Chapitre 16: Fuite et pouvoirs

Le repas terminé, je retournai à ma chambre. Tout me semblait si compliqué ces derniers temps... Mon cerveau ne parvenait plus à capter la totalité d'informations qui m'entourait. Ce désespoir qui me rongeait malgré tout mes efforts me pesaient aussi.

Je soufflai un coup, évacuant ces pensées de mon esprit. Etrangement, malgré la froideur de l'ambiance, les Mukami ont été plus gentils avec moi. Je finissais par croire qu'ils avaient enfin ramené Ruki à la raison et qu'ils voulaient se faire pardonner.

Regardant par la fenêtre, il me vint à l'idée que les Sakamaki n'avaient pas tenté de venir me chercher. Peut-être ne savaient-ils pas où j'étais ?

Je secouai la tête, non bien sûr qu'ils le savent, leurs familiers leur servent pour tout et n'importe quoi, et je ne doutais pas que Raito en ait usé.

Alors pourquoi ? Sûrement qu'ils étaient heureux de se débarrasser de moi. Si c'était le cas, j'étais déçue d'Ayato.

Je me tapai violemment les joues.

« Anju, arrête de jouer les héroïnes de roman à l'eau de rose ! Tu vaux plus que ça ! »

Me convainquant une fois de plus de l'inutilité de mes pensées dans ma situation, je jetai un regard circulaire sur la chambre.

J'avais retrouvé un semblant de force avec le repas et le repos de ces derniers jours. Je pourrai peut-être tenter le tout pour le tout et profiter de leur préoccupation pour Ruki et Rhin...

Mais, si tout était bien mieux maintenant, pourquoi tentai-je encore de m'échapper ? Etait-ce la peur que tout recommence ? Que ce soit ici ou chez les Sakamaki, on ne m'avait pas épargnée. Pourtant, par comparaison, j'avais jugé que ma vie chez les Sakamaki était mieux.

A cause d'Ayato.

Jurant contre moi-même, je me résolus à prendre mes affaires et tenter de partir. Je m'étais dit de ne plus trop réfléchir et de suivre mon instinct. Si c'était mon instinct qui parlait, c'était sûrement que quelque chose de bon finirait par m'arriver si j'y retournais.

Soudain, mes mains se mirent à trembler et ma tête à me faire souffrir. Jugeant que ce devait être lié au stress, je tentai une fois de plus de respirer profondément pour lâcher la pression. Je parvins quelque peu à apaiser mon corps, mais je sentais que quelque chose clochait.

Pourtant, mon état me donna une idée sur la manière de m'enfuir d'ici en minimisant au maximum les risques.

Laissant mes affaires dans ma chambre, j'allai trouver Kou ou Yuma.
Je ne tardai pas à mettre la main sur Kou, qui chantait à tue-tête dans sa chambre. Toquant contre la porte avec impatience, il ne mit pas longtemps à ouvrir.

« Oh M-neko-chan. Je ne m'attendais pas à ce que tu viennes jusqu'à moi ! Tu veux que je te morde ? Sourit-il d'un air faussement innocent.
- Kou, j'aimerai retourner au lycée avec vous. J'ai déjà eu du mal à rattraper mon retard avant, je ne veux pas être une fois de plus perdue... »

Il me regarda, un peu surpris de ma demande soudaine.

« J'aurai quoi en échange ?
- Tu peux me mordre, je ne me débattrai pas. »

Il hésita, me fixa et soupira.

« J'en parlerai avec les autres, je ne garantis rien. En attendant, l'intention y est donc viens-là ! »

Ne me laissant pas riposter, il me tira vers lui dans sa chambre.

A peine avais-je le pied dans son antre qu'il me mordit l'épaule. Couinant de douleur, je tentais de ne pas me débattre, ou le « contrat » serait caduque.

Je détestais me monnayer ainsi, mais mon sang était finalement mon seul atout face aux vampires. Et si cet atout me permettait d'être libre, alors je n'hésiterais pas.

Il but un moment, me causant cet horrible désagrément d'entendre ma substance vitale s'écouler dans sa gorge et de sentir ma tête se vider de penser, devenant lourde.

Il me relâcha ensuite. Presque comme on lâche un jouet dont on ne veut plus, me laissant m'échouer lamentablement sur le sol.

Se rendant compte de son geste, il me releva, plus doucement cette fois.

« Je vais aller en parler aux autres, toi va te reposer. »

Il me ramena à ma chambre et partit sans un mot de plus.

Plus tard, après un réveil difficile pour mon corps, Kou revint vers moi en me disant que ses frères avaient accepté à condition que je sois étroitement surveillée- ce qui ne pouvait être le cas qu'entre deux cours. Aboutissant à moi souhait de départ, j'acceptais la condition sans rechigner.

N'attendant plus que la nuit pour aller en cours, je me recouchai et profitai de ces dernières heures de repos accordées pour refaire le plein d'énergie.

Le chemin fut plus rapide et moins gênant qu'avec les Sakamaki. En fait, à bien y regarder, les Mukami et les Sakamaki étaient foncièrement différents. De part leur nature d'ex-humains, les Mukami pouvaient très bien vivre le jour, et c'est ce qu'ils faisaient quand ils n'avaient pas cours. Mon corps un peu perdu par ces changements eut du mal à suivre, mais ne se plaignait pas quand j'avais pu aller quelques instants dans le jardin de Yuma sous la douce chaleur du soleil.
Autre différence : les Mukami s'entendaient bien mieux que les Sakamaki, car ils avaient choisi d'être une famille et ne laissaient pas leur bonne entente gâchée par des réflexions. Enfin, j'avais remarqué que les Mukami en tant que « vampires impurs et non aristocrates» n'avaient pas de familiers contrairement aux Sakamaki. Pourtant j'avais déjà aperçu une chauve-souris se diriger vers la chambre de Ruki. Je me disais que leur « bienfaiteur » devait y être pour quelque chose.

Aussi le trajet se passa dans les taquineries de Yuma et Kou, et le silence des deux autres. Une fois arrivés au lycée, Kou se fit aborder à peine arrivé par des groupies, étant donné qu'il était une idole connue surtout auprès des jeunes, il devait faire attention à sa personnalité et à ses gestes.

Il ne restait donc plus que Yuma, Azusa et Ruki.

Yuma dût partir car il s'aperçut qu'il avait oublié de préparer un devoir ramassé, aussi s'en alla-t-il rapidement vers la bibliothèque.

Il ne restait plus que Ruki et Azusa.

Me dirigeant vers ma salle de cours comme s'ils n'étaient pas là, je jetai néanmoins un œil autour de moi pour surveiller l'éventuelle arrivée des Sakamaki. Jusque-là, je n'avais vu personne de la fratrie.

Ne laissant pas ma déception se montrer, je m'installai à ma place sans un regard pour Ruki qui se tenait à côté de moi, attendant sûrement que le professeur n'arrive pour s'en aller.

Je tournai la tête vers l'extérieur et contemplai la vue. Je serrai mes mains entre elles, les empêchant de trembler. Le stress devait grandement me ronger, mon mal de tête aussi revenait. Voulant vérifier quelque chose, je levai la tête vers Ruki.

« Mes yeux sont de quelle couleur ? »

Surpris par ma question, il baissa son regard sombre vers moi, et me fixa un instant, fronçant les sourcils.

« Je ne saurai pas le dire, ils changent de couleur. »

Marmonnant une grossièreté, je fermai les yeux et mis ma tête dans mes bras. Je sentis le regard chargé de questions de Ruki, mais je choisis de l'ignorer pour me concentrer sur mes pouvoirs. Il fallait que je reprenne le dessus ou je pressentais que quelque chose allait se produire.

Des raclements de chaises m'informèrent de la présence du professeur, et le silence envahit la salle.

Je ne sentais toujours pas la présence des Sakamaki, et un coup d'œil rapide m'informa de leur absence. C'était étrange, beaucoup trop étrange, et le stress de l'échec de ma mission « fuite » me donna à nouveau la migraine.

Peu à peu, je me laissais submerger par ces émotions trop fortes et difficiles à gérer, et intérieurement, je me maudis. Pourquoi fallait-il que je sois si faible le jour où je reprenais une vie sociale ? Pourquoi fallait-il que mon esprit déraille à nouveau maintenant ?

Les pensées parasites revinrent alors, et je sentis la dernière barrière de sanité se briser en moi.

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