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— Non. Attends. Peut-être une personne.
— Et c'est qui ?
La réponse était évidente. Quelle femme méritait toute l'attention d'un homme après lui avoir donné tant d'amour ?
— Ma mère.
— Ouais, une mère est précieuse. La mienne est toujours absente et je ne la connais pas vraiment. Mais je suppose que j'aurais eu cette même réflexion si notre relation était normale.
— Et si tu n'étais pas aussi maboule.
Jamais je n'arrêterais de te la rappeler. Tu l'entendrais tellement de ma bouche que ton subconscient finira par l'accepter comme une vérité. Toutefois, elle l'ignora.
— Et si je te disais que tu serais mon choix, tu dirais quoi ?
— Mauvais choix. Je ne suis pas du genre à rester fidèle à une femme.
Le sourire de Jennifer défila à travers celui de Sarah, renforçant un peu plus ce fait que j'avouais à haute voix. Je trompais quelqu'un. Quelqu'un que je trouvais assez spécial sur laquelle j'espérais trop. Ça n'aurait peut-être rien donné. On finirait peut-être par se séparer après un mois ou deux, en comprenant que les kilomètres auraient raison de notre volonté. Mais j'aurais aimé tenter le coup, rien que pour voir ce que cela faisait d'aimer par un coup de foudre.
— On serait les seuls sur terre, je te signale. Donc pas la peine de s'en faire.
— J'avais oublié ce détail, soupirai-je.
— Nous serions les maîtres du monde.
Elle lança cette réplique aussi calme et sérieuse qu'un professeur de philosophie. Accompagné par cette musique, on dansa jusqu'à avoir les pieds engourdis et le vertige. Sarah m'embrassa pour marquer la fin de la séance et m'envoya m'asseoir de nouveau.
La fatigue s'emparait de moi à petit feu. Tout ce cinéma me fatiguait. Et si je lui plantais une fourchette dans l'œil ? Ensuite, ce couteau d'argent lui ouvrirait la gorge pour que son sang puisse salir sa magnifique robe. L'entendre suffoquer dans son sang en essayant de dire mon nom. Folie ! Jamais je ne pourrais tuer quelqu'un. Encore moins quelqu'un qui m'aimait. À sa manière.
— J'ai une très bonne nouvelle pour toi, mon chéri, commença-t-elle en entremêlant ses doigts. En fait pour moi aussi. Plus pour moi que pour toi, mais du moment que je suis heureuse, tu l'es aussi, pas vrai ?
— On dit que c'est ça l'amour, donc...
Elle descendit cul sec son verre, ajusta sa posture et effaça son sourire. Un désir dangereux remplit son regard tandis que le silence comblait les lieux. Mes sens étaient en état d'alerte, comme souvent lorsque je me trouvais en sa compagnie. Une vraie peste ! Plus elle retardait sa révélation et plus je risquais de devenir aussi cinglé qu'elle. Au bout d'une douzaine de secondes, elle plongea sa main dans sa valise et sortit une petite boîte rectangulaire frappée d'un logo en forme de diamant. Elle le déposa sur la table et l'ouvrit. Une bague de fiançailles ?
Ma tête se mit à faire des mouvements de droite à gauche tandis que la sienne, tout l'inverse. Dans ce néant, je cherchai le signe qui dirait que c'était une farce, de mauvais goût certes, mais une farce quand même. Ce serait si simple si elle se leva pour crier : « Je t'ai bien eu. Voici une des caméras cachées. Il se trouve derrière ce pot de fleurs. » Aucune plainte ne serait déposée de ma part pour toutes les choses horribles qu'on m'avait fait subir. Cependant, rien n'émergea de ce beau visage. Désespéré, un courage surprenant s'empara de moi et me poussa à clamer haut et fort que je ne comprenais pas. Espérant que j'arriverais à le croire. Amusée, elle porta la bouteille de vin rouge à ses narines, inhala l'odeur à fond avant de prendre une petite gorgée.
— C'est simple, veux-tu m'épouser ?
Je me levai en frappant la table si fort, que ça me fit mal. Mais la douleur passait au second plan lorsqu'on se trouvait dans ce genre de situation.
— Va te faire foutre ! Jamais je ne t'épouserais! hurlai-je en arrosant la table de postillon. Tu entends, jamais !
Avec une souplesse digne d'une miss univers, elle se leva en replongeant sa main dans son sac. Mais cette fois-ci, non pas pour sortir un quelconque cadeau de mariage ou autre babouin, mais bel et bien son arme à feu qui pointait plus tard, dans ma direction. Son plaisir de voir la peur envahir mon visage fut grand, si grand qu'elle se perdit dans un rire sarcastique avant de souffler.
— Mais mon chéri, c'était une question rhétorique.
Une question rhétorique ? Oh la blague ! Je regardai la bouche du canon qui grandissait. Les yeux de Sarah, dont les flammes des bougies donnaient un aspect diabolique. L'enfer s'affichait dans ses yeux et pourtant il fallait rester calme. À partir de cet instant, j'ai su qu'il faudrait que je mette tout en place pour me tirer d'ici.
— Tu te rends compte de ce que tu chantes ? T'épouser ? C'est du grand n'importe quoi.
Elle se leva en ajustant la bouche du revolver, prit un instant pour regarder avant d'aller allumer les lumières. Lorsque les rayons jaillirent des néons, elles me piquèrent les yeux. De quoi me signaler malgré ma volonté de résister, je restais humain et que la douleur n'était pas une partie de plaisir.
— Et pourquoi ? On s'aime, c'est le plus important.
— ....
— Pour ce qui en est de l'argent, j'en ai en quantité. Ce ne serait pas un problème. Alors, dis-moi ce qui t'empêche que nous nous unissions.
Elle s'avança à deux mètres de moi.
— Mais quel est ton problème, dis-moi. Ça ne se fait pas d'enlever quelqu'un. Même avec toutes les raisons du monde. Et on ne demande pas en mariage quelqu'un qu'on vient à peine de rencontrer.
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