Chapitre 4
Le vendredi soir, après avoir passé une très belle heure à tenter de restituer le cours de l'avant-veille dans une synthèse parfaitement construite, Octave et Adrien se retrouvèrent chez ce dernier. Octave avait prévenu sa mère qu'il rentrerait bien après le dîner. Il ne voulait pas avoir affaire avec elle. Le matin, déjà, il avait pris le bus plus tôt que d'habitude pour ne pas avoir à lui parler. Il était très curieux au sujet de sa sœur, mais quitte à avoir une longue conversation avec ses parents, il préférait qu'ils soient présents en même temps plutôt que devoir entendre leurs excuses plusieurs fois.
« Life isn't always what you think it'd be
Turn your head for one second and the tables turn »
Ainsi, il se trouvait allongé sur le lit de son meilleur ami, lançant et rattrapant mécaniquement un ballon de rugby, tandis qu'Adrien, assis sur sa chaise de bureau, tournait sur lui-même, regardant le plafond sans vraiment le voir.
_ Tu connais son nom, finalement ?
_ Non, même pas.
_ Tu n'as pas envie de le savoir ?
_ Si, bien sûr.
_ Alors pourquoi tu n'as pas demandé à ta mère ?
Octave arrêta de lancer le ballon pour réfléchir, puis reprit l'exercice.
_ Je n'en ai pas vraiment eu l'occasion. J'ai attendu dix-huit ans, je peux bien attendre encore une journée de plus.
_ Je suppose que tu vas vouloir entrer en contact avec elle ?
_ Evidemment.
_ Et comment tu vas t'y prendre ? Tu m'as dit que tes parents ne savaient même pas où elle se trouvait.
_ Je ne sais pas. Je n'y ai pas réfléchi. J'attends de voir ce que donne la discussion de demain.
_ Tu ne voudrais pas prendre un peu d'avance ? Non, parce que moi je peux t'aider à entreprendre les recherches.
_ Merci, mec, mais je pense que c'est quelque chose que je dois régler avec mes parents.
_ J'ai un cousin qui travaille comme assistant au Monde, il pourrait peut-être essayer de nous aider, tu imagines ?
Octave se redressa sur le lit et regarda son ami.
_ Je n'ai pas envie de déballer ma vie à des milliers de lecteurs.
Adrien arrêta de faire tourner sa chaise.
_ Et les réseaux sociaux ? Tu pourrais poster un message en public, ça va très vite ces choses-là ! Ou alors...
Octave pencha la tête sur le côté, qu'est-ce que son ami allait encore inventer ?
Adrien baissa la voix sur le ton de la confidence :
_ Ou alors tu pourrais faire les deux et là...
De ses mains, il mima une explosion.
_ Deux fois plus de chances de retrouver ta sœur, ou plutôt que ta sœur vienne à toi.
Octave n'était pas convaincu du résultat, mais il n'avait pas envie d'y réfléchir plus que cela et il acquiesça :
_ Oui, ça peut marcher.
Adrien eu un geste de victoire tout en s'écriant :
_ Génial !
*
Son père était appuyé contre un des meubles de la cuisine, sa mère à ses côtés. Octave, lui, avait préféré s'asseoir, trop nerveux pour tenir sur ses jambes. Allait-il réellement apprendre de nouvelles informations au sujet de sa sœur ? Son père prit l'initiative de la parole :
_ J'ai cru comprendre que ta mère t'avait déjà raconté l'histoire...
Il s'interrompit. Octave les regarda tour à tour, incrédule. Voyant que la suite ne venait pas, il demanda :
_ Alors quoi ? C'est tout ? J'apprends que j'ai une sœur et on reprend notre quotidien comme si rien ne s'était passé ?
Le silence et l'embarras de ses parents l'exaspéraient au plus haut point.
_ Elle est partie juste parce que tu ne t'entendais pas avec elle, Papa ? Pourquoi ne serait-elle jamais revenue ?
_ Ta sœur avait un caractère bien trempé, quand elle voulait quelque chose, elle trouvait presque toujours un moyen de l'obtenir. Quelle que soit la raison de son départ, si elle avait voulu revenir ou nous contacter, elle l'aurait fait.
_ Attends, elle ne vous a vraiment donné aucune nouvelle en dix-neuf ans ? Aucune ?
Son père secoua la tête, sa mère baissa les yeux.
_ Et vous ? Vous ne l'avez pas cherchée ?
Les yeux de sa mère flamboyèrent :
_ Bien sûr que si, elle était notre fille, tout de même ! Nous avons appelé toute la famille, ses amis, les voisins... Personne ne savait où elle était partie.
_ Elle avait même coupé les ponts avec ses amis ?
Quel genre de sœur avait-il ?
_ Elle était beaucoup entourée, mais elle ne nous a jamais parlé de personnes qui auraient été plus importantes à ses yeux...
Octave ne comprenait pas :
_ En fait, elle n'est peut-être même plus vivante... comment auriez-vous pu être au courant ?
Son père serra les poings.
_ Ne dis pas de telles choses, Octave.
_ Désolé...
Un silence suivit ces mots. Son père balbutia enfin :
_ Si tu n'as plus de questions, tu peux retourner travailler.
_ Ouais. Ouais, je vais faire ça.
Sans rien dire, il suivit du regard ses parents se diriger vers le salon, main dans la main, mais les interpella avant qu'ils ne sortent totalement de la cuisine :
_ Je voudrais la trouver.
Ses parents se retournèrent vers lui, l'air interrogateur.
_ Comment veux-tu t'y prendre ? Nous avons déjà fait tout ce qui était en notre pouvoir.
_ Peut-être pas tout, non.
Et voilà, il ne pouvait s'empêcher de leur reprocher de ne pas être allé au bout de la procédure de recherche.
_ J'ai juste besoin de votre autorisation pour mener mes recherches.
_ Tu te sentirais capable de la trouver ? implora sa mère.
_ J'aimerais, en tout cas. Alors ? Est-ce que vous me faites confiance ?
Son père soupira.
_ Ne prends pas de risques inconsidérés, par pitié, dit-il simplement.
Octave hocha la tête, les mâchoires serrées. Alors qu'ils avaient le dos tourné, il interpella une fois de plus ses parents.
_ Comment s'appelle-t-elle ?
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I'm so sorry de Imagine Dragons
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