Chapitre 20 - t2
Le ciel est pâle et voilé, d'un gris laiteux qui efface les contours du monde. Un peu comme quand il se retrouve drogué pour se tenir sage et obéissant. Il ne pleut pas à grosses gouttes mais la bruine recouvre tout. L'air est chargé d'humidité, les premières brises tièdes du printemps qui arrive font frissonner doucement les murs de la maison d'éducation.
Jisung est déjà debout. Il n'a pas dormi. A dire vrai, il ne dort plus vraiment depuis qu'il s'est réveillé, le ventre creux, vide de son bébé. Quinze jours se sont déjà écoulés, pourtant tout paraît s'être dissous en une lente torpeur dans laquelle les heures se confondent. Pire encore qu'avant la naissance de ce petit être qu'il n'a même pas eu l'occasion de voir. Les drogues contre la douleur qu'ils lui donnent ne font que le perdre un peu plus. Même si sa conscience est très loin, perdue dans des sphères inatteignables, il n'en est pas dupe pour autant, il se doute bien que ces doses qu'ils lui injectent sont bien trop fortes pour qu'il vive ainsi bien longtemps. Pourtant il a mal. La cicatrice sous son nombril le tiraille à chaque mouvement. Un sillon rouge et tuméfié que les infirmières bandent régulièrement avant de le ceinturer avec force dans une ceinture rigide. Le paraître... La rigidité des étoffes est là pour dissimuler la faiblesse de son ventre qui peine à se remettre. Il faut plaire. Encore et toujours.
— Tenez vous droit monsieur Han. Vous êtes un présent. Un cadeau. Pas un convalescent.
Le ton est sec mais pas dénué de compréhension, et le noiraud tente de raidir son dos sans geindre à la brûlure ressentie, et il n'a pas répondu. Il ne dit plus grand-chose, au grand désespoir de Ren qui pensait avoir réussi à le dérider quelque peu.
On le lave, on le rase, on le vêt, avant de le maquiller un peu, comme chaque désigné par l'empereur. On leur a distribué des kimonos d'apparat, aux tissus somptueux, bridés de motifs floraux ou mythologiques. Les grues blanches volent au milieu des pivoines et des lotus pour échapper à la vue des dragons discrets qui se confondent en ton sur ton sur la soie. Le sien est de couleur ivoire, aux larges galons bleu très pâle, d'une élégance glacée, presque sacrée. Les broderies se détachent en couleurs irisées qui attirent l'œil. A l'aune des femmes, on le peigne avec soin avant de fixer ses cheveux relevés avec des épingles ornées de perles. A son grand soulagement, il évite toutefois le blanc sur la peau et on se contente de lui rougir un peu les joues, comme pour lui redonner un peu de vie.
— Jisuuuung! T'es... Wow ! Eh mon petit, on va les impressionner tu vas voir !
La voix enjouée de Ren fait lever le museau du noiraud, et il doit bien avouer que le japonais est particulièrement séduisant dans ses atours. Toutefois il ne tient pas en place, et une des gardiennes le suit de près pour essayer de finaliser la coiffure, cela dit, elle est trop petite pour atteindre la tête de ce grand jeune homme, alors après avoir regarder son épingle dépitée, elle s'en est retournée en haussant les épaules.
— Je suis tellement excité ! On va voir Tokyo ! J'ai hâte ! J'ai aussi tellement hâte de voir qui je vais avoir ! Je te préviens, si j'ai la chance de rester au palais, tu y seras convié tous les quatre matins !
L'oméga offre un sourire factice à son ami qui ne s'arrête plus de parler, et même s'il aimerait, il finit par ne plus l'écouter vraiment.
Tous parés, fardés et rangés de manières à bien paraître, les gardiens s'assurent que chacun des désignés est bien présent et bien présentable. La procession jusqu'au transport doit faire honneur à leur maison.
Finalement, lorsque tout est en ordre, le cortège s'ébranle pour rejoindre les rues animées de Kyoto, baignant dans la lumière blanche de cette fin d'hiver. Les passants s'écartent avec respect, admirant les silhouettes élégantes qui défilent sous leurs yeux. Kimonos somptueux, broderies délicates et couleurs éclatantes... Les Omégas et les femmes désignées rayonnent d'une beauté rare, presque irréelle. Leurs visages sont maquillés avec soin, leurs coiffures minutieusement arrangées, ornées d'épingles étincelantes qui captent chaque éclat du soleil naissant.
Leurs pas résonnent avec grâce sur les pavés polis, comme une danse cérémonielle célébrant leur rôle sacré. Nombre d'entre eux échangent des sourires confiants, fiers d'être choisis, honorés d'être les cadeaux offerts à la puissance de l'Empire. Leurs yeux brillent d'une flamme d'espoir et d'acceptation tandis qu'ils sont particulièrement honorés de ce destin vers lequel ils se dirigent.
Au milieu de ce tableau éclatant, une silhouette détonne. Jisung avance, le visage pâle et fermé, comme un homme qui marche vers sa fin. Son ventre douloureux est soutenu grâce aux étoffes, et il remercierait presque les gardiens d'avoir pensé à sa condition. Au travers de la buée que son souffle dégage dans l'air froid, il tourne la tête afin de jeter un regard à Ren. Ce dernier paraît si fier...
La foule, captivée par le spectacle, murmure des louanges et des exclamations admiratives.
— Regardez ces merveilles !
— Un honneur pour notre nation.
— Qu'ils sont beauuuux !
Les enfants, les yeux brillants d'étoiles, tendent les mains dans un geste de bénédiction silencieuse. Les gardes, impassibles, maintiennent le rythme, guidant ce cortège de fleurs destinées à éclore dans la grande ville.
Leurs pas les rapprochent des fiacres qui les conduiront à la gare la plus proche, imposante et froide, mais la procession ne faiblit pas. Les offrandes marchent fièrement, tandis que le noiraud, lui, sent sa résignation atteindre son apogée.
Jisung n'a jamais eu l'occasion de voir un train, que ce soit de près comme de loin. Alors le bruit, et la vision de ce monstre d'acier le pétrifie à mesure qu'il s'en approche. Il s'arrête, incapable de bouger, alors que la locomotive à vapeur rugit et crache sa fumée cendrée dans un vacarme étouffant. Il est presque fasciné malgré la drogue qui lui envahit les sens.
Ren glisse doucement la main dans la sienne, discrètement.
— C'est comme un cheval. Un cheval énorme, mais il ne mord pas normalement. Il se peut qu'il soit aussi têtu qu'un vrai cela dit. Ils l'ont fait venir ici juste pour nous !
Il ne répond pas, mais se saisit des doigts qui sont venus quérir les siens.
Une gardienne vient alors le saisir par le bras afin de le faire avancer pour monter dans le wagon qui leur est assigné. L'intérieur du compartiment sent la laque, le tissu, mais il n'a pas le temps de s'appesantir sur le décor qu'ils partent déjà. Et la fenêtre retient toute l'attention du jeune homme, qui, fasciné, s'en approche. Il n'a jamais vu le monde ainsi. Les collines s'effacent derrière la brume qui commence à s'élever, et l'horizon se tord au rythme du train qui accélère. Il reste collé à la vitre, incapable de ne pas regarder les paysages qui défilent si rapidement. Les champs se succèdent, les villages, les rizières, les bois encore nus.
C'est à peine s'il se rend compte qu'à mesure qu'ils s'approchent de la capitale, une petite chaleur réconfortante naît en lui, chassant le froid qui le ronge depuis des mois. La pensée l'effleure, il le sent finalement, mais elle s'échappe aussi rapidement qu'elle est venue, étouffée par les opiacés qu'ils lui ont injectés en dose un peu plus forte pour ce jour. Il n'aurait pas fallu qu'il s'enfuit. Son front se pose contre le carreau et ses paupières se ferment doucement. Respirer. Il faut respirer doucement. Durant un bon moment, sous le regard attentif de Ren, il se laisse bercer par les cahots du train.
Lorsqu'ils arrivent à Tokyo, il fait presque nuit. Le ciel se teinte d'un violet profond, et les premières lanternes s'allument autour du quai sur lequel ils sont descendus. Ils ont dû changer plusieurs fois de train, mais tout s'est finalement bien déroulé.
Des hommes et des femmes en uniforme les attendent, des femmes aussi, habillées à l'occidental, les visages impassibles. Chacun se salue en s'inclinant profondément, puis le groupe d'omégas et de femmes est aligné.
— Nous devons vous compter.
Cela fait, ils sont finalement conduits vers les palanquins et les fiacres qui les mèneront au palais. Une main passe dans le dos de Jisung afin de l'inciter à avancer, malgré sa fatigue et la douleur qui est revenue faute de ne pas se reposer.
On les installe dans une annexe du palais impérial, non loin de la cour principale. Il est cocasse de penser que la dernière fois que l'oméga a mis un pied dans un palais, celui-ci s'est fait attaquer. Cette fois tout est calme, les bruits sont étouffés par de lourdes tentures, les papiers muraux paraissent neufs, les sols brillent. L'air sent le bois poli, la poudre de riz et cette odeur sèche et fade des lieux sans vie. Les pièces sont dépouillées, presque vides, malgré les paravents richement décorés, les tapis brodées et des coffrets contenant des bijoux qu'ils ne sont pas autorisés à ouvrir seuls.
Ils ne sortiront pas. Offrandes, ils sont eux-même des bijoux auxquels il faut faire attention. On les garde donc enfermés dans des chambres, séparés selon leur statut et leur âge.
Le premier soir, Jisung ne demande pas son reste, et une fois couché sur un futon confortable, le sommeil le saisit si vite qu'il n'a pas le temps de laisser son esprit s'égarer. Ce n'est qu'au matin, un peu libéré de ses drogues qu'il réalise qu'il n'a plus froid. Doucement, presque tendrement, il passe une main sur son torse et esquisse un sourire léger. Malheureusement, il n'a pas le temps de profiter de la sensation que des jeunes femmes arrivent, apportant thé, compresses et bandages afin de le soigner. Et le noiraud hausse haut les sourcils lorsqu'il voit Daisuke entrer afin de lui faire son injection quotidienne.
— Bonjour Jisung. Je vois que tu as fini par avoir ton enfant. J'espère que tout s'est bien passé.
L'oméga observe le médecin, mais ne répond pas. Que dire de toutes façons ? Doit-il s'excuser pour l'avoir rossé comme il se devait ? Non... Au lieu de cela, il détourne le regard et se laisse faire.
***
— JI !! JIII ! Réveille-toi !
Comment ne pas ouvrir au moins un œil alors qu'il se trouve secoué comme un prunier par Ren qui semble être au mieux de sa forme. Le sursaut vaut bien un râle alors que Jisung saisit son ventre d'une main en grimaçant et se tourne de côté.
— Oups j'avais oublié. Hé Jisung ! Debout ! C'est le grand jour !
Un nouveau râle et ce dernier s'enfouit sous son édredon en espérant que le japonais va le laisser terminer sa nuit.
— Aller mon p'tit, on a du travail si tu veux paraître présentable. Vu ta tête, ça va durer des heures !
Le jeune homme se relève alors et se saisit des couvertures sous lesquelles se cache le noiraud.
—Mais laisse-moi encore un peu bon sang !
— De-Bout. Ils vont passer de toutes façons ! Je suis excité comme une puce !
Ne pas le voir serait être aveugle... Jisung en roule les yeux au ciel dans un mouvement à peine exagéré. Ce geste lui vaut une claque sonore portée à son derrière.
— Eh !
— OH ! Tu retrouves ta voix ! Tu vois, elle était pas bien loin. Aller la marmotte, debout !
Le jeune homme lui offre ses mains, mais l'oméga donne un petit coup dedans pour les repousser. Il veut y arriver seul même si c'est douloureux.
Finalement, on les a pomponné pendant des heures. Coiffés, rasés, on a vêtu Jisung d'une soie pâle, presque translucide, blanc et or brodé de fils d'argent. Il ne dit rien, se contente de regarder le sol devant lui, toutes pensées éteintes. Daisuke est revenu ce matin et ce dernier a prévenu les présents que la dose de ce jour était conséquente. Il ne faudrait pas d'éclat devant l'empereur. Et cela, l'oméga l'a bien senti.
— On peut pas lui épargner sa piqûre pour aujourd'hui ?
— Tu ne veux pas qu'il attaque Sa Majesté tout de même ?
— ... Non... Non bien sûr...
Le petit regard navré de son ami à la suite de ces quelques mots n'a même pas été capté par le noiraud. La femme qui le prépare, enroule le poignet gauche du noiraud dans une étoffe délicate afin de cacher la longue cicatrice qui lui orne l'avant bras, elle serait difficile à dissimuler autrement.
— Tu crois qu'ils seront beaux ? Gentils ?
Ils sont en file indienne en attendant d'entrer dans la grande salle où a lieu la cérémonie, et Ren est si excité qu'il n'arrive pas à tenir sa langue malgré les réprimandes répétées des gardiens. Il essaye de se faire discret lorsqu'il souffle aux oreilles du noiraud ses questionnements rhétoriques, mais ça ne l'empêche pas de recevoir un bon coup d'éventail sur le crâne. Jisung est dans un autre monde. Tout lui paraît flou. Tout lui paraît lent. C'est à peine s'il ne titube pas alors qu'il se sent partir dès qu'ils sont dans l'attente. Sa tête dodeline doucement sur ses épaules mais les voilà qui sont finalement conduit auprès de Sa Majesté.
Dans l'immense salle décorée pour l'occasion, l'air sent le bois brûlé, l'encens, l'arrogance impériale et l'alpha. On les fait passer avec une lenteur étudiée, entre les colonnes dans un silence presque religieux. Chaque murmure se répercute autour d'eux, et dans l'esprit de l'oméga ce n'est qu'un brouaha sans queue ni tête. Ils traversent ainsi les allées dans lesquelles toute la cour les observe avant qu'ils ne soient installés, chacun à leur place, à genoux, dans cette posture humble qu'on leur a inculqué. La pièce est pleine de monde, et le noiraud ne devine même pas les visages. Certains se dissimulent derrière de larges éventails ouverts, de riches vestures recouvrent les femmes, et les hommes sont guindés dans des uniformes trop cintrés. Sii les visages sont flous, les regards eux sont particulièrement nets. Ils sont avides, curieux.
Ils sont là, alignés le long d'un grand mur, offerts aux regards comme des biens précieux, exposés tels des pièces rares qu'on admire avant les enchères. Ils ne sont plus que des lots silencieux, soigneusement présentés à la convoitise de tous.
Jisung n'y voit pas très clair, ses pensées engourdies par les drogues, la fatigue ou peut-être les deux. Pourtant, la curiosité parvient à percer ce voile. Lentement, il relève la tête, juste assez pour observer ceux qui les scrutent avec attention, évaluant leur valeur comme on le ferait d'un bijou ou d'un cheval de course. Les lumières dansent devant lui, les visages flottent.
Et malgré tout... il le voit.
Cet homme.
Celui qui lui a enlevé Minho.
Il est là, tout près, comme s'il n'avait jamais quitté son ombre. Le cœur de l'oméga loupe un battement, mais son corps ne suit pas. Il ne peut que baisser de nouveau ses beaux yeux vairons, incapable de réagir autrement, englué dans cette torpeur qui l'empêche de fuir, de parler, de se défendre. Comme si même la haine, la rancœur n'avaient plus d'emprise sur lui.
Les invités affluent dans la grande salle, leurs pas feutrés résonnent sur le parquet vernis. Des hommes d'influence, des femmes parées de soie et de bijoux, des dignitaires venus de loin pour assister à ce moment d'apparat. Tous déambulent entre les colonnes, le regard affûté, jugeant d'un œil expert les silhouettes alignées contre les murs. Ils chuchotent, ils désignent du menton, jaugent les postures, les courbes, la jeunesse, la soumission, la prestance. Certains s'approchent jusqu'à frôler du bout des doigts un pan de tissu, un poignet gracile, un visage fardé. Un sourire entendu sur les lèvres, comme s'ils évaluaient la qualité d'un objet d'art ou d'un futur investissement. Il y a dans leurs yeux un mélange de gourmandise, de pouvoir et d'ennui feint, comme si ce marché de corps était à la fois banal et délicieux. Rien n'échappe à leur examen : pas une démarche, pas une inclinaison de nuque, pas une hésitation dans le regard. Ils sont là pour admirer et envier. Ils se demandent qui parmi eux auront droit à ces présents de qualité. Qui donc a été suffisamment bon avec l'empereur pour mériter d'avoir son oméga, sa femme ici présentés ?
Le brouillard épais dans lequel Jisung se perd s'ouvre soudain sous l'effet d'un parfum discret, presque timide, qui vient caresser ses narines. Un effluve épicé, doux et entêtant à la fois, qui remue ses entrailles et ranime son cœur engourdi. Il ne voit plus les visages, n'entend plus les conversations déplacées ni les rires forcés. Il n'y a plus que cette fragrance. Celle de l'immortelle. Une senteur chérie, gravée dans sa mémoire, qui soulève un frisson au creux de son ventre et fait perler une larme au coin de son œil.
Son museau se relève lentement, guidé par l'instinct, et ses yeux cherchent, fébriles, à percer la foule. Il est là. Minho. Il l'a suivi jusque-là. L'instant efface tout le reste, et dans l'oubli de l'endroit, le noiraud incline la tête, les traits adoucis d'une tendresse mêlée de douleur. Mais il n'obtient pas le sourire qu'il attendait. Non. Les sourcils de l'alpha se froncent, et ce regard voilé d'inquiétude vient percuter l'oméga en plein cœur. Il vacille. Il ne comprend pas.
Avec un regard amoureux, éperdu, Jisung se permet de le détailler. Malgré la brume qui l'enveloppe encore, malgré la douleur, il ne peut s'empêcher de le scruter comme s'il cherchait à graver chaque détail dans sa mémoire défaillante.
Minho est là, mais si différent des autres jours durant lesquels il le voit. Cet uniforme austère ne lui sied pas. Il semble trop rigide, comme s'il cherchait à l'enfermer dans un rôle qu'il n'a jamais voulu. Et cette femme à son bras, dont le rire cristallin tranche cruellement avec la gravité de son regard... Jisung fronce imperceptiblement les sourcils. Non, il ne comprend pas. Il n'aime pas ce que le fantôme de son aimé lui fait voir aujourd'hui.
Une larme silencieuse roule sur sa joue amaigrie, et, le teint livide, il rebaisse la tête. L'alpha serait si furieux de le voir ici. Furieux de l'état dans lequel il est.
Une mèche noire s'échappe de ce chignon impeccable qu'on lui a fait porter, venant retomber doucement devant son visage, comme une brèche, un rappel subtil que, malgré tout, il n'est pas aussi soumis qu'ils veulent le faire croire.
___
:o
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top