite pour me garer et m'éclipser dans mon coin pour le surveiller lui et les autres de loin, quand je sens une ombre derrière moi, et une main qui m'agrippe par le bras. J'attrape le poignet de celui qui me tient, le retourne afin de l'immobiliser, et finis par lui faire un croche-pied pour le déséquilibrer. Le garçon finit par terre, la main devant les yeux pour cacher le soleil qui l'éblouit.

- C'est bon ! Je capitule ! crie le garçon d'une voix familière.

Je retire sa main pour voir son visage, c'est Jonathan !Et je me tiens en ce moment assise sur lui, pour ne pas qu'il bouge.Je n'hésite pas une seconde, me relève et attrape ses mains pour l'aider à faire de-même. Je regarde autour de moi, des gens rigolent dans leur coin. Je me suis faite un peu remarquée, mais rien d'irréparable.

- Je suis désolée... si j'avais su que c'était toi...

- C'est rien... mais rappelle moi de ne jamais t'embêter, dit-il sur le ton de la plaisanterie.

- C'était juste un vieux réflexe, dis-je en essayant de me justifier.

- Qui est-ce qui t'as appris ce réflexe ? J'aimerai aller le remercier.

- Une personne que je ne vois plus depuis un moment déjà...

Jonathan souffle, apparemment épuisé par la prise dont il a été victime.

- Et moi qui était venu te saluer et te donner quelque chose...

Je le regarde, interrogative. Qu'est-ce qu'il a à me donner ? Je ne me rappelle rien avoir oublié en classe, ou lui avoir prêté. Comme s'il avait lu dans mes pensées, il sort un petit paquet noir de la poche de sa veste. Je le regarde faire avec attention et bloque mon regard sur la boîte.

- Est-ce que tu préfères que ce soit moi qui l'ouvre ?demande-t-il en blaguant, me tirant de mes pensées.

- Je suis désolée, c'est que... je ne m'y attendais pas.

- Joyeux anniversaire ! Avec un peu en retard, mais tune peux pas me le reprocher on ne se connaissait pas avant.

Je ne peux absolument rien lui reprocher, je ne sais même pas si je mérite ce cadeau. Je l'ouvre, et aperçois un magnifique pendentif au bout d'une chaîne, le tout en or. Il représente une cage arrondit ouverte, à la porte de laquelle un oiseau s'envole. Tout est si fin et si précis, sublime.

- Il m'a fait pensé à toi, qui veux toujours te débrouiller seule, toujours plus de liberté.

Il me dit ça alors que je dévore le collier des yeux.

- Merci, mais... il est hors de question que j'accepte.- je referme le boîtier- C'est beaucoup trop, et moi je n'ai rien pour toi.

- Mais c'est normal, ce n'est pas moi qui ai eu dix-huit ans hier. S'il te plaît... on ne refuse pas un cadeau en plus, c'est malpoli.

Il sourit. Je crois qu'il aime me voir souffrir, il envient à me mettre face à mes propres valeurs. C'est vrai que ce n'est pas poli de refuser quelque chose. Je me sens si mal, je ne fais que lui mentir depuis notre rencontre, je lui cache la raison pour laquelle je reste avec lui même si je l'apprécie, et en échange de tout ça, lui, il me fait un cadeau. Je me sens horrible,lâche, mais décide de l'accepter. Je n'ai pas envie de le blesser et de toute façon il ne pourra pas comprendre si je refuse.

- D'accord, soufflé-je.

Il ouvre la boîte, prend le pendentif et passe derrière moi pour m'attacher le collier. Je relève mes longs cheveux bruns et baisse la tête. Je lève les yeux et vois au loin, à l'endroit où se trouvent les camarades de Jonathan, Thomas, dans le lot, qui me fusille du regard. Jonathan referme l'attache et revient face à moi.Je détache mon regard de son ami.

- C'est vraiment magnifique, merci.

- Je t'en prie, content qu'il te plaise.

- Qui sont-ils ? demandé-je en regardant le groupe de garçons par-dessus son épaule.

Il se retourne comme pour se rappeler d'eux rapidement et me propose :

- Viens, je vais te présenter.

Nous nous avançons vers eux et j'allume le micro discrètement pour que Zoé puisse entendre leurs noms, si toutefois elle est réveillée. Je reconnais plusieurs têtes, toutes en fait.Ils font tous partis de ma classe de français et de technologie.

- Les gars, voici Alice ! présente-t-il un fois en face d'eux. Elle est arrivée hier. Alice je te présente Danny, il est sympa mais ne lui demande pas de conduire après une soirée parce qu'il sera incapable de retrouver la voiture même sur un parking d'une place ; Hugo, lui c'est le contraire, si tu as besoin d'aide tu pourras toujours faire appel à lui, et Owen, que tu pourras mettre par terre quand tu en auras envie, il ne craint pas les coups.

Ils me saluent tous à chaque nouveau prénom, et tentent directement de me mettre à l'aise en s'intéressant à moi.

- On a vu de loin ce que tu as fais faire à Jonathan,commence Owen, on ne peut pas dire que ce soit du niveau d'un débutant. C'était impressionnant !

Je n'ai rien dit, ils n'essaient pas de me mettre à l'aise mais plutôt de me rappeler une des plus grosses erreurs que j'ai faite depuis que j'ai commencé ma mission, même si je ne pensent pas qu'ils le fassent exprès. Je ne réponds rien, je ne vois pas quoi répondre, me justifier ne me servirait à rien.

- Je crois que tu n'avais pas besoin de nous la présenter, vieux, renchérit Danny. Je pense qu'elle l'a fait toute seule. On t'as tous remarqué hier en classe, t'es douée en français, comment tu connais tout ça ?

Et je me donne une énorme claque mentale. Génial, il ne manque plus qu'ils me disent que je travaille comme espionne et j'aurai entièrement perdu ma couverture.Je savais que je m'étais faite remarquée ! Je hausse les épaules pour me donner un air innocent ce qui déclenche un rire général.

- Français, combat, t'es douée en tout dis-moi !continue Danny.

- Je ne dirai pas ça, non, lui répondis-je.

- Non, c'est vrai qu'elle a des choses à revoir dans ce qui est de la technologie.

Thomas vient de s'incruster dans la discussion, avec un léger sourire de satisfaction. Je le regarde en levant les sourcils.

- C'est bizarre mais je croyais que c'était moi qui avait aidé le «meilleur élément», dis-je en soulignant les guillemets, à ne pas foirer le réseau électrique de la puce.

Il ne répond rien, il sait que j'ai raison. Les trois garçons pouffent derrière lui mais s'arrêtent vite en voyant Thomas leur lancer un regard noir, ce qui me fait sourire. La cloche sonne, c'est l'heure d'aller en cours.

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Hey ! J'espère que vous allez bien. Je voulais dire qu'en vérité, je trouve que ce chapitre est moins bien que les autres, il y a des moments où j'ai l'impression qu'il manque quelque chose. Alors dites moi votre avis, si vous voyez des choses que je peux modifier faites le moi savoir. 

A bientôt pour le prochain chapitre !

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