Chapitre 29

Le capitaine dans sa cabine, la tête ayant travaillée depuis le début sans même prendre de pause, il entendit les voix approcher du Red Edan. Alexandre quitta donc ses appartements pour fixer son groupe de pirate accompagné de joli cœur.

Lorsqu’il se mit à la fixer il repensa à la question de Brown. Après que son timonier ait prononcé ces quelques mots, Alexandre s’était arrêté. Au départ, il pensait que lui en parler serait peut-être le mieux mais il se renfrogna vite.

Il ne savait comment expliquer ce qu’il ressentait. Il ne savait même pas lui-même ce qu’il ressentait. Alors, après que Brown le lui ait demandé, Alexandre s’était comme stoppé dans son élan. Il s’était tourné pour regarder son timonier. Mais avait vite abandonné pour retourner dans sa cabine. Il avait encore une fois fuit.

L’équipage monta sur le pont, un brouhaha emplissait les lieux encore silencieux il y avait de cela quelques minutes. Le capitaine les regardait approcher, chacun retournait tranquillement à son branle.

Marie de son côté avait une envie de parler au capitaine qui grandissait de plus en plus. Mais à cette heure là il n’accepterait sûrement pas. Il lui fallait trouver une excuse, ce qui fut plutôt facile lorsqu’elle repensa à cette pierre verdâtre. Sauf qui la prit de court en s’approchant doucement vers elle sans pour autant lui apporter un regard.

- Comment était-ce ? demanda l’homme les bras croisés sur le torse dont les yeux fixaient les derniers hommes de l’équipage qui disparaissaient peu à peu.

- Bien à vrai dire. Même si le rhum n’a pas été la meilleure parti. Et vous, vous avez avancé ?

- Pas vraiment pour être honnête, avoua-t-il un grognement dans la gorge.

- Peut-être est-ce parce que la réponse était sous nos yeux ?

- Que voulez-vous dire ? Ne me dites pas que vous…

- Le caillou, continua-t-elle en lui coupant la parole.

Mais évidemment, la réaction de l’homme était loin de ce qu’elle avait espéré. Son visage était devenu plus sombre, plus froid. Ce qui avait offert un frisson à la jeune pirate.

L’homme, ne voulant pas s’énerver face à elle, prit une grande inspiration avant de se tourner pour aller dans sa cabine. Marie offusquée, le suivit jusqu’à fermer la porte derrière eux.

- Écoutez moi au moins ! avait-elle dit durant leur léger voyage allant du pont aux appartements de l’homme.

Devant son bureau Alexandre se tourna petit à petit pour lui faire face.

- Écoutez moi, s’il vous plaît… rajouta-t-elle presque dans un souffle. Je vous en prie.

Alexandre demeura muet face à elle, son regard toujours aussi perçant. L’homme avait finit par s’appuyer sur son bureau les bras toujours liés entre eux. Marie ne savait pourquoi il réagissait de la sorte, mais elle n’aimait pas ça. Lui qui avait l’habitude de l’écouter se résignait à la rejeter sans essayer de comprendre.

- Cela peut paraître étrange mais je suis certaine qu’elle n’a pas été posée là-bas pour rien, avoua-t-elle en montrant l’objet verdâtre.

Le capitaine souffla une fois de plus. Il se redressa pour s’approcher d’elle. Seulement un ridicule mètre les séparait. Pourtant Marie n’eut aucune réaction espérant qu’il l’écoute. Il n’en fit rien, restant droit et imposant face à la petite carrure de la jeune.

- Je vous l’ai rendu parce que vous aviez l’air d’y porter une quelconque importance, mais elle ne sert à rien.

Son cœur lui faisait mal. Pourquoi ne voulait-il pas l’écouter ? Peut-être était-elle trop émotive lorsqu’il s’agissait de cet homme ? Elle avait presque envie de pleurer. Sa gorge s’était serrée comme on aurait étranglé quelqu’un. À la différence qu’elle respirait encore et qu’aucune main n’était présente sur son cou. Elle n’ajouta rien, comme perdue.

Alexandre eut mal à son tour, mais il continua tout de même.

- Lors de mes recherches sur d’ancien butin, il nous est très souvent arrivé de tomber sur une fausse piste. Croyez-moi, ce caillou ne vaut rien.

- S’il vous plaît…

C’était la seule chose que Marie avait prononcé face à lui. Le regard de l’homme s’était adoucît une fraction de seconde avant de reprendre son air froid et distant.

- Non joli cœur, de nous deux je suis celui qui a le plus d’expérience dans ce domaine. Je vous prierai donc d’arrêter cela.

Encore une fois il venait de lancer une épine sur la jeune femme. Elle avait du mal à le supporter. Son sang bouillonnait dans ses veines, son cœur venait frapper dans ses tympans. La colère prenait le dessus.

- Écoutez moi bon sang ! Pourquoi réagissez vous comme cela !? Vous n’avez eu aucune piste ! Alors qu’est-ce que cela peut-il changer si je vous donne ne serait-ce qu’une simple idée !?

L’homme était plus que surpris de la voir dans un tel état. Il sentait toute la pression présente dans son petit corps. Il sentait sa colère. Alexandre voulait la calmer. Il posa donc sa grande main sur celle de la femme, passant ses doigts entre les siens et récupérant doucement l’objet verdâtre qu’elle tenait.

Les yeux bleus de la jeune étaient restés plantés dans ceux de l’homme. Les tremblements de ses petites mains se calmèrent petit à petit. Alexandre posa le caillou sur son bureau. Malheureusement celui-ci tomba lorsque la manche rouge du pirate vint s’entrechoquer avec lui.

L’objet vert fit quelques rebonds avant de s’arrêter près de la table de chevet. Marie était statique. Elle avait suivit des yeux leur trouvaille. La jeune n’avait rien dit, ses muscles s’étaient détendus. Pourtant la tension restait la même.

L’ancienne noble elle venait de se briser de l’intérieur. Ce caillou, lors de sa chute... elle s’était vu elle. Dans sa main, s’était lorsqu’elle avait apprit son mariage. Sur la table, la jeune venait d’arriver au port prêt à subir son destin. La première chute, elle avait été capturée. Le premier rebond, elle avait atterri sur le Red Edan. Le second, le troisième, le quatrième… c’était tout ce qu’elle avait vécu jusque là. Et l’arrêt, c’était en ce moment même.

Alexandre ne disait rien, regardant la jeune statique. Marie de son côté commença à bouger. Elle marchait lentement jusqu’à l’objet au sol. Elle s’était accroupie pour le ramasser et lorsqu’il fut enfin dans ses mains il ne se passa plus rien.

- Joli cœur… fit-il comme s'il tentait de la ramener à lui.

Mais elle ne lui offrit aucune réaction. Son cœur se serrait de plus en plus. Pourquoi ? La voir dans cette état était entrain de le détruire petit à petit. Où était passé le forban sans cœur ?

Marie de son côté tremblait encore sous la colère. Pourtant, ce n’était en aucun cas celà qui l’avait rendu statique comme une statue. En ramassant ce caillou vert, elle avait remarqué une chose bien étrange.

La lumière. L’ombre.

L’ombre de la pierre n’était pas normale, non. Comme si elle dessinait une forme bien précise ne se révélant qu’à la lumière. Lorsqu’elle attrapa l’objet pour le regarder de plus près, elle y devina effectivement une très légère gravure sur l’une des faces. Mais quand son doigt vint la toucher, aucune rugosité n’était présente. Comme si le dessin gravé dans l’objet n’était qu’une illusion.

Elle compris vite.

Marie se leva bien rapidement, presque chancelante par son mouvement trop brusque. Elle se tourna vers Alexandre qui fronça les sourcils inquiet et interrogateur.

- Que se passe-t-il ? demanda-t-il ne comprenant en aucun cas le regard qu’elle avait arboré.

Les yeux qui s’écarquillaient de plus en plus, Marie comprenait enfin tout ce qu’ils avaient loupé. La route sur le butin qu’ils cherchaient tant.

- La carte… dit-elle en assimilant toutes les réponses qui venaient s’entrechoquer violemment dans sa tête.

Alexandre s’approcha légèrement d’elle.

- De quoi parlez-vous ? fit-il presque dans un murmure inquiet de cette réaction dont il ne s’attendait guère.

Elle avait des yeux pétillants. Elle était revenue. Joli cœur venait de réapparaître. Et cela avait apporté comme un baume au cœur du pirate écarlate.

- Nous l’avons trouvé ! argua Marie en s’écartant de lui pour aller de l’autre côté du bureau.

Il la suivit du regard, la voyant prendre une lampe à huile et l’élever au niveau de son cou et de ses épaules.

- Elle est gravée.

- Gravée ? demanda Alexandre encore entrain d’essayer de tout comprendre.

Elle se mit à sourire, plaçant la lampe derrière le caillou verdâtre. Même si le dessin offert par l’ombre était flou par la distance entre l’objet et le receveur, on pouvait y deviner une carte.

L’homme se mit à réagir d’instinct. Il se dirigea vers un meuble ouvrant le tiroir pour en ressortir une feuille légèrement jaunie. Puis il s’assit au plus vite à son bureau attrapant sa plume.

Comme connecté, Marie plaça la lampe et l’objet vert de sorte à ce que l’ombre vienne taper sur la feuille. Puis sans rien de dire de plus, le pirate commença à inscrire avec son encre noire la carte révélée par l’ombre. Plus il traçait les nombreuses cernes noires, plus la carte apparaissait sous leur yeux. Et lorsqu’il eut finit, l’homme se leva comme prit d’une énergie sans nom.

- Vous aviez raison joli cœur, intervient-il avec un grand sourire naissant hypnotisé par la carte d’une île.

Il se tourna vers elle, et étrangement, c’était les lèvres de la jeune qu’il voulu capturer tel un prédateur envers sa proie. Sauf que le regard de son joli cœur le stoppa dans son élan le ramenant à lui.

À cet instant précis il avait une seule envie, ce n’était pas de continuer leur quête à la recherche de ce butin des abysses, non. Il avait qu’une seule chose en tête : enlacer cette femme qui se trouvait face à lui. La capturer dans ses bras sans la laisser partir. Sentir son odeur telle une drogue dont il ne pourrait se défaire. Il était devenu addict à ce petit cœur. Devenu addict à ce brin de femme qui le regardait avec des yeux bleu océan.

Il… l’aimait ?

Son cœur fit un bon, qu’il cru même sortir de sa poitrine. Une révélation que Brown avait su deviner avant lui. Soudain, le chaud monta à ses joues, il avait l’impression d’être tombé malade. Mais il était en bonne santé. Ce n’était que son joli cœur qui lui faisait cet étrange effet…

Il chassa vite ces idées se concentrant sur Brown, son timonier. Étant aussi le navigateur il était presque obligatoire de le prévenir de leur cap. Ensemble ils pourraient étudier cette île et définir la direction à prendre.

Il se racla la gorge détournant le regard.

- Je… commença-t-il cherchant quelque chose à dire.

Une excuse était évidemment essentielle et la bienvenue parmi ses pensées divaguantes.

- Vous êtes forte joli cœur, fit-il comme s'il cherchait ses mots pour exprimer ce qu’il ressentait.

Marie haussa un sourcil, elle ne comprenait pas ce qu’il essayait de lui dire. Et Alexandre l’avait vu. Il continua donc.

- Je suis désolé de ne pas avoir cru en vous, argua l’homme les yeux toujours bloqués vers la fuite.

Elle était surprise mais pas déçue. Elle se mit à sourire. Un étirement de lèvres qui offrit des frissons au pirate.

- Je vais prévenir Brown ! Il nous faut étudier au plus vite cette carte, finit-il en fuyant.

Alexandre fit plusieurs pas avant de quitter la cabine. Marie laissé seule dans cette grande pièce, elle avait fixé la silhouette de l’homme.

Le capitaine s’arrêta dos à la porte, son cœur tambourinait violemment dans sa poitrine. Mais il ne voulait en aucun cas rester bloqué sur ces étranges sentiments. Il quitta donc vite le bois pour rejoindre son timonier et lui parler de leur découverte.

La jeune ne savait que faire en attendant. Devait-elle rester ? Avait-elle le droit de rester seule dans la cabine d’un homme, qui plus est le capitaine de ce bâtiment ? Elle n’eut pas le temps de plus y réfléchir que les deux hommes entrèrent rapidement dans la pièce. Coupant le silence constant de cette endroit qui devenait trop vide pour elle.

Brown fit un signe de tête à la jeune et les hommes se mirent tous les deux à scruter les cartes et celle qu’Alexandre avait inscrite. La jeune pirate resta dans un coin regardant avec intérêt ce qu’ils faisaient.

Alexandre remarqua les yeux de joli cœur qui se plantaient sur chacune des cartes que Brown touchait. Il se mit à sourire, un doux sourire. Puis l’homme se redressa et tourna la tête vers elle.

- Joli cœur, vous voulez bien nous amener cette lampe ? demanda-t-il en faisant allusion à celle qu’elle n’avait pas lâché depuis leur trouvaille.

- Oh, réalisa la jeune. Bien sûr.

Elle s’approcha d’eux posant la lumière sur le bureau. Ses yeux virent scruter chacun des papiers alignés et entremêlés sur la table. Tout était si intéressant et nouveau. Brown ne faisait qu’utiliser des mots qu’elle ne connaissait presque pas. Elle les voyait en pleine action, cherchant une piste, une réponse cachée dans ses nombreuses cartes.

Puis le timonier bloqua sur un endroit plus précis, une loupe en main il la lâcha sur une île en particulier.

- Nous l’avons trouvé, intervient-il en se redressant fixant maintenant son capitaine.

Alexandre se pencha pour voir de plus près leur prochaine destination et fut plus que surpris par cet endroit.

- L’Isla sirena, murmura.

- Comment ? demanda Marie sans même s’en rendre compte.

- Notre prochain cap se trouve dans le nid même des monstres marins, les sirènes.

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