Chapitre 28 - t2
La cour du domaine du général est enveloppée d'un doux silence, troublé seulement par le murmure des oiseaux de cette fin de journée. Le printemps commence à se montrer même si la brise reste fraîche. La nuit tombe lentement et drape les murs d'ombres bleutées, que Jisung observe, l'esprit ailleurs. Il se tient là, debout, les bras croisés contre lui, pour se protéger du froid de ce début de soirée. Ses cheveux sombres, attachés sagement dansent doucement au gré du vent.
Revenant de ses affaires à la caserne et au palais, Katsuyuki le trouve ainsi. Déposant ses affaires et se mettant à l'aise après une journée compliquée, il arrive auprès de l'oméga et sourit en coin.
— Tu attends quelqu'un ?
Pas de jugement dans le ton qu'il emploie, juste la voix douce et curieuse. Il est aussi un peu amusé, il faut bien l'avouer. Jisung sursaute presque, il ne l'a pas entendu arriver, mais aussitôt il se détourne.
— Non.
— Ne mens pas, tu espérais le voir, n'est-ce pas ? Minho.
Incapable de répondre, le noiraud se mordille la lèvre et s'agite un peu. Nier serait mentir. Mais acquiescer serait avouer quelque chose qu'il se refuse. Pourtant, c'est vrai... Il aurait aimer voir son alpha. Ce dernier n'est pas revenu depuis plusieurs jours déjà et l'oméga n'a guère de nouvelles alors qu'il aurait aimé qu'ils parlent. Qu'ils échangent un peu... Il aurait aimé montrer qu'il est enfin décidé à faire quelques efforts pour lutter contre sa rancune.
Voyant qu'il n'obtiendrait pas de réponse, le général pouffe un peu avant de s'asseoir sur les marches non loin. L'une des domestiques lui apporte un thé qu'il se met à déguster tranquillement.
— Tu devrais rentrer te reposer un peu. Tu n'es pas totalement remis. Tu as l'air épuisé.
— Je ne peux pas... Pas encore... S'il vient...
— Tu n'es pas obligé de lui parler. Pas ce soir, ni demain. Tu as le droit d'exister par toi-même. Ne te cache pas... Tu existes. Il reviendra.
Le noiraud ferme les yeux, le coeur serré. Sa voix se brise et c'est à peine un murmure qu'il glisse à l'homme qui l'accueille au sein de sa maison.
— Je... J'ai compris ce qu'il a fait... Pourquoi il l'a fait... Mais... Il savait que j'étais vivant... Il savait que j'étais dans une de ces maisons... Il n'est pas venu...
Katsuyuki se lève alors, et vient poser sa main libre sur l'épaule du jeune homme.
— Il voulait te protéger. Il t'a sauvé comme il l'a pu.
Le silence qui suit n'est pas gênant, pas pesant. Il est plein de calme et de sérénité. Tout ce dont a besoin Jisung. Tournant son regard vers ce dernier, le soldat hésite un instant.
— Veux-tu voir le bébé ? Il est en compagnie de sa nourrice.
L'oméga recule alors légèrement et secoue la tête avec vigueur.
— Non... Non pas encore. Je... Je ne suis... Pas prêt.
La tête du maître des lieux se hoche doucement et le silence se réinstalle entre eux.
— Est-ce que... Est-ce que vous savez où habite Minho ?
Katsuyuki prend une légère inspiration, ses yeux noirs se portant un instant vers l'horizon, là où la lumière décline.
— Oui... Je sais où il vit. Une jolie maison non loin du ministère. Pas très grande, mais bien tenue. Il y a un grand pommier devant l'entrée. Tu ne peux pas la manquer. Tu devrais essayer d'y aller.
Jisung hoche doucement la tête, comme s'il gravait l'information dans sa mémoire. Puis, il se retourne lentement vers l'intérieur, sans un mot de plus. Le général comprend qu'il ne doit pas insister davantage. Il le regarde s'éloigner, les épaules encore un peu basses, mais les pas enfin tournés vers quelque chose. Ou quelqu'un.
Le quartier est calme à cette heure. Les lanternes, suspendues à intervalles réguliers, dansent doucement dans la brise nocturne, jetant leur lueur pâle sur les pavés clairs. La maison est là, comme l'avait décrite le soldat. Sobre mais élégante, le petit jardin clos.
Jisung hésite un long moment devant la grille. Ses doigts se crispent autour du fin tissu de ses manches, son cœur bat trop vite, trop fort. Il ne sait pas s'il a le droit d'être là. S'il va le déranger. S'il ne va pas s'imposer dans une vie où il n'a peut-être plus de place.
Mais il a besoin de savoir. Besoin de voir. De comprendre s'il peut encore espérer quelque chose. Ou s'il est trop tard. Il lève une main tremblante et frappe doucement à la porte.
Le bois grince un peu quand on l'ouvre. Une femme apparaît dans l'encadrement. Belle, dans une simplicité délicate. Les cheveux relevés proprement, un kimono clair qui souligne ses gestes posés. Elle l'observe avec surprise, mais sans hostilité.
— Bonsoir... ?
Sa voix est douce, presque chantante. Le monde semble vaciller un instant sous les pieds de Jisung. Il sent son cœur se serrer à l'excès, au point de lui en couper le souffle. Il veut parler, expliquer sa présence, mais aucun mot ne vient. L'oméga se courbe aussitôt, mal assuré, les mains jointes devant lui. Ainsi c'est avec elle que son alpha a dû se marier... Soudain il se demande ce qu'il fait là. Il peine à se reprendre, mais il lui faut reprendre un peu d'assurance.
— Bonsoir, excusez-moi... Je... Je cherche Lee Minho.
Elle le détaille un instant, sans animosité, mais avec une lueur de prudence.
— Il n'est pas encore rentré du ministère. Vous êtes... un collègue ?
— Non... Je... Je suis... un ami.
Le mot a du mal à franchir ses lèvres. Il ne sait même plus s'il peut encore se qualifier ainsi, mais l'idée lui fait mal. Un ami... Un amour.... Il relève à peine les yeux, fuyant le regard trop clair de la jeune femme. Elle incline légèrement la tête, une ombre passant dans ses yeux. Est-ce de la surprise, de la gêne, de la méfiance ? Il ne saurait le dire.
— Vous pouvez attendre à l'intérieur, si vous le souhaitez. Il ne devrait pas tarder.
Il secoue la tête, vite, presque paniqué.
— Non, non... Je ne veux pas déranger... Je voulais juste...
Ses mots se perdent dans le vide. Il se sent ridicule. Mal à l'aise. Comme un intrus. Mais elle ne referme pas la porte.
— Vous êtes Jisung, n'est-ce pas ?
Il relève brusquement les yeux vers elle. Il n'a pas dit son nom. Elle sourit un peu tristement, comme si elle comprenait ce qu'il ressent, sans vraiment pouvoir le partager.
— Il parle souvent de vous.
Un frisson traverse l'oméga. Il ne s'attendait pas à cela. Pas à être évoqué dans cette maison, dans cette vie rangée qui n'est pas la sienne. Elle reprend, doucement.
— Il est souvent absent, vous savez. Il rentre tard, et il semble toujours... ailleurs. Mais quand il parle de vous, ses yeux s'adoucissent. Il pense à vous... chaque jour.
Jisung se fige. Les battements de son cœur se font douloureux. Elle continue, sans amertume.
— Je crois que vous lui manquez. Vraiment.
Il ne répond pas. Il ne sait pas quoi dire. Son regard glisse vers le sol. Il murmure, à peine audible :
— Je suis désolé...
Il n'attend pas de réponse, ou quoi que ce soit d'autre. Il se sent fébrile et préfère tourner talons pour retourner chez le général, la seule place où il se sent réellement bien dans ce pays. Il l'entend l'appeler dans son dos, mais il hâte le pas afin de s'en aller au plus vite. Il y aura bien un jour où ils se reverront, et peut-être que là, il pourra lui montrer quels efforts il veut tenter de faire. Jisung s'éloigne, la gorge nouée. Il s'en veut d'avoir cédé à cet élan, d'avoir espéré... quoi, au juste ? Que Minho surgisse, le regarde avec cet air brûlant qu'il connaissait par cœur ?
Que tout redevienne comme avant ?
Les jours passent, lents, monotones, ils se ressemblent tous. Le domaine baigne dans une torpeur tranquille. Parfois le noiraud hésite à mettre le nez dehors, de peur de tomber sur un indésirable. Il se laisse bercer par l'attente de voir Minho revenir auprès de lui.
Chaque matin, il lève les yeux quand des sabots résonnent au loin, croyant un instant reconnaître l'alpha. Chaque soir, il s'endort contre le chambranle d'une porte ouverte sur le vide, bercé par le souffle du vent nocturne, hanté par l'absence.
Mais Minho ne vient pas. Et malgré tout ce qu'il peut penser, cette absence est plus cruelle encore que les mots, ou les regards qu'il aurait pu redouter. Elle le ronge peu à peu et son inquiétude grandit de jour en jour. Peut-être a-t-il raté sa chance ? Peut-être qu'il est maintenant trop tard, son alpha a décidé qu'il ne méritait plus de se faire attendre... Et lui, il comprend. Bien sûr qu'il comprend. Il sait pourquoi son amant reste loin. Sans doutes qu'il s'en veut de l'avoir traîné dans ce bordel pour lui montrer avec la brutalité des âmes qui ne savent pas dire leur douleur ce à quoi il a échappé. Parce qu'il s'est laissé emporter par sa propre rage, son propre chagrin.
Jisung voit encore ces femmes, ces omégas... Il a compris ce que le châtain voulait dire... Mais maintenant il n'y a plus que le vide. L'apha fuit ce qu'il a fait. Il le fuit lui.
Le général l'observe parfois, en silence, sans rien dire. Il a proposé encore une fois de lui présenter l'enfant, mais le noiraud se contente de secouer la tête, trop fragile pour ce pas-là, pas encore prêt à poser les yeux sur ce petit être qui cristallise ses peurs et ses regrets.
Puis, un soir, alors que le soleil se couche dans un ciel strié de nuées rouges, il entend des sabots dans l'allée. Il lève les yeux, le cœur soudain trop lourd, trop rapide.
Minho.
Il est là, enfin.
Le visage tiré, les traits marqués par l'insomnie et le remords, les épaules basses comme si le poids du monde s'y était accroché. Mais dans son regard brûle toujours cette flamme, celle que Jisung redoute et espère à la fois.
Le châtain met pied à terre, sans un mot. Il s'avance de quelques pas, hésite, comme s'il redoutait d'être chassé. Puis il se plante là, les bras ballants, le souffle court, les yeux rivés dans ceux vairons de son oméga.
— Je...
Sa voix est rauque, brisée par le silence des jours écoulés.
— Je ne voulais pas te blesser. Je voulais... Je ne sais même plus ce que je voulais.
Il grimace, passe une main nerveuse dans ses cheveux.
— Tu m'en veux encore. Et tu as raison. J'ai été con. Vraiment con.
Jisung, lui, ne dit rien. Il le regarde, figé, partagé entre le soulagement et l'envie de le frapper.
— Je t'ai traîné là-bas... Parce que j'ai eu peur. Peur que tu continues à croire que j'aurais pu te laisser tomber, que j'aurais pu te laisser finir dans un endroit pareil.
Son regard s'adoucit un instant.
— Je voulais te réveiller. Je voulais que tu comprennes. Mais j'ai tout sali.
Un silence. Le vent fait danser la poussière à leurs pieds.
— Je t'ai cherché partout, tu sais. Pendant tous ces mois. J'ai réalisé que tu étais à Kyoto quand je t'ai senti. J'ai senti ta chaleur, tu étais là... Juste là, mais je n'ai pas pu suivre ce lien que je ressentais. J'étais surveillé... Et si j'avais trop forcé...
Il serre les poings, le regard fuyant.
— Si j'étais venu... Si je t'avais réclamé... Tu sais ce qu'ils t'auraient fait. Tu sais où tu serais allé.
Je me suis dit que t'y survivrais mieux là où t'étais, loin de moi. Loin de ce qu'on aurait pu t'imposer par ma faute.
Il relève enfin les yeux, brillant d'une lueur amère.
— Je voulais juste te sauver, Jisung. Mais à la fin... je crois que je t'ai perdu quand même.
Ce dernier sent ses jambes fléchir légèrement, pris au piège entre la colère et la douleur.
Il inspire profondément, mais les mots restent coincés, brûlants, impossibles à prononcer. Et Minho, Minho attend, le cœur à nu, prêt à encaisser la tempête.
Un long silence retombe entre eux. Le vent s'est calmé, comme s'il retenait son souffle, suspendu à ce qu'il se joue là, entre eux.
Le noiraud ne bouge pas.
Son regard reste accroché à celui de son alpha, incapable de s'en détacher, incapable aussi de se résoudre à lui pardonner. Il le déteste. Oh oui, il le déteste de l'avoir laissé dans ces murs d'opprobre, de l'avoir arraché trop tard, de ne pas avoir été là, tout simplement. Et pourtant... pourtant... il a tant attendu ce retour, tant espéré ce visage... Son corps hésite.
Il fait un pas en arrière, un réflexe de défense, de survie.
Son cœur hurle « reste loin, ne viens pas, tu ne comprends pas ce que c'est d'avoir attendu dans le vide, de s'être senti abandonné jusqu'à se briser. » Mais ses doigts tremblent. Son souffle est court.
Il a tellement envie, malgré lui, de se blottir contre cette poitrine qu'il a tant de fois imaginée, dans les nuits les plus sombres. Alors, sans même s'en rendre compte, Jisung fait un pas en avant.
Un tout petit pas.
Comme un battement de cœur, presque imperceptible.
Le châtain le voit. Et dans ses yeux, une lueur d'espoir, fragile, vacillante, mais bien là.
L'oméga serre les poings. Il murmure alors, la voix brisée, mais il veut s'en assurer.
— Pourquoi t'es venu ?
Il détourne le regard, incapable de soutenir la tendresse qu'il devine dans les yeux de l'alpha. Ses joues prennent une teinte écarlate et une moue boudeuse prend place sur son visage.
— T'as pas le droit... T'as pas le droit de revenir... pas après tout ça.
Son pas en avant, pourtant, le trahit. Ses épaules s'affaissent légèrement, comme si tout le poids des années écoulées venait de le rattraper. Minho ne bouge pas. Il semble craindre que le moindre geste ne fasse tout s'effondrer. C'est dans un souffle qu'il reprend.
— Je ne voulais pas revenir comme ça... Je voulais être sûr de pas t'enfoncer encore plus.
J'ai mis trop de temps. Je sais.
Un frisson secoue Jisung. Il a envie de hurler. De pleurer. De le frapper. De s'accrocher à lui.
Tout se mêle, tout se bouscule, et il ne sait plus ce qui le tient debout.
Il fait un deuxième pas.
Presque contre son gré. Si proche, et pourtant encore si loin. Il lève les yeux vers le châtain, la mâchoire crispée, les yeux brillants d'une colère qui n'a plus vraiment de cible.
— Tu crois que ça s'efface ? Tu crois que parce que t'es là, maintenant... ça efface tout ce que j'ai vécu ?
Minho secoue la tête, les lèvres serrées.
— Non.
Il marque une pause, puis, plus bas, il continue.
— Je veux juste... que tu saches que je suis là. Maintenant. Si tu veux de moi.
Et là, le noiraud craque. Pas un grand cri, pas une explosion. Juste ce pas de plus, ce dernier pas, jusqu'à venir buter contre lui, jusqu'à sentir la chaleur de son corps. Il ne lève pas les bras. Il reste raide, mais il ne s'écarte pas. L'alpha baisse lentement la tête, son front frôlant celui de son compagnon sans oser un geste de plus. Le souffle de l'oméga tremble contre sa peau.
Et dans ce silence qui les enveloppe, un silence chargé de tout ce qui n'a jamais été dit, ils restent là, immobiles, à reprendre pied l'un contre l'autre.
Le front de Minho contre le sien.
Leurs souffles mêlés.
Et ce silence, plus éloquent que mille mots.
Jisung ferme les yeux, juste un instant.
Le poids de tous ces derniers mois s'efface l'espace d'un battement de cœur.
Il y a là, si près, ce parfum qu'il avait cru à jamais perdu... Celui de l'immortelle... Celui de Minho. Et la douleur revient, plus vive encore, tant il a espéré ce moment, tant il l'a redouté aussi.
— Pourquoi t'es revenu ?
Sa voix n'est qu'un souffle, si faible qu'il n'est même pas sûr que Minho l'ait entendu.
Pourtant, il sent la réponse avant même qu'elle ne vienne. Le léger tremblement du front contre le sien, ce soupir qui se mêla au sien.
— Parce que je t'ai jamais vraiment quitté.
Jisung rouvre les yeux, la gorge nouée.
— C'est faux... T'étais pas là. T'as laissé faire...
Il croit sentir Minho se raidir. Mais son front reste collé au sien, et sa voix, quand elle répond, est grave, lasse et douloureuse.
— Et ça m'a tué un peu plus, chaque jour passant.
Il serre les poings, si fort que ses jointures blanchissent.
— Tu crois que je dormais tranquille en sachant où t'étais ?
Noiraud a un ricanement amer.
— Moi, j'avais pas le choix.
Sa voix se brise.
— Moi, je dormais pas. Moi, je comptais les jours. Moi, j'attendais. Et toi, t'étais où ?
Il sent les doigts du châtain s'ouvrir, comme s'il voulait l'attirer, le serrer enfin... mais sans l'oser.
— J'étais là. À chaque instant. À chaque foutu instant. J'aurais tout donné pour changer les choses. Tout, tu m'entends ?
Jisung recule d'un millimètre. Juste assez pour que leurs fronts se séparent. Il plante ses yeux dans ceux de son vis à vis.
— T'as pas tout donné. T'étais vivant. Et moi, je mourais.
Et là, il la voit, la douleur nue dans le regard de son alpha. Cette douleur qu'il aurait voulu voir, qu'il aurait voulu frapper, mais qui ne fait que faire enfler la sienne.
— Je voulais te protéger. Tu comprends pas ? Si j'avais bougé, ils t'auraient brisé pour de bon. T'aurais fini dans un bordel comme celui où je t'ai emmené. Tu serais plus là pour me haïr aujourd'hui.
Le silence revient. Plus lourd, plus oppressant encore. Jisung serrait les mâchoires. Il tremblait. De rage, de chagrin, de fatigue.
— Et maintenant ? Qu'est-ce qu'on doit faire ?
Minho baisse les yeux, avant de les replonger dans les siens. Finalement, il laisse sa main se dresser pour venir glisser quelques mêches de cheveux derrière l'oreille de son compagnon.
— Je veux juste que tu sois libre. Que tu vives. Que tu souris et que tu sois heureux.
Une pause.
— Et si un jour... tu arrives à me pardonner... alors je resterai.
Jisung se détourne. Il a l'impression que s'il reste là une seconde de plus, il allait s'effondrer. Pourtant, au fond, il sait qu'il l'aime. Il l'aime à en crever. Il l'aime au point qu'il pourrait mourir pour lui.
— Je... J'ai compris tu sais... J'ai compris ce à quoi j'avais échappé en te croyant mort...
L'alpha se rapproche de nouveau un peu.
— Merci...
— Merci ?
L'entendre le remercier fait froncer les sourcils du châtain. Il ne comprend pas vraiment.
— Merci... Pour ce que tu as fais. Merci de m'avoir sauvé...
Minho baisse alors les yeux et se saisit de la main gauche de Jisung. Ce dernier le laisse faire, ne sachant ce qu'il compte faire. C'est lorsqu'il remonte doucement et délicatement sa manche que l'oméga serre le poing et cherche à récupérer son bras, mais son amant le retient. Il dévoile alors la longue cicatrice qui remonte au long de l'avant bras. Avec une douceur rare, un doigt est passé dessus en une caresse légère.
— J'aurai pu te perdre, en faisant ça... Et je n'étais même pas là...
Des bruits de pas sur les graviers les font redresser la tête. Le général se hâte en leur direction, et indique une sortie dans un coin du jardin, en la pointant du doigt.
— Minho, tu dois t'en aller rapidement. Va à la caserne.
Il lui tend alors un rouleau, une lettre à confier à quelqu'un de confiance.
— Demande Haruki Saitō, et donne lui ça. Il te donnera le logis.
Jisung s'inquiète immédiatement. Tout cela lui paraît précipité et sans fondement.
— Que se passe-t-il ?
— Minho est en danger. Ils veulent le traîner en procès pour trahison. Ils pensent qu'il joue les espions. Les absences ont été trop douteuses et le ministre est d'un naturel à voir des complots partout. Ils viennent ici.
Un silence brutal s'abat sur les trois hommes. Seul le bruissement nerveux du vent dans les arbres semble oser troubler l'instant. Jisung pâlit, figé, incapable de croire ce qu'il entend. Ses yeux vont de Katsuyuki à Minho, affolés. D'une voix blanche il répète les mots du général.
— Un procès pour trahison... ?
Minho, lui, serre la mâchoire. Il ne semble pas surpris. Une ombre passe dans son regard, comme s'il savait que cela finirait par arriver. Mais ce n'est pas pour lui qu'il s'inquiète. C'est pour l'oméga. Le soldat reprend, plus ferme.
— Il faut que tu partes, maintenant.
Le regard toujours ancré dans celui de l'oméga, il souffle sans bouger.
— Et toi ? Tu vas faire quoi, Jisung ? Si je pars...
C'est Katsuyuki qui répond, bien plus sec maintenant.
— Si tu restes, tu meurs, et ça, personne ici ne le veut. Ni lui, ni moi.
Le cœur de Jisung cogne dans sa poitrine, brutalement. Il fait un pas vers Minho, comme par instinct, puis s'arrête, tendu, tiraillé. Son regard accroche celui de l'alpha, désespérément. Il demande alors, presque enfantin dans sa peur.
— Tu... tu vas revenir ? Tu vas m'écrire ?
L'alpha approche, lentement. Il prend la main de son compagnon avec douceur, malgré l'urgence. Ses doigts sont froids mais sa poigne est ferme.
— Je reviendrai. Et cette fois, je resterai. Je te le promets.
Il baisse un instant la tête pour appuyer son front contre le sien. Un simple contact, mais qui contient tout ce qu'ils n'ont pas encore su dire. Le noiraud ferme les yeux. Il veut croire à cette promesse. Il doit y croire.
— Allez,Ils arrivent.
Le général gronde, plus inquiet que fâché.
Minho s'écarte enfin, relâche la main de Jisung comme à contrecœur, puis saisit le rouleau de la main du général. Il hoche la tête, une dernière fois. Un dernier regard. Et il s'élance, disparaît par la sortie dissimulée entre les arbres, sans un bruit. Dès qu'il s'éloigne, Jisung sent un froid immense l'envahir. Il reste là, figé, l'estomac tordu par l'angoisse. Finalement, il amorce quelques pas, il ne peut pas le laisser partir ainsi. Pas encore, pas comme ça. Il n'y survivra pas cette fois. Mais la main ferme du général le rattrape.
— Il va s'en sortir. Il est intelligent. Et Haruki est loyal. Ils ne l'attraperont pas facilement.
Mais le noiraud n'écoute déjà plus. Son regard reste fixé sur le vide, là où Minho a disparu. Il a la sensation absurde qu'une partie de lui vient de partir avec lui. Ses coeur s'emballe, sa respiration aussi. Le monde, autour, commence à vaciller.
Minho...
Minho...
Pas encore...
Pas encore.
Katsuyuki voyant l'état soudain inquiétant de son protégé, le soutient alors en le prenant contre lui.
— Ce n'est que pour cette nuit. Il reviendra, je t'en fais la promesse. Il va revenir très vite. Il ne faut juste pas qu'ils le trouvent ici.
__
Heureusement que le général est avec eux!
Je crois qu'il y a beaucoup de répétitions sur la fin, je n'ai plus les yeux en face des trous, j'améliorerai demain peut-etre :p
Vous suivez toujours? <3
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top