Chapitre 7

  Deux semaines après avoir rempli la mission confiée par M. le Maire, une lettre était arrivée en recommandé vers la fin d'après-midi :

Chère Y/N

Je ne saurais assez vous remercier, vous et votre équipe, pour les services héroïques rendus à la ville.

Grâce à vous, les coupables sont désormais entre les mains de la justice. La réputation de l'usine « Bolla di Caesar » est maintenant restaurée et sa réhabilitation comme centre économique ne saurait tarder. Sachez également que parmi les enfants que vous avez sauvé, certains ont eu la joie de retrouver leurs parents. Pour les autres, la municipalité a pour projet d'organiser un gala de charité afin de lever des fonds qui permettront l'ouverture d'un orphelinat.

Nous vous invitons donc chaleureusement à notre grande soirée de bienfaisance et nous espérons que vous accepterez d'être la marraine de cette événement.

Avec toute notre amitié et notre reconnaissance.

Bien à vous,

M. Roberto Pipo Wagono, Maire de la ville.

C'était Tio qui en avait fait la lecture à la table du goûter, pendant que, perchée sur un petit escabeau, tu dépoussiérais les placards au dessus du plan de travail.

En entendant cette formidable nouvelle, tu te laissas distraire un instant de ton nettoyage de printemps. Excitée comme une puce, tu te retournas avec tellement d'énergie qu'il s'en fallut de peu que tu ne tombes de ton perchoir.

Une véritable chance que Norio, qui passait par là, t'ait rattrapé au vol. À se demander si sa vocation n'était pas de couvrir tes arrières à tout instant.

- Hop-là ! Ce serait quand même dommage que tu ailles au gala avec un plâtre, t'avait-il souri en te soulevant lestement entre ses bras.

- Ah Norio, qu'est-ce que je ferais sans toi ? te pâmas-tu d'une voix caricaturale, passant une main sur ton front avant d'exploser de rire.

Ne partageant pas vraiment ton hilarité, sans un mot, Leone avait discrètement quitté la table pour regagner sa chambre.

Aux yeux de tous, il faisait maintenant partie de la « famille ». Mais il lui arrivait souvent de s'isoler. Et avec le temps, vous n'y prêtiez plus vraiment attention, habitués à son caractère taciturne et à son goût pour la solitude.

Vous ignoriez alors, qu'une fois seul dans les différentes pièces de la villa, il en profitait parfois pour rembobiner le temps. Poussé par la jalousie et le besoin de mieux cerner ta relation avec Norio, il partait en quête des moindres moments que vous aviez partagés.

Sans doute se faisait-il autant de mal qu'il cherchait à se rassurer.

Lui-même désapprouvait son comportement. Rien ne lui donnait le droit de s'immiscer ainsi dans l'intimité de vos instants de complicité. Mais c'était plus fort que lui.

Depuis qu'il t'avait embrassé pendant la mission, il avait bien du admettre qu'il te désirait.

Et encore, le mot était faible.

Il était dépossédé de tout contrôle sur ses sentiments. Malgré lui, tu étais devenue le centre névralgique de ses considérations et de ses pensées. Et il ne savait pas comment gérer ses envies contradictoires.

Il te voulait, rien que pour lui. Mais il se refusait à agir en conséquence, à s'accorder le droit te séduire, ou même de te laisser deviner toute l'attraction qu'il avait pour toi.

Te voir aussi proche de Norio était une véritable torture, mais il arrivait à se persuader qu'il était l'homme qu'il te fallait : stable, attentionné, toujours aimable et souriant. En somme, son exact opposé.

Plusieurs fois, il avait songé à partir, sans jamais trouver la résolution de te laisser derrière lui.

Une fois dans sa chambre, son humeur maussade avait fait ressurgir les démons du passé. En passant devant le miroir, il se fit face à lui même, à ses ténèbres. Ses vêtements noirs, ses lèvres couleurs lie de vin, et même l'ombre de son regard : tout s'était assombris en lui depuis l'époque où il œuvrait pour les forces de l'ordre. Seuls ses longs cheveux, pâles comme la lune, conservaient l'empreinte immaculée d'une lueur lointaine et astrale.

Adressant un sourire brisé à son propre reflet, il se saisit des ciseaux qui traînaient sur la table de nuit. À pleine poignée, il regroupa la masse de ses cheveux, prêt à en faire offrande à la pair de lames aiguisées, quand soudain :

- Leone ? Je peux entrer ?

Ta voix résonna derrière la porte.

Dans un soupir, il reposa les ciseaux et alla t'ouvrir.

- On part dans deux heures, l'informas-tu, visiblement impatiente. Je viens t'apporter ta chemise. Elle est toute propre !

Il se saisit du vêtement, et alors qu'il allait refermer la porte, tu t'infiltras dans la pièce.

- T'as les cheveux tout emmêlés. Assied- toi, tu ne peux pas aller au gala avec cette coupe ! t'exclamas-tu en lui présentant le siège devant la table de chevet.

Leone n'eut pas la volonté de refuser. Il prit place, et de nouveau devant le miroir, il t'observa attentivement.

Tes petits doigts de fée se glissèrent dans la masse désordonnée de sa chevelure argent et il réprima un frisson de bien-être.

- Tu as les cheveux si doux et brillants. Je suis jalouse, fis-tu remarquer en redonnant à sa coiffure un aspect lisse.

« Et toi tu es si adorable que je risque bien de te gober toute crue ! » songea Abbacchio alors que tu commençais à lui faire de petites tresses pour t'amuser.

C'était impressionnant comme ta simple présence, toujours rayonnante et pleine de vie, suffisait à l'apaiser instantanément. Avoir toute ton attention, sentir le contact de tes doigts lui chatouiller le cuir chevelu commençait à le griser...

Il aurait souhaité s'abandonner pleinement à ta douceur, à l'innocence de tes gestes, mais c'était déjà plus qu'il ne s'autorisait à recevoir de toi.

- Je ne suis pas une poupée, grommela-t-il en t'attrapant soudain le poignet. Je vais finir de me préparer tout seul.

- Oh pardon, je me suis un peu emballée. Moi aussi, il faut que j'aille me faire belle ! rigolas-tu en libérant la tresse d'entre tes doigts.

« Comme si tu en avais besoin, tu es déjà la fille la plus jolie que je connaisse » songea Leone avec amertume en t'observant quitter sa chambre.

***

Rectification, tu n'étais pas juste « jolie », tu étais de loin la créature la plus désirable sur laquelle il ait jamais posé les yeux, se fit-il la remarque quand il te vit le soir, toute pomponnée et apprêtée pour l'occasion.

Accoudé au bar dans sa chemise noire, les cheveux attachés en catogan, Abbacchio ne parvenait pas à te quitter du regard.

Les violons entamaient une vive mélodie, et toi, tu dansais, le pas léger, faisant briller ta robe de tulle rouge brodée de sequin sous le lustre de cristal. Reliée à la main de Norio, tu virevoltais, penchant la tête en arrière, dévoilant ta gorge gracile d'où s'échappait des éclats de rire plus enchanteurs encore que la musique.

D'un seul trait, Leone avala sa sixième coupe. Il préférait le vin rouge, qu'il tenait plutôt bien, mais ce soir il avait du se rabattre sur un champagne millésimé, dont les bulles commençaient tout juste à le prendre en traître.

Après ta danse, tu sautillas gaiement jusqu'à lui. Les joues roses, tu te plantas juste sous son nez. Il pouvait sentir d'ici ton parfum exquis, ainsi que les odeurs sucrées de fruits et de rhum arrangé qui s'exhalait de ton souffle rapide.

- Viens avec moi sur la piste Leone, lui réclamas-tu, le visage fendu d'un sourire espiègle.

- Non, très peu pour moi. Je ne sais pas danser, maugréa-t-il d'un air contrarié, presque gêné.

À peine eut-il le temps de voir une déception naissante poindre sur ton visage, qu'un élégant jeune homme se détacha du bar.

- Si vous me permettez, mademoiselle, moi je suis prêt à vous faire danser toute la nuit, te dit-il en t'offrant sa main gantée de parfait gentleman.

La demande était si classe et polie que tu n'osas pas refuser, et non sans adresser un petit regard déçu à Abbacchio, tu laissas l'homme te conduire sur la piste de damiers noirs et blancs.

Délaissant les airs de tarentelle, l'orchestre se mit à jouer une valse endiablée. Ton cavalier n'était pas seulement élégant, c'était aussi un excellent danseur. Ses pas rapides te guidaient à merveille, et sa main assurée te faisait tournoyer comme une toupie euphorique entre ses bras.

Le contenu d'un septième verre se déversa dans la gorge serrée de Léone.

Crispé par ce qu'il voyait, il reposa brusquement sa flûte sur le comptoir, avec tant de frustration, que le cristal se fendit en deux.

La fin de la danse approchant, tu commençais à avoir le tournis, tout autour de toi n'était qu'un kaléidoscope de couleur vives et chatoyantes. Et quand la dernière note retentit, ton cavalier te bascula en arrière. Encore étourdie, tu reportas ton attention sur son visage, pour voir qu'il entamait, lentement mais sûrement, le chemin de tes lèvres pantelantes.

Alors que le baiser te semblait inévitable, ton parfait danseur alla soudain valser, sans toi, cinq pas plus loin, manquant de s'effondrer contre les desserts du buffet. Quant à toi, tu ne tardas pas à remarquer que le bras qui te soutenait désormais par la taille, était celui de Leone.

Tu eus à peine le temps d'apercevoir l'expression froide qui contrastait avec la rougeur de ses pommettes saillantes, qu'il te mis sur pieds, encercla ton poignet et te tira à sa suite hors de la piste.

Chaussée de petits talons, en proie à l'incompréhension la plus totale, tu avais un mal fou à suivre ses longues enjambées qui vous menaient par delà les grandes portes fenêtres de la salle de bal.

- Leone, moins vite ! Qu'est-ce qu'il te prend ?

Traversant la terrasse, il t'ignora, et comme tu trébuchais, il te souleva lestement pour te porter contre son torse ; accélérant sa course dans l'herbe humide des jardins, se dirigeant vers ce qui ressemblait à la lisière d'une sombre forêt.

Ce qu'il lui prenait ? Il ne le savait pas vraiment lui même, seulement guidé par ce besoin urgent de t'emmener au plus loin des lumières aveuglantes de la fête, loin des danses et des regards concupiscents des autres hommes.

Comme Hadès avait enlevé Perséphone, il voulait t'emporter avec lui, t'envelopper de ses bras et te garder prisonnière de ses ténèbres.

Quand il vous fit pénétrer dans le bois, tu te trouvas à nouveau sur tes pieds, brusquement plaquée contre un tronc d'arbre, sa large main protégeant l'arrière de ton crâne et son corps comme moulé contre le tien.

Une vague de plaisir s'éleva au creux de ton ventre et tu ne cherchas pas à le repousser quand il se recroquevilla pour happer brusquement tes lèvres, son souffle brûlant s'insinuant en toi alors qu'il te dévorait.

La danse qu'il t'avait refusé, c'était maintenant sa langue qui la menait avec passion, entraînant la tienne dans un collé-serré où se mélangeaient les fruits et le champagne, le rhum et la vigne.

Avide de ses baisers, tu croisas tes mains autour de son cou, t'abandonnant sur la pointe des pieds à la soif rigoureuse de ses lèvres.

Tu ne sus comment, mais ce geste, ou plutôt l'ardeur de Leone, t'avait emporté au sol, sur un parterre de mousse dans un froissement de tulle.

La fraîcheur nocturne ne tarda pas à transir tes jambes alors qu'il soulevait tes jupons, remplaçant bien vite la sensation de froid par l'intense chaleur de ses paumes.

Et bientôt, ce fut la peau frissonnante de ton cou qui se réchauffa sous les coups de langues et les sussions ardentes d'Abbacchio. Gémissante et éperdue de désir, tu plongeas les mains dans ses cheveux pour le guider jusqu'au mont de tes seins qui saillaient par dessus le bustier de ta robe.

Tu respirais avec peine, écrasée par le poids de son corps, soumise à l'empreinte de ses dents sur la tendre chair de ta poitrine offerte. Mais à aucun moment tu fis mine de vouloir te soustraire à lui.

C'était tout simplement trop bon. Si bon que tu te perdais en de petits cris de détresse et de plaisir mêlés.

Deux doigts épais s'insinuèrent soudain dans ta bouche pour caresser l'intérieur de tes joues et se presser contre ta langue humide, mimant entre tes lèvres les vas et viens que Leone rêver d'imprimer à celles d'en-bas.

Sous cette douce torture, ton sexe se gonfla d'impatience, libérant les sucs de ton incoercible excitation.

« Comment pouvait-il être si doué ?! »

Ce fut la seul pensée cohérente qui parvint à percer la barrière de ta conscience engourdie, comme possédée.

Puis, succédant à cette simple réflexion, la jalousie, le doute et l'incertitude...

Sur combien d'autres femmes avait-il exercé ses talents ? Combien en avait-il renversé de la sorte pour les asservir à sa nature sauvage ?

Au fond de toi, tu refusais d'être une énième conquête, un simple coup d'un soir, juste bonne à assouvir ses instincts de prédateurs.

Aussi affolantes que soient ses caresses, aussi exaltante que soit son emprise sur toi, tu ne pouvais simplement pas. Pas dans ces conditions.

- Attends, Leone, haletas-tu en retirant ses doigts de ta bouche. J'ai besoin de savoir... qu'est-ce que tu ressens pour moi ?

Prenant à peine le temps de cesser d'embrasser tes seins, il se débarrassa de ta question en grognant entre deux suçons affamés.

- Qu'est-ce qu'on en a à foutre ? ... Je veux coucher avec toi, pas te demander en mariage.

Sous ses lèvres cruelles, ta poitrine se comprima douloureusement. Ce qui ne te dispensa pas de gémir bruyamment lorsque ses deux mains prirent possession de tes fesses, les pressant amoureusement entre ses doigts.

- Non... Leone, arrête... le supplias-tu entre deux halètements, tant que tu en avais encore la force mentale.

Loin de t'écouter, il agita une main sous les jupons de ta robe, avant de la plaquer rudement contre la chair suintante entre tes cuisses.

- Trempée comme tu es, tu me feras pas croire que tu veux que j'arrête, te souffla-t-il d'une voix rauque. Et j'en ai aucune envie. Regarde comme tu me fais bander...

D'un élan sulfureux, il pressa l'énorme et douloureux renflement de son boxer contre celui de ta culotte imbibée de désir.

Aussi foutrement excitantes qu'elles soient, son instance et sa détermination à souligner l'excitation mutuelle de vos deux corps acheva de te poignarder le cœur.

Pour lui, ce n'était donc bien qu'une histoire de cul !

Te faisant violence pour ignorer les appels lancinant de ton sexe contre sa virilité, tu t'écrias soudain :

- Abbacchio ! J'ai dis STOP !

Cette fois, il se figea net, te laissant l'occasion de le repousser pour te dégager à la hâte.

- Y/N... ? t'appelas-t-il, incrédule, en avançant la main.

Tu ne lui laissas pas le temps de te toucher. Laissant les pleures et les sanglots remonter dans ta gorge, tu te relevas et te mis à courir, le plus loin possible de lui.

Abandonné sur le flanc, Leone te regarda prendre la fuite, écrasé par la culpabilité.

Lui qui s'était juré de ne pas poser la main sur toi, il avait finit par succomber. Et parce qu'il n'avait pas su résister, tes larmes était le prix à payer.  




J'espère que ce chapitre vous a plu ! ;)

Je vous partage une illustration qui m'a un peu inspiré pour le moment où Leone repense à son passé devant le miroir :

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