Prologue
2055. Lerici, maison de Katerina.
Mon esprit, encore tourmenté par ce que je venais de vivre durant ces dernières années, s'apaisait enfin. Je regardais à travers la fenêtre de ma petite chambre, le soleil se coucher sur la ville de Lerici. Cette dernière avait beaucoup changé à travers les siècles.
J'y ai vécu de merveilleux moments : des souvenirs précieux ont marqué à jamais ma mémoire. Cependant, la vie n'a pas été si belle et douce. De nombreuses aventures me sont arrivées dans ce lieu si magique. Mon cœur a souffert, tout comme mon âme. Partagée entre amour, raison, passion, tristesse et désespoir.
Je pris une profonde respiration. Le faisceau lumineux du phare me parut soudainement si captivant que je n'arrivais plus à détacher mes yeux de son parcours dans le ciel. Le reflet de la lumière sur l'eau, les nuages qui s'élevaient de plus en plus tandis que le soleil disparaissait peu à peu sous l'eau, ce mélange de couleurs unique, cette alchimie naturelle entre les êtres vivants et leur environnement...
Mais que cette vue est belle, pensai-je, elle va tant me manquer...
J'ai ainsi vécu ma vie selon deux époques différentes, découvrant un nombre incalculable de personnes qui m'ont accompagnée tout le long. Je savais qu'il était temps pour moi d'abandonner certaines d'entre elles et de rejoindre les autres : celles que j'avais perdu en chemin. Celles qui restent continueront de tracer leur voie pour découvrir leur destinée comme je l'ai fait.
Je regardai désormais ce corps chaleureux collé au mien. Je passai alors une main fragile et ridée au dessus de sa tête et caressai du bout de mes doigts fins ses longs cheveux bruns. Légèrement endormie, elle se réveilla doucement en ouvrant délicatement ses paupières, exposant ainsi au monde ses beaux yeux bleus.
J'admirais ce regard. Ce doux regard qui me rappelait chaque jour l'homme que j'ai aimé plus que de raison. Elle avait ses yeux.
Son visage s'illumina alors sous l'affection portée par mes gestes maternels. Elle sourit. Son sourire étincelant transforma son visage. Suite à l'étirement de ses lèvres, deux fossettes se creusèrent sur ses joues relevant alors ses pommettes, ce qui accentua l'apparition de rides naissantes au bout de ses yeux. Elle avait ainsi le regard de son père et le sourire de sa mère.
Elle releva sa tête et se positionna face à moi. Je posai ma main gauche sur sa joue droite. Je caressai son visage doucement. Sa peau était aussi douce que lorsqu'elle était bébé. Une larme coula aussitôt le long de sa joue et je l'essuyai du revers de ma main. Il ne fallait pas qu'elle pleure. J'étais enfin prête. Prête à traverser ce tunnel obscur pour rejoindre un endroit rempli de lumière, d'amour et de paix. Plus que jamais, prête à terminer cette balade faite de détours, de raccourcis, de découvertes et de pertes.
Je la regardais intensément pour me souvenir de chaque parcelle de son visage pétillant, qui à mes yeux touchait la perfection, et, pour me remémorer son magnifique corps de jeune femme. La petite fille que j'avais connu avait tant grandi ! Je ne voulais pas oublier ces petits détails qui la rendaient unique, comme sa tâche de naissance sur son poignet droit découvert par sa manche de pull relevée. Ses tâches de rousseurs sous ses yeux qui l'embellissaient. Cette petite cicatrice sur son front au dessus de son œil droit, due à une chute à vélo lorsqu'elle avait quatre ans. Toutes ces petites choses me rappelaient de fabuleux souvenirs.
J'ai tant profité de tous ces instants merveilleux. Et même si c'est très audacieux de penser cela, je ne regrette rien. Chaque moment de ma vie, chaque personne que j'ai rencontrée, chaque paysage que j'ai exploré, chaque action que j'ai entreprise, chaque choix irréfléchi que j'ai fait, chaque éclair au chocolat que j'ai dévoré... Toutes ces choses, bonnes ou mauvaises, nous rappellent chaque jour que nous vivons, c'est-à-dire nous pleurons, rions, aimons jusqu'à ce que la mort nous enlève.
Je réfléchissais pendant quelques secondes à ce que je pouvais lui dire. Il fallait que je pense longuement car après avoir passé la journée à lui raconter toutes mes péripéties, je devais désormais lui faire mes adieux.
Ayant capté son attention, j'entrouvris mes lèvres et dès lors, les mots sortirent tout seuls malgré le fait que ma voix devenait de plus en plus faible.
— Tu sais, l'amour, une fois qu'il a germé, donne des racines qui ne cessent de croître. Je t'aime, ma petite Anna. Et je ne cesserai jamais de t'aimer ma fille. Je m'en vais rejoindre le ciel, pour ajouter une étoile au dessus de la mer, alors, ne t'inquiète pas. Je ne veux pas que tu pleures, on se retrouvera, je t'attendrai. Je ne serai pas loin, juste de l'autre côté du chemin. Tout ira bien, mon coeur, je te promets...
Anna contre moi, me serrant très fort, j'étais sereine et épanouie. Sentant alors mes paupières s'alourdir, mes yeux se fermer doucement, je me mis à rêver profondément.
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