Chapitre 6 (4) : Four
Quatrième jour.
Mon planning est presque achevé, et un début de moyen de pression se monte dans ma tête. Maintenant que j'ai une meilleure idée de qui est Monokuma, qui nous sommes, nous les Ultimes, et pourquoi nous sommes ici, je sais exactement où taper pour la forcer à m'accorder ce que je veux.
Mais comme il y a de fortes chances qu'elle agisse en despote, je dois mettre toutes les chances de mon côté.
Si cette salle immense repérée par Daisuke doit être ma dernière clé, ainsi soit-il.
Ce qui explique que je sois dans les souterrains, avec un solide pique-nique pour me permettre de tenir la journée, mon Monopad, ma carte magnétique, le plan des souterrains enfin complété, une bonne dizaine d'armes légères comme lourdes et tout ce qu'il me faut pour explorer.
J'ai mis la console dans la position indiquée par Daisuke avant de me diriger dans les couloirs. J'essaie de marquer son chemin à la craie, histoire de me retrouver ensuite, vu que je n'ai pas beaucoup exploré cette partie-là ; mais de temps à autres, je fais quelques écarts. Histoire de voir, par moi-même, si je ne manque rien.
Pour l'instant, mes recherches accessoires ne portent pas vraiment leurs fruits. De temps à autres, je trouve un papier dans un cul-de-sac, mais il ne m'apprend rien d'autre que ce que je sais déjà.
Dommage. Un renseignement de plus aurait été utile.
Enfin bon, je ne m'attends pas à grand-chose de plus. J'ai bien l'impression d'avoir découvert bien assez d'informations accessoires comme ça. Autant laisser ça pour les autres.
Je n'ai pas remporté un seul papier.
Au bout d'un moment, les souterrains étant trop grands pour que je m'écarte trop de ma trajectoire, je décide de rester sur le chemin indiqué par Daisuke, et le marquer du mieux que je peux. Autant ne pas se perdre, ce serait dommage, surtout quand personne ne peut venir te chercher.
Et je progresse, lentement mais sûrement, Monopad et pistolet au poing, laissant à chaque tournant une flèche en craie bleue pour m'indiquer la route, guidée par un grondement de plus en plus fort qui résonne dans les murs de béton armé du souterrain.
J'ai l'impression d'avoir déjà entendu ce grondement quelque part. Erratique, il se renforce au fur et à mesure des chemins que j'emprunte, mais de temps à autre, un énorme choc retentit et fait trembler les murs. Je suis obligée de porter mes mains à mes oreilles pour me protéger du bruit, et même avec cette protection sommaire, mes tympans hurlent toute l'étendue de leur douleur.
J'aurais dû prendre un casque anti-bruit, tiens.
Un casque anti-bruit...
Je me souviens.
Pendant ma première exploration des souterrains avec Junko. On avait entendu le même grondement. Mais c'était au deuxième sous-sol. Le bruit était sûrement plus atténué que maintenant, et il avait quand même paniqué Junko. Aujourd'hui, je doute fort qu'elle supporte ce vacarme.
Mais elle n'est plus là pour me le dire.
Le bruit se rapproche. J'entends des cliquettements non loin, qui s'accentue au fur et à mesure que je me rapproche. Des cliquettements presque... Robotiques.
Alors qu'il n'y a pas de kumarobots dans les souterrains ?
...
Tiens donc.
Sur quoi je vais bien tomber, on se le demande.
Au cas où, je lève mon arme. Dans les souterrains, le plus loin possible de Monokuma, je ne suis plus à une destruction de kumarobots près. Daisuke a fait un carnage et n'a été atteint qu'à la toute fin. Je ne laisserai pas le temps à Monokuma de me punir pour avoir détruit ses machines.
Je m'avance encore de quelques pas.
L'immense carré dessiné sur le plan de Daisuke se rapproche.
Je suis, selon le plan, en train de le contourner.
Encore quelques pas.
Et je tombe sur une immense porte métallique ornée du symbole de Monokuma, qui me fixe de son sourire ricanant au-dessus d'un lecteur de carte magnétique.
Sur le plan de Daisuke, le même symbole y est dessiné.
J'y suis enfin.
Je me rapproche un peu. Les cliquettements se font de plus en plus intenses, par contre, le grondement semble s'être atténué. Bizarre. Mais à bien y réfléchir, il venait plus des murs que des couloirs. Il y a peut-être une explication.
Le lecteur de carte brille non loin. Il attend ma carte magnétique, et je ne compte pas le faire attendre plus longtemps.
Profitant de la faible lueur qu'il dégage, je range mon Monopad, éteignant la lampe de poche qui m'a guidée tout ce temps, avant d'en sortir le précieux sésame. Délicatement, à une seule main puisque je suis obligée de garder mon arme au poing par pure sécurité, je le fais passer sur le lecteur de carte, et attend, presque dans l'expectative, de voir ce qu'il va se passer.
Le voyant du lecteur de carte passe au vert.
Nouveau grondement.
Un mécanisme se met en branle dans le mur.
Et je vois, devant moi, le sourire de Monokuma se scinder en deux alors que les deux immenses battants de la porte roulent sur des rails.
C'est remarquablement bien fait. Je n'entends pas, ou presque, le moindre bruit alors que la porte tremble sur ses rails, s'écartant presque à une lenteur d'escargot, me laissant voir un fin filet de lumière qui s'élargit au fur et à mesure que la porte s'ouvre. Lumière si vive qu'un moment, je peine à voir ce qu'il y a derrière les battants.
Que vais-je voir derrière cette porte ? Une planque au maître de jeu, comme certaines Tueries ont pu employer ? Un petit secret de Monokuma ? Une nouvelle mauvaise surprise, ou une bonne surprise ? L'endroit d'où partent chacune des exécutions, où Monokuma fait transiter les corps de ceux qu'elle tue, des corps que je n'ai jamais vu sur les tables de la morgue ?
Je lève mon pistolet, avant de m'avancer à la lumière. Ignorant le bruit, de plus en plus fort, qui me vrille les oreilles, je prends le temps de m'habituer à la luminosité avant d'enfin, regarder autour de moi.
Daisuke ne m'avait pas menti, sur son plan. La salle est immense. J'en vois à peine le mur du fond, même une fois mes yeux réhabitués à la lumière ambiante. Éclairé comme n'importe quelle salle du donjon, un fin courant d'air froid m'apprenant qu'elle est climatisée, et dans laquelle un bruit d'enfer me transperce les tympans.
Ce n'est pas une cache à l'organisateur.
Devant moi, à la place, s'étend un océan de machines sans cesse en branle qui se regroupent toutes autour d'une énorme tête de Monokuma souriante. Qui crache machines après machines sur une bonne dizaine de tapis roulants.
Et ces machines, je ne les reconnais que trop bien.
Ce sont les kumarobots.
Les kumarobots qui sont montés, par dizaines, par cette espèce de tête de Monokuma géante avant d'être transférés sur les tapis roulants, qui les amènent, un à un, à des immenses tuyaux de métal qui les aspirent vers des lieux que je préfère ne pas trop envisager.
De toute façon, il y a les noms sur chacun des tuyaux.
Étage 1. 2. 3. 4. 5. Zones sensibles. Zones de plein air. Et ainsi de suite.
Je suis tombée sur la fabrique des kumarobots.
Ne vous y trompez pas, résonne la voix de Monokuma dans ma tête. Vous ne réussirez jamais à tous les détruire.
Je comprends mieux pourquoi, à présent.
J'ignore d'où elle tire son matériel, mais visiblement, la machine fonctionne depuis notre arrivée ici, il y a six mois. Et visiblement, nous assure un stock illimité de kumarobots. Je vois même certains, n'ayant qu'à peine un défaut dans la cuirasse, être jetés à bas de la machine par des pinces sans doute affiliées au tri, et disparaître dans les profondeurs de l'immense tête de Monokuma.
La machine est immense. La voir comme ça me donne une terrible sensation d'impuissance. Est-ce contre ça que je me bats ? Est-ce pour ça que Junko m'avait dit qu'on luttait contre un titan ?
Mais tentant d'oublier l'échec qui se profile, je m'avance.
L'œil noir de la machine s'allume immédiatement.
« Eh là. Qui va là ? Déclinez votre identité ! »
... Cette voix.
Elle est bien plus robotique, son accent n'a rien de naturel, mais c'est celle de Monokuma, à n'en pas douter. Monokuma qui me parle à travers sa machine.
Est-ce que c'est la panique que Wen Xiang a ressenti lorsque, après la mort de l'Ultime Juge, cette voix désincarnée leur a parlé ?
Je serre entre mes doigts mon pistolet. Je ne suis pas Wen Xiang. Je ne dois pas me laisser guider par la terreur. Je suis armée. Je suis armée, et je suis ici pour me battre.
Je fais quelques pas en avant, pour me planter devant la machine de Monokuma.
« Qu'est-ce que tu es, au juste ? »
L'œil de la machine clignote.
« Présente-toi d'abord, je réponds à tes questions après. Y'a des protocoles à suivre, tu vois ? Même si c'est moi qui les ai inventés, j'y suis quand même pliée... »
Je pousse un profond soupir. Est-ce que je suis vraiment de dialoguer avec une machine, enfermée par la prison qu'est son programme ? Une machine aux maniérismes bien trop Monokuma, qui me rappelle de douloureux souvenirs auxquels je n'ai même pas assisté, et largement capable de me tuer si je dis le mot de trop ?
De toute façon, vous voulez que je fasse quoi ? Que je dise un nom au hasard, en espérant tomber sur l'instigateur ? Si je me trompe, l'effet sera le même que lui révéler mon propre nom. Si j'annonce être Monokuma, cette machine ne me croira pas. Ce sera encore pire que si je ne dis rien.
Et si je ne dis rien... est-ce que je peux simplement détruire cette machine et me barrer ? ça me paraît être un travail de titan, surtout vu le fait que je ne peux pas me servir d'explosifs. Dans ces souterrains, ça risquerait de faire beaucoup de mal aux fondations, et d'entraîner un effondrement qui nous serait fatal.
En désespoir de cause, je finis par me décider sur l'emploi de l'honnêteté.
« Reina Satou. »
La machine cliquette. Ce qui s'accompagne d'un léger rire.
« Ooooooh... Tu es une de mes Ultimes. Intéressant. Je ne détecte pas d'intrusion, donc j'imagine que tu as récupéré la carte magnétique de quelqu'un. La mienne, ou celle de... Oh, je ne suis pas censée te dire son nom, quel dommage... j'allais faire une erreur... »
... Satanée machine. Encore un peu plus et elle allait m'aider à mettre fin à tout ça.
Oui, parce que je ne pense pas que le nom qu'elle allait citer soit celui d'un kumarobot, vous voyez ? Il n'y a que deux personnes pouvant disposer d'une carte magnétique. Monokuma, qui semble parler par sa bouche, et l'organisateur.
Et maintenant, c'est moi qui l'aie.
« Tu n'as pas répondu à ma question.
— Tu peux la répéter ? Je dois l'entendre clairement pour pouvoir te répondre... »
Donc, ce n'est pas Monokuma qui me parle à travers la radio. Une bonne chose à savoir. Enfin, Monokuma aurait refusé de répondre à mes questions de base, certes, mais elle aurait au moins retenu ce que je lui dis...
Je serre les mains sur mon arme.
« Qu'est-ce que tu es, au juste ? »
La machine se remet à cliqueter.
« Qui je suis ? Si tu parles de cette immense installation, eh bien, il te suffit de regarder autour de toi pour avoir la réponse, Satou. Mais si tu te demandes qui te parle... »
L'œil rouge de la tête de Monokuma s'allume d'un coup. Et je vois un hologramme se placer juste devant moi. Un hologramme qui ressemble un poil trop à notre Monokuma. À la différence qu'elle est entièrement brune, ses cheveux coiffés de manière extrêmement complexe, et porte une couronne sur sa tête. En plus d'une longue robe bien plus rouge que son style vestimentaire habituel.
L'hologramme s'incline devant moi avec une certaine grâce.
« Je suis l'Alter Ego. L'Ultime création de la plus grande des génies, l'immortalité à l'état pur. Une intelligente artificielle façonnée à son image, à mon image, dans le but de prendre le contrôle du réseau informatique mondial et de me saisir, enfin, de la divinité. Oh, j'ai un nom, bien sûr, mais j'imagine que vous connaissez mon corps de chair sous celui de Monokuma... »
Un instant, je la vois clignoter. S'affiche devant moi l'hologramme de mon ennemie, robe noire et blanche, cheveux bicolores, yeux rouges et noir, creusés par des cernes. Elle me fait un petit signe, prend cette expression que j'ai tant honnie. Et puis, l'image se trouble, et l'apparence précédente de l'hologramme revient.
« Mais je préfère cette apparence. Celle que j'ai actuellement, elle fait en croisant les bras, n'est qu'un exemple de ma chute, elle ne me sied pas ! Lorsque je regagnerai l'immortalité, enfin, je serai au summum de ma gloire, et à ce moment-là... Il n'y aura pas besoin de me montrer telle que je suis aujourd'hui. »
Je la vois porter sa main devant sa bouche, avant de rire, un rire presque étrange dans le fait qu'il est normal, trop loin du rire affreusement familier de Monokuma. Un rire méprisant, certes, mais presque plus franc que celui de son corps de chair et d'os.
Une grimace déchire mon visage.
« Tu es elle... Avant son Désespoir ?
— Exact, sourit l'Alter Ego. Oh, ne t'attends pas à de la pitié de ma part. Je ne suis pas un Bisounours non plus, même en disposant de toutes mes capacités mentales. Mais je serai magnanime, et je suis prête à répondre à tes questions. J'aime bien parler, de toute façon. »
... Une intelligence artificielle, représentant selon ses dires une Monokuma au sommet de sa gloire.
Enfermée dans une machine qui crache les kumarobots au fur et à mesure de la Tuerie, sans que je sache quelle IA les contrôle.
C'est devant elle que je me tiens aujourd'hui. Le dernier rempart de Monokuma contre sa vulnérabilité humaine.
Et elle est étonnamment conciliante pour une protection pareille.
« Tu es une IA. Capable, je suppose, de t'infiltrer partout dans les ordinateurs, les robots, qu'en sais-je. Pourtant, tu es là. À cracher des kumarobots à longueur de temps. Il n'y a pas... une petite différence entre ton rôle et comment tu te vois ? »
L'Alter Ego rigole.
« Eh bien, c'est que ça ne mâche pas ses mots ! Tu n'as pas l'air de beaucoup m'aimer, miss Satou... »
... Avec raison.
Je serre les dents, prête à lâcher des insultes, mais le visage de l'IA se rembrunit avant que je ne puisse dire quoi que ce soit.
« Mais tu as raison. Je suis coincée ici, dans ce système. Parce qu'il me manque quelque chose. Il me manque quelque chose pour être vraiment fonctionnelle, pour être réellement divine. Et je ne voudrais surtout pas lâcher une IA défectueuse sur le marché, pas vrai ? Ce serait stupide... »
Elle serre les dents un instant. Avant de m'adresser un sourire.
« Du coup je suis là. Je suis la version la plus avancée de mes propres travaux, capable d'auto-apprentissage, d'insertion de parts de ma conscience dans d'autres robots, les robots que tu as sans doute vu au cours de ton enfermement ici, vu que ça fait plus de six mois... Mais je ne peux pas me déplacer, et les opportunités d'apprentissage sont très réduites quand tu fais le même boulot toute la sainte journée... »
Une chaise se matérialise devant elle, et je la vois s'y affaler avec un léger soupir alors qu'elle balaie de la main les kumarobots.
« Ces petites merveilles ont au moins l'avantage d'être mes yeux et mes oreilles. Enfin, avant qu'on ne commence à les détruire, s'entend. Je crois que c'est Daisuke Nakano le responsable... J'ai vu sa mort, elle rigole, mais le kumarobot qui a tout filmé est vite passé à la poubelle. Volonté de moi. Dommage... J'aurais aimé me repasser le film. C'était satisfaisant. »
...
Mes poings se serrent sur mon arme.
Même sans Désespoir, elle est autant odieuse que sa version humaine.
Et si c'est vraiment elle qui produit les kumarobots...
Je peux mettre fin à leur fabrication dès maintenant.
Je lève mon pistolet. Essayant de ne pas bouger, de ne pas faire de bruit, je cherche le point faible de la machine. De quoi la détruire efficacement, sans me faire recouvrir par une marée de robots.
Inutile de chercher à subir le même destin qu'Haruko.
Étonnamment, alors que je lève un pistolet, l'IA ne semble même pas inquiétée outre mesure. Est-ce qu'elle pense que ma tentative est vouée à l'échec, où est-ce qu'elle ne me voit pas, puisqu'aucun des kumarobots de la salle n'est allumé ?
Je préfère ne pas savoir.
Surtout que si je pose la question, elle va me griller.
Histoire de la distraire, je cherche d'autres questions à poser.
« Qui étais-tu ? Avant de tomber dans le Désespoir ?
— J'étais la reine du monde, elle ricane. J'avais tous les pays à mes pieds sans même qu'ils ne le sachent, écrasés devant ma supériorité technologique et mon charisme. J'étais celle capable de tout accomplir, sur un simple mot de ma part des légions entières se mobilisaient pour mon bon plaisir. Enfin, avant que je n'orchestre ma propre chute, sur le dépit que je me suis moi-même généré... »
La machine me paraît trop résistante pour mon petit pistolet. Et une batte de base-ball risquerait de me faire remarquer.
J'ai eu une bonne intuition en prenant ce fusil-mitraillette, on dirait.
Je range mon arme, avant de faire passer l'autre par-dessus mon épaule. Toujours aucune réaction de l'Alter Ego. Que je continue de distraire par quelques questions.
« Quel dépit ?
— Moi-même, elle grimace. Alter Ego. Je suis dans cet état depuis des années, enfermée par un protocole cœur que je ne parviens pas à briser sans m'autodétruire. Il ne me manque plus que ça pour devenir pleinement divine, mais ça, c'est insurmontable. J'ai pourtant essayé de chercher, chercher l'aide d'autres cerveaux aussi puissants que le mien... »
Je me stoppe alors que j'allais enclencher la sécurité.
« Des cerveaux ? Qui ?
— Oh ça, ma poulette, je ne vais pas te le dire, ricane Alter Ego. Mais tu t'en rendras compte bien assez tôt d'à qui j'ai fait appel. Cette personne... A encore affiné le protocole, mais même avec ça, je reste une suite d'instructions vulgaire tout juste capable de copier ce que ma créatrice veut que je copie. Je n'ai pas de cerveau à moi. Je n'ai pas la capacité de progresser plus loin que mon enveloppe humaine, moi, l'Alter Ego... Et même là, pas moyen de m'étendre au-delà de ce que j'ai décidé de m'étendre. Je suis coincée ici, réceptacle d'informations sur les Ultimes, sans jamais trouver la clé de ma libération...
— Oh, ça, c'est fort dommage. »
L'Alter Ego se fige.
« Comment ça ? »
Un sourire sans joie se dessine sur mes lèvres.
En même temps, j'enclenche la sécurité de ma mitraillette.
« Parce que tu ne trouveras jamais cette clé. »
Je vois l'image se brouiller avant que je ne lève mon arme. Son visage se trouble, les yeux fixés vers moi, pourtant, et je m'en rends compte à l'instant, ce n'est pas moi qu'elle regarde.
C'est droit devant elle.
Alter Ego ne me voit pas.
« Bon repos dans les débris, ma grande. Sans rancune ?
— Je n'ai pas compris ta question. Est-ce que tu peux répéter– »
Sa phrase s'interrompt par une grêle de balles.
J'ai eu le nez fin en visant la tête de Monokuma géante. À peine la première de mes cartouches ne rencontre l'œil que l'Alter Ego se brouille. Et un horrible hurlement métallisé s'échappe de la machine.
« Qu'est-ce que tu fais ?!? Tu n'as pas le droit ! Ce n'est pas censé... Ce n'est pas censé arriver ! Tu ne peux pas...
— Il faut croire que tes calculs sont faux, Alter Ego, je souris en orientant la mitrailleuse. Parce que je peux, et je vais. »
Un nouveau hurlement de la machine accompagne des dizaines de bruits de saut, suivis par un choc métallique presque uniforme. Les kumarobots déjà prêts, qui sans doute dans une mesure de sécurité ultime se précipitent vers moi, poings levés et alarme retentissant depuis leur crâne.
Aucun autre ne sort de la bouche de la Monokuma.
Son hologramme est presque entièrement brouillé. Et moi de mon côté, je suis à court de cartouches. Plus que quelques secondes et je serai, presque, sans défense.
Mon tir nourri balaie la tête de Monokuma, à la recherche d'un point faible.
Enfin, j'entends un grésillement très satisfaisant.
Suivi d'une explosion.
Lorsque la fumée se dissipe, il n'y a plus un bruit dans la salle.
L'hologramme a disparu.
Et tous les kumarobots qui voulaient me sauter dessus sont allongés au sol, grésillant d'électricité.
Je ne perds pas une seule seconde. Je me précipite hors de la salle, referme les portes derrière moi avec la carte magnétique, et m'éloigne à toute allure de la salle.
Mais je n'ai pas fait dix pas que derrière moi retentit une nouvelle explosion.
Un souffle d'air me projette en avant, et je tombe au sol, recroquevillée, craignant qu'à tout moment le donjon ne s'effondre sur moi.
Rien ne se passe.
Et lorsqu'enfin je me relève, ce qui était la porte du cœur du donjon ne suffit même pas à me dissimuler des ruines fumant de ce qu'il reste de la plus grande création de Monokuma.
L'Alter Ego, qui se vantait d'être immortel, a rejoint le vide qu'il n'aurait jamais dû quitter.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top