Je mords ma lèvre en préparant la chambre de mes parents. Est-ce qu’elle va accepter de venir passer la semaine chez moi ? D’un côté je ne vais pas lui laisser le choix. Je dois me servir de cet enregistrement bien que je n’ai pas l’intention de l’envoyer, mais ça elle l’ignore. Cela fait maintenant quelques jours qu’Halloween a eût lieu et j’ai toujours le sentiment d’avoir fait une grosse erreur, Camden ne vient presque plus en cours et je dois passer par Michael pour avoir de ses nouvelles. C’est de ma faute mais je suis prêt à tout.

 A : Mike

Salut Mike est-ce que tu peux passer prendre Camden pour l’amener chez moi ? Dis-lui de prendre sa valise, avec un maillot de bain.

De : Mike

Son maillot de bain est-il nécessaire ? Si oui je veux bien rester la semaine moi aussi.

A : Mike

C’est pour se baigner crétin pas pour autre chose. Tu as vraiment les idées tordues.

        Combien de temps me reste-t-il avant qu’ils n’arrivent tous les deux ? Une fois que j’ai fini de nettoyer la maison de fond en comble, je profite de leur absence pour faire quelques courses dont du thé pour Camden. Je pense que cette semaine sera assez dure pour elle alors je peux bien lui faire ce petit plaisir. En allant payer je remarque une affiche sur les portes du magasin ‘Sydney-Melbourne au Stade de Sydney’. Tiens c’est une idée ça, un match de foot, on pourrait y aller avec Camden, j’ai cru comprendre qu’en plus de savoir y jouer elle s’y intéressait. J’appellerai ce soir pour réserver des places. Une fois rentré chez moi, je retire mon haut à cause de la chaleur et  j’ai à peine le temps de ranger les courses que j’entends le bus s’arrêter à l’arrêt face à mon studio, je lève la tête et je la vois, elle n’a pas l’air ravie mais au moins elle est venu. Je souris sans le vouloir avant de me reprendre et de sortir pour les accueillir.

*

        Alors que je fais la visite de la maison à Camden, me félicitant intérieurement de l’avoir aussi bien rangée, je ne réfléchis pas une seconde au fait qu’elle peut voir la porte de la chambre de Melody.

« - Et celle-ci ? –Me demande-t-elle en montrant la porte de ma sœur-

- Celle-là ce n’est rien –Dis-je tout en me raidissant- n’essaie même pas d’y entrer. »

        Je veux passer ma semaine avec elle mais sans pour autant avoir à lui conter toute ma vie. Non je ne veux pas qu’elle sache ce qu’il y a derrière la porte, je ne veux pas qu’elle se pose des questions et surtout je ne veux pas qu’elle comprenne à quel point je suis plus pitoyable que je ne le laisse paraitre.  Que dirait-elle de moi si elle apprenait que j’ai une sœur, qui est décédée la semaine d’Halloween et que c’est en vue de l’anniversaire de sa mort que je veux passer ma semaine avec un peu de compagnie pour ne pas trop y penser. Elle me prendrait pour un pauvre fou, incapable d’avancer et d’oublier son passé. Je ne veux pas qu’elle me voit ainsi.

        Lorsque je descends pour les rejoindre je les surprends en train de s’embrasser. Je ne saurais dire ce que c’est mais à ce moment-là je ressens quelque chose. Est-ce qu’ils sont ensemble ?  Je les regarde du coin de l’œil, elle a l’air si heureuse avec mon meilleur ami et moi je la maintiens prisonnière ici alors qu’elle pourrait passer du bon temps avec lui. Je suis si égoïste. Et alors que Michael s’en va je lis dans ses yeux l’impression d’être abandonnée, comme si elle vivait notre semaine comme une fatalité. Je baisse la tête, je sais que c’est trop demandé mais j’aimerais qu’elle soit un minimum contente d’être avec moi, comme avec Michael. Mais bon, nous sommes ennemis, il n’y a que moi qui trouve du réconfort à l’avoir à mes côtés cette semaine.

*

        Depuis qu’elle est là je me sens revivre. La maison semble de nouveau habitée et je me lève avec de nouvelles motivations que je pensais avoir perdues à jamais. Même si chaque matin je lui réserve une crasse, au moins je m’amuse et je passe du temps avec elle. Je crois même qu’elle a fini par m’apprécier, ou alors elle joue son rôle de servante à la perfection. La solitude avait commencé à me peser et c’est en étant à ses côtés que je m’en rends compte, bien qu’elle soit soulante à parler tout le temps et à me poser des questions sur ma famille, au moins je ne suis pas en train de me parler à moi-même et de me morfondre sur mon horrible vie. Finalement j’avais bien fait de la faire venir chez moi, Mike avait raison, elle n’est pas méchante et il est possible qu’elle et moi finissions pas nous entendre un jour.

        J’ai beau être un salaud je fais des recherches chaque soir dans le but de trouver une activité pour le lendemain, histoire de l’occuper et qu’elle puisse passer des vacances normales. Déjà que je la privais de son confort et de ses activités, je pouvais au moins faire l’effort de lui faire un geste. Le soir du match de foot elle avait lâché la main de Mike et j’avais commencé à paniquer comme lorsqu’étant enfant je perdais Melody dans la foule de la fête foraine. J’ai poussé les gens et cherché dans tous les sens, l’imaginant perdue au beau milieu de la foule en train de pleurer, jusqu’à ce que je puisse voir sa tignasse verte et bleue. Mon cœur avait fait un bond et je m’étais empressé de lui donner la main, ne voulant pas la perdre une deuxième fois. Ce n’est pas ma sœur mais je crois que c’est tout comme. Je crois que je commence à m’attacher à elle, elle est si vulnérable. Bien qu’elle mette en avant sa fierté, à plusieurs reprises j’avais compris que ce n’était qu’un masque pour cacher ses faiblesses.

Comme moi.

*

« MELO ! »

        Je me réveille en sursaut, le corps chancelant et collant de sueur. J’ai fait un cauchemar, encore et toujours. Tous les ans depuis quatre ans, mes mauvais rêves se multiplient en cette période d’après Halloween, bien que toute l’année je ne trouve pas vraiment le sommeil de toute façon. Je passe ma tête dans mes mains essayant de chasser de mon esprit le visage sans vie de ma petite sœur. Pourquoi fallait-il que ce souvenir me hante ? Dans quelques jours ce sera la date pile du décès de Melody et je devrai être fort pour l’affronter, surtout que Camden sera à la maison et que je ne veux pas qu’elle me voit flancher. Je laisse couler quelques larmes avant de me reprendre et de descendre déjeuner avec ma pire ennemie. Elle ne fait que parler, j’ai la tête qui tourne et je n’arrive pas à oublier ce cauchemar.

        Toujours le même, Melody est dans ma voiture, le siège conducteur est vide, Megan s’est enfuit et la voiture roule toute seule à vive allure alors que ma petite sœur, impuissante, reste sur le siège passager. Elle ne sait pas conduire, elle ne peut pas prendre le volant et même si elle le faisait, la voiture n’en ferait qu’à sa tête, elle ne réponds plus à rien et moi je suis là, cloué au sol à la regarder hurler et suis forcé de voir la voiture faire des tonneaux avant d’atterrir dans un fossé, suivis d’un silence de mort. L’impuissance, c’est ce qui avait toujours fait grandir mon sentiment de culpabilité. Je n’avais rien pu faire, je l’avais vu dans son lit d’hôpital pendant trois jours, faible, dans le coma. J’avais espéré la voir ouvrir les yeux, j’étais restée à ses côté en voulant être le premier sur qui elle poserait le regard, mais la dernière chose qu’elle ait vu de moi c’était mon corps malade, en train de vomir bêtement le trop plein d’alcool. Elle est décédée avec cette dernière vision honteuse de moi. Et je ne me le pardonnerai sans doûte jamais.

        Le fait de repenser à tout ça me rend exécrable et je n’arrive pas à faire la part des choses avec Camden, l’envoyant chier à chaque fois qu’elle ouvre la bouche. J’aimerais lui dire combien je suis désolé, que ce n’est pas contre elle, que je suis au plus mal. Mais je garde tout pour moi et je la laisse nourrir encore plus de rancœur à mon égard. Elle aussi elle ne doit pas avoir une vision très valorisante de moi. Je soupire et malgré mon état, je pars chercher une activité pour le soir-même. Labyrinthe nocturne. J’espère que ça lui plaira, j’y allais avant avec les garçons, Megan et Melo. J’y ai de bons souvenirs et j’aimerais en avoir aussi avec Camden, même si au point où nous en sommes, aucun des souvenirs qu’elle aura de moi ne sera bon...

*

« - Chacun pour soi donc ? »

        Ricane Calum alors que j’observe Camden du coin de l’œil, ça ne l’enchante pas, mais elle est bien trop fière pour l’avouer. Peut-être que je la suivrais, je n’ai pas vraiment envie qu’elle se perde bien que je m’efforce à lui prétendre le contraire. Nous nous postons devant les différentes entrées et je la regarde. Ce serait le moment d’avouer qu’elle a peur, qu’elle préfère venir avec l’un de nous. Je trouverais une réplique cinglante avant de la prendre avec moi et au moins je pourrais veiller sur elle, mais cette idiote pars de son côté. Avant Melody et moi faisions ce parcours ensemble, justement parce qu’elle avait peur du noir et qu’elle se sentait en sécurité avec moi. Mais Camden n’est pas ma sœur et je la regarde qui avance timidement dans l’allée, bientôt recouverte par l’obscurité des haies. Elle se retourne une dernière fois, hésitante et nos regards se croisent. Je veux qu’elle sache que si elle revient sur ses pas je ne lui en voudrais pas mais après tout nous sommes censés nous détester, j’ai un rôle à jouer avec elle et ce n’est pas celui du grand frère. Je soupire avant de prendre un chemin au hasard et d’entendre Ashton brailler au loin. Suivis du silence. J’ai horreur de ça, trop de connotations négatives, trop de mauvais souvenirs qui viennent m’assaillir alors que mes cauchemars venaient à peine de refaire surface eux aussi. Je dois faire preuve de courage, je dois aller de l’avant et me battre contre mes démons. Enfin, ça fait quatre ans que je me répète ça et j’ai l’impression qu’à chaque maigre victoire, une plus lourde défaite m’attend derrière.

~ Bonsoir :)

Je suis vraiment contente de voir que les POV Luke vous plaisent :) je ne ré-écris que les chapitres importants et qui permettent de mieux comprendre Luke, ensuite je reprendrai avec Camden et ce sera quelques chapitres avant l'épilogue et la fin :( En tout cas je suis vraiment heureuse que mon histoire vous ai séduite jusque là ! Merci à tous !

K.