Chapitre 39
Combien de personnes Jisung a-t-il bousculées sur son passage ? Il ne les compte même plus. Son esprit est trop concentré sur une seule pensée : fuir. Il doit mettre le plus de distance possible entre lui et la demeure de Tian. Ses cheveux longs volent en tous sens dans son dos et devant son visage, suivant le rythme effréné de sa course. Le monde autour de lui est flou, un tourbillon d'ombres et de formes. La chaleur de son corps, la sueur qui coule dans son dos, n'est rien comparée à la brûlure dans sa poitrine, où chaque respiration lui arrache presque un cri.
Ses jambes, tendues comme des fils sous ses robes, menacent de céder à tout instant. La douleur dans ses hanches est si cuisante qu'il craint de tomber. Mais il continue à avancer, la souffrance dans chaque pas, sa volonté plus forte que la fatigue. Il doit, il DOIT y arriver. C'est tout ce qui compte.
Les passants, eux, ne se préoccupent même pas de lui. Ils vaquent à leurs occupations, comme si tout allait bien. Un marchand crie à la vente de ses produits, un couple se dispute, mais rien de cela n'atteint Jisung. Comment peuvent-ils être aussi insouciants ? Comment peuvent-ils vivre leur vie si simplement, si librement, alors qu'il a été enfermé, brisé, pendant si longtemps ? Il n'est pas le seul, pourtant...
Au coin d'une rue marchande, une maison attire son regard. Il l'a déjà vue. Pas une maison ordinaire, non. Un dragon sculpté orne l'avancée du toit. Ses pas ralentissent imperceptiblement.
C'est par ici, chez Hyunjin... Chez lui, ils sauront quoi faire de lui. Et peut-être qu'ils sauront où est Minho... À cette pensée, un éclat de larmes, douloureuses et pleines d'espoir, menace de déborder alors qu'après avoir observé autour de lui, il se remet en marche, désireux d'atteindre cet endroit salutaire. Les rues sont parcourues pendant ce qui lui semble être une éternité. Le jour commence à s'assombrir et l'air à se rafraîchir, mais il tient bon. Au coin d'une ruelle, il reconnaît l'endroit et sait que derrière ces habitations sommaires, les demeures des plus riches seront face à lui, dont celle de Hyunjin, tout proche.
Il s'avance d'un pas, mais ses yeux s'écarquillent quand il aperçoit une silhouette immobile devant l'entrée. Un policier. Jisung se fige, le cœur battant la chamade. Il recule d'un pas, puis de deux, se glissant derrière le coin de mur de la ruelle étroite. Il a oublié... oublié cette discussion, il y a quelques mois, entre les conseillers et Tian. Il avait fait surveiller les maisons des réformistes... Et cela n'a pas changé.
Un frisson glacé parcourt son dos. La peur monte en lui comme une vague déchaînée. Il a cru, un instant, qu'il serait en sécurité ici. Mais la réalité le frappe de plein fouet : il est encore prisonnier de son propre monde. Un monde où il ne peut même pas chercher refuge là où il pensait trouver un peu d'espoir. Là où il espérait revoir Minho.
Le vent frais de la fin de mars lui mord la peau à travers les tissus de ses vêtements. Il serre les dents, sa main se crispe autour du carnet qu'il tient toujours. C'est tout ce qu'il lui reste, cette petite chose fragile, un vestige de son passé, un espoir qu'il ne peut se résoudre à abandonner. Mais face à l'impasse devant lui, il doit faire une pause. Reprendre son souffle. Il est à bout. Il se laisse glisser le long du mur, jusqu'à s'accroupir, adossé à l'habitation. Ses doigts rougis par le froid se perdent dans sa tignasse sombre, serrant ses mèches dans un geste de désespoir.
Il se relève. Ses yeux à la couleur si étrange cherchent, une dernière fois, une ouverture, un chemin à prendre. Mais il sait déjà. Il ne peut pas y aller. Pas maintenant. Pas ici.
D'un dernier regard furtif, il contemple la maison de Hyunjin avant de tourner les talons, une moue sur le visage. Il a erré dans Séoul pendant des heures pour en arriver là, pour découvrir que la liberté n'était qu'un mirage. Un autre obstacle à franchir, encore et encore. Tian, quoi qu'il arrive, le tient enchaîné à son bon vouloir.
Le pas traînant, mais l'oreille aux aguets, l'oméga retourne dans les quartiers plus pauvres de la ville. Il a fui la demeure sans rien prendre avec lui à part ce maudit carnet. Il n'a pas un won, pas un mun qu'il pourrait échanger contre un repas chaud et un futon quelconque. Chaque respiration lui semble un fardeau, son parfum trahissant son désarroi et faisant naître dans son esprit la crainte qu'il ne faille qu'un instant pour qu'on le repère. Ils savent déjà. Ils savent. Il est un oméga, il faut le capturer.
Un bruit léger et clair attire son attention, comme le murmure d'un ruisseau qui s'écoule. Prenant le chemin d'où le son semble provenir, il s'avance, le pied lourd, mais la vigilance intacte. Il finit par tomber sur un vieux lavoir, situé à l'écart, à peine éclairé par les derniers rayons du jour. L'air est humide, la pierre de l'édifice froide et lisse sous ses doigts. La nuit tombera vite. Il se précipite vers l'eau, l'attrape à mains nues. Il étanche sa soif, puis, avec une gêne palpable, passe l'eau sur sa nuque et ses poignets, espérant réduire l'emprise de son parfum dévastateur. L'eau glacée fait naître un frisson qui le secoue de la tête aux pieds, mais il s'en moque. Chaque goutte le ramène à une douleur moins brûlante que l'angoisse qui l'étreint. Il frotte, il frotte, comme s'il pouvait effacer sa peur, mais rien n'y fait. Rien ne pourra la faire disparaître.
Las, il se laisse tomber contre le rebord du bassin, l'épuisement pesant sur ses épaules. Ses yeux se posent sur son reflet dans l'eau, tout juste discernable dans la lumière qui se fait de plus en plus timide. Il passe ses doigts sur sa joue, le contact glacial contrastant violemment avec la chaleur de ses larmes qui refusent de couler. Il a changé. Tellement changé. Où est donc passé cet éclat espiègle, ce petit air malicieux qui semblait toujours l'habiter ? Où est cet homme de quinze ans, le regard brillant d'espoir, qui se croyait invincible et plein de rêves ? Le visage qui lui revient n'est plus qu'un masque de gravité, de résignation, un homme de vingt ans, brisé, le cœur lourd d'angoisse et de souvenirs perdus.
Ses paupières se ferment lentement, et il s'accroupit, posant son front contre la pierre froide et humide. Le contact le foudroie d'un frisson glacé, un rappel brutal de la douleur de l'instant. Il tente de calmer son cœur, mais c'est une lutte de chaque instant, une bataille qu'il perd encore et encore. Il n'a pas le temps de se poser, de se réconcilier avec ses pensées. Il doit trouver un refuge, un endroit où il pourra échapper à la morsure du vent glacial, où il pourra enfin respirer sans que l'angoisse ne lui serre la gorge. Il doit trouver un endroit où il ne gèlera pas jusqu'à l'âme, un endroit où il pourra être protégé. Alors, l'air décidé, il se relève, une nouvelle fois, et reprend la direction des rues. Il ne peut se permettre de payer quoi que ce soit, alors il doit se trouver une grange. Point de futon, mais du foin en pagaille pour se tenir chaud au milieu des animaux de ferme.
C'est après ce qui lui semble être une éternité qu'il aperçoit enfin les abords de la ville, comme un mirage à travers la brume de son esprit épuisé. Il jette un coup d'œil autour de lui, les yeux fuyants, se forçant à observer chaque recoin, chaque ombre qui pourrait cacher un danger. Il avance encore un peu, sa démarche traînante, ses jambes comme ankylosées après tant d'heures de marche effrénée. La douleur dans ses muscles le dévore, mais l'instinct de survie le pousse à avancer. Quand il est enfin sûr que personne ne l'a suivi, il s'empare du verrou rouillé de la grange et pousse la porte avec une vigueur qu'il n'imaginait plus avoir. Un grincement métallique déchire le silence, puis l'écho des animaux le rejoint.
Les vaches, dans l'ombre, réagissent au bruit en poussant un meuglement sourd, et un cochon apparaît, curieux, son groin sale se frayant un chemin au-dessus d'une porte en bois usé. L'endroit est misérable, humide, mais au fond, dans un coin plus reculé, un amoncellement de paille l'attend comme un maigre refuge. Il s'y dirige d'un pas lourd, presque titubant, son corps déjà au bord du gouffre. Cela fait trop longtemps qu'il n'a pas eu l'occasion de simplement marcher sans crainte, sans être surveillé. Et maintenant qu'il a enfin trouvé un endroit où se poser, tout son être semble vouloir s'effondrer.
Ses doigts tremblent lorsqu'il repousse un ballot de foin pour y loger son corps, les muscles tendus sous la douleur de l'effort. Il se faufile entre les brins, cherchant un semblant de confort. Il s'assure que le foin est bien coincé, puis tombe à genoux, avant de s'abandonner complètement contre ce lit de fortune. La poussière de la paille entre dans ses narines, et l'odeur d'humidité et de fourrage envahit ses sens, mais c'est tout ce qu'il peut se permettre. Son corps proteste, mais il se laisse aller, incapable de tenir plus longtemps. Il ferme les yeux, essayant de chasser les pensées tourmentées qui l'envahissent. Épuisé, il se perd dans la douleur qui l'étreint, à la fois physique et psychologique.
Il ne sait pas ce qu'il va devenir, ni même si quelqu'un viendra le chercher, ni même si un jour il pourra retrouver la paix. Tout ce qu'il sait, c'est qu'il est là, seul, dans la nuit froide, dans une grange malodorante, et que cette situation pourrait être pire. Mais il n'arrive pas à échapper à la sensation qu'il est à l'aube d'une nouvelle tragédie, une tragédie qu'il ne contrôle pas.
***
C'est une douleur vive qui le réveille en sursaut. Le jour qui a envahi le lieu l'éblouit et il peine à reprendre suffisamment ses esprits pour se souvenir où il se trouve. Cependant, une voix particulièrement menaçante rugit à ses oreilles alors qu'il sent de nouveau la piqûre dans son flanc. Cette fois, il se rappelle et il entend alors les paroles de l'homme qui s'agite devant lui, une fourche à la main, pointée sur lui. L'oméga a un sursaut et se recule vivement afin de se soustraire à la menace.
— Dégage de là l'pouilleux !!
— Qu... Quoi ?
— Hors d'ma vue ! Sors d'chez moi misérable !
Jisung, tétanisé par la présence du propriétaire et la douleur, se traîne difficilement, les mains tremblantes cherchant à repousser la paille pour se lever. Il n'arrive pas à quitter l'homme des yeux, se méfiant de ce qu'il pourrait lui faire. Il n'a ni l'énergie ni le temps de négocier, seulement l'instinct de survie qui le pousse à quitter cet endroit, à fuir avant qu'il ne soit trop tard. Le noiraud se saisit de son précieux carnet et se hâte de trouver la sortie, toujours tourné en direction du paysan menaçant, encore couvert de paille, mais c'est bien le cadet de ses soucis.
Maintenant bien éloigné de la grange, le jeune homme tente de reprendre un souffle régulier et de se remettre les idées en place. Il se débarrasse du foin qui s'accroche au tissu de ses vêtements, et dans ses cheveux emmêlés, tandis qu'une idée germe dans son esprit. Il faut qu'il trouve Seungmin. Le médecin sera le plus à même de lui dire comment trouver Minho, comment faire passer ce carnet, la clé de sa liberté et qui lui ôtera cette épée de Damoclès qui stagne au dessus de sa tête en l'attente d'un mot pour s'abattre.
***
— S'il vous plaît, il est un peu plus grand que moi, il a un air doux...
Le noiraud parle à un mur. La femme s'éloigne de lui sans même un coup d'œil en sa direction. Et si seulement c'était la première à le faire... Il voit un homme qui les observe, et Jisung se rend auprès de lui, approchant comme s'il était son dernier espoir, mais la personne s'en va avant même qu'il ait pu l'atteindre. Dépité, l'oméga s'arrête et pousse un soupir à fendre l'âme, avant de lever le museau pour regarder le ciel. Le jour est déjà bien entamé, il n'a rien mangé depuis la veille au midi et il n'a toujours pas la moindre idée d'où peut se trouver le médecin.
— Je veux juste trouver Seungmin, le médecin... Juste ça...
Il manque se laisser envahir par le désespoir, mais il a trop risqué pour abandonner aussi facilement. Certes il est épuisé, et les conditions ne sont pas réunies pour que tout soit facile, mais il lui faut faire montre de plus d'optimisme. Alors il se reprend et après avoir regardé autour de lui qu'aucun policier ne soit présent, il s'en va rejoindre une autre rue passante, au milieu de laquelle il peut se fondre un peu parmi les gens.
Combien de temps passe encore sans qu'il n'obtienne le moindre renseignement ? Jisung ne saurait le dire. Les minutes s'étirent, deviennent des heures, et toujours aucune trace de Seungmin. Il erre, l'estomac noué, les jambes lourdes, la gorge asséchée. Ses doigts crispés sur son carnet sont l'unique preuve de sa détermination, alors que tout son corps lui hurle d'abandonner, de s'arrêter là, de céder à la fatigue.
Les passants le bousculent sans ménagement, certains lui jettent des regards dédaigneux, d'autres l'ignorent complètement. Il n'est qu'une silhouette de plus, un être sans importance perdu dans le tumulte de la ville. Son regard s'attarde sur les échoppes, les enseignes défraîchies, cherchant désespérément un signe, une indication, n'importe quoi qui pourrait le mener jusqu'au médecin.
Puis, enfin, alors qu'il traverse une rue plus calme, un éclat de voix attire son attention.
— Je vous dis que je n'ai plus rien pour aujourd'hui, revenez demain !
Jisung se fige. Son cœur rate un battement. Il connaît cette voix.
Sans réfléchir, il se précipite dans la direction du bruit. Au bout de la ruelle, une porte entrouverte révèle une pièce encombrée d'herbes médicinales et de rouleaux de tissus. Un homme au visage fermé, l'air agacé, congédie un client récalcitrant.
Seungmin.
Le soulagement qui s'empare de Jisung est si brutal qu'il en vacille presque. Il se sent prêt à pleurer, à s'effondrer là, mais il serre les dents et rassemble le peu de forces qui lui restent. Il doit lui parler.
D'une voix tremblante, il souffle.
— Seungmin...
Le médecin se tourne vers lui, fronçant légèrement les sourcils. Un instant, il ne semble pas le reconnaître. Puis son regard s'élargit, et son expression passe de l'incompréhension à une stupeur muette.
— Jisung ?!
L'oméga esquisse un sourire fatigué, vacille sur ses appuis, et s'accroche à l'encadrement de la porte pour ne pas tomber.
— J'ai besoin de ton aide...
Il n'en faut pas plus pour que le bêta se saisisse de son patient mal en point et le fasse entrer, non sans observer autour de l'échoppe, voulant être certain que l'oméga n'a pas été suivi. La porte est refermée et verrouillée derrière eux et Seungmin conduit le noiraud dans un siège confortable pour le laisser se reposer.
— Qu'est-ce que... Jisung, tu t'es enfui ?
Ce dernier voit son sourire s'élargir. Il est soulagé d'avoir enfin trouvé un allié et fier de son forfait.
— Oui, j'ai saisi une occasion hier.
— Hier ?? Mais tu... Laisse tomber, ne bouge pas.
Le médecin laisse un instant l'oméga qui se laisserait bien aller au sommeil, mais le médecin revenant avec un bol de riz et quelques légumes, il remet son projet à plus tard et se jette sur la nourriture. Seungmin l'observe, souriant en voyant ses joues s'arrondir comme celles d'un écureuil faisant ses réserves, et il finit par secouer la tête.
— Tu es recherché, tu sais, ça ?
Jisung se renfrogne et ne peut que hocher la tête, incapable de parler pour l'instant.
— Tu t'en doutes... Forcément... Ils sont passés hier en fin de journée, me demander si je t'avais vu. Je ne voulais pas le croire. Je me suis fais un sang d'encre, tu n'as pas idée.
Il faut dire que depuis deux ans environ, maintenant, ils sont devenus amis proches avec Minho.
— Et toi tu trouves prudent de te promener à découvert comme ça au milieu des rues ?
Jisung a enfin avalé sa monstrueuse bouchée et fait la moue aux paroles du bêta.
— J'ai fais attention. Je ne suis pas fou. Il est hors de question que je retourne là bas, maintenant. Je ne veux pas qu'il...
La phrase ne sera jamais finie, mais le nez bas de l'oméga fait soupirer Seungmin.
— Je ne vais pas pouvoir te cacher longtemps ici. S'ils reviennent ils... Te trouveront forcément...
— Je sais... Je n'ai pas pu aller chez Hyunjin hier... La maison était gardée...
— Oui ça fait un moment, ils surveillent tous les membres du conseil qui sont de son côté. Il semble que la Chine craigne une révolte plus que ce qu'ils veulent bien avouer.
— .... Et... Et Minho ?
Jisung n'avale plus rien alors qu'il pose la question quant à son alpha... Il promène ses baguettes machinalement au milieu du riz, observant les traces qu'il y fait.
— Il a été blessé il y a quelques mois. Son état a été critique, mais on a réussi à le soigner. Par contre, il a été reconnu, et la surveillance chez Hyunjin se faisant plus qu'étouffante, on a dû trouver un moyen de le protéger et de l'envoyer ailleurs. Nous sommes tous toujours en contact, mais ça devient compliqué et il faut réussir à déjouer de nombreux pièges.
Jisung sent son cœur se serrer à ces mots. Minho... blessé. Il a du mal à respirer, sa poitrine se comprime sous le poids de l'angoisse. Il s'accroche aux paroles de Seungmin, cherchant une lueur d'espoir, mais chaque mot alourdit davantage son fardeau. Il finit par demander d'une voix hésitante, presque tremblante.
— Il va bien, maintenant ?
Seungmin acquiesce doucement.
— Aussi bien qu'on peut l'être en étant un fugitif. Il n'a jamais cessé de se battre. Mais... il s'inquiète pour toi. Il a voulu venir te chercher plus d'une fois, mais c'était trop risqué.
Jisung serre les poings. Il n'a jamais douté de Minho, jamais cessé de croire qu'il essaierait tout pour le retrouver. Mais l'entendre ainsi, savoir qu'il a souffert, qu'il a risqué sa vie... Le médecin reprend, sur le ton de la confidence. Non qu'il craigne qu'on les espionne mais sait-on jamais vraiment.
— Écoutes, en attendant il te faut aller dans la montagne. Il y a un refuge pour les oméga qui ont été enlevés et qu'on a libéré. Les soldats, les milices ne les ont pas encore trouvé. Ils t'aideront à te remettre un peu sur pied, et quand je pourrai je signalerai à Minho que tu t'y trouves.
Le noiraud se redresse alors, s'accrochant aux pans du hanbok de Seungmin, sa tête se secouant brusquement.
— Non, non, je veux aller le trouver maintenant, dis moi où il est... Maintenant... S'il... S'il te plait...
Les deux mains du bêta viennent encadrer celles de l'oméga qui s'agrippe fortement. Comment le rassurer alors qu'il vient de passer de longs mois enfermés loin de son alpha ?
— Ce n'est pas sûr pour toi, pas du tout, bientôt ils vont quadriller la ville et tu ne pourras plus aller nul part, et je ne sais pas où il se trouve. Lui et son groupe bougent constamment pour ne pas se faire prendre. Je n'aurai des nouvelles que quand il aura décidé de m'en donner, pas avant.
Jisung sent la panique l'envahir, un désespoir presque enfantin le gagner alors que ses doigts crispés refusent de lâcher le tissu du hanbok de Seungmin. Il ne peut pas attendre. Pas encore. Il a trop attendu, trop souffert, trop perdu pour qu'on lui dise encore une fois d'être patient. Sa voix se brise quand il souffle ses paroles.
— Mais... Et s'il lui arrive quelque chose d'ici là ?
Seungmin serre un peu plus ses mains, cherchant à l'ancrer, à lui faire comprendre. Il réplique doucement, souhaitant se montrer chaleureux et réconfortant malgré tout.
— Et s'il t'arrive quelque chose, à toi ? Minho n'a pas survécu à tout ça pour te retrouver mort dans une ruelle.
Ces mots frappent fort. Jisung frissonne, son souffle tremble. Il ferme les yeux, tente de calmer son cœur qui cogne si violemment dans sa poitrine qu'il en a mal.
— Je ne veux pas être loin de lui.
Son murmure est à peine audible, mais Seungmin soupire, compatissant, mais inflexible.
— Je sais. Mais tu dois tenir encore un peu. Minho fait tout pour que vous soyez libres ensemble. Ne ruine pas ses efforts en prenant des risques insensés.
Jisung inspire profondément, et enfin, ses doigts se desserrent. Il n'a pas le choix.
— La montagne...
Il souffle, sa voix est basse et résignée. Seungmin acquiesce.
— La montagne. Dès la nuit tombée, je te ferai sortir d'ici.
Jisung déglutit, et cette fois, il n'essaie plus de protester. Parce que malgré la douleur et la frustration, il sait que c'est la seule solution. Pour l'instant. De toutes façons, il veut être auprès de Minho, mais arrivera-t-il seulement à le regarder dans les yeux, à le laisser s'approcher... Rien n'est moins sûr. Alors oui... Peut-être que la montagne est un refuge plus raisonnable que les bras de son alpha.
Cherchant quelque chose dans son dos, l'oméga tend le carnet au médecin tout en se laissant s'avachir contre le dossier du siège, soudain las de tout.
— Avec ça... Vous pourrez faire tomber... Tian... Et mon Père...
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