chapitre 9

Evan buvait une gorgé de son thé lorsque son regard se fixa sur l'écran de son ordinateur. Une nouvelle donnée venait d'apparaître : un effectué à une station balnéaire à quelques kilomètres d'ici. C'était Jimmy Privet, encore une fois. Ce nom étrange qui revenait sans cesse, comme une ombre qu'on n'arrivait pas à chasser.

– « Attends... » murmura Evan, l'air concentré, en scrutant l'écran. Une lueur de suspicion alluma un feu dans ses yeux. « Ce paiement... il a été fait dans une station balnéaire... à seulement dix bornes d'ici. »

Barty, toujours silencieux, s'approche de l'écran en entendant ces mots. Son regard s'assombrit, le poids de la vérité menaçant de tomber lourdement sur eux. À cet instant, Barty ne pensait plus qu'à une chose : trouver celui qui avait pris la vie de sa mère, ce mystère qui le rongeait depuis des années.

Sans un mot, il attrapa son manteau, l'enfilant en haine. Les gestes étaient vifs, presque frénétiques, comme s'il voulait se débarrasser de toute réflexion avant qu'elle ne le submerge.

– « Je pars. » Sa voix était ferme, presque glaciale, comme un homme qui savait exactement ce qu'il avait à faire.

Evan, qui était toujours en train d'analyser les informations, leva les yeux et fronça les sourcils. Il s'était attendu à une réaction plus mesurée, mais il ne s'attendait pas à une telle précipitation. Ses yeux se durcissent.

– « Barty, attends ! » s'écria-t-il, se levant brusquement. « C'est trop risqué, tu te rends compte ? Si c'est lui... si c'est l'assassin de ta mère... »

Barty ne le regardait même pas. Il accroche la porte, prêt à partir.

– « C'est exactement ce que je veux savoir. Si c'est lui, je veux le voir de mes propres yeux. »

Le ton de Barty était calme, mais il y avait quelque chose de dangereux dans son calme. C'était la voix d'un homme prêt à tout pour enfin obtenir une réponse, même si cela signifiait risquer sa vie.

Evan, maintenant visiblement agité, se précipita vers lui, attrapant son bras pour le retenir. Son cœur battait plus vite, une sensation de panique qui montait lentement en lui.

– « Non, tu ne peux pas y aller seul ! » sa voix se brisa presque. « Tu crois que je vais te laisser partir dans un endroit comme ça, sans savoir si ce type peut te tuer sur place ? Tu veux vraiment prendre ce risque, sans réfléchir ? »

Le regard de Barty se fit plus dur, plus tranchant. Il se retira de l'étreinte d'Evan d'un geste brusque, se détachant de lui.

– « T'as pas idée de ce que c'est. Tu ne sais pas ce que c'est de vivre avec cette incertitude, jour après jour, depuis des années. » Barty parle d'une voix basse, mais il y avait une colère silencieuse dans ses mots, une douleur qu'il portait comme une armure. « Depuis mes dix ans, j'ai vécu avec la question de savoir qui avait tué ma mère. Chaque jour, chaque minute... je me suis demandé : et si c'était cet homme-là ? Et si j'étais passé à côté de la vérité pendant tout ce temps ? »

Les mots de Barty frappèrent Evan en plein cœur, mais au lieu de se calmer, Evan se sent envahi par une émotion plus forte encore. La colère et la frustration se bousculaient en lui, un torrent qu'il n'arrivait pas à contenir. Il se sentait blessé, incompris. Comment Barty pouvait-il penser qu'il ne savait pas ce que c'était que de vivre avec des fantômes ?

– « Tu crois que je ne sais pas ce que c'est, Barty ? » La voix d'Evan éclata, une colère sourde s'exprime à travers ses mots. Il se leva brusquement, renversant presque sa chaise. « Tu crois que je n'ai jamais vécu avec des questions, des incertitudes ?! »

Le silence s'installe entre eux. Barty, un instant figé par l'intensité du regard d'Evan, ne savait pas quoi répondre. Il s'était attendu à une dispute, mais pas à ce déferlement d'émotions.

Evan ne le laisse pas parler. Il s'approche de lui d'un pas rapide, sa respiration saccadée. L'angoisse dans son cœur était palpable.

– « Je sais ce que c'est, Barty ! » dit-il presque en criant, sa voix tremblante de colère et de douleur. « J'ai vécu avec ça pendant des années. Mon père... » Il s'arrête un instant, le temps de reprendre son souffle. Puis, d'une voix plus grave, presque étouffée : « Mon père s'est suicidé quand j'avais 17 ans. Un après la mort de ma mère. Elle est morte dans un accident de voiture. Sur le coup. Et moi ? Moi, je me suis retrouvé avec juste une cicatrice au sourcil, à survivre à tout ça ! »

Il se tut un instant, le poids de ces mots semble l'écraser. Il ferme les yeux, une larme roulant sur sa joue qu'il ne convient rien pour cacher. Ce passé, cette douleur, cette perte... tout revenait en une vague implacable. Il y avait eu la voiture, l'ambulance, la police, mais surtout cette absence, ce vide, qui avait empli sa vie à partir de ce jour-là.

– « Et après... j'ai fait l'armée. Quatre ans. Pourquoi ? » Il leva la tête, les yeux brûlants de larmes et de colère. « Parce que je voulais comprendre, comprendre ce que c'était que de protéger les gens, de les aider à trouver des réponses. J'ai passé ma vie à chercher des réponses, Barty ! »

Le silence était lourd, dense. Barty, pétrifié, n'osait pas bouger. Il sentait qu'il avait franchi une limite, qu'il avait ouvert une porte dans la douleur d'Evan qu'il n'aurait jamais dû toucher.

Evan se tourna alors complètement, s'éloignant un peu pour éviter que ses émotions ne dévorent toute la pièce. Il passe une main dans ses cheveux, tentant de reprendre son calme, mais ses épaules tremblent sous le poids de ce qu'il venait de dire. Il avait parlé plus qu'il ne l'aurait voulu. Mais ces mots, ces vérités, semblaient avoir besoin de sortir.

Un long moment passé. Barty, toujours silencieux, se tenait là, regardant Evan comme si c'était un homme qu'il ne reconnaissait plus. La confession l'avait frappé comme un gif. Il ne savait pas que la douleur d'Evan était aussi profonde. Et surtout, il ne savait pas qu'ils portaient le même fardeau, ce fardeau de la perte et de l'incertitude.

– « Merde... » murmura enfin Barty, sa voix brisée. Il se sentait tout petit, démuni face à l'ampleur de ce qui venait de partager Evan. « Je... je savais pas. Que ..tu avais vécu tout çà . »

Evan revient lentement, et pour la première fois depuis qu'il avait parlé, il croisa le regard de Barty. Les deux hommes se fixèrent longuement, un silence lourd, presque palpable, entre eux. Puis, doucement, presque à regret, Evan dit :

– « On va y aller ensemble. » Il essuya une larme furtive. « Parce que je ne vais pas te laisser partir tout seul là-bas, Barty. Ce n'est pas ce que je veux. Ce n'est pas ce que je vais faire. »

Barty reste un instant immobile, une étrange chaleur montante en lui. Il n'avait jamais imaginé qu'Evan, l'homme qu'il pensait toujours aussi indestructible, avait lui aussi été brisé par la perte. Et maintenant, il sentait un étrange rapprochement entre eux, comme si cette douleur partagée les liens avaient d'une manière nouvelle.

– « Merci, Evan... » répondit-il enfin, d'une voix plus douce, presque gênée.

Ils se regardèrent en silence, comme deux âmes fatiguées, prêtes à affronter ensemble ce qui les attendaient, mais surtout, prêtes à se comprendre, enfin.

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