09 | 𝐇𝐎𝐏𝐄𝐋𝐄𝐒𝐒 ?
𝐇𝐎𝐏𝐄𝐋𝐄𝐒𝐒 ?
▷ Sans espoir ?
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Timeflies ft. Katie Sky - Monsters.
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Mes jambes s'élancent l'une après l'autre à une vitesse dont je ne reviens toujours pas. Je cours pratiquement dans la direction du banc où est assise la demoiselle alors que le vent froid m'embaume le visage. J'ai les lèvres qui tremblent et les doigts gelés, mais cela m'importe peu.
Plus je l'approche, et plus je constate qu'elle ne semble pas vouloir partir. En réalité, après avoir croisé mon regard pendant une fraction de secondes, elle a juste fermé son livre, tourné la tête et tiré sa capuche de plus belle, de sorte à ce que ses cheveux ornés ne me soient plus du tout accessibles aux yeux. Et pourtant, je croyais réellement qu'elle prendrait la fuite.
Peut-être m'a-t-elle reconnu et veut-elle se lier d'amitié avec moi ?
Cette simple pensée me fait sourire. Je serais plus que ravie de créer une amitié avec la demoiselle, vraiment. Non pas que que je sois attiré par elle d'une certaine manière – enfin, si, pour tout dire –, mais elle m'intrigue. Elle a cette part de mystère qui se ressent rien qu'à son aura. Il y a quelque chose de profond chez elle qui m'attire plus que tout au monde. Et avec ce qui s'est passé ce matin, l'envie de la percer à jour me tiraille à m'en rendre fou.
Il faut que j'en sache plus sur cette fille.
Le son de mes Tenis se frottant contre les cailloux du sol se stoppe soudainement. Mon regard la parcourt un instant alors qu'elle garde la tête baissée sur les pages de son livre ré-ouvert sous ses yeux.
Ses pommettes rougies par le froid sont à nu, son écharpe ne recouvrant qu'une moitié de son visage, et ses petits doigts plus pâles que d'habitude me font bien comprendre qu'elle est là depuis un bon moment déjà. Ses jambes tremblantes de froid me font froncer les sourcils, pourquoi donc ne va-t-elle pas à la bibliothèque du lycée ? À moins qu'il n'y en ait pas.
Son visage ne fait que me raviver des souvenirs. Je la revois debout devant moi, sa légère robe d'été moulant légèrement sa poitrine, ses épaules rondes rosies par la fraîcheur des lieux, son visage angélique teinté d'une chaleur contagieuse ainsi que son sourire plus qu'éblouissant qui m'a tout de suite charmé. Parce que oui, je la trouve belle. Incroyablement belle. D'une beauté si douce et innocente que j'en viens à sourire rien qu'en la regardant.
Et puis d'un coup, sans que je ne m'y attende, son visage de porcelaine pivote dans ma direction. Je retiens mon souffle lorsque nos yeux s'accrochent une nouvelle fois.
C'est fou, l'effet qu'elle me fait.
Elle ne semble pas plus intéressée que ça par ma personne, alors elle reconcentre son attention sur les pages de son roman. Jusqu'à ce que, comme piquée à vif, elle retourne encore une fois le visage dans ma direction.
L'expression terrifiée qui s'empare de ses traits lorsqu'elle me regarde de plus belle me surprend. Pourquoi semble-t-elle si étonnée ? Elle m'a pourtant reconnue tout à l'heure, n'est-ce pas ?
À moins que... Oui, c'est ça, elle n'a sûrement pas dû se rendre compte qu'il s'agissait de moi.
— Mini-Durand ? souffle-t-elle d'une voix étouffée, comme si les parois de son œsophage s'étaient restreintes et que le son avait du mal à s'en échapper. Mon corps se tend lorsque ses petites lèvres en cœur délivrent ces mots.
Un long frisson me parcourt subitement l'échine. Son regard. Il me décharge une vague d'électricité à laquelle mes muscles se tendent.
Elle me dévisage, muette, laissant un silence de mort s'abattre entre nous. Sa peau laiteuse se teint d'une pâleur cadavérique, et alors que je l'observe plus profondément, elle me dévoile les tombes noires qui viennent lui creuser les yeux.
— C'est moi, je réponds presque inaudiblement.
Ses yeux revêtent une froideur qui me glace le sang. La vulnérabilité dont elle faisait preuve étant baignée dans son bouquin s'envole, désormais, elle semble complètement loin de ce monde imaginaire dans lequel elle avait plongé. Son regard qui était voilé d'innocence il y a quelques minutes est maintenant teinté d'une lueur que je ne saurais nommer.
— Pourquoi est-ce que tu es ici ? détonne-t-elle, la voix chargée d'une telle dureté que j'en fronce les sourcils.
Je ne le laisse pas paraître, mais mon égo en prend un coup. C'est comme si elle avait glissé, entre nous, une sorte de muraille juste avant que je n'en découvre trop sur elle. Plus qu'elle ne le voudrait.
— Tant de douceur dans ta voix, j'en suis ravi, répondé-je calmement en m'installant à ses côtés.
Elle fait les gros yeux en me voyant poser mon derrière sur le banc, me scrutant encore et encore d'un mauvais œil comme si elle n'en revenait pas que je puisse m'asseoir près d'elle, avant de ramener une mèche de cheveux à l'intérieur de sa capuche en détournant le regard.
— Tu devrais t'en aller.
Je n'ai aucunement l'intention de le faire.
Après un bref regard dans sa direction, je m'adosse contre le dossier du banc et superpose les jambes.
— Tu es ici depuis longtemps ? feins-je n'avoir rien entendu.
— Tu n'as pas compris ce que je t'ai dit ?
— Je ne partirai pas d'ici, Gemini.
Elle semble surprise d'entendre son prénom de ma bouche, puis se redresse lentement comme un piquet. Elle renfrogne le nez, plisse les lèvres et entreprend subitement de ranger son bouquin dans son sac. Elle se lève d'un bond, et instinctivement, mes doigts entourent son poignet dans le but de la retenir. Elle ne peut pas partir. Je ne veux pas qu'elle s'en aille.
— Où tu vas ? je lui demande.
— Ça ne te regarde pas, me crache-t-elle avec une certaine rage dans la voix, ce qui me vaut un mouvement de recul. Néanmoins, je ne la lâche pas pour autant.
— Tu as l'intention de fuir ? lui demandé-je à nouveau.
— Je n'ai aucune raison de le faire.
— Est-ce que tu es indirectement en train de me repousser, là ?
— Non. Je le fais directement. C'est juste toi qui ne veut pas le comprendre. J'en viens à croire que tu es réellement anormal.
Ses mots respirent la colère, mais aussi la tristesse. Une profonde peine qui se perçoit rien qu'au son de sa voix. Ce qu'elle me dévoile aujourd'hui contraste totalement avec l'image que je m'étais faite d'elle à l'entreprise où travaille mon père. L'entreprise à son père.
Son regard m'évite. Ma mâchoire se contracte tandis que je resserre mon emprise sur son poignet, ce qui me vaut une grimace de sa part. Mais l'expression détachée qu'elle s'obstine à garder depuis tout à l'heure ne tarde pas à regagner sa place.
— Il faut qu'on parle.
— Je n'en ai pas envie.
— Pourquoi ?
Pour la première fois depuis que nous sommes là, l'un debout et l'autre assis, comme deux hébétés, Gemini ose enfin plonger son regard émeraude dans le mien et, encore une fois, mon souffle se bloque dans ma poitrine. Ses pupilles me scrutent un instant, puis elle laisse échapper un rire. Amer, à m'en glacer le sang. Ses yeux sont vides, son rire aussi. on aurait dit un écho, un son glauque avec lequel son air innocent contraste tellement que ma conscience se meurt à se demander s'il s'agit réellement de la fille que j'ai rencontré ce soir-là.
— Pourquoi ? me reprend-elle, tu oses vraiment me demander pourquoi ? ( elle ramène une mèche de cheveux par-dedans sa capuche ).
Je déglutis.
— Écoute, à propos de ce qu'il s'est passé ce matin...
— Quoi ? hurle-t-elle presque, nous valant tous les regards des gens autour. Que s'est-il donc passé ce matin, mini-Durand ? Hein ? Dis-moi ?
Son sourire glauque toujours perché à ses lèvres, elle continue, d'un air sarcastique :
— Ah, mais oui ! C'est ça ! Tu as de la peine pour moi, hein ? Tu as pitié de moi ? C'est pour cette raison que tu es là, à me retenir et me parler comme si tu me connaissais ? Dans le couloir, tu as fait exprès de prendre le casier à côté du mien, c'est ça ? Mais qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez toi, enfin ?
Le casier à côté du sien ? C'est quoi cette histoire ?
C'est donc là qu'elle allait lorsque l'on s'est croisés ? Et c'est aussi pour ça qu'elle a aussi vite changé de direction ?
Elle laisse fuser ces phrases à une vitesse hallucinante, si bien qu'elle reprend son souffle comme si elle avait fait dix minutes d'apnée. Sa poitrine s'élève et s'abaisse irrégulièrement, et je ne peux m'empêcher de trouver son raisonnement débile. Idiot. Illogique. Pourquoi est-ce qu'elle comprend les choses de la sorte ? Est-ce que je donne l'impression d'être à ses côtés par simple pitié ? Si je suis là, c'est uniquement parce que je le veux, et rien d'autre.
— C'est ridicule.
C'est tout ce que j'arrive à déblatérer après un long moment de silence. Elle recule, secouée de ma franchise et de mon calme étonnant, sans doute.
Ses iris verts cherchent des réponses dans les miens. J'aperçois ses doigts se resserrer sur la bretelle de son sac à dos. Son angoisse est palpable, mais à aucun moment elle ne détourne les yeux. J'en fais de même, avec tout le sérieux du monde.
— Je...je ne suis pas aussi idiote que tu peux le penser, tu sais...
Sa voix n'est plus qu'un murmure.
— Je ne dis pas que tu l'es.
— Ce que je veux dire, c'est que tu as vu et entendu des choses auxquelles tu n'aurais jamais dû assister, reprend-t-elle, comme essoufflée. Je ne veux pas de ta pitié.
— Ecoute, je ne suis pas ici, à côté de toi et te tenant le poignet de cette manière juste parce que je ressens de la pitié pour toi. Bien au contraire. Il faut que tu arrêtes de tout voir en mal, parce que ce n'est pas le cas.
Ses prunelles parcourent mes traits, si lentement que la gêne commence à se faire ressentir. Puis, lorsqu'elle est assez convaincue par mes dires – enfin, je crois –, elle entrouvre les lèvres avec pour intention de dire quelque chose. Sauf qu'au même moment, la sonnerie du lycée retentit, annonçant ainsi la fin de la pause déjeuner.
Ce son a comme un effet hypnotique sur elle, car au moment même où elle l'entend, l'éternelle expression détachée qu'elle arborait revient sur son visage. Elle réajuste la bretelle de son sac sur son épaule, et d'un geste brut, retire sèchement son poignet de mes doigts. J'en sursaute.
Ses jambes font quelques pas en arrière, sans néanmoins qu'elle me tourne le dos, et une fois une distance raisonnable installée entre nous deux, Gemini s'écrie :
— Ne t'avise plus jamais, je dis bien plus jamais, de m'adresser ne serait-ce qu'un regard, sinon je te jure que tu le regretteras.
Sa voix est crue. Son regard, destructeur. Elle me balance tout ça comme un archer lancerait sa flèche sur une cible. Sauf que là, pour je ne sais quelle raison, c'est mon cœur qui se comprime sous l'effet de ses mots assassins. Ici, mon organe vital est sa cible, et ses mots, la flèche qui me le fend.
Après un regard plein de dédain, elle me tourne le dos, puis se met à courir sans se retourner ne serait-ce qu'une seule fois. Je tente de hurler son prénom en me relevant d'un bond, mais aucun son ne franchit la barrière de mes lèvres. Et alors que mes pensées se bousculent dans ma tête, elle disparaît derrière un mur, quittant ainsi mon champ de vision pour de bon.
▷ 𝑵𝑫𝑨 ◁
Hey tout le monde!
Comment allez-vous ?
J'ai pris un moment pour m'éloigner de tout ces dernières semaines, mais je suis enfin de retour. Je ne sais pas s'il y a encore des personnes qui liront ce chapitre, mais si vous en faites partie, cœur sur vous ! <3
N'oubliez pas de voter et de commenter, ça fait toujours plaisir.
Kiss, Mira❤️
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