Chapitre 8 - Créature
Après deux longues heures, Edelweiss retrouva ses deux disciples, qui avaient étonnamment réussi à maintenir la conversation entre eux. Ameris également était là, mais elle restait silencieuse. C'était une habitude, mais Celes se doutait qu'il y avait autre chose.
"Concrètement, vos observations sur ce jeune garçon et sa grand-mère étaient inutiles. Les possibilités suggérées par Sonah ont, en revanche, un certain intérêt. Il faudra aussi visiter le monde intérieur d'autres victimes encore en vie, afin d'obtenir des données plus fiables."
"Mais madame, si au final le phénomène est entièrement aléatoire, que ce soit dans ses victimes que dans la liquéfaction elle-même, nos recherches ne vont mener à rien."
"Je ne peux pas y faire grand chose. Loin de moi l'envie de faire preuve d'optimisme, mais il faut espérer que quelque chose nous fasse avancer. Ce plateau est celui avec le plus de cas de liquéfaction, donc je recommande de rester sur place. Si un cas de liquéfaction finit par apparaître, Celes, tu seras chargé d'entrer dans son monde intérieur. Et aucune pitié cette fois, saccage-le sans attendre. Il nous faut trouver quelque chose."
Le disciple acquiesça silencieusement. Une colombe viendra se poser sur l'épaule d'Edelweiss, un parchemin coincé dans son bec. La préceptrice le récupéra en soupirant.
Cette colombe, il s'agit d'un messager à disposition des dirigeants.
Elle commença à lire à voix haute.
"Le groupuscule et leur cheffe approche de nos portes. Nous exigeons le rapatriement immédiat d'Ameris Gazestorm, ainsi que d'Edelweiss Cyclamen Acocite afin d'aider dans leur élimination."
Elle regarda la soldate avec un sourire en coin, cette dernière soupira, peu enjouée, ce qui était totalement compréhensible, suite à leur malheureuse 'discussion' d'il y a quelques heures. Mais elle devait bien faire avec, et ce, malgré son statut et son identité. Les ordres sont les ordres !
"Ne tardons pas. Une fois cette affaire réglée, je reviendrais, Celes."
"Quant à moi, je rejoindrais le quatrième plateau. Potentiellement. Enfin, je te tiendrais au courant, Sonah. Sur ce..!"
Les deux femmes sont bien vite parties. Recevoir un messager de la sorte n'était pas anodin, et signalait une urgence. Celes soupira, presque soulagé.
"Je suis redevable à dame Edelweiss, mais sa présence est... Oppressante."
"... Peut-être..? Mon instinct me dit qu'elle est dangereuse."
"Pour sûr ! Et sinon, tu ne veux vraiment pas me parler de ce culte ? Celui dédié au Déicide."
Sonah hocha la tête négativement. Les émotions se lisent assez facilement sur son visage, il ne semblait pas particulièrement enjoué à chaque mention de ce culte.
"Alors changeons de sujet ! Tu as déjà voyagé ?"
"Entre le premier plateau, le deuxième, et une allée du quatrième seulement."
"Il n'y a pas beaucoup plus à voir, c'est sûr..."
"En fait... J'aide des gens, sur le quatrième."
"En ne restant que sur une seule allée..?"
"N-non..! Edel' m'a forcé à aller dans un grand bâtiment, avec beaucoup de médecins. Et des confidents."
"... Ca m'a l'air assez étrange ?"
"Certains viennent voir les médecins, et d'autres veulent voir des confidents. Les gens y vont librement, c'est le seul endroit où le s gens peuvent se faire soigner sur le quatrième plateau. Un confident doit écouter la personne, l'aider et la réconforter. Peut-être aussi la conseiller ! Edel' me l'a expliqué comme ça. Elle m'a dit que ceux qui viennent voir un confident ont besoin de parler."
Celes était assez perplexe quant à l'idée même de la chose, mais il ne posa pas de question à ce propos. Peut-être que chaque confident doit faire le serment de garder les secrets de ses patients. Il espérait, du moins.
"Et j'imagine donc que tu sers de confident ?"
"Oui... Madame Edel a dit que je devrais essayer. En fait, elle m'a totalement traîné de force là... J'avais peur de voir autant de gens, et je ne voulais pas dire n'importe quoi... Alors j'ai essayé, et, selon elle, je m'en sors bien. Ca fait un an que j'y vais deux fois par semaine."
"...Tu es efficace, surtout pour quelqu'un qui avait peur !"
"Il n'y a pas beaucoup de monde qui vient. Et j'ai toujours un peu peur, quand j'y vais... Mais il y a toujours un garçon de mon âge. Il... Souffre beaucoup, mais il dit que je l'aide. J'y vais surtout pour lui."
"Il doit être assez important pour toi, mh?"
Celes souria. Il avait une idée derrière la tête, mais son interlocuteur n'en savait rien. Au contraire, il avait l'air encore plus confus.
"Il dit que l'on est amis, donc... Je pense. Je l'aime bien aussi."
"C'est un excellent début !"
"Juste 'bien aimer', c'est peu, non..?"
"Tout dépend d'à quel point tu aimes sa compagnie."
"Beaucoup..? Enfin..! J'aime l'aider, et-... Et non je ne l'aime pas à cause de ses problèmes ! Juste... En tant que personne."
Celes souria, plaçant ses mains face à lui.
"Du calme, du calme. Je ne vais pas te juger, et je me doute que tu l'apprécies pour beaucoup de raisons. Mais je vois que tu n'es pas à l'aise, alors allons marcher un peu ! Et changeons de sujet. Tu verras, le vent nocturne est étonnamment réconfortant."
Le duo commença à déambuler tout en discutant ensemble, principalement de la vie à l'Institut Fortitudo, et de l'histoire du continent d'Asphodel.
A l'origine il était un royaume, composé de neuf plateaux, quatre ayant déjà coulé sous les flots. Il y a vingt sept ans, le royaume, déjà sur le déclin et ignoré, s'est effondré au profit d'un nouveau système : Les Cardinaux. A savoir, l'Institut Fortitudo, l'Ordre de Temperantia, la Cour de Prudentia, et enfin la Primatiale de Justitia. Quatre organes aux missions différentes, mais qui convergent vers la même notion, le 'bien commun'.
"La Primatiale... J'y suis déjà allé. J'ai déjà vu la dirigeante, mais... Je ne me souviens pas de ce à quoi elle ressemblait..."
"C'est le cas pour tout le monde ! Quiconque la voit oublie entièrement son apparence après avoir quitté la salle. Dame Régina est assez mystérieuse. Mais, qu'est-ce qu'elle t'as dit ?"
"C'est... Embarrassant..."
"Ne te fais pas violence non plus, si tu ne veux pas me raconter quoi que ce soit, cela me convient."
Malgré la nuit déjà tombée, Celes était toujours en capacité de voir l'incertitude sur le visage de son ami.
"Elle m'a dit beaucoup de choses, à propos de moi, ce que je suis, ce que je dois ou ne dois pas faire..."
"Je suis bien curieux de savoir comment elle te voit, mh."
"D'après elle, je ne suis rien. A... A cette époque je n'étais sûr de rien. Alors, ensuite je lui ai demandé si mon cœur me faisait mal. Ou si c'était mal pour moi de pleurer. Même aujourd'hui... J'ai l'impression que tout ce monde est un rêve. Que rien n'est réel."
Celes s'apprêtait à répondre, mais une voix peut-être trop familière à son goût se fit entendre.
"Il s'avère que Dame Régina avait raison. Les pleutres ne sont rien."
Il se retourna, soucieux, avant de froncer les sourcils. Son instinct lui criait haut et fort que l'homme sous ses yeux était dangereux. Celes, lui, était certain que ce type l'était, mais il s'interrogeait tout de même sur un détail.
"Pleutre..?"
"Il s'agit là de ce que j'ai dit, en effet. Mais je t'ai retrouvé, il est temps de mettre un terme à ton rêve. Tu as passé bien assez longtemps en liberté, lycanthrope. Désormais, tout ce qui t'attends, est la mort, de ma lame."
Il dégaina sa lame en approchant, alors que Celes regarda Sonah, quelque peu déçu.
Il serait donc le lycanthrope ayant fui ? Mais alors, pourquoi Edelweiss l'aurait pris comme disciple ? Quoiqu'il en soit, il est membre d'une espèce des plus sauvages, à éviter à tout prix. Une bête sanguinaire à éliminer, quel qu'en soit le prix.
"Permet moi donc de m'introduire proprement. Mon nom est Wille Glanz, Héraut au service de Dame Régina. La mort est une fin trop douce pour une engeance telle que toi, alors, je te prie, accepte son chaleureux accueil sciemment, et sans sédition."
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