Chapitre 5 (21) : Ticking down the last clock

Il n'y a plus rien.

Il n'y a plus rien.

Il n'y a plus que moi.

Plus que moi, genoux à terre, le pistolet lâche dans ma main. Les yeux perdus au loin, fixés sur un cadavre, sur tout ce qu'il reste de la femme que j'ai aimée.

Morte.

Le dernier sacrifice, arraché à sa vie dans d'atroces souffrances, arraché à moi sous mes yeux, alors que je n'ai été qu'impuissance.

Je n'ai même pas réussi à lui offrir une mort plus douce.

J'aurais pu, pourtant.

J'aurai pu.

Vingt mètres, ce n'est rien désormais. Je sais viser. Je sais tirer. L'atteindre en pleine tête, mettant fin à sa vie sur l'instant, mettant fin à ses souffrances abruptement mais rapidement, ne m'aurait pas été difficile.

Mais je n'ai pas su, je n'ai pas su, et maintenant elle se vide de son sang devant moi, mutilée, la gorge arrachée, un œil et des doigts en moins, sa chair et son sang se répartissant sur le sol, tout ça devant moi, tout ça parce que je n'ai même pas réussi à appuyer sur la détente.

Monokuma, enfant de catin, savait très bien que je savais tirer. Évidemment. Je me croyais discrète, à m'entraîner pendant ces trois derniers mois, mais évidemment qu'elle me regardait, évidemment qu'elle savait. Elle savait tout. Et cette décision de me mettre une arme en main n'avait rien de hasardeux.

Elle voulait me montrer que quoi que je fasse, quoi que je tente, ça ne sert à rien.

Je n'ai pas changé.

Je ne suis pas en mesure de mettre fin à ce jeu.

Je ne l'ai jamais été.

Je ne le serai jamais.

Et maintenant, j'ai sacrifié la personne que plus que tout, je voulais voir survivre à mes côtés.

Depuis combien de temps suis-je à genoux au sol, à fixer mes espoirs éclatés ?

Depuis combien de temps suis-je enfermée dans mes propres regrets ?

Ce n'est même pas le bruissement du tissu derrière moi, preuve macabre de la présence de mon exécutrice, qui me fait réagir. Même pas alors que sa main glisse le long de mon bras pour m'arracher des mains mon arme, guidée par un horrible rire haut perché.

« Je te récupère ça, ma jolie... Il ne faudrait pas que tu te tires dans le pied, pas vrai ? »

...

Il ne faudrait pas que je te tire dessus, surtout, pas vrai, Monokuma ?

Mais je n'en ai même pas eu la force.

Et maintenant, c'est trop tard.

Maintenant, elle a une arme en main, elle n'est même plus vulnérable, et elle sera toujours, toujours plus rapide que moi.

Je ne suis même pas en mesure de me venger.

Pathétique.

Putain, putain, putain de pathétique.

En six mois, je ne suis toujours pas capable d'accomplir quoi que ce soit.

En six mois, je n'ai toujours pas été en mesure de les sauver.

Haruko doit se sentir bien bête, de là où elle est.

Michi doit terriblement m'en vouloir d'être aussi faible.

Sora... A quel point Sora me prend en pitié ?

Est-ce qu'ils m'attendent, tous ?

Est-ce que je pourrai abandonner, encore faciliter la tâche des survivants, puisque de toute façon, je ne suis même pas capable de les aider ?

Le sol vibre sous moi. Je me sens portée, entraînée par la gravité, sur une plate-forme qui s'élève dans les airs, me cachant, petit à petit, la salle d'exécution. Toujours à genoux, je me penche, dans un geste désespéré. Je ne veux pas partir. Je veux rester avec elle. Quitte à ce que ce soit sa dernière demeure, autant que ce soit aussi la mienne. N'est-il pas plus que temps de disparaître ?

Mais je ne parviens pas à sauter.

Et mes prières ne sont pas écoutées.

Finit par se dérober à mes yeux la salle d'exécution. Et avec elle, la dernière vision de la femme que j'ai aimée.

Nous ne tardons pas à ressurgir dans la salle de procès, comme si tout allait bien, comme si j'avais juste fait un petit voyage dans les profondeurs des Enfers. Monokuma en bondit avec entrain, guillerette, avant de se diriger vers l'entrée et la déverrouiller. Elle sourit toujours. Combien de fois j'ai voulu le lui gommer ?

« Allez, sortez d'ici, sales gosses. Vous connaissez la chanson, pas vrai ? »

Mais même si tout le monde la connaît, personne ne veut l'écouter chanter. À la place, ils se précipitent tous, sans exception, vers moi. Leur visage n'est qu'un masque d'horreur identique, trois banshees sans exception.

« Eh Reina, Reina, réveille-toi ! Me lance Soma d'une voix presque trop forte, un sourire même pas honnête aux lèvres. C'est fini, okay ? C'est terminé...

- Maintenant qu'on est plus que quatre, personne ne peut mourir, nan ? renchérit Yuuki, d'une toute petite voix. Sinon, le jeu est terminé... On a trouvé le boss final... »

... Oui, c'est terminé.

Maintenant qu'on est plus que quatre, je n'ai plus que trois choix pour comprendre qui est le maître du jeu, l'instigateur, le responsable. Même si je voulais le tuer, ce serait terminé.

Mais à quel prix ?

A quel prix, alors que le corps mutilé de Michi gît plus bat dans ces souterrains du Désespoir, alors que je n'ai même pas la garantie que Monokuma va lui rendre les respects qu'elle mérite ?

De seize, on est passés à quatre.

Et l'un d'entre eux est le monstre qui m'a tout pris.

Une paire de bras s'enserre autour de mes épaules. Saki, qui a laissé tomber sa tablette pour me serrer contre elle. Ses yeux sont pleins de larmes. Puis, une autre. Soma, qui pleure franchement, incapable de me regarder dans les yeux, incapable de retenir ses sanglots. Puis, encore une autre. Yuuki, qui se glisse entre nous, les épaules secouées par ses propres pleurs, pleurent qui résonnent dans toute la salle de procès.

« Les morts ne reviennent pas, je l'entends marmonner entre deux hoquets. Les morts ne reviennent pas. »

Non. Les morts ne reviennent pas. Et ils ne reviendront jamais.

Peu importe à quel point je peux les voir, ou les entendre. Je ne les reverrai jamais me sourire, en chair et en os, étincelants de chaleur et de vie. Je ne pourrai jamais leur prendre la main, les aider à transporter quelque chose, leur parler de tout et de rien, me disputer, les étreindre, les embrasser.

Parce que les morts sont morts.

Il n'y a pas de résurrection.

Il n'y a que la revanche.

...

Je me relève, doucement, alors que les deux autres suivent mon mouvement. Ils pleurent tous, leur visage est figé. Comme le mien, sans doute. Sauf que moi, je n'arrive pas à pleurer.

Je n'arrive plus à pleurer.

Il n'y a même plus de tristesse.

Il n'y a plus rien.

C'est terminé.

Quoi que je fasse, désormais, c'est terminé.

Saki finit par se détacher de moi. En silence, elle récupère sa tablette, tombée au sol, avant de se diriger, tout doucement, vers la sortie de la salle de procès. Yuuki, après m'avoir jeté un regard hésitant, la suit. Il n'y reste, finalement, plus que Soma et moi.

Ce dernier me serre doucement la main.

« Écoute Reina... J'suis vraiment désolé. »

Pourquoi tu l'es ? Tu n'as rien fait. Il n'y a rien dont tu puisses être désolé. Ta pitié ne sert à rien. Elle ne comblera pas le vide. Elle ne me rendra pas Michi. Elle ne te rendra pas Daisuke. Elle ne rendra pas Junko à Yuuki. Elle ne nous rendra pas les victimes précédentes.

La main de Soma se resserre sur la mienne.

« Tu sais, si ça peut te mettre un peu de baume au cœur... Enfin je dis des conneries, pardon. Mais je pense que Monokuma voulait vraiment la tuer. Le fait qu'elle s'acharne autant sur elle... je veux dire, entre Ryo, Khalil, tout ça... Et puis même, l'indice qu'elle t'a donné, sa manière d'expédier le procès au moment où on a vu la vidéo ? Elle voulait clairement pas que Michi survive. Le fait qu'elle ait tenu aussi longtemps... Et même qu'elle ait tué, finalement, sans même s'en rendre compte, sans même avoir eu le désir de tuer... Elle était forte. Vraiment forte. »

... Et sa force a cédé à la toute fin.

Alors à quoi bon ?

À quoi bon ?

Même si Monokuma voulait vraiment la tuer, même si elle s'est comportée depuis le début de manière à l'achever, au final, ce qu'il s'est passé, c'est que Michi a quand même tué. La vidéo, cette damnée vidéo, en est une preuve. Vidéo dont le kumarobot responsable est toujours là, à mes côtés, prêt à me remontrer comment Michi est sortie de cette chambre, comment après avoir tué Daisuke, elle a tué Junko, sans faillir, sans fléchir, sans...

...

...

Sans... traces.... De... Lutte....

Ma main se referme d'un coup sec sur le poignet de Soma. Et dans ma tête, tellement de rouages se mettent en branle.

Michi a tué Junko, oui. C'est irréfutable.

Mais est-ce qu'elle a vraiment tué Daisuke ?

Selon les débris de robots que j'ai vu sur la vidéo, lorsque Michi est sortie de la chambre, Daisuke est passé par là, et probablement déjà mort. Donc si Michi l'a tué, avec son propre couteau qui plus est, elle l'avait tué avant d'étrangler Junko.

Mais sur la vidéo, ou même dans son apparence même, il n'y avait pas de traces de lutte.

Pas le moindre coup.

Et ça, c'est impossible.

Pas contre Daisuke.

Et même, si elle avait un couteau... Transe ou pas... Pourquoi ne pas l'avoir repris pour poignarder Junko, au lieu de l'étrangler, une méthode de meurtre bien plus longue ?

Pourquoi est-ce qu'elle n'avait pas une seule trace de sang ?

...

Il y a quelque chose d'effroyablement louche.

« Reina, grimace Soma en me serrant le poignet. Tu me fais mal. Tu peux relâcher ta prise ? »

Je le regarde. Il était avec moi à ce moment-là, pour l'un ou l'autre des meurtres son alibi est le plus solide. Est-ce que je lui dis ?

Est-ce que je lui demande ?

« Soma. Tu m'avais dit que le procès t'avait semblé expéditif ? »

Ma voix est affreusement éraillée. Je peine à parler, je me sens ridicule. Mais par chance, Soma ne se moque pas. Il se contente de grimacer.

« Ouais, un peu... Je veux dire, on a eu encore moins d'enquête qu'avant. Et Monokuma te sort un indice pareil sur le nombre de tueurs, et... t'as eu une vidéo ? Déjà, pour avoir la vidéo, faut le faire, quoi... »

...

Je m'en doutais.

Pardonne-moi, Michi, de ne pas avoir pu te sauver. Mais ta mort ne sera pas vaine. Je peux te le jurer.

Cette fois, je la tiens, ma clé.

Chapter 5 : Ticking down the last clock

END

Surviving students : 4

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Hop-là, fin du Chapitre 5 les enfants !

Comme vous l'aurez compris avec le TRÈS FAIBLE NOMBRE de gens restants, le prochain Chapitre sera le dernier, et se déroulera d'une manière un peu particulière.

Du coup, il n'y aura pas de votes pour quoi que ce soit. D'ailleurs, à l'heure ou je vous parle, le Chapitre est terminé, prêt à la publication, qui commencera lundi prochain !

Vous aurez un Chapitre par jour, puis, dimanche 25 septembre (vous avez vu comment que j'ai bien calculé hein), je sortirai l'intégralité du procès d'un seul coup.

Ca va vous faire de la lecture, mais le nom de mon MasterMind et les dernières grosses révélations de lore autour de cette Tuerie devraient en valoir la peine :D

Ceux qui sont sur le Discord du NCU pourront, le 25 septembre, rejoindre une petite session de lecture en live pour que je puisse voir vos réactions en direct (Corneille, l'auteure de l'Enfer Aquatique et Sacrement Sépulcral, avait fait la même pour, justement, l'Enfer Aquatique et disons qu'elle s'était bien marrée). Je referai pas de seconde session, parce que bon, je manque de temps, et il est très probable que j'ai repris l'écriture de The Art of Creating Hope dans le temps donné.

Si vous voulez le Discord du NCU, je peux vous le donner, mais pensez à me prévenir avant de rejoindre que je puisse expliquer qui vous êtes et d'où vous venez-

Du coup en attendant le Monokuma Theater de demain (que j'espère réussir à poster, puisque je vais être en WEI ce jour-là, sinon il arrivera lundi en même temps que ce bon vieux chapitre six), on va se faire un petit résumé des scores de cette Tuerie.

Déjà, en ce qui concerne les FTE, les résultats des votes se sont réparties comme tels :

Akihito : 1/5

Daisuke : 5/5

Haruko : 5/5

Hina : 2/5

Junko : 5/5

Kichiro : 0/5

Michi : 5/5

Ryo : 0/5

Saki : 4/5

Shizuka : 4/5

Shô : 1/5

Soma : 4/5

Sora : 5/5

Taichi : 2/5

Yuuki : 5/5

Vous avez eu des bonus FTE grâce aux proches de Shizuka (ce qui vous a permis de débloquer son lore) et Taichi (Evdokia vous a raconté le contenu de son quatrième FTE).

Vous avez pu avoir les points de lore des FTE d'Haruko (elle vous aurait de toute façon passé sa clé USB même avec un nombre faible de FTE), de Daisuke, de Junko et, par l'intermédiaire de Kazumi, de Shizuka. Vous avez raté le lore de Kichiro (qui de toute façon n'était pas bien gros, c'était une introduction au Projet Renaissance) et d'Akihito, qui vous en a de toute façon dit pas mal pendant son premier FTE en guise de bonus.

En faisant un sondage de popularité auprès de mes personnages, j'ai pu découvrir que les plus appréciés (dans ceux qui avaient répondu) étaient Reina, Haruko, Michi et Daisuke. Sora est également assez haut dans le classement, de même que ma Monokuma, ce qui a été on va pas se mentir une grosse surprise-

Par contre, Kichiro unanimement détesté, ça, je m'y attendais un peu. Le pauvre, il a fait une Eugène- Littéralement-

Niveau stats, on a :

Plus des deux tiers de mes lecteurs ont entre 18 et 25 ans. Le tiers suivant concentre surtout des lecteurs entre 13 et 18. J'ai été surprise de voir au moins un.e lecteurice de plus de 25 ans par contre- Qui donc se cache dans mes lectures fantômes ? :,)

J'ai toujours deux tiers de mes lecteurs qui sont des femmes. Le reste, c'est beaucoup de genres indéfinis ou secrets et très peu d'hommes.

Tous mes lecteurs sont français ou belges. Ça tombe bien pour les treize pour cent de belges, mon deuxième protag l'est-

Mon chapitre le plus voté est... Mon préambule. Le plus commenté, lui, est ma 18e partie, ce qui correspond si je ne m'abuse au début de mon Chapitre 2.

Et je crois que je vais m'arrêter là, c'était la distraction de Louna pour oublier que j'ai envie de me jeter par la fenêtre suite à ce chapitre (c'est une blague.... unless ?)

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