Piste 2

10/04/2021: chapitre corrigé. 

2) Lonely Boy 4:02


°°°
Cailean longeait doucement le couloir afin de parvenir à son dortoir. Ses sens étaient en alerte, l'écossais ne cessait de jeter des coups d'œil derrière son épaule pour vérifier que personne ne le suivait. La paranoïa commençait doucement à prendre possession de lui. Les cernes sous ses yeux dévalaient ses joues, creusant ainsi son visage. Malgré la couleur noire de sa peau, il avait une allure cadavérique. Alors que ses yeux reconnaissaient le couloir familier, il aperçut une fenêtre qui donnait une splendide vue sur la lune fièrement dressée, haut dans le ciel.La beauté de cette vision l'hypnotisa, le conduisant à s'accouder sur la rembarre. Son regard s'accrocha désespérément à la lueur argentée, il avait terriblement besoin d'une bouée de sauvetage.Alors qu'il allait de nouveau se laisser envahir par des sentiments néfastes et démoralisants, il entendit une voix retentir derrière lui.


- Cailean Iguel !


Ce dernier eut le plaisir de se retourner et de découvrir le célèbre duo : Eros Ivaldi et Tommaso Sachello, deux armoires à glace. Avant qu'il ne puisse esquisser le moindre mouvement ou encore émettre la moindre parole, Tommaso Sachello lui lança un sac noir. Il le réceptionna sans même y songer. Ce geste était dû à une certaine habitude. Ce fût pour cette raison qu'il se détourna rapidement des deux hommes pour rejoindre sa chambre. Alors que Cailean passait près d'eux, il baissa les yeux de honte. Le jeune métis ne voulait pas affronter le regard de quiconque après sa crise. Il n'en avait pas la force actuellement.

Lorsque ses yeux se tournèrent vers le sol, il entre-aperçut un comportement inhabituel de la part du duo. Il remarqua qu'Eros Ivaldi avait voulu faire un pas dans sa direction, mais que Tommaso Sachello l'avait retenu d'une main déposée sur son avant-bras. Dans sa petite tête meurtrie, il songea qu'il voulait sûrement s'avancer afin de lui donner une leçon et de lui signifier de bien exécuter son travail. Il accéléra le pas pour enfin rejoindre un espace où il se sentirait en sécurité. Qu'ils ne s'inquiètent pas. Il allait faire ce qu'on attendait de lui, de toute manière, il n'avait pas le choix. Si Cailean avait tendu l'oreille et prêté attention plus que nécessaire aux deux autres personnes présentes, il aurait entendu une conversation qu'il n'était sûrement pas prêt à écouter.


- Pourquoi tu m'as retenu ?

Eros Ivaldi chuchotait rapidement à son acolyte, mais le ton de sa voix ne laissait aucun doute concernant sa contrariété.

- Tu sais pertinemment qu'on a reçu des ordres ! On ne peut pas avoir de conversations superflues.

Alors, Tommaso Sachello baissa sa voix au maximum. Il se repositionna devant son acolyte afin qu'il puisse observer ses lèvres si jamais sa voix était trop inaudible.

- Souviens-toi qu'on a des comptes à rendre.

Ses yeux criaient littéralement de se taire, il ne voulait aucunement prendre le risque de subir une punition. Cailean Iguel n'en valait pas la peine. Pourtant, ce n'était pas ce que traduisait le regard déçu d'Eros qui ne lâchait pas l'endroit où Cailean avait franchi le passage pour aller à son dortoir. Eros Ivaldi avait juste voulu s'enquérir de son état. Un simple « comment tu te sens ? » avait failli franchir ses lèvres. Il souffla et gratifia d'un regard reconnaissant son ami, notamment pour son rappel à l'ordre et ils repartirent en direction des cachots.

°°°

498... 499... 500... Le reste de ses camarades devait s'être endormi à présent. Tous les soirs, il s'obligeait à compter jusqu'à 500 afin d'être persuadé qu'il pouvait accomplir sa mission tranquillement. Les dortoirs se composaient de deux lits, mais ils étaient tous reliés à une salle de bain commune. Pour le moment Cailean n'avait pas de colocataire et il ne s'en plaignait aucunement.Chaque bâtiment correspondait à une unité. Le centre comptait actuellement trois unités. Les adolescents étaient ainsi regroupés par niveau de dangerosité.Il se força à sortir de son lit, il n'avait pas le choix. Il devait accomplir les ordres de Giacomo même si chaque soir, il se dégoûtait un peu plus pour ça. Difficilement, il parvint à se dégager de ses couvertures encombrantes, qui constituaient un refuge lorsqu'il ne pouvait plus supporter la pression permanente sur ses épaules.

À la suite de ses vérifications quotidiennes, il plongea sa tête sous son lit puis récupéra le petit sac noir. Ce fut avec un air contrit qu'il rejoignit la salle de bain commune. Lorsqu'il fut à l'intérieur, il prit bien garde de fermer la porte derrière lui, tout en laissant son regard vagabonder sur les différentes affaires disposées sur le lavabo. Après avoir partagé tant d'années avec ses colocataires, il savait parfaitement reconnaître leurs effets personnels.

Il ne pouvait pas prendre trop de temps afin de ne pas éveiller les soupçons si quelqu'un venait à se réveiller... il n'avait plus le temps de tergiverser, il devait désigner sa prochaine victime.Les mains tremblantes, il sortit le petit sachet de poudre blanche et s'avança près des parfums, il devait en choisir un pour y déposer quelques grammes de cette drogue à l'intérieur. Ainsi, lorsque la personne utilisera à plusieurs reprises ce flacon, elle se rendra progressivement accro aux effluves que diffusera le liquide mélangé à cette nouvelle substance. La personne sera incapable de se détacher de l'accoutumance qu'aura créée la drogue. Dans un sursaut désespéré, la victime achètera le même parfum et sera perpétuellement déçue de ne pas retrouver les mêmes sensations qu'avec l'ancien.

La suite du travail de Cailean était de repérer les signes annonciateurs que la victime était totalement dépendante de la drogue. Ce qui se traduisait par des symptômes tels que : l'irascibilité, insociabilité et la paranoïa.Donc, quand il découvrirait le changement de personnalité de sa victime, il devra lui faire parvenir anonymement un papier sur lequel figureront les coordonnées d'un dealer.

Voici comment fonctionnait le trafic de drogue à Renewal. Cailean n'était qu'en bas des échelons, juste un pion de cette machination. C'était Giacomo qui dirigeait tout. Il ne pouvait se résoudre à recommencer, c'était trop pour lui. Malheureusement, il devait obligatoirement faire une autre victime. Il avait des statistiques à établir, des comptes à rendre. Giacomo était un déséquilibré qui n'hésitait pas à être cruel afin de se faire obéir. Cailean resta prostré de longues minutes à même le sol, puis dans une pulsion, il se leva et déposa la poudre dans un flacon qui lui était plus que familier. Presque heureux, de ne pas être de nouveau responsable du malheur d'une autre personne. Parce que ce flacon, c'était le sien.

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