7
E.A
— Donc tu veux dire... Que tout est vrai ?
Sarah ne répondit pas. Elle préféra me lancer un sourire qui m'obscurcit encore plus l'esprit. Quelque chose de dur s'infiltra dans ma tête, du poison peut-être. Il raviva la migraine qui y chantait jadis. Comme un avertissement à prendre le soin de peser chaque mot et de ne pas cracher au visage de ma ravisseuse.
— Donc tu m'as enlevé ? redemandai-je pour confirmer. Même si mes yeux attestaient tout ce cirque, ma tête n'en faisait qu'à la sienne. Pourquoi ?
— Arrête de poser des questions inutiles, mon cœur. C'est évident. L'amour.
— Tu penses que ça t'autorise à agir comme bon te semble ? Connais-tu au moins la gravité de tes actes ? Une plainte de ma part et tu passeras une bonne partie du reste de ta vie en prison.
Révélant ce point sensible, je m'attendais à voir la peur s'emparer d'elle et qu'elle perde tout contrôle. Qu'elle me supplie de ne pas porter plainte. Mais pas à dire comme une évidence.
— Mais tu ne le ferais pas. Tu n'aimerais pas voir la femme que tu aimes en prison.
— Une femme qui m'a kidnappée ?
L'expression "petit détail sans importance" frappa son visage et me fit sentir plus mal. Ma patience s'évaporait sous le soleil de l'incompréhension et de l'absurde. Si un jour, Dieu en personne était descendu sur terre pour m'annoncer que j'allais me retrouver dans cette situation, je lui aurais sans doute ri au nez en le questionnant sur ce qu'il tramait avec son éternité : regarder Netflix ? Mais maintenant que je m'y trouvais, il fallait bien trouver un moyen de me sortir de là. La colère n'avait pas porté des fruits, ce qui ne m'étonnait pas. Je me demandai en tant qu'avocat souvent confronté à des cas divers et variés, comment l'un des principaux déclencheurs d'action condamnable pouvait-il m'aider ? Faute à l'émotion, sans doute. Et pourquoi ne pas trouver un terrain d'entente tant qu'on y est ?
— Ça prouve au moins que tu m'aimes jusqu'à risquer la prison, répondis-je à sa place.
— Oui.
La psychologie féminine me surpassait. Les femmes ne se comprenaient pas elles-mêmes. Toutefois, mon intuition suspectait qu'elle se trouvait dans un moment de faiblesse. Et comme tous les êtres vivant dans ces moments-là, elle créait des ouvertures dans lesquelles je devais foncer.
— Aller approche, embrasse-moi. J'ai envie de toi, ai-je déclaré.
Je mentais. Ma peur ne laissait place à aucune autre émotion, néanmoins, il fallait jouer le jeu.
Elle s'exécuta. Ses lèvres saisirent les miennes pour les sucer comme si elle voulait me les arracher. Pas pour me déplaire, mais son geste insistait de plus en plus. Elle me privait d'air. Ce serait si drôle de mourir comme ça. J'imaginais les grands titres : homme mort asphyxié en embrassant une femme. Heureusement, Sarah ne comptait pas me tuer. En tout cas pas comme ça. Elle semblait goûter à tous les plaisirs du monde. J'aimerais pouvoir en dire autant. Cependant, de temps en temps, je me forçais de sourire et de lâcher un petit grognement de plaisir. Pour rendre le tableau parfait et naturel.
— Sans ses menottes, je pourrais te caresser, finis-je par lâcher.
Cette phrase ralentit ses gestes, comme si elle réfléchissait sur la véracité de mes dires. Mais après quelques secondes, elle dit.
— Ce n'est pas la peine, tout ton corps est mien et ça me plaît.
Elle lécha mon cou, provoquant une petite secousse qui se mêlait à ma déception.
— Tu es dans une position dans laquelle je pourrais te faire tout ce qui me passe par la tête.
Je fis en sorte qu'elle n'aperçut pas mes gorgées de salive. Lui montrer des signes de peur serait mauvais pour le reste de l'histoire. Elle mit son index sur mon menton et ancra bien ses yeux dans les miens. Ensuite, son doigt glissa sur ma gorge, passa au milieu de mon buste, parcourut mon ventre pour s'arrêter sur mon pénis. Le silence me permettait de distinguer les battements irréguliers de mon cœur. Difficile d'attribuer la cause à la peur ou à l'excitation.
— Découvrir chaque parcelle de ta peau ou... baiser. Avoir un bébé. Baiser, bébé, ça rime.
La terreur s'empara de moi et voulut extirper mes yeux de leur orbite.
— Un... un...
Les mots ne voulaient pas venir. Et je les comprenais. Un bébé ?
— Mais je brûlerais les étapes, dit Sarah. Pas vrai ?
Retrouvant à peine l'usage de la parole, cette phrase, qui commençait à devenir barbante à force de répétition, sortit.
— Tu es... folle ?
Un petit sourire triste se grava sur ses lèvres avant qu'elle ne secoue la tête.
— Tu es un mauvais comédien. Rien que tes soupirs suffisaient à me le montrer.
Sans avertissement, elle me saisit le pénis et les testicules d'une poigne ferme et me les pressa. À l'ascension de toute la douleur (et le plaisir) que cela pouvait provoquer, des ombres menaçantes traversaient son visage et rendaient un rendu machiavélique.
— Et tu n’aurais pas dû.
À bout de souffle, je lui demandai d'arrêter.
— Supplie-moi.
— Quoi ?
Elle augmenta la pression à un point tel que je gémis.
— Supplie-moi pour que j'arrête.
Ma fierté prenait un coup. Mais je n'avais pas le temps ni les couilles à penser à ça.
— Arrête, je t'en supplie.
Sa main se fit toujours sentir dans les secondes suivantes. Voulait-elle me montrer mon impuissance ? Si oui, c'était réussi. Néanmoins, elle finit par défaire sa pression sur mon membre avant d'y déposer un baiser. Tout en murmurant : « Bon garçon, bon garçon », me donnant l'impression d'être un petit chien obéissant à sa maîtresse. Maintenant, mon corps pataugeait dans sa sueur et l'impression que je me déshydratais devenait inquiétante. Mon souffle court ne me permettait pas de consommer assez d'oxygène pour calmer mon rythme cardiaque et mon esprit.
— Regarde-moi ça, tu es dans un état effroyable Apo. Ça te dirait de prendre un bain ?
Pour toute réponse, je laissai ma tête tomber sur mon épaule droite. De toute façon, à quoi bon répondre lorsqu'on savait que cela ne servirait à rien. Elle posait la question juste pour la poser et rien d'autre. Elle s'absenta, m'offrant ainsi un petit temps de repos. Plus les minutes s'allongeaient et plus je prenais espoir qu'elle avait renoncé à son idée. Pour tout dire, je rêvais encore que tout ceci ne soit qu'une putain de comédie montée de toute pièce sans mon accord.
Une voix dans ma tête prit le dessus. Et si tu te trompais et que tout ce qu'elle émettait était aussi réel que la seule petite fenêtre de cette chambre ? Alors cela signifierait que ce n'étaient pas seulement mes testicules qui étaient menacés, mais ma vie. Sur ces pensées joyeuses, Sarah réapparut, un petit sac sous le bras et une trousse de clé dans la main. Elle l'envoya en l'air comme le ferrait un joueur de baseball qui allait lancer une balle, provoquant un petit boucan qui accompagnait son sourire provocateur.
— Je te fais confiance. Alors pas de bêtise, m'avertit-elle tandis qu'elle avança.
L'espoir que mes mains allaient se libérer de ce tas de métal qui s'amusait à les ciseler me monta à la tête.
Devrais-je sauter sur elle dès la première occasion ? Non, non. Je gardais tout de même mes principes. Une femme restait une femme et m'en prendre physiquement à une restait un acte... Ignoble. Même s'il y a peu, elle m'écrabouillait les couilles, je pensais toujours que les hommes qui frappaient les femmes, étaient tous des connards. Pire encore, des femmes que soi-disant, ils aimaient. J'ignorais si j'avais toute ma tête à cet instant-là quand je lui avais dit que je l'aimais. Mais le simple fait de l'avoir dit suffisait à refouler tout désir de violence.
Sal lâche. À quoi servaient alors tous ces moments dans les salles de gym ?
Elle retira une des menottes, mais lia l'autre à mon autre poignet :
— Tu es mon prisonnier d'amour. Je ne peux pas te laisser les bras ballants.
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