Chapitre 21

_ Adrien ! héla Octave.

L'interpelé le salua de loin et effectua un petit slalom entre les tables du café avant de s'asseoir en face de son meilleur ami.

Le café était presque bondé, mais cela n'altérait en rien l'ambiance joyeuse qui régnait comme d'habitude. Le personnel était jeune, des enceintes accrochées aux murs diffusaient de la musique actuelle en bruit de fond et les conversations allaient bon train. D'habitude, la clientèle était diversifiée, mais ce matin-là, elle était plutôt composée d'étudiants et de salariés qui ne faisaient que retarder le moment où ils devraient se rendre sur leur lieu de travail.

A peine son sac déposé à ses pieds, Adrien désigna les clients :

_ Qu'est-ce qu'ils font là, tous ces gens ? Ils sont nombreux.

Octave arqua un sourcil, amusé.

_ Ils font comme toi et moi, ils prennent leur petit-déjeuner.

_ Un lundi matin à neuf heures ? Ils ne devraient pas être en train de travailler ? rétorqua Adrien, dubitatif.

_ Et toi, alors ? Qu'est-ce que tu fais ici un lundi à neuf heures ? Tu n'es pas à la fac ? rigola Octave.

Feignant d'être sur le qui-vive, Adrien s'enfonça dans sa chaise :

_ Je te retourne la question, c'est toi qui m'a dit de venir ici.

_ On a cours à dix heures et demie.

_ Oui, je sais et alors ?

_ Alors, on a le temps de prendre un petit-déjeuner ici.

_ A chaque fois qu'on vient dans ce café, c'est pour les grandes occasions...

_ Oui, comme les fins de partiels...

_ Où la fois où je t'ai annoncé ma rupture avec Natasha.

_ Nathalie.

_ C'est pareil.

_ Quand même, c'est incroyable que tu aies attaché aussi peu d'importance à cette relation, embraya Octave, un sourire en coin.

Il savait qu'il abordait un sujet fiché « à éviter », mais il adorait voir Adrien trouver des excuses farfelues pour se justifier.

_ On en a déjà discuté pendant des semaines, mon vieux, tu ne vas tout de même pas remettre ça sur le tapis maintenant.

Octave gloussa et n'ajouta rien.

_ Tu as déjà commandé ? demanda Adrien pour changer de sujet.

_ Deux cappuccinos, deux croissants, un muffin chocolat supplément amandes et un maxi-cookie, énuméra Octave.

_ Super et pour toi ? renchérit Adrien.

Octave n'eut que le temps de lever les yeux au ciel devant l'humour de son ami, car un serveur surgit de nulle part pour poser leur commande sur leur table. Ils réglèrent immédiatement l'addition et commencèrent à manger.

_ Tu vas finir par m'expliquer ce qu'on fait ici ? reprit Adrien entre deux bouchées de croissant.

_ J'ai reçu des nouvelles d'Avril, annonça Octave.

Il était inutile de tourner autour du pot plus longtemps, déjà que la veille au soir il s'était retenu de courir chez Adrien lui parler de ce qu'il avait découvert à la librairie...

_ Entre deux voyages ? C'est peu commun. Qu'est-ce qu'elle racontait ? Rien de grave, j'espère.

_ Au contraire, c'est très positif. J'ai trouvé un mot caché dans la couverture d'un livre. C'est une infirmière qui me l'a apporté.

_ Dans un livre ? C'est inventif, dis-moi ! Est-ce que l'infirmière et Avril se connaissent ?

_ Je n'ai pas pu lui demander, elle est partie avant que je trouve le papier. Je suis sorti dans la rue pour essayer de voir si elle était toujours dans le coin, mais il n'y avait aucune trace d'elle aux alentours.

_ Est-ce qu'elle aurait pu être Avril elle-même ?

_ Impossible, je l'aurais reconnue.

_ Oui, enfin tu ne l'as jamais vue.

A ces mots, Octave faillit lâcher son cookie.

_ J'ai des photos d'elle. Et puis, on est de la même famille, on se ressemble.

Adrien se contenta de cette réponse et but quelques gorgées de son cappuccino. Il n'eut pas à relancer la conversation car Octave enchaîna de lui-même, les yeux pétillants :

_ Dans son mot, Avril écrivait qu'elle avait beaucoup réfléchi et qu'elle en avait marre d'attendre. Elle compte reprendre contact avec mes parents.

Face à cette nouvelle, Adrien écarquilla les yeux et reposa son gobelet qu'il portait à ses lèvres au même instant.

_ Eh bien, si je m'attendais à ça... C'est ce qu'on appelle une grande nouvelle ! C'est fantastique !

_ C'est Eliott qui l'a poussée à prendre cette décision.

_ Eliott, c'est son mari, je ne me trompe pas ? demanda Adrien, pris d'un doute.

_ Exactement, confirma Octave.

_ Il a l'air d'être un mec bien.

_ Oui, j'ai hâte de le rencontrer. Il a une influence très positive sur Avril.

Un court silence s'installa, le temps de grignoter encore un peu et une nouvelle question fusa :

_ Tu en as parlé à tes parents ?

_ Avril m'a demandé de ne rien dire, pour le moment. Elle pense que c'est à elle de gérer la situation, que c'est un problème qui ne me concerne pas.

_ Elle n'a pas tort, dans un sens.

_ Je n'aime pas cacher des informations aussi importantes aux parents.

Adrien sourit et le rassura :

_ Bientôt, on trouvera Avril. Et il n'existera plus aucun secret entre vous...

Il prit encore un peu de café et rajouta malicieusement :

_ Sauf peut-être celui sur l'existence de ta dernière note en droit des obligations...

Octave prit un air choqué puis parut se résigner :

_ De toute façon, ils finiront bien par recevoir un bulletin de notes à la fin du trimestre.

Les garçons rigolèrent et finirent leur boissonavant de couler un regard sur leur montre. Le temps filait à une vitesseinimaginable et ce fut avec une pointe de regret qu'ils quittèrent l'ambiancedélicieusement légère du café pour se diriger d'un pas tranquille vers celle, bienplus studieuse, de la faculté de droit.

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