Chapitre 3

J'ouvre lentement les yeux, la lumière m'éblouit. Je cligne des yeux. Le monde est flou, comme s'il était peint à l'aquarelle. Mes yeux sont remplis de tâches de couleur. Les sons sont étouffés, comme s'ils traversaient un épais mur de coton. Une douleur sourde qui pulse à l'arrière de ma tête. Je cligne des yeux de nouveau, en essayant de chasser le brouillard qui obscurcit ma vision.

Je suis allongée sur le sol,le dos contre de l'humidité du sol qui me provoque un frisson. J'essaye de me lever, mais mes membres refusent de m'obéir. Je reste là, allongée, en essayant de rassembler mes pensées. Que s'était-il passé ? Il y a eu cette lumière puis, le noir, le néant. Peu à peu, les détails autour de moi commencent à se préciser, à s'éclaircir lentement comme lorsqu'on manipule la focale d'un appareil photo.

Une forêt ? Je ferme les yeux, j'essaie de me concentrer sur ma respiration. Ce n'est qu'un rêve. Je rouvre les yeux. Non c'est loin d'être un rêve. D'une main, j'agrippe l'herbe. C'est bien réel. C'est là. Un vent de panique s'empare de moi. Je passe une main sur mon front en me redressant avec un bon mal de crâne.

Je suis tellement choquée que ma respiration en est presque coupée. Je regarde autour de moi. Quel est cet endroit ? Où suis-je ? La panique monte d'un cran. J'ai été parachutée dans un tout autre monde à l'instar des grands livres de fantaisie et de fantastique que j'ai pu lire plus jeune.

Cette forêt a une aura étrange, c'est un tout autre monde, je doute encore d'être sur terre. Chaque arbre semble murmurer à son voisin des secrets portés par le vent. Les feuilles de ces derniers semblent scintiller d'une lumière étrange comme si elles étaient imprégnées de magie. Je n'ai jamais vu une forêt aussi luxuriante. Les fleurs aux couleurs chatoyantes poussent en abondance et dégagent un parfum d'une douceur enivrante qui me fait tourner la tête. Je lève le nez et découvre l'étendue des arbres. Ils sont vraiment gigantesques, que les séquoia géant d'Amérique pourraient palir. Leurs troncs sont larges comme des maisons, c'est sûrement exagéré de dire cela. Leurs branches s'étendent vers le ciel comme des bras tendus. Et les racines s'enfoncent profondément dans les entrailles de la terre, elles forment tout un réseau souterrain. Les racines remontent à certains endroits à la surface et sont couvertes de petits champignons blancs, tout à fait adorable je dois dire. A ma plus grande surprise, des centaines de cristaux de tailles plus ou moins grandes décorent la forêt et lui donnent un ère féerique.

Le seul bruit que je perçois à présent est le chant mélodieux des oiseaux, leur gazouillis doux, qui n'ont rien n'avoir avec les croassements rauques des corbeaux de la préfecture qui se trouvent à côté du lycée avec lesquels ont se réveille souvent . Une légère brise remue les feuilles, laissant ces derniers échapper un doux murmure. Aussi incongru soit-il, tout cela fit redescendre la tension qui s'était installée en moi. C'est un son continu apaisant, presque comme un léger froissement de papier.

Je me lève en silence et scrute les alentours. Ma curiosité me pousse à avancer prudemment.

J'ai été bercée toute mon enfance par les contes, les histoires dans lesquelles un humain franchit les frontières des mondes, en passant par un miroir ou bien une armoire. Ces histoires m'ont fait rêver, mais pas de là à imaginer que c'était possible.

Les questionnements s'enchaînent et j'ai dû mal à trouver des réponses.

Je pose une main sur le tronc d'un arbre, ce dernier est peut être millénaire. Son écorce à une couleur brune comme la terre avec des nuances grises qui me font penser à la pierre. L'aspect est rugueux sous mes doigts. Je l'observe. Il y a quelque chose de particulier dans cet arbre que je n'ai jamais vu auparavant. L'écorce de ce dernier forme un véritable tableau, dont le bois, que l'on peut percevoir sous cette carapace, est la toile. L'écorce en est la peinture irrégulière, portant la marque du temps dans chaque crevasse et fissure qui la parcourent. Cette peinture, si spéciale, semble vouloir témoigner d'une histoire de survie contre les aléas météorologiques en d'autres termes les éléments, telle l'eau qui a dû s'infiltrer un grand nombre de fois dans les crevasses et les petits recoins sensibles. La mousse verte et encore gorgée d'humidité, offre une magnifique parure à ce spécimen d'arbre dont j'ignore le nom. Elle est d'un vert tout aussi intense que celui des feuilles. À certains endroits, l'écorce s'est écaillée, révélant le bois tendre en dessous. C'est un contraste frappant avec la dureté de la surface extérieure. Il n'y a pas de doute, l'écorce a dû voir passer de nombreux piverts venus se régaler de la multitude de petits insectes , qui offre un écosystème miniature dans ses replis discrets lorsqu'on voit ce roi de la forêt de loin. Cet arbre semble vivant et toucher son écorce est comme toucher le pouls de l'arbre. Sous mes doigts j'ai l'impression de sentir un cœur vibrer. Une coccinelle se pose sur ma main, j'ai un petit sursaut, je ne m'y attendais pas. Elle a une belle couleur rouge, à l'instar d'un rubis, ses ailes semblent briller sous le soleil. Elle finit par s'envoler.

Je m'éloigne de l'arbre sous lequel je m'étais réveillée.

Qu'est ce que je fais ?

Je cherche alors dans ma poche mon téléphone. Cependant à ma plus grande surprise, ce dernier semble avoir disparu de mes poches. Je baisse les yeux sur mon sweat, qui n'est plus n'est plus mon sweat. Je ne porte absolument plus mes vêtements. Mon vieux sweat a fait place à un étrange vêtement. Une sorte de tunique verte- bleue, avec une chemise blanche, une ceinture surement de cuire et une espèce de petite cape vert sapin. Mon vieux sac à dos à fait place à une magnifique sacoche brune brodée de ce qui me paraît être des fils d'argent.

Je ne sais pas comment, pourquoi, par quel miracle ou quelle magie, j'ai atterri ici vêtue de cette façon vraiment bizarre.

Je dois découvrir le fin mot de l'histoire. Mais comment ? J'ignore tout. Je suis toute seule au milieu de ces grands arbres.

Je lâche un soupir avant de m'asseoir. Je me saisis de ma sacoche et je l'ouvre. Je fouille dedans, plus aucun cahier de cours. Simplement des instruments bien étranges. Une corde, une sorte de petite dague, qu'est ce que je vais bien pouvoir faire de ça ? Cela ne me servira en rien pour retourner d'où je viens.

Personne ne sait ce qu'il s'est passé en plus. Ils vont s'inquiéter. Qu'est ce qu'ils vont croire ? Que j'ai été enlevée ? Que je me suis enfuie ?

Pourquoi aurais-je eu envie de m'enfuir ? Peut-être fuire la pression, mais ce n'est pas une raison suffisante. Mon angoisse commence à remonter en moi. Je passe une main dans mes cheveux et attrapé une de mes pauvres mèches pour l'entortiller autour de mon doigt. Je balade mon regard sur tout, sur le moindre mouvement de branche, à la recherche d'une quelconque réponse.

Et ce caméléon ? Où est-il ? Est ce vraiment un caméléon ou le fruit mûr et dur de mon imagination ?

Je l'ai bien vu pourtant prendre ma clé. Je l'ai même frôlé. Et puis cette porte, Elle est apparue comme cela avant de disparaître. Comme si elle n'avait jamais existé ? Non ce n'est pas possible. Elle doit bien être quelque part. Peut-être que je dois la trouver? Mais dois-je prendre le risque de me perdre ? Je ne connais absolument rien à ce lieu et tout est si grand. Je prends une profonde inspiration, une nouvelle fois. Elisabeth tu ne vas pas te laisser abattre ! Debout !

Je m'avance donc entre les arbres, faisant attention au moindre mouvement. Je suis impressionnée par la beauté de l' environnement. Je tourne sur moi-même. J'aimerais savoir où je suis. Le nom de cet endroit sortit de nul part.

Un bruit attire mon attention. On dirait quelqu'un qui chante. Je me dirige vers la source du bruit.

Comme apparut de nul par, le caméléon fit son apparition à mes côtés me faisant sursauter. Je pose une main sur mon cœur battant comme s'il allait sortir de ma poitrine.

-Toi ! m'exclamais je.

Il prend la fuite. Je me dépêche de le suivre, enjambant tant bien que mal les racines, je n'ai jamais été très sportive. Je me retrouve donc bien vite essoufflée, obligée de m'asseoir. Je déteste courir. Frustrée, je croise mes bras sur ma poitrine. Maudit animal.

Je reprends doucement une respiration normale. J'ai assez couru pour aujourd'hui; et comme je suis fatiguée. En fait, je ne sais même pas combien de temps il s'est écoulé depuis que je suis arrivée ici. Sommes nous l'après-midi, le matin ?

A l'évidence, je suis totalement désorientée.

Une ombre se dresse alors devant moi, je redresse la tête et écarquille les yeux, me pinçant la joue. Je ne rêve pas, un batracien, pardon une grenouille dont la peau est un véritable Kaléidoscope de verts du vert émeraude à celui de la mousse se tient devant moi, elle a un aspect totalement humain, vêtue d'une blouse bleu pervenche et une chemise blanche froissée avec un long manteau brun-orangé brodée de petits motifs en forme de feuille. Elle porte un large chapeau de paille sur la tête et une canne faite de bois. Ses yeux globuleux, d'un jaune doré hypnotisant capture chaque mouvement avec une précision déconcertante. Sa bouche, une fine ligne courbe, semble presque sourire. Elle émet un tchip plusieurs fois, tout en me regardant de la tête au pied. Elle cligne des yeux, d'une manière lente avant de se pencher vers moi. Elle me paraît soudainement beaucoup plus imposante. Je rentre la tête entre les épaules et déglutie me sentant très mal à l'aise.

-Vous ne devriez pas être là, vous.

-Je crois, oui. murmurais-je d'une petite voix. Excusez-moi, où sommes-nous ?

-Vous n'êtes pas d'ici, n'est-ce-pas ?

-Nous pouvons dire ça oui.

Je vois le caméléon apparaître sur son épaule.

-C'est à cause de lui que je me retrouve ici.

Elle émet un rire.

-Allons bon, voilà autre chose. Mon enfant, vous avez beaucoup d'imagination.

-Mais . . . Je vous assure.

-Vous devez être fatiguée, vous dîtes n'importe quoi.

La grenouille géante lève ses yeux vers le ciel, tout en s'appuyant sur sa canne de bois.

-Nous ne devons pas traîner. Le soleil se couche. Allons Debout, nous avons du chemin à faire, je ne vais pas vous laisser là.

-Mais je dois rentrer chez moi, je suis juste perdue.

-D'où venez-vous ?

Face à cette question, je me sens tout de suite bien ridicule, ne sachant comme expliqué ce qui m'arrive.

-J'ai passé une porte étrange et j'ai atterri ici. Je ne saurais comment vous expliquez cela, mais je ne viens pas de ce monde.

-Je vois.

-Vraiment ?

-Vous avez besoin d'un médecin, ma chère. Allons, nous devons rentrer au village, nous aviserons là bas. La nuit ici n'est pas sûre.

-Je ne suis pas folle, je peux vous l'assurer.

-Bien, ne discutons pas.

Elle se détourne de moi et commence à avancer avant de se retourner de nouveau.

-Venez vous ?

Je finis par acquiescer et me lever pour la suivre, serrant la bandoulière de mon sac.

Après quelques minutes de marche et de silence dans cette immense forêt, j'ose lui adresser de nouveau la parole.

-Excusez moi, qui êtes vous ? Où sommes-nous ?

-Bienvenue dans le beau bois de Seinn, je suis Miss green apple.

Pomme verte ? Voilà un drôle de nom, encore connaissent t-ils l'anglais dans cette drôle de contrée. Est-ce que seulement je suis en train de parler français où un quelconque langage ?

Le bois de Seinn, je n'en ai absolument jamais entendu parler. Pourtant j'ai pu voir beaucoup de choses en géographie.

-Et vous ?

-Elisabeth Catherine Chevalier, madame.

-En voilà un prénom peu commun.

Peu commun ? C'est tout ce qu'il y a de plus commun de s'appeler Elisabeth. Je n'ose pas discuter. Peut-être a-t-elle raison.

Au fur et à mesure de nos pas l'obscurité descend comme un voile, et j'avoue que cela me donne un certain sentiment d'angoisse. Les lieux me semblent soudain bien loin d'être aussi chaleureux que lorsque je me suis réveillée.

Un bruit effroyable résonne alors, dans un sursaut je me retourne et observe autour de moi, en me tournant vers l'immensité obscure qui se dresse à présent. On aurait dit un grincement sinistre qui glace le sang. Cela ressemble à un mélange entre un hurlement aigu et les grognements sourds d'une bête, qui est pour moi totalement inconnue pour l'heure. Le son est si intense qu'il semble pénétrer dans mes os, en faisant vibrer chaque fibre de mon être telle la corde d'une guitare que l'on gratte. Il porte en lui une menace sourde, une promesse de danger imminent. Un cri primal qui arrive à réveiller des instincts oubliés de survie. Un écho s'élève et amplifie l'horreur qui m'habite, transformant la nuit tranquille qui se profilait en un cauchemar éveillé.

-Qu'est ce que c'est ? demandais-je une fois le silence revenu.

-Le seigneur. Nous ne devons pas traîner plus longtemps ! 

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top