la bigamie c'est une femme de trop .... La monogamie aussi. Sacha Guitry
Même au bout d'un mois les cours de philo sont toujours aussi chiants. Je dirais même qu'ils le sont plus. Je me traîne avec lenteur vers cette salle, après tout pourquoi se presser? Je prends le temps de discuter tranquillement avec Jess et Bryan avant d'entrer en classe.
— Monsieur Laurence ! Vous nous honorez enfin de votre présence.
— Que voulez-vous m'sieur Dein je n'aime pas l'anonymat des troupeaux.
Histoire d'en rajouter un peu, j'englobe la salle remplie de ce fameux troupeau de ma main d'un geste théâtral. J'ai le droit à deux-trois regards haineux, comme si je prenais le temps de m'intéresser à ces cons. Le prof se masse les tempes en se demandant sûrement s'il doit me foutre dehors maintenant ou attendre encore un peu. Je sais bien que ma présence le dérange, je ne bois pas ses paroles et son flot continu de conneries me les brise, mais le faire chier est tellement tentant... Je jette mon sac vide, sur l'une des tables du fond, m'assois près de la fenêtre et plonge ma tête entre les bras pour une petite sieste. Je fais déjà acte de présence, c'est suffisant. Il ne faut pas trop m'en demander non plus.
— Comme je disais, voici donc Louis votre nouveau camarade. Monsieur Cowel, si vous n'avez rien à ajouter, je vous prierai d'aller vous asseoir. Sur ma droite, je sens vaguement ma table bouger, je lève le nez en grognant prêt à faire de la grande philosophie avec l'abruti fini qui me réveille. Mais lorsque mon regard croise celui du cinglé, je perds, l'espace d'un instant, tous mes moyens. L'air comprimé de mes poumons s'est complètement fait la malle; son regard sombre, presque animal se fait de plus en plus intense. Le noir profond de ses yeux et de ses cheveux contrastent avec sa peau albâtre. Un petit sourire en coin se dessine sur ses lèvres et me ramène à la réalité en moins de deux. J'ai la soudaine envie de lui foutre mon poing dans la gueule !
— Ton portable vibre, chuchote l'abruti. Je plaque ma main sur la poche de mon jean et me rends compte que ce con a raison.
— Va te faire foutre ! je lui grogne en arrivant enfin à me détourner de son regard.
Du coin de l'oeil, je sens la morsure de son regard sur mon corps. Je sens qu'il me reluque. Comme si chaque parcelle de mon corps n'était plus qu'un simple morceau de viande. Non c'est sûr il ne me regarde pas comme un gars regarde un autre gars. Non, plutôt comme un gars qui cherche sa nouvelle proie. Un frisson de dégoût me fait trembler les mains. Quelque chose en lui me dérange énormément, dans sa façon de me regarder, de sourire, de respirer même.
Ouais lui et moi on ne va pas du tout être potes.
J'ouvre la bouche sans vraiment m'en rendre compte pour reprendre mon souffle. Je n'aurais jamais remarqué que j'avais à nouveau arrêter de respirer sans ça. Je passe distraitement une main sur mon estomac, ça grouille comme jamais là-dedans, me donnant l'impression d'avoir avalé une tonne d'aiguilles. Je frissonne une nouvelle fois. Ce n'est que lorsque son rire résonne que je reviens à la réalité, je ressens ce son comme une grosse claque dans la gueule. Je referme la bouche et sers les dents avant de me jeter sur mon portable afin d'envoyer un message à Bryan.
Hey ! C'soir on s'fait Laura ?
Ok
Quand je dis que je partage tout avec Bryan, c'est tout. Puis avec Laura, c'est facile, on a juste à rappliquer chez elle. Pas besoin de prévenir. Elle n'est pas frileuse dans le genre. Et là j'en ai besoin, il faut que je me défoules, c'est pratiquement une question de vie ou de mort. J'essaie de relâcher la tension qui s'est accumulé dans mes épaules en m'étirant.
M'man, ce soir je suis avec B
Ok, ton père part en fin de matinée demain.
Je serai rentré pour midi
D'accord, je t'aime.
Oui, je suis un pseudo fils à maman, et non, j'en ai pas honte. Bon, le pater' n'est pas là dans l'après-midi... Je vais pouvoir me poser avec ma mère. — Qu'en pensez-vous monsieur Laurence ?
Je lève les yeux vers le prof sans cacher tout le mépris et l'ennui qu'il m'inspire.
— La connaissance des mots conduits à la connaissance des choses, dit l'abruti avec un sourire malsain. Pendant qu'il se fait féliciter comme un bon lèche-cul, je me tourne vers lui et siffle entre mes dents, juste assez fort pour qu'il soit le seul à m'entendre:
— Ceux qui on créés les mots croyaient aux délires. Il me jauge une seconde avant de reporter toute son attention sur le prof qui raconte une nouvelle fois sa vie. Il croit quoi l'autre con, que je suis trop débile pour ne pas pouvoir citer du Platon ? Minable.
Je me lève finalement avant que la sonnerie ne sonne et me dirige vers la sortie sous le regard choqué de certains et amusés d'autres.
— Les hommes faibles hurlent avec les loups, braient avec les ânes, bêlent avec les moutons, je fais une courbette et me barre en claquant la porte. Et voici comment se faire insulter avec élégance.
Je presse le pas pour me retrouver loin de ce putain de cours de philo. Je ne comprends pas pourquoi je me suis senti aussi étouffé ni même pourquoi le regard de l'autre abruti de bas-étage vient de me retourner les tripes. C'est pas normal ! C'est même pas logique!
Mais qu'est-ce que je raconte moi bordel?! Voilà qu'un petit nouveau débarque et fout en l'air tout mon monde? Non, hors de question! Même pas en rêve! Je suis et resterai un chasseur. Point barre, fin de l'histoire. Dans le couloir désert du lycée, j'appelle les jumeaux, ils sont déjà à la planque. De toutes façons ils y passent leur vie. Je pars les rejoindre tout en faisant un crochet vers mon casier, histoire d'y déposer mon sac. Bryan est en sport, enfin je crois, et Jess n'est jamais loin, mais lui mettre la main dessus est presque impossible.
— Nul n'est plus faible que celui qui se croit le plus fort.
Une goutte de sueur perle le long de mon dos et un léger frisson s'empare de moi. Je reconnais instantanément la voix de l'abruti, comme si elle était ancrée en moi. Comme si elle faisait vibrer une chose en moi qui jusqu'ici était restée endormie. C'est dégueulasse! Je me retourne directement prêt à tout, comme lui imprimer mon poing dans sa gueule par exemple, mais tout ce que je vois c'est une silhouette longiligne disparaître au détour du couloir. En une fraction de seconde, je suis fou de rage.
Putain, il se prend pour qui lui ? Je vais lui faire bouffer les murs !
Je secoue la tête et me frotte le visage des deux mains pour supprimer la drôle de sensation qui me bouffe les entrailles.
Sans vraiment m'en rendre compte mes pieds me mènent jusqu'aux jumeaux qui fument et se marrent. J'essaie de ne pas penser à ce qu'il vient de se passer, j'ai le regard fou, et fait attention à tout ce qui m'entoure. Je regarde un peu partout avec l'impression d'être un vrai radar. Je vais finir par devenir fou.
*******************
— T'en a mis du temps ! Tu foutais quoi, me demande l'un des deux jumeau.
— Je te manquais tant que ça p'tite pute ? je lui réponds avec un petit sourire vicieux.
— Ho ho! J'te connaissais pas comme ça frangin ! répond son frère en me passant le joint qu'il tient dans sa main.
— J'suis irrésistible mec ! dit son double. D'un geste global il montre son corps d'une main et de l'autre ramasse la canette qu'il a posé sur la planche.
— Salooope ! crions en cœur Jorris et moi alors que Loris est toujours en pleine démonstration. Il sourit à un objectif imaginaire et prend la pose, ce qui nous fait encore plus rire.
— Y'a de quoi boire ? Une masse d'un mètre quatre-vingt, la tignasse blonde dans tous les sens blonde aux yeux marrons tend sa main dans notre planque pour se servir.
— Bryan ! Tu foutais quoi ?
— J'étais dans les gradins avec Cynthia. Tu sais tu le l'es faite l'année dernière, me dit ce vieux pervers. — P't-être. J'sais plus à force, tu sais, je lui réponds en haussant les épaules.
Ouais, en vrai je me souviens d'elle et elle ne m'a fait ni chaud ni froid, elle a un bon cul, mais c'est tout. D'ailleurs, je l'avais prise en levrette histoire de ne pas voir sa sale gueule. Ouais, ouais, je sais, j'suis un salaud, j'me soignerai demain... Pendant que les jumeaux délirent sur je ne sais quoi, je me pose sur un rondin à côté du grand blond.
— Demain, le pater' n'est pas là. Il ne cache pas son sourire, mais pour une fois, il n'est ni vicieux ni crade, c'est celui d'un gamin de 17 ans. Non, il n'a pas de problèmes avec sa famille, ses parents sont sympas et tout, mais chez moi avec ma mère c'est différent. C'est notre seul lieu de squat préféré où on peut être nous-mêmes sans avoir nos parents sur le dos. Ma mère est super cool à ce niveau.
— Matin ou après-midi ?
— Tu peux te ramener en début d'aprèm avec des pizzas ?
— Question inutile, dit mon ami le sourire toujours aux lèvres.
— Réponse inutile, je réponds puis nous cognons nos canettes l'une contre l'autre.
— Vous avez vu le nouveau ? demande Lorris la bouche pleine. Ce gars est toujours en train de manger, c'est un vrai gouffre à nourriture. Il est né et crèvera en bouffant, autrement c'est pas possible
— En math ouais !
— En philo... Ses yeux m'apparaissent une fraction de seconde. Faut que je fasse disparaître cette vision de merde. Je descends le reste de ma bière d'un trait.
— On va chez Laura. Je ne demande pas, je me lève et Bryan suit. Il sait que ce n'est pas une requête. Faut que je me vide en elle, non pas qu'elle m'excite, mais c'est une bonne échappatoire à la sensation de dégoût qui m'envahit dès que les yeux de cet abruti apparaissent dans mon esprit. Un défouloir simple et sans prise de têtes
— Ok ! À demain les gars ! Je leur fait rapidement un geste de la main pour et part avec mon pote sur les talons.
— T'es aussi plein que ça ? Franchement non, juste sur les nerfs l'autre idiot m'a gonflé. Puis j'aime bien les plan à trois, mais à petite dose.
— Envie d'une bonne baise, je lui dis pour éviter de repenser à ce noir qui me hante.
— J'te reconnais bien là ! Il m'attrape par le coup et me frotte le crâne comme un malade !
— Mes cheveux merde !
***
Sur tout le trajet, on se pousse et se chamaille comme deux gosses. On a dû aussi bousculer un ou deux passants; on se marre comme deux cons.
Franchement si un jour, quelqu'un a pu avoir un doute sur le fait que j'étais un pur connard, maintenant il ne pourra plus en avoir. Je ne l'ai traitée avec aucune délicatesse, rien, à peine bonne à remplir les capotes. Bryan ne l'a pas ménagé non plus, c'est que cette salope en redemandait.
Elle me fait de la peine quelque part.
Nus comme des vers dans son lit, Laura s'est endormie sur le torse de mon pote. Elle sait qu'elle n'a pas le droit à ce genre de petites attentions de ma part, donc elle en profite avec lui. Je donne un coup de coude à Bryan et désigne la fenêtre du menton, il hoche la tête. C'est donc en silence qu'on passe par la salle de bain et qu'on regagne notre liberté.
Le silence, ce n'est pas pour la déranger dans son sommeil, c'est plus pour éviter qu'elle nous fasse chier pour qu'on reste si on la réveille. Cette meuf est une vraie plaie quand elle s'y met.
On passe la fin de la journée au parc derrière chez nous. Quand on était des gosses, on y passait des heures. On était vraiment des sales gosses à cette époque, du genre à balancer du sable dans les yeux des autres enfants, de les pousser pour qu'ils tombent et leur voler leurs bonbons.
— Faut que je rentre... je siffle entre les dents.
— Ton pater' et ses putains de règles...
— Tu parles ! Il me tient en laisse ce con !
— Va falloir en profiter demain.
Carrément que je vais en profiter demain ! Comme un putain de fils à sa maman, ouais, je vais me faire chouchouter par la seule femme qui vaut le coup en ce bas monde et j'en n'ai même pas honte!
***
La fameuse après-midi est passée trop vite, comme toutes les bonnes choses de toute façon. Quand Bryan s'est ramené avec trois pizzas, ma mère a explosé de rire. Elle n'est pas du genre salade et tofu, non elle, c'est plus frites, coca et burgers. Le pire, c'est qu'elle ne prend pas un gramme. Ouais, elle a de quoi se faire détester. Et je tiens d'elle. En fin de journée, elle nous dit que le pater' va bientôt faire son grand retour. Le grand blond rentre donc chez lui en emportant les traces de notre après-midi. Je monte dans ma chambre et m'enferme, je n'en ressors que pour le repas et encore, c'est parce que ma mère m'a appelé.
***
Dans moins de trois minutes, j'ai quatre heures de philo... Ouais, je suis ravi. Ce qui m'empêche de sécher ? Le pater'! S'il apprend que j'ai séché, en dérochant le téléphone par exemple, et que je suis collé ça risque de partir en couille. Ma mère n'aimerait pas donc... Putain d'amour et ses sacrifices. Quatre heures quoi !
Dans le couloir, alors que je parle avec un geek de jeux vidéos, j'entends l'abruti et les gars de l'équipe de foot faire un sacré bordel, le rire rauque de l'un des joueurs résonne sur tous les murs. Lorsque je lève la tête pour voir ce qui a déclenché ce fou rire, je vois des nanas lui tourner autour, mais il ne semble pas les remarquer. L'une d'entre elle se dirige vers nous en ondulant des hanches. Elle ne me lâche pas du regard et les regards de braise qu'elle me lance n'ont rien d'innocent. Quand elle se plante devant moi, elle vient se glisser dans mes bras et glousse lorsque j'embrasse le haut de son crâne.
Non, ce n'est ni ma meuf ni un vulgaire plan cul, c'est Jess qui vient demander son câlin de la journée. Quelque fois je me demande comment elle fait pour obtenir de moi tout ce qu'elle veut. Cette nana au charme androgyne est de la même trempe que ma mère, une vraie sauvage! Qui sait, si elle aimait les garçons je me caserais peut-être avec elle.
Nan... pas possible, elle est trop comme moi, elle collectionne les conquêtes et en a strictement rien à foutre du reste.
Quand je relève le nez de sa tignasse qui sent la pomme, je vois l'abruti nous regarder. Je la serre un peu plus contre moi.
Et ouais mon gars cette bombe n'est pas faite pour toi. Un vieux sourire se dessine sur mes lèvres alors que je pense à la réaction de ce pauvre con. Il finit par détourner le regard et reprend sa discussion avec un des gros bras du club de foot, Idriss, il est sympa.
— Ce soir, je vais me faire percer la langue, me dit la belle brune en plantant son regard noisette sur moi.
— Tu vas où ?
— Dans le centre, tu viens ?
Je lui fais un signe affirmatif, je la vois partir vers sa classe alors que la cloche sonne. Tout en m'installant à ma place de prédilection, j'envoie un message à ma mère pour lui dire que je serai un peu en retard, et un à Bryan pour qu'on se retrouve dans le parc cette nuit.
—Tu peux enlever ton sac ?
Je lève les yeux, après avoir rangé mon portable dans ma poche, autant dire que je prends mon temps. L'autre abruti se tient devant moi et fait mine de ne pas vouloir bouger. Je regarde vite fait la salle...
Merde. Plus aucune place de libre, il y a bien le sol...
Sans un mot, je le regarde puis je regarde le sol, il suit mon regard et avant qu'il ne puisse répliquer, le prof entre. Il se laisse tomber comme une grosse merde sur le siège et me tend mon sac que je lui arrache des mains. Je tourne la tête vers la fenêtre pour éviter de croiser son regard. Quatre putain de longues heures à devoir le supporter.
Je souffle, m'enfonce dans la chaise et profite du somptueux spectacle qui se joue devant mes yeux. Des voitures qui passent. Ouais, sublime!
Tenir plus de trente minutes relève limite de l'impossible. Je tiendrai jamais avec lui à côté de moi pendant aussi longtemps et si je me barre, ce vieux con de prof va me coller un rapport et appeler chez moi...
Putain.
***
Là, c'est le moment de positiver... Trois heures et douze minutes que je suis assis à côté de l'autre abruti. Trois longues heures que le prof de philo crache son texte appris par cœur à cette foule de mouton au cerveau atrophié qui l'écoute. Ce vieux con doit jubiler un max ! C'est obligé, il doit compenser un sérieux manque pour être aussi barbant !
— Et vous monsieur Laurence, que pensez-vous du concept de la mort ?
Bien sûr, il ne pouvait pas m'ignorer jusqu'au bout ce grand con ?
— La mort n'est pas un concept et de toute façon, on vient tous au monde avec une date de péremption alors autant en profiter, ce n'est pas un concept, c'est notre réalité...
Je dis ces derniers mots si bas que je ne suis pas sûr que qui que ce soit m'ait entendu. Je regarde de nouveau au travers de la fenêtre sans écouter ce que l'autre braille.
— Et comment rendre le temps qu'il nous est imparti agréable ?
Il y a comme un blanc dans toute la classe, plus personnes ne parlent . Apparement tout le monde a épuisé son quota de reflexion philosiphique au rabais. Le prof continu son charabia pendant quarente longue minutes. Son nouveau théme " la dualité entre la vie et la mort".
J'ai du faire appel a toute ma motivation, insoupsoné on est bien d'accord, pour ne pas m'endormir. L'autre prof bedonnant pose encore une question.
Personne ne répond, car la sonnerie salvatrice résonne dans nos oreilles, je me lève sans demander mon reste. Je suis déjà resté quatre putain de longues heures assis sur mon cul à côté d'un abruti à écouter le flot continu de conneries débitées pas un porc frustré, alors quand ça sonne, je me casse ! Même si j'ai les fesses engourdies.
Jess m'intercepte au passage, elle me tire par le bras et nous extirpe de ce maudit lycée à vitesse grand V. Nous allons au perceur du centre, sur la route, nos langues de putes se délient et les gens s'en prennent plein la gueule. Forcément, avec elle, les crises de rire sont courantes. D'un point de vue extérieur, on pourrait ressembler à un petit couple un tantinet turbulent. Que l'on me voit comme ça avec elle ne me gêne pas. Déjà parce que je sais que ce n'est pas possible et au moins elle évite de se faire emmerder par des mecs chiants comme ça. Ouais, je suis un peu protecteur avec elle, en plus d'être la petite soeur que je n'aurai jamais elle est un peu comme mon âme soeur. Non je ne crois pas à ces conneries et non je ne suis pas un gars contradictoire.
Jess n'a pas mis un pied dans le salon qu'elle dévore déjà des yeux une autre nana, bon ok, elle est plutôt pas mal. Brune, grande, yeux marrons et un piercing à la langue, elle joue avec.
— Je te parie que je me la fais, me dit mon amie en la déshabillant du regard.
— Paris tenu.
Une grosse demie heure plus tard Jess à la langue gonflée et moi un rendez-vous demain soir avec la brune, Caroline, je crois. Je me marre alors qu'elle râle.
***
Cette nuit, je fais le mur pour rejoindre Bryan au parc devant chez nous. Enfin, je ne fais pas vraiment le mur puisque ma mère a laissé la porte-fenêtre ouverte. Je crois qu'elle entretient mon vice...
Le grand blond m'attend déjà, il est couvert d'au moins quinze couche de fringues. Ce mec est un vrai cul-gelé ce mec.
Chacun assis sur un jeu de gosses, on se met à parler. Tout y passe, les jeux, les nanas, les cours, les parents... Je ne lui dirai jamais, mais ces moments-là sont ceux que je préfère, pas besoin de jouer un jeu ou de se la jouer grande gueule. Non, là, on est juste nous-mêmes, un peu comme quand on se fait une après-midi chez moi sans le paternel. La discussion dérive vers les nanas qu'on se tape actuellement, il a l'air un peu ailleurs comme s'il avait quelque chose à me dire mais qu'il a peur de me le dire et de se l'avouer à lui-même. Bryan plonge son regard dans le mien, souffle un grand coup et me sort la chose la plus déstabilisante qu'il m'ait jamais dite.
— J'crois que je vais me caser avec elle.
Quoi? Mais de qui il parle là? J'essaie de me reprendre, il vient vraiment de me parler de se mettre sérieusement avec une paire de fesses?!
— Toi ? Te caser ? T'es sérieux ? je finis par lui répondre toujours abasourdi.
Au lieu de me répondre franchement, Bryan se lève grogne et shoote dans un caillou. Mon meilleur ami amoureux ... Putain tout arrive en ce bas monde !
— Qui ? je finis par lui demander en reposant ma bière, faut que j'ai les idées claires là.
— Estelle.
Estelle. Estelle. Estelle. Estelle... C'est qui ? Je ne l'ai pas baisée. Non, je ne crois pas...
— La petite blonde du club de musique, me dit l'amoureux transit.
Ah! Bah oui! Enfin non... je ne vois toujours pas. Je reprends la canette que j'ai posé et prends quelques gorgées.
— Ça fait combien de temps ? je lui demande dans l'espoir que mes neurones s'activent un peu.
Faut que j'arrête de fumer... et de boire... J'arrêterai demain...
— Ça fait quatre mois que je suis avec elle. Plus ou moins.
Je m'étouffe et recrache ma bière, je tousse comme un grand malade pendant que Bryan se fout de moi en me frappant le dos.
— Qu... Att... Qua... J'abandonne ma tentative de communication et lui montre quatre doigts d'une main pendant que l'autre me soutient, car je crache encore mes poumons.
— Ouais quatre comme ça !
Et en plus, il se fout de moi ce con !
— Et tu te me lâches ça comme ça là ! Avec à peine, quatre putain de mois de retard !
— Ça va ça va, j'suis pas en cloque calme-toi. Je voulais être sur, c'est tout, il dit en enfonçant ses mains dans les poches. Il est de plus en plus mal à l'aise, un petit silence gênant s'est installé. Il faut que je dise quelque chose j'ai l'impression pour détendre l'atmosphère.
— Dis, si elle fait la nulle, j'peux me la faire ?
Il me regarde une seconde, hausse un sourcil et part dans un putain de fou rire, me tape dans la main et me prend rapidement dans ses bras. Et voilà, plus de moment gênant. Mon meilleur ami reste mon meilleur ami même si maintenant une meuf va plus ou moins venir se mettre entre nous.
— Carrément ! Dis demain soir t'es dispo, je voudrais te la présenter ?
— C'est tout bon pour moi, j'emmène Jess ou pas ?
Ouais, ouais, je sais demain soir, je dois me taper la brune là. Cécile, Céline, Clautilde... Coralie ! Ouais ou un truc dans le genre. Pas grave, les potes d'abords, j'enverrais un message pour le dire à Jess, suis sûr qu'elle ira la consoler.
— Heu... J'suis pas trop sûr pour le coup, elle est un poil sauvage Jess, il me dit en se frottant la nuque.
— Pas faux !
La belle brune est sympa, mais faut la connaître et ne pas avoir peur de s'afficher. Pas top pour une première rencontre. Jess risquerait de parler trop fort, comme d'habitude, de dire tout ce qu'elle pense, comme d'habitude, sans même se dire que ça peut blesser, pour qu'elle en est quelque chose à foutre! et je passe sur son humour noir plus que douteux! Bref, on l'adore mais faut savoir la prendre.
— À la monogamie ! je dis en levant ma canette vide. En fait, tu t'es fait Laura l'aut' jour avec moi.
— Jusqu'à y a trois jours, on était en relation libre. Il mime les guillemets sur le dernier mot. Ouais comme ça pas d'engagement pas de prise de tête.
Lui et moi, on ne doit pas toujours avoir le même dictionnaire, je le regarde et hausse un sourcil, parce que là je suis sûr que même un gars avec toutes ses neurones ne pourrait pas tout comprendre. Pour le coup je reprends une bière.
— On se disait que comme ça pas d'attaches pas de galères, mais la dernière fois avec l'autre salope, c'est comme si... je l'avais trompé. Et avec Cynthia, la nana dans les gradins, tu sais? J'ai rien fait, j'ai pas pu, elle m'a grave allumé mais...
Il arrête de parler et se balance sur ses chevilles d'avant en arrière/se balance d'un pied sur l'autre.
Ce grand couillon de blond enfonce ses mains dans les poches et regarde partout sauf vers moi. Ouais, c'est définitif, il est accro. Je crois que je vais devoir me taper un peu plus les jumeaux. C'est bien connu une nana dans un duo ça fout la merde et comme ce n'est pas moi qui vais la chercher...
On se raconte encore deux trois conneries avant de rentrer, c'est con, mais j'ai un pincement au cœur.
***
J'avoue être un peu jaloux quand je repense à tout ça les yeux fixés au plafond. J'ai l'impression que la nuit va être longue...
Ça fait quoi d'être amoureux?
Je souffle et me frotte le visage des deux mains. Quand je ferme les yeux ce sont deux orbes noirs qui apparaissent sous mes paupières.
Merde !
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