Chapitre 21.

21.

« Un voyage de mille lieue commence toujours par un premier pas. » - Lao Tseu

Nathan

Devant ma moto depuis une dizaine de minutes, je tente de me décider à l'enfourcher ou non. Même si le chauffage à l'intérieur de la maison m'attire inexorablement, je n'arrive pas à savoir si il faut ou non que je fasse enfin un pas vers Eli.

Cela fait près d'une semaine et demi que aucun de nous deux ne tente une approche quelconque, et les seuls mots que nous avons échangé se résument à "tu pourrais me passer le sel s'il te plait ?", "tu m'emmènes au lycée ?", et mon "oui" journalier.

Aucun de nous deux n'a essayé de débloquer la situation, si bien qu'un important malaise est encore présent. Et il me tue petit à petit, à petit feu.

Et je suffoque, tout simplement.

J'ai l'impression d'être totalement vide. L'absence de Flavia se fait énormément ressentir dans mon humeur, mais le fait que Eli s'éloigne de moi de plus en plus ajoute plusieurs choses à ma mauvaise humeur constante et permanente. JM, Noa et Théo la supporte sans cesse, sans même ciller comme les véritables amis qu'ils sont pour moi, et je leur suis intérieurement reconnaissant, même si je ne leur montre pas cette gratitude imposante.

Oui, je dois y aller. Je dois tenter tout arranger.

J'enfourche enfin ma moto et démarre en trombe, faisant crisser les graviers de l'allée sous mes roues. Connaissant le chemin par coeur, j'arrive sur place en très peu de temps. J'enlève mon casque et me gants avant de me diriger vers la porte. Mais arrivé devant cette dernière, je suis pris de nouveaux de doutes. Planté comme un piquet sans bouger, je commence à trembler à cause de la température de plus en plus fraîche à mesure que le mois de décembre avance.

Mais une personne pousse la porte pour sortir, ne me laissant pas le choix d'entrer dans le café où Eli travaille. Comme d'habitude, plusieurs personnes sont présentes, mais il n'est pas bondé. Je regarde deux enfants tourner autour d'une table en courant, et lorsque l'un d'eux glisse sur le sol légèrement humide, mes lèvres se retroussent en un léger sourire. L'ambiance reposante me rassure légèrement et je me dirige en baissant la tête vers la table habituelle, au fond de la salle de restauration.

Je la cherche du regard. Mais pourtant, après avoir parcouru l'ensemble de la grande pièce de service, je ne la vois pas. Elle n'est nulle part. Mais lui, je le vois.

Aymeric.

Le connard.

La dernière fois que je l'ai vu, il l'a embrassée. Et elle a fait un malaise quelques secondes après. Je ne le sentais vraiment pas avant, mais maintenant, je suis fixé. Je le déteste. Tout simplement.

Je le regarde déambuler dans le café pour faire son travail pendant quelques longues minutes. Étant le seul serveur présent, il sourit aux gens et ne cesse de bouger partout, tout en portant des plateaux les uns sur les autres...

Puis je le vois relever les yeux vers une porte réservée au personnel lorsque cette dernière s'ouvre. Laissant apparaître, à mon plus grand soulagement, Eli.

Mon coeur se réchauffe lorsque je la vois, mais je reste en retrait, caché, pour les observer, tous les deux. Je n'ai aucune idée de leur relation actuelle, depuis l'altercation d'il y a maintenant plusieurs semaines.

Je regarde Eli remplir un grand verre d'une substance rose presque fluo, semblable à un milkshake. Puis elle se dirige vers une table à la droite. Elle passe devant Aymeric sans même lui adresser un regard. Yes. Première victoire pour moi.

Lorsqu'elle s'approche de la table, son visage laisse apparaître un sourire jovial, tandis qu'elle discute quelques secondes avec ses clients, rigolant sûrement à une blague. Elle donne un plateau remplit de verres vides a Aymeric, puis elle revient vers eux, comme pour finir leur conversation.

Son rire résonne comme une mélodie à mes oreilles et me redonne légèrement le sourire. Mais je le perds très vite, lorsque je vois son visage se décomposer lorsqu'il croise le mien. Elle me fusille du regard, si bien que je sens presque des impacts transpercer mon coeur. Puis elle me tourne le dos et fait comme si je n'existais pas. Me laissant seul avec seulement mes pensées noires comme compagnie.

Pour couronner le tout et accentuer la mauvaise humeur, un serveur s'approche de moi pour prendre ma commande. Aymeric. Encore et toujours là, à ses côtés, alors que moi-même je n'y suis plus, à mon grand désarroi. Elle semble m'avoir totalement rayé de sa vie, alors que Aymeric et moi avons tous les deux suivi le même chemin. Comme deux personnes parallèle, nous avons tous les deux embrassés Eli, comme deux lâches ne pouvant résister à l'attraction qu'elle crée autour d'elle. Et elle nous a repoussé tous les deux, sans que l'on ne puisse rien faire. Alors pourquoi semble-t-elle accepter la présence d'Aymeric près d'elle, alors qu'elle me repousse sans cesse ? Qu'est ce que j'ai fait de plus ? De pire ?

- Je voudrais un coca, je lance désinvoltement à celui que je méprise tant. 

Je passe le reste de la soirée à broyer du noir dans le coin du café, seul. Elle est là, autour de moi, à se déplacer, à sourire, à parler, à rire. Mais elle est loin de moi. Trop loin de moi. Elle crée un mur qui m'est infranchissable, et tous mes efforts pour le dépasser ou le détruire sont restés vains jusqu'à maintenant.

Eli

Il est là. Dans le café. Il a enfin tenté de faire un premier pas vers moi.

Et je suis totalement terrorisée.

Ça fait maintenant plusieurs semaines que je me refuse de faire le moindre pas vers lui. Parce que je m'en veux, tout simplement. À cause de moi, Nathan et Flavia ne sont plus ensemble. J'ai détruit leur couple. C'est ma faute. Je ne me pardonnerai jamais d'avoir trahis autant mon amie.

Alors j'ai évité Nathan, pour détruire l'attraction que je ressentais pour lui. Il ne dois rien se passer entre nous. Il ne peut rien se passer. Vis à vis de Flavia. Je ne peux pas ressentir le moindre sentiment pour lui. Ça m'est interdit.

Et puis je dois en savoir plus sur Maxime. Car j'étais avec lui avant. Je ne sais pas si nous étions encore ensemble au moment de ma "disparition", ni s'il me cherche actuellement. Mais il est la clé, et pour creuser cette piste, je dois oublier Nathan.

Car je m'en vais. Je reste encore une semaine, le temps que les vacances arrivent, puis je quitte cette petite ville. Ma ville d'accueil. Qui m'a tant aidée. Comme on dit, toutes les bonnes choses ont une fin. Et je sais qu'elle s'approche de plus en plus, en même temps que s'approchent les vacances scolaires.

Je n'ai encore prévenu personne de mon départ, tentant de pour l'instant cacher ce secret au fond de moi. Grâce aux économies ramassées en travaillant dans ce café, j'ai pu réserver mon billet de train. Mais un aller simple. Je ne sais pas si je vais revenir.

- Eli, tu peux apporter ce coca à la table quatorze s'il te plaît ?

Aymeric. Avant, j'aurais pu dire que c'était mon ami. Mais maintenant, depuis ce fameux soir, nous nous contentons simplement de travailler ensemble. Une relation purement professionnelle, au dessus de laquelle plane un grand malaise, mais que tout le monde tente d'ignorer. Tout est mieux ainsi.

- Oui bien sûr, je lui réponds en évitant de croiser son regard.

J'attrape le grand verre de coca, j'ajoute mécaniquement une paille Orange et une rondelle de citron sur le coin, puis je me dirige vers la table dite. Mais c'est seulement en arrivant devant cette dernière que je réalise que l'occupant de cette table, la plus en retrait de tout le café, est en vérité Nathan.

Je pose le verre devant lui, puis dans un mot, je retourne derrière le comptoir.

Je dois continuer à l'ignorer. C'est la meilleure chose à faire. Il faut que je résiste. Il ne faut pas que je lui parle.

La boutique se vide petit à petit, au fur et à mesure que les minutes passent.

- Je te laisse fermer pour ce soir. J'ai quelque chose à faire, me dit mon collègue en posant un trousseau de clés devant moi.

Je jette un coup d'œil devant moi, pour vérifier si Nathan est encore là. Et à mon plus grand malheur, je l'aperçois, seul client encore présent.

- Non, non Aymeric, je le supplie presque, s'il te plait me fait pas ça. Je...

- Eli c'est pour toi que je fais ça justement.

Apres m'avoir coupé la parole et lancé ces quelques mots, il quitte en trombe le café. Me laissant toute seule avec Nathan.

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Pardon de mon absence, mais je n'avais pas de wifi en vacances.

J'espère que vous avez aimé ce chapitre ❤️

So.

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