12 | 𝐁𝐋𝐎𝐖𝐒
𝐁𝐋𝐎𝐖𝐒
▷ Coups.
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EMINEM ft. RIHANNA — LOVE THE WAY YOU LIE.
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Je reste un bon moment debout devant la salle, les yeux braqués sur le type, abasourdi. Je crois que Nam me parle, mais je n'en suis pas sûr. Mon esprit s'est décroché de tout.
Effondrée au sol, la demoiselle a les genoux en sang. Mais elle ne semble pas s'en préoccuper. Pour l'instant, je peux voir son visage se déformer de douleur sous la poigne de ce sale type qui lui tire les cheveux. Et il n'y va pas de main morte. À chaque cri de détresse, mon cœur se tord encore plus dans ma cage thoracique et mon souffle diminue. Comme si l'air manquait et que je devais fournir un effort surhumain pour arriver à en aspirer la moindre quantité.
Je sens mes poings se serrer malgré moi. Je sens la colère. Cette scène me répugne. Mes jambes tremblent. Pas de peur, non, de rage. J'arrive à ressentir la douleur de mes ongles qui s'enfoncent dans la peau de mes paumes, mais je n'en ai que faire. Mon cerveau se met à imaginer toutes sortes de tortures possibles et je suis presque sûr que mes yeux se voilent littéralement de rouge. Ou de noir. Je n'en sais rien. En revanche, je sais que j'ai des envies de meurtre.
Je suis prisonnier de ma rage. Je ne sais même plus si c'est cette scène qui en est à la base. Sous mes yeux défilent des souvenirs que j'aurais voulu refouler. Des images dont je n'aurais jamais voulu me rappeler. Et peut-être que tout se mélange. Peut-être que cette colère que je ressens est le mélange de celle due à cette scène et de celle due à tous ces foutus souvenirs. Peut-être que je me perds. Que je perds le nord. Mais ça ne compte plus, à présent, parce que je suis déjà en pétard.
Gemini tente, tant bien que mal, de libérer sa chevelure des mains du brun, en vain. Il est, non seulement plus grand et baraqué, mais aussi accompagné. À ses côtés se tient une blondinette qui ne cache même pas sa joie en le voyant martyriser Gemini.
Les gens présents dans la salle ne daignent pas prononcer ne serait-ce qu'un mot. On ne peut entendre que les pleurs et les gémissements de douleur de la demoiselle, ainsi que le rire malsain du sale type et sa pétasse. Ça me fout en boule.
Mes mains me démangent. Il faut que je cogne. Je suis certain que la colère est lisible sur mon visage, et même si j'ai un mouvement de recul, je ne peux pas laisser faire ça.
Durant les semaines qui ont suivi mon altercation avec la demoiselle, je me suis promis de respecter sa décision et de rester en dehors de ses histoires. Comme elle a si bien voulu me faire comprendre, ça ne regarde qu'elle, et pas moi. Alors, à chaque fois que je tombais sur une scène pareille, je changeais de direction. Je fermais les yeux. Je faisais mine d'être sourd-muet. En aucun cas je ne devais m'en mêler, je faisais tout pour rester en dehors. À chaque fois, je me répétais que ça n'était pas mon problème. Et que ça ne le serait pas.
Mais cette fois, c'en est trop. J'en ai ma claque. Au diable les promesses que je me suis faites, je ne peux définitivement pas rester de marbre face à tout ça. C'est aussi un être humain, bordel. Quel genre de personne je serais si je gardais le silence face à tout ce qu'on lui fait subir ?
Il n'y a aucune raison apparente, en plus. Juste pour une histoire de jalousie et de fric. Quelle merde. Et, même s'il y avait une raison solide, ce n'est jamais la meilleure manière de faire.
Et moi, j'ai une conscience.
J'effectue un pas en avant, avec pour intention de m'introduire dans cette salle et de casser la gueule à ce connard. Mes yeux ne cessent de le fixer depuis tout à l'heure, et je sais qu'il le ressent. Il n'arrête pas de tourner la tête dans tous les sens, sûrement pour capter mon regard. Mes longues jambes s'élancent rapidement l'une après l'autre, mais Nam m'arrête avant que je ne puisse entrer.
— Minute papillon, ne te mêle pas de ça.
Je lui lance un regard meurtrier.
— Pourquoi je ne devrais pas ?
— Non mais t'es bête ou quoi ? Tu as déjà oublié tout ce que je t'ai dit sur la pelouse ? Si tu lui viens en aide, tu seras aussi pris pour cible par ces idiots ! Et puis, c'est un peu de sa faute à elle aussi, si elle ne réagit pas. Elle se laisse faire comme une gentille petite victime, et ils aiment les agneaux vulnérables.
Je retiens un rire amer et me passe la main sur le visage. Je trottine sur place tellement la colère bat dans chacun de mes ports. Purée. Dites-moi qu'il n'est pas sérieux. Qu'il plaisante. Qu'il me fait marcher.
Ça ne peut pas être Nam qui me dit ça. Mon cerveau refuse d'enregistrer l'information. Sauf que si, c'est bien lui.
— Je me fiche bien d'être pris pour cible, merde. Je m'en fiche, Nam, tu m'entends ? S'il le faut, je leur casserai la gueule à eux tous. Ça m'est égal. Mais ça, ( je pointe du doigt la scène dans la salle ), je ne peux pas ignorer. Et ton histoire de « c'est aussi de sa faute si elle ne réagit pas », tu peux bien la ravaler. Ça n'est pas une excuse.
Nam s'apprête à répondre quand une voix retentit de nouveau.
— Arrêtez, bon sang !
Je tourne immédiatement la tête lorsque je reconnais la voix de ma sœur. Elle s'avance d'un pas déterminé vers le type et lui tire le bras, ce qui lui fait lâcher sa prise sur Gemini. Cette dernière soupire de soulagement et glisse en arrière, comme pour s'éloigner définitivement de ces idiots. Je la vois reprendre son souffle, ses larmes coulant à flot sur ses joues, et ma colère remonte d'un bond. La peur que je lis dans ses yeux me met hors de moi. C'est la première fois que je la vois pleurer ainsi.
Habituellement, après avoir été humiliée, elle attend que la foule se disperse pour se lever silencieusement et s'en aller, comme si de rien n'était. Puis elle va ensuite se réfugier dans les toilettes. Jamais elle ne se laisse aller en public. Pas devant moi, en tout cas. Elle a dû avoir sacrément mal pour pleurer de la sorte. Ou alors... ce connard lui a dit quelque chose. C'est sûrement ça.
Je n'en suis que plus énervé. Je ressens subitement une haine immense envers tous ces mômes gâtés et arrogants. Une envie de me les faire me submerge, mais j'essaie de me contrôler.
Kamie continue de lutter contre le brun. Entre-temps, je suis comme figé dans l'encadrure de la porte. Tout se mélange dans ma tête, des images indésirables refont surface. Des visages que je pensais avoir réussi à effacer de ma mémoire me reviennent en pleine face et je perds l'équilibre avant de me rattraper. Il a juste fallu que je me mette en colère pour que tout mon passé ressurgisse. Bordel.
Et puis, soudainement, j'entends un cri d'indignation.En regardant de plus belle, je remarque avec béatitude que la pétasse du type vient de renverser le contenu de sa bouteille de lait sur la tête de ma sœur.
— Non, mais ça va pas ? hurle-t-elle en essuyant le lait qui lui couvre les yeux.
Ses cheveux châtains qu'elle a pris soin d'attacher, ce matin, en queue de cheval, sont gluants. Son chemisier blanc dégouline du liquide et lui colle à la peau. Son soutien-gorge en devient de plus en plus visible. Et, pour couronner le tout, la blonde au brun lui assène une gifle qui résonne dans l'entièreté de la salle. Le son me ramène complètement à la réalité.
Je vois flou.
La pétasse se met à rire, suivie du sale type et de plus de la moitié des élèves présents dans cette foutue salle. Cette fois-ci, je ne me contrôle pas. Je n'essaie même pas.
Je me délivre de l'emprise de Nam et m'introduis dans la classe. Mes pieds claquent colériquement sur le sol ciré et me mènent aux côtés de ma sœur. Le moi enragé espère faire trembler la terre à chacun de ses pas. Mes yeux fixent intensément le sale type, qui lui, cesse de rire en me voyant approcher.
Sans le quitter du regard, je retire ma veste et la pose sur les épaules de ma sœur. Le silence retrouve sa place dans la pièce, et je peux sentir les yeux verts de la demoiselle me brûler la peau. Mais je ne me détourne pas du brun. Même elle ne pourra pas me refroidir. Mon cœur est voilé de colère.
Un sourire carnassier prend soudainement place sur ses lèvres.
— Oh ! on a affaire à une scène de rescousse ? raille-t-il. Alors, dis-moi, c'est quoi ? Ta copine ? Ta pute ? Qu'est-ce que ça te fait de la voir dégoulinant de lait ? Je suis pratiquement certain que ça t'excite !
Et il se remet à rire. Mais je ne réponds pas. Je ne réagis pas. Je reste de marbre. Comme un mannequin de cire.
Je me contente de le fixer, comme si ma vie en dépendait. Tout en essayant de ravaler mes envies de meurtre. Je crois néanmoins qu'il serait déjà mort si jamais mes yeux étaient des armes à feu.
Quand il constate mon impassibilité, il se reprend et je crois voir une étincelle de crainte traverser ses yeux. Sa pétasse reste stoïque derrière lui. Il déglutit et reprend son air assuré, m'offre un sourire malsain avant de se tourner de nouveau vers la demoiselle. Elle s'est glissée jusqu'au bas du tableau, à environ dix mètres de lui, et lorsque je le vois commencer à marcher dans sa direction, je m'emballe. Mon cœur s'emballe. Mes membres font de même.
Non, il ne va pas recommencer à la martyriser. Il rêve.
— Hé, je lui lance.
Il pivote sur lui-même, presque immédiatement, et sans attendre, j'ouvre la bouteille que Kamie m'a demandé de lui ramener, puis la lui lance. Il n'a pas le temps de réagir. Deux secondes plus tard, le contenu se déverse sur son polo Lacoste bleu, puis sur son visage, et une onomatopée d'indignation résonne à l'unanimité dans la salle. J'en fais abstraction. Je me fiche absolument de tous ces gosses qui me fixent.
Sa pétasse ainsi que la demoiselle sursautent systématiquement lorsqu'il me hurle dessus.
— C'est quoi, ton putain de problème ?
Il me lance un regard meurtrier auquel je réponds en haussant les épaules. Sa colère s'accentue. Mais, bon sang, ce que je me fous de ce qu'il peut ressentir.
Une vague de murmures s'élève de nouveau. Les élèves me regardent comme si j'étais un malade mental évadé d'un asile, mais j'ignore. Je m'en fiche. Totalement.
Nam est resté dans l'encadrement de la porte. Du coin de l'œil, je peux le voir me lancer un regard désapprobateur. Son expression faciale reste neutre, je sais qu'il est en colère contre moi. Sauf que, là, il n'a pas de raison de l'être. C'est plutôt moi qui en ai une, et très solide en plus : mon ami est un lâche. Mais pas moi, et je ne vais pas tranquillement rester à ma place durant toute une année en étant témoin des atrocités que ces sales gamins font subir aux autres. Hors de question.
Soudainement, le brun se met à courir dans ma direction. Je ne le vois pas immédiatement. Alors, il me tombe dessus sans aucune once de douceur et nous nous retrouvons tous deux au sol avant qu'il ne m'assène un premier coup au visage.
C'est violent. Si bien que je me mords la langue sous le choc. Je sens ma bouche se remplir d'un goût métallique que j'attribue systématiquement au sang. Il veut se battre ? Très bien. On va se battre.
Des cris, des gémissements, des commentaires, retentissent lorsque je prends l'avantage sur mon adversaire en le faisant tourner à la renverse. Mon poing retrouve sa mâchoire, un craquement d'os me parvient, puis sa bouche se remplit bientôt de sang. Je souris. J'aime ça.
Je suis en colère. Et, comme à chaque fois que c'est le cas, je perds notion des alentours. Je perds toute nature humaine. Je veux le voir souffrir, pleurer, implorer de l'épargner. Je veux voir le sang couler. Sans ça, je ne serais pas satisfait.
Je désire l'entendre me supplier, me demander pardon.
Alors, je continue. J'enchaîne les coups, l'un après l'autre. Son arcade sourcilière cède, sa pommette se balafre, sa lèvre se déchire. Les cris autour de nous me semblent lointains. Comme si j'étais sous l'eau et qu'on me parlait depuis la surface. Je ne discerne aucun son avec exactitude, mais je suis pratiquement sûr d'entendre Nam me hurler de me calmer. Je sens aussi des mains sur moi, essayant de me tirer en arrière, mais je m'en défais. Personne n'arrivera à me dégager de cet enfoiré. Aujourd'hui, il a signé sa mort. Il peut être certain qu'il ne s'en relèvera pas totalement indemne. Je vais lui laisser ma marque, pour qu'il se souvienne de sa place à chaque fois qu'il se regardera dans un miroir et qu'il la verra.
Plus rien ne compte. Rien ni personne.
Je vois juste ce connard sous moi, le visage en sang et mes poings qui ne le ménagent pas. Ils ne le feront d'ailleurs pas. Parce que, derrière mes yeux, défilent encore les images de sa pétasse en train de gifler ma sœur. De sa pétasse et lui riant de manière si malsaine. De lui, tirant les cheveux de la demoiselle sans prendre en compte ses cris de douleur.
La demoiselle.
Et puis, comme s'il venait d'y avoir un déclic dans mon esprit, mon poing se stoppe en plein air. Je cligne plusieurs fois des yeux et la lumière me paraît encore plus vive que jamais. J'ai l'impression de sortir en plein air pour la première fois depuis des années dans l'obscurité. Mes yeux cherchent ceux de Gemini dans cette foule ambiante qui s'est rassemblée autour de nous. Je balaie la salle du regard, ma respiration se fait haletante. Pitié, faîtes qu'elle soit partie. Faites qu'elle ne m'ait pas vu comme ça. Je ne sais pas ce que je ferai si jamais elle est encore là.
Mais lorsque des émeraudes d'un vert profond entrent en collision avec mes iris, mon souffle se coupe immédiatement. Je laisse tomber mon poing au sol et je la fixe. Aucun de nous deux n'ose bouger, nous nous regardons juste. Ma gorge est étonnamment sèche, si bien que j'ai un énorme mal à ravaler ma salive.
Je peux lire, dans ses yeux, de la peur. Elle me demande d'arrêter de cogner ce pauvre type. Elle veut que je le laisse tranquille, la demoiselle juge que ça suffit comme ça. Son regard m'implore de me relever, de cesser ce carnage. Elle a peur. Peur de moi.
Et j'ai honte.
Honte de m'être montré à elle sous la forme d'un idiot avide de violence. Honte qu'elle m'ait vu défigurer ce pauvre idiot comme si j'étais un psychopathe. Mais, surtout, j'ai honte d'avoir laissé mes sentiments me guider.
J'avais promis à maman de ne plus user de mes poings. De me contrôler. Si jamais elle me voyait comme ça, elle serait déçue. Tellement déçue.
Je soupire. Il faut que je me relève. Le pauvre type sous mes yeux est sur le point de fondre en larmes, minable. Ses joues ont enflé sous mes coups, une infime quantité de sang s'écoule de sa bouche et sa lèvre inférieure est quelque peu déchirée. Purée, je ne lui ai pas fait de cadeaux. Je commence subitement à regretter.
Alors, je décide de me lever pour lui laisser l'occasion de respirer. Qu'il se calme, bon sang, je ne vais pas le tuer. Et que quelqu'un l'emmène à l'infirmerie, il est sacrément amoché.
À peine me suis-je mis debout qu'une voix exagérément rauque retentit toutefois entre les quatres murs de cette pièce, nous réduisant tous au silence.
— Qu'est-ce qui se passe ici, bon sang !
C'est le professeur de ma sœur, et sa phrase n'était clairement pas une question.
▷ 𝑵𝑫𝑨 ◁
Hello! Comment allez-vous ?
Moi, ça ne pas fort. Ma mère veut m'envoyer en vacances dans un endroit où je.ne.veux.pas.aller ☠️
Belle vie.
Bref. Nouveau chapitre :)
Qu'en avez-vous pensé ?
Kayon s'est un peu laissé emporter, et il nous dévoile quelques démons du passé dont il n'aurait pas voulu se rappeler. Vos avis ? Vos suggestions sur ce qui a bien pu se passer ?
Pensez-vous que le "sale type" méritait d'être tabassé de la sorte ?
Avez-vous des idées sur la suite ?
Kiss❤️
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