ÉTAPE 6: FAIRE RETOMBER NOTRE PROIE DANS NOS FILETS

Trois heures du matin, le sommeil me fuyait. Le regard rempli d'incompréhension de Josh me hantait, parfois pour gagner il fallait savoir perdre, mais c'était douloureux. J'envoyais un dernier message, succombant une dernière fois à mes sentiments, à celui qui avait su lire en moi et surtout me permettre d'écrire une nouvelle page.

«Tu resteras à jamais dans mon cœur, prends soin de toi Josh, je t'aime»

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Ma mère vivait un appartement chic appartenant au groupe Grayson, je n'eus aucune difficulté à m'y introduire, les gens pensent toujours qu'un appartement high tech est plus sécurisé qu'une bonne vieille clé. Pour les gens comme moi, c'était tout simplement du pain béni. Tout était luxueux, et connaissant ma mère, ça me surprenait vraiment beaucoup, sachant qu'elle avait horreur de tout ce qui était bling-bling, elle qui était une militante dans l'âme, elle était complètement différente.

Je ne mis pas longtemps à trouver ce que je cherchais, il y avait un coffre derrière un tableau et le code était tout simplement la date de naissance de mon père. Il y avait plusieurs téléphones, une clé USB, un peu d'argent et des documents. Je pris le tout et le rangeai dans mon sac avant de faire un tour dans la chambre et de fouiller le dressing. Elle avait gardé plusieurs photos de notre famille, il y avait des photos de moi également, et des enregistrements vidéos, j'embarquai le tout également, ça avait une valeur sentimentale pour elle, alors je ne laissai rien, rien du tout.

Je sortis satisfaite et rentrai chez moi. Un seul petit message et ma mère passerait les prochaines semaines enfermée, ça lui remettrait les idées en place et ça me laisserait le temps de finir ce que j'avais à faire. Je m'arrêtai au Firehouse après avoir enfilé une robe et une paire d'escarpins, je savais qu'Eric Pender y était, j'avais localisé son téléphone et je devais continuer, il fallait que j'accapare de nouveau toute l'attention d'Alex. Je regardai mon reflet dans le rétroviseur et plaquai un air triste sur mon visage, sans trop de difficulté étant donné qu'une partie de moi l'était vraiment, entrai dans le bar et m'installai au comptoir.

— Qu'est-ce que je vous sers ? me lança le barman.

— Un Manhattan, s'il vous plait, et mettez-moi un whisky on the rocks.

Le bar était assez peu rempli bien que nous soyons un vendredi soir, les gens allaient surement arriver plus tard. Ma stratégie était simple, j'allai jouer les demoiselles en détresse et Eric Pender prendrait son rôle d'ange gardien à cœur et à corps, j'en étais sûre... Les boissons arrivèrent et je bus d'une traite mes deux verres, avant de recommander une autre tournée. Mon regard croisa celui d'Eric qui était avec des amis à lui et il s'approcha de moi.

— Cassie, comment ça va ?

— Super ! Tout va bien dans le meilleur des mondes ! dis-je d'une voix forte.

J'enchaînai la troisième tournée sous le regard désapprobateur d'Eric.

— Tu devrais y aller doucement, viens à ma table, on va manger un bout.

— Non merci, je suis bien là, toute seule, dis-je en riant. Assieds-toi avec moi, je te paye un verre.

— Cassie, tu veux que j'appelle Alexander ?

— Non ! dis-je vivement. Il ne voudra pas me parler...

Il s'installa à mes côtés et prit un verre avec moi.

— Vous vous êtes disputés ?

Je n'avais pas eu besoin de me forcer pour verser quelques larmes.

— Eh barman ! criai-je. Deux autres verres ! !

— Ne la sert pas Jimmy.

— Sers-moi Jimmy, je suis une adulte responsable !

Il haussa les épaules et me fit glisser deux autres verres. La musique était de plus en plus entraînante et je tirai Eric sur la piste après avoir descendu les deux verres, il ne se fit pas prier pour me suivre. Bonjour l'amitié... Alexander verrait rouge s'il nous voyait comme ça !

— Qu'est-ce que tu as ? Je pensais qu'Alex et toi vous étiez réconciliés, demanda-t-il en posant sa main sur ma taille.

Je fis un effort pour ne pas me raidir à son contact.

— Oui et puis une certaine Callie Vasquez est arrivée et il a annulé notre rendez-vous en disant qu'il avait un imprévu.

— Ah elle est revenue, celle-là ? Ne t'inquiète pas, c'est une vieille amie, une junkie, Alex a juste pitié d'elle, mais elle est amoureuse de lui depuis le lycée, me lança-t-il.

Alors comme ça elle était amoureuse d'Alex, je ne l'aurai jamais parié... Je mis cette information dans un coin de ma tête et retournai au bar reprendre un verre en m'appuyant sur Eric et en titubant un peu.

— Oulah, je te tiens Cassie, tu devrais manger un morceau, demain matin tu regretteras de pas m'avoir écouté.

Je bus cul sec mon dernier verre.

— J'ai besoin de prendre l'air, ris-je.

Il marchait près de moi et me retenait, pensant que j'allai tomber, pff, ridicule s'il savait.

— Doucement Cassie, tu n'aurais pas dû boire autant de verre, tu ne tiens pas debout.

— Je suis pathétique hein, Alex mérite quelqu'un de beaucoup mieux que moi.

— Tu n'es pas pathétique, tu es une fille géniale, tu es belle, tu es intelligente et il faudrait être aveugle pour ne pas voir que tu es la femme parfaite.

Je ris comme une idiote et m'approchai de lui.

— T'es pas mal non plus Eric Pender, si on s'était connu avant...

Je fis abstraction de tout et l'embrassai, sans surprise il me rendit mon baiser et après quelques secondes je me reculai vivement.

— Mon Dieu ! dis-je en mettant une main sur ma bouche. Je suis... Qu'est-ce que...

— Calme-toi, Cassandra, on a trop bu c'est tout, ce n'est rien, dit-il.

Je me mis à pleurer.

— Cassie, arrête s'il te plait, je suis désolé c'est ma faute ! Où tu vas, tu es ivre, je ne vais pas te laisser seule.

— Je vais juste marcher un peu, je ne suis pas ivre à ce point.

Il soupira et me laissa partir, c'était très bien. Je tenais très bien l'alcool et je pouvais encore boire plusieurs verres facilement, je sortis mon téléphone et appelai Alexander, en prenant soin d'intensifier mes pleurs.

— Cassie, dit-il d'une voix presque endormie.

Je regardai l'heure, il était presque minuit.

— Alex, dis-je en pleurant.

— Cassie ? Qu'est-ce qu'il se passe ?

Je me mis à rire et je l'entendis se lever.

— Où tu es ?

— J'ai fait une bêtise Alex, repris-je en pleurant de nouveau.

— Où tu es Cassie ? Tu es ivre ?

— Je suis pas loin du Firehouse, non je ne suis pas ivre, pourquoi vous dites tous ça ?

— Tu es avec qui ?

J'entendis une porte claquer, il serait là dans vingt minutes maximum.

— Eric est ici, mais il est pas loin, je sais pas trop, je vais m'asseoir une minute, je suis désolée Alex.

Je raccrochai sans attendre sa réponse et me dirigeai vers une épicerie pour acheter une bouteille de vodka. Je rejoignis ma voiture et m'assis à même le sol en buvant, j'avais renversé la moitié de la bouteille et attendis l'arrivée d'Alexander qui ne tarda pas. Il m'aperçut rapidement et s'approcha de moi.

— Cassie..., soupira-t-il.

Il me prit les mains pour me relever et je retombai dans ses bras.

— Donne-moi ça, dit-il en prenant la bouteille de mes mains. Pourquoi tu te mets dans cet état ?

Eric sortit à nouveau du bar et nous aperçut.

— Alex, dit-il mal à l'aise.

— Tu l'as laissé se mettre dans un état pareil ? Pourquoi tu ne m'as pas appelé ? s'énerva Alexander.

— C'est une adulte, je lui ai dit d'arrêter elle n'a pas voulu et tu n'es pas son père que je sache !

La tension était palpable et j'en profitai pour laisser couler des larmes et intervenir.

— Alex, ne t'énerve pas sur lui, tout est ma faute.

— Comment ça, tout est de ta faute ?

Il s'arrêta un instant et ses sourcils se froncèrent.

— Qu'est-ce que tu as fait Cassie ? Tu m'as dit que tu avais fait une bêtise, de quoi tu parlais ?

— Tu vois bien qu'elle est ivre, répondit Eric à ma place.

Alex se raidit et me lâcha la main pour s'approcher d'Eric.

— Réponds-moi, qu'est-ce qu'il s'est passé ?

— Rien du tout ! Je sais qu'elle est à toi, j'ai compris Alex, relax, on a juste bu quelques verres ensemble. J'ai proposé de t'appeler elle a refusé, ne rejette pas la faute sur moi mec, si elle est dans cet état c'est toi le seul et unique responsable.

C'était le moment d'intervenir, je préférais être celle qui lui annonçait. Malgré le regard noir qu'il avait, je dis d'une petite voix.

— Je l'ai embrassé, c'est moi, c'est pas lui, je...

Il leva la main pour me dire de me taire, il était dégouté, pauvre Alex... Eric lui restait là, debout, il faisait le fier, mais je voyais bien qu'il était mal à l'aise. Je vis le poing d'Alex se serrer, il allait frapper Eric et je m'interposai juste avant pour qu'il n'ait pas le temps de retenir son coup et que je sois celle qui le reçoive. J'avais eu le réflexe de me protéger, il ne toucha que mon épaule et je me laissai tomber par terre sous les yeux écarquillés d'Eric et d'Alex.

— Putain tu l'as frappée mec ! cria Eric en s'approchant de moi.

Je le repoussai et me levai avec difficulté, il n'y était pas allé de main morte et j'avais vraiment mal. Je fouillai dans mon sac et sortis les clés de ma voiture avant de la déverrouiller.

— Cassie...

— Je rentre, je suis fatiguée, je veux dormir.

Il n'osait pas me regarder, il était choqué par ce qu'il venait de faire, mais me parla quand même.

— Je... je ne voulais pas Cassandra, pardonne moi.

Parfait.

— Ça va, j'ai connu pire, dis-je un sanglot dans la voix.

Il fronça les sourcils surpris, Eric était étonné aussi et il lui lança un regard noir. Alex me tendit sa main, le visage complètement décomposé, et attendit que je la prenne. Je voyais la détresse dans son regard, et je savais aussi qu'après cet épisode il serait à mes pieds. Je ne pris pas sa main et ouvris la portière de ma voiture.

— Cassandra s'il te plait ne conduit pas, laisse-moi au moins te ramener.

Je ne lui répondis pas et me tournai vers Eric.

— Tu peux m'appeler un taxi, j'ai plus de batteries.

Il sortit son téléphone et me commanda un Uber.

— Il arrive dans trois minutes.

Alex me regardait, mais je l'ignorais complètement, j'avais vraiment mal, j'aurais dû réfléchir avant de m'interposer, j'étais sûre d'avoir un bleu. Le chauffeur arriva et avant de monter je lui lançai un dernier regard embué et montai dans la voiture en entendant à peine mon prénom qu'il avait murmuré.

J'arrivai chez moi et pris une longue douche, mon épaule était déjà colorée et chaque mouvement était douloureux. C'était un mal pour un bien, même si une alternative moins douloureuse n'aurait pas été de refus.

Un bip sur mon ordinateur m'indiqua la réception d'une vidéo, l'expéditeur était inconnu et je me doutais que ça concernait ma mère.

Ils avaient été beaucoup plus rapides que je ne l'avais imaginé : ma mère était à l'arrière d'une camionnette, ligotée et les yeux bandés. Ils l'avaient un peu amochée, mais elle s'en remettrait rapidement, elle pleurait et demandait où était sa sœur. Le plan fonctionnait à la perfection, elle pensait que ça concernait tante Sara, elle n'arrêtait pas de parler et finit par dire :

«Vous voulez de l'argent? Ma fille, ma fille Sara a beaucoup d'argent, si vous me laissez l'appeler, elle vous paiera, pour moi et ma sœur, je peux même vous dire où elle vit! Vous pourrez vérifier que je dis la vérité».

Même dans un moment comme ça, elle voulait m'entraîner dans sa chute. La pauvre... si elle savait que j'étais derrière tout ça, elle tomberait des nues. J'envoyai un bref « très bien » et refermai l'ordinateur.

Il était temps que je me penche sur les comptes des Johnson et des Graysons, ma mère semblait penser que cette piste était sérieuse et je devais vérifier tout ça par moi-même. L'alcool que j'avais bu m'empêchait d'être à cent pour cent alors je reportai à demain, et m'endormis le sourire aux lèvres.

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Le lendemain, je fus réveillée par une vive douleur à mon épaule. Je me levai et regardai le résultat dans le miroir, putain, c'était bien bleu et gonflé ! Je pris une douche brûlante et deux cachets d'aspirine, mais rien n'y faisait, j'avais un mal de chien et je pouvais à peine bouger mon bras.

On frappa à la porte et je me déplaçai avec difficulté pour ouvrir, j'aurais dû laisser Eric se prendre ce poing dans la gueule !

— Alex ?

Il se tenait face à moi, un sac fumant, et un bouquet de fleurs dans les mains.

— Je sais que ça n'excuse pas mon geste, peut être même que tu ne veux pas me parler, si c'est le cas je dépose juste ça et je m'en vais, débita-t-il en rougissant et en me tendant les fleurs.

Je sus à ce moment que j'avais gagné la partie, et ça valait tous les coups de poing du monde. Je fis un geste pour prendre le bouquet et grimaçai de douleur.

— Tu as mal ? s'inquiéta-t-il

— Un peu, mais ce n'est rien.

— Laisse-moi regarder.

Il s'approcha et ses yeux s'écarquillèrent.

— Qu'est-ce que j'ai fait... Cassie je... pardon, je ne voulais pas je te jure, je n'ai jamais touché une femme de ma vie, je n'ai pas fait exprès, je t'ai pas vu venir je te jure !

— Arrête Alex, c'est pas grave, je ne t'en veux pas.

— Je t'emmène à l'hôpital ! C'est peut-être sérieux.

Il prit mon sac et une veste et me fit sortir avant que je ne proteste. Vu la douleur, je pensais avoir une luxation, pas juste un gros bleu. Nous arrivâmes et malgré la file d'attente, je fus immédiatement prise en charge, merci le nom Grayson. Alex était blanc comme un linge, et lorsque la confirmation de la luxation tomba, il était livide. Un médecin effectua une réduction, qui ne fut pas une partie de plaisir, surtout que j'avais refusé le sédatif. Chaque mouvement était une torture et Alex semblait sur le poing de vomir, le pauvre il faisait vraiment peine à voir. Après une attelle que je devais garder une semaine, nous sortîmes de l'hôpital.

— Alex, arrête de te torturer, ce n'est pas ta faute, j'étais ivre et je me suis interposée entre toi et Eric. Dans quelques jours, je n'aurai plus rien et ce sera un mauvais souvenir.

— Je veux que tu viennes chez moi le temps que tu as ton attelle, je m'occuperai de toi Cassie.

— Arrête de dire des bêtises, je peux très bien m'en sortir seule.

— S'il te plait, laisse-moi me faire pardonner...

Il était impossible que je reste toute une semaine avec lui et en même temps, me voir tous les jours avec cette attelle lui rappellerait son acte et intensifierait sa culpabilité. C'était toujours bon à prendre pour moi.

— Juste trois jours alors, pas plus, proposai-je.

Il me prit la main et acquiesça.

Alexander Grayson était à moi, et le retour de Callie Vasquez, amoureuse de lui, ne serait pas un obstacle, en tout cas, plus maintenant.

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