Quatre
Les années sont passées et enfin j'ai eu seize ans. J'avais quitté le collège sans imaginer qu'il enfermerait entre ses murs, l'année suivante, la bande qui allait te faire basculer du mauvais côté. J'allais entrer en seconde et encore une fois, il aurait suffit que j'ai un an de moins pour éviter le carnage. Je ne t'ai pas vu sombrer dans la solitude et ses affreux abimes.
Pour ma défense, on pourrait dire que j'avais besoins de temps pour m'adapter au nouvel environnement dans lequel j'évoluais à présent. Pour la tienne, on pourrait pu dire que personne n'avait remarqué dans quoi tu t'enfonçais, même moi qui restait obnubilée par mes stupides révisions. Et puis, pour être franche, je pensais que comme je m'étais bien débrouillée seule lors de mon arrivée dans ce nouvel environnement, je ne voyais pas pourquoi tu ne pouvais pas en faire autant.
Peut-être est-ce parce que tu t'es retrouvé seul dans ta classe ou alors parce que personne ne voulait être ami avec toi. Je sais pas. Tout ce que je sais, c'est que face à l'isolement tu t'es tourné vers eux. Ces affables individus qui t'ont foutu la vie en l'air.
Mais ça je ne le savais pas. J'étais plongée dans mes leçons, mes révisions, mes réflexions et ne voyais pas plus loin que le bout de mon nez.
Et puis l'année suivante, celle de mes dix-sept ans, j'étais en première. Cette année là, la pression et l'anxiété étaient moins intenses. J'ai commencé à relever la tête de mon monde pour observer celui qui m'entourait. C'est là que j'ai remarqué le changement chez toi. Tu devenais de plus en plus distant.
Mais ce n'est que quelques mois plus tard que j'en ai vraiment mesuré les proportions.
C'était un soir de la mi-novembre, quand je relisais une de mes leçons, que j'ai vu une ombre bouger dans le jardin endormi. Je n'ai identifié ta silhouette qu'une seconde avant que tu ne sautes la barrière du jardin, seul et dernier obstacle entre toi et le monde inconnu.
Lorsque tu as disparu derrière la barrière, mon regard s'est porté sur la pendule de ma chambre. Mon petit doigt me soufflait que vu l'heure tardive, tu ne devais pas être aller à ton entraînement de volley.
Je t'ai attendu tu sais ? Je t'ai guetté, assise à ma fenêtre, n'osant pas quitter ma place de peur de te rater. Et ce n'est que bien après minuit que j'ai vu ta silhouette dans la nuit noire, sauter la barrière en sens inverse pour retrouver ta chambre. Alors seulement lorsque j'ai vu la lumière de ta chambre s'éteindre, j'ai pu aller me coucher. J'y ai réfléchi dans mon lit cette nuit là. Je voulais savoir où tu allais comme ça en cachette. Il y avait deux solutions qui s'offraient à moi. Soit, tu sortais le soir pour aller conter fleurette à je ne sais quelle fille de ta classe. Soit, tu allais retrouver ta bande, je suppose, mais je ne savais ce que vous faisiez ensemble. Je pensais bien que tu refuserais de me le révéler. Alors j'ai décidé de le comprendre par moi même.
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