CHAPITRE 7

LANDO

Posé dans un fauteuil cocon, je fais défiler mon fil Instagram sans grand intérêt. Je me fais clairement chier. L'effervescence du Grand Prix de Monaco vient de se terminer et alors que tout le monde pense encore à la victoire de Leclerc, ils ont tous oublié la mienne à Miami.

Je n'arrive plus à gagner. Le week-end dernier j'ai fini derrière Max et y'a deux jours je n'étais pas foutu de faire plus que 4e. Cette position est la pire qui puisse exister dit-on. Aux pieds du podium, il n'y a rien de pire que ça. Pour moi, c'est la deuxième. Juste avant le Graal, c'est clairement la place la plus frustrante. Moi je cherche la victoire, pas la deuxième marche. Je m'en fiche des 18 points.

Si j'avais pu accélérer plus, ou dormir mieux, peut-être que ça aurait pu être différent. Je dors pas en ce moment. Je ne fais que réfléchir. Tout. Le. Temps. Mes pensées ne veulent pas me foutre la paix.

Donc, à 1h du mat, je prends l'air sur mon balcon et essaye de renvoyer ces insomnies dans leur basque. Mais rien n'y fait. Elles ne font que de me narguer.

Ce soir, c'est encore le cas. Mes parents ont repris l'avion vers 20h et maintenant, je suis tout seul comme un couillon. Enfin, je pourrais l'appeler, mais je ne suis pas d'humeur.

Quoique. C'est généralement quand j'ai pas l'humeur que je veux la voir. Mais elle m'énerve en ce moment. Je sais pas ce qu'elle a. Elle sait ce qu'on est pourtant, mais elle veut plus. Toujours plus. Mes amis ne l'aiment pas, mes parents non plus. Moi, elle me divertit. Elle me change les idées l'espace d'une nuit seulement, mais pas pour plus longtemps.

Je pose le téléphone sur mes genoux et regarde le ciel étoilé. Oh si je pouvais quitter ce monde pour une bulle l'espace d'une journée. Si je pouvais échapper à cette pression et ces attentes le temps d'un week-end. Si je pouvais aller ailleurs, je le ferais tout de suite.

La sonnerie de mon smartphone coupe court à mes pensées. Qui peut bien m'appeler à 2h du mat ? Tout le monde dort à cette heure-là. Tout le monde ? Pas la personne qui m'appelle apparemment.

Je décroche après avoir regardé le correspondant.

_ Ouaip ?

_ Lando, Dieu merci !

_ Un souci Garrix ? demandé-je en me redressant de mon fauteuil cocon suite à une intonation partagée entre le soulagement et la préoccupation.

_ Tu peux me rendre un service ? Tu me sauverais la mise vieux !

_ Bien sûr. Il se passe quoi ? Ça a l'air grave ton problème. T'es sûr que ça va ?

Là je suis inquiet. Martijn n'est jamais aussi touché à ce point ; à moins que ce soit quelque chose qui le tienne à cœur.

_ Moi ça va oui.

La tension descend. Mes épaules se soulagent. Je m'affale dans l'assise moelleuse.

_ Alors ? C'est quoi ton souci ?

_ Tu fais quelque chose tout de suite maintenant ?

_ À part essayer de compter les moutons pour dormir ? Nope, m'exclamé-je en riant légèrement.

_ Parfait parfait. Tu peux aller à Paris pour moi ?

_ Qu'est-ce que j'irai foutre à Paris ? Il faut plus de 9h de route pour y aller, répliqué-je sans tact, absolument dépassé par cette situation.

Jamais j'irai à Paris tout de suite, faut pas déconner non plus.

_ Ouais, mais je te l'aurai pas demandé si j'avais pu me déplacer. C'est un peu une urgence et tu es le seul proche de Paris qui la connaît.

_ Ta meuf a un problème ? ricané-je.

Je réalise.

_ Mais depuis quand t'en as une d'ailleurs ? Même pas tu me le dis ! m'exclamé-je presque vexé.

_ J'en ai pas. C'est une amie.

_ Pour me faire intervenir en urgence à l'autre bout de la France à ses côtés, c'est une amie ? Elle est bonne celle-là. Elle l'est d'ailleurs ?

_ Nan mais t'as quoi en ce moment ? T'es insupportable. C'est pas compliqué ce que je te demande.

_ Roh calme-toi Marty, ça va je déconne, contré-je presque soulé, à deux doigts de raccrocher.

_ Peut-être mais t'es chiant à force. Alors ?

_ Mais je sais même pas qui c'est ta demoiselle en détresse !

_ Alizée.

Alizée. Alizée Isobel Dumas. Son visage me revient à l'esprit. Son rire et son sourire apparaissent comme un flash. Je fixe un point au loin en me laissant emporter par les souvenirs.

Sa spontanéité. Son humour. Sa joie de vivre. Son côté solaire. Son stress. Ses gamineries. Son sourire. Son rire. Ses yeux ordinaires. Sa personnalité se fraye un chemin jusqu'à moi.

Je secoue la tête et tente de me l'enlever de la boîte crânienne. La voix de mon ami me ramène à la réalité après m'avoir interpellé plusieurs fois apparemment.

_ Oui ? Tu disais ?

_ Eh bah. T'étais où ?

_ Rendre visite à Pesquet.

L'humour permet de me sortir de situations délicates comme celle dans laquelle je m'étais plongé il y a peu. C'est ma botte secrète. Ça passe crème pour mes interlocuteurs et les médias, mais seul moi je suis au courant de ce que je pense réellement.

_ Pourquoi tu me missionnes d'aller à Paris ? Il se passe quoi ?

_ Je l'ai souvent au téléphone et...

Comment ça il l'appelle ? Depuis quand il a son numéro ? Je ne pensais pas qu'ils étaient aussi proches ces deux-là...

_ ... pleurait et ça allait pas du tout. Je me fais pas mal de souci et j'aimerai bien que tu montes pour t'assurer qu'elle va bien car franchement ce n'est pas la grande forme.

_ Qu'est-ce qu'elle a ? demandé-je soucieux, à présent debout en train de marcher vers mon dressing.

Moi qui pensais qu'elle souriait pour n'importe quelle occasion et surtout tout le temps, je me rends compte que ce n'est pas le cas. Elle semble dissimuler pas mal de trucs sous son corps de jeune adulte.

_ Je pense qu'elle est au bord du craquage. Sans compter ses parents qui lui foutent une pression de dingue. Elle arrive plus à-

Il en a trop dit. Le téléphone placé en équilibre contre une oreille, j'enfile mes Nike Air et prends une veste assez chaude. Dans un sac à dos, je fourre deux ou trois vêtements et le nécessaire de toilette. Je prends les clés du SUV Lamborghini dans l'entrée, enfile une casquette et ferme la porte de mon appartement.

_ Bon c'est pas que je t'aime pas Marty, mais je vais bouffer les kilomètres au lieu de compter les moutons. Et j'aime bien conduire en solitaire.

_ Ah bah le revoilà le Lando serviable !

_ Ouais c'est surtout parce que j'arrive pas à dormir et que je me fais chier ici.

_ Si ça te soûle, tu me le dis et je demande à Alex d'y aller, répond Martijn d'un air dur et froid. Oh mais elle est sur Paris en plus ! T'embête pas je vais lui-

_ Trop tard. Je suis dans l'ascenseur et bien réveillé. Je veux bien que tu me files son adresse par contre. Sinon passe-moi son numéro et je lui demande directement, proposé-je.

_ Je te file son adresse t'inquiète.

Je lève les yeux au ciel et secoue ma tête. Nan, mais je vais pas te la piquer...

_ Préviens-moi quand t'es arri-

Je raccroche.

Peu de temps après, je reçois l'adresse de la brune et l'entre dans le GPS. 9h de voiture.

Let's go Lando. J'y serai en 8h en appuyant un peu vite sur la pédale. Oops.

Moi qui pensais que j'allais trouver le temps long pendant la route, c'est tout le contraire. J'ai avalé les kilomètres avec une playlist quelconque, les doigts battant le rythme sur le volant. Moi qui pensais m'endormir à un moment, j'ai eu faux sur toute la ligne. Mes pensées ont été omniprésentes. Au lieu de ruminer sur mes performances pathétiques ou d'autres choses, j'ai concentré mon esprit sur Alizée en tentant de savoir ce qu'il se passait. Mine de rien mon pote est resté très flou.

Faire 8h de route pour rendre service et remonter le moral à une quasi-inconnue. Il faut être gravement atteint n'empêche. Mais qu'est-ce qu'il m'a pris ? C'est à ne rien y comprendre.

J'arrive à Paris sous les coups des 10h du matin, juste après les embouteillages. J'ai mis une heure de moins que prévu en appuyant un peu (beaucoup) sur l'accélérateur, conscient que j'ai déclenché plusieurs flashs sur mon passage. Et ce n'était pas les paparazzis.

Je m'esclaffe à ma connerie. Alors que je suis en train de trouver une place dans un parking payant près de chez Alizée, c'est-à-dire dans le 2e arrondissement, Insomnia de Faithless passe.

"I'm wide awake in my kitchen // It's black and I'm lonely // Oh, if I could get some sleep"

J'esquisse un sourire. Ça c'était moi y'a 8h. Je baille un coup. Le sommeil a décidé de me rattraper, l'adrénaline ne doit plus couler dans mes veines.

Ma voiture garée dans un parking Indigo à cinq minutes à pied de la place des Victoires, en plein cœur de la capitale, je foule la rue d'un pas rapide, mon sac à dos sur une épaule.

Je rentre enfin dans un immeuble typiquement parisien d'une beauté sans égale. Les escaliers sont en béton et en bois, recouverts d'un tapis qui monte, j'imagine, jusqu'au-dessus. Pas mal le bâtiment. Je veux pas être la concierge, ça doit être bien chiant à nettoyer...

Je gravis alors les trois étages au pas de course. Pas d'ascenseur dans cet haussmanien. Je comprends pourquoi elle les aime pas. C'est juste qu'elle n'est pas habituée.

Un sourire furtif fait son apparition, et avec lui un souvenir. Ah, qu'est-ce que j'ai adoré ce petit moment. Je ne voulais pas qu'elle gagne et pourtant elle a réussi à me laminer alors qu'elle était en robe. Cette fille est vraiment une enfant dans un corps d'une jeune femme de 25 ans. Le contraste est dingue, mais plaisant.

Grande et fine, elle n'a pas beaucoup de formes, mais c'est clairement son sourire qui fait tout son charme. Elle n'est pas gaulée comme une Kardashian ou une mannequin refaite, mais elle pourrait très bien être une star des catwalks et une admiratrice des appareils photos si elle le voulait. Sa simplicité vient lui apporter un truc qui contrebalance avec ses fesses peu marquées. Un sourire en coin se dessine sur mes lèvres. Je l'enlève au moment où je toque à la porte.

Des pas lourds se font entendre dans ce que je pense être un couloir. Ça grince. Le bruit s'arrête. L'épaisse porte en bois se déverrouille.

Alizée est en face de moi. Yeux cernés, cheveux foncés en bataille, elle est vêtue d'un t-shirt noir Quadrant trois fois trop grand pour elle et d'un short en lin. La vue n'est pas désagréable.

En me voyant, ses yeux s'écarquillent. Elle se les frotte vigoureusement et me regarde une autre fois en battant plusieurs fois les cils.

_ Mais ? Tu fous quoi ici ?

_ Bonjour à toi aussi birthday girl.

_ C'est plus mon birthday depuis belle lurette Norris. Tu devrais te mettre à la page, assène-t-elle.

Elle est de bien bonne humeur ce matin. Elle ne paraît pas sur le point d'exploser en larmes ou de tomber en dépression. Dites-moi pas que j'ai fait 8h de route pour rien ? Putain Garrix...

_ Bon, tu me laisses rentrer que je m'affale dans ton canap, je suis claqué là, dis-je sans ménagement en lui forçant le passage.

Facile, elle n'a aucune force. Ou alors elle ne la montre pas.

Je me fraye un chemin et arrive directement sur la pièce principale décorée avec goût dans un style contemporain.

Le canapé d'angle moelleux de couleur crème aux nombreux coussins m'accueille à bras ouvert. J'ignore les interrogations de la brune et m'affale dessus, prêt à rattraper mon sommeil.

_ Tu te crois chez toi peut-être ?

_ Juste deux heures. Donne-moi deux heures et je te réponds après, réponds-je la tête enfoncée dans les coussins, à plat ventre sur une méridienne aussi confortable qu'un nuage.

Je tourne ma tête sur le côté de manière à pouvoir respirer, ramène un bras vers moi et sombre dans une grosse sieste, emporté dans le cocon enveloppant du canapé.


🏎🎡🏎🎡🏎🎡🏎🎡

LANDOOOO IS ON POOOOLE FOR THE DUTCH GRAND PRIIIIX

Heureusement que c'est un chapitre spécial point de vue de Lando alors !!

Breeef, on en pense quoi de ce petit Lan ?

Un peu jaloux sur les bords, vraiment courageux de conduire autant en pleine nuit, Lando a mon cœur bien qu'il fasse sa tête de mule hihi

Garrix aussi, vraiment soucieux pour Ali !

Vous auriez réagi comment à la place de la brune vous ?

Demain, loooong chapitre de 3000 mots. Et mille mercis 🫂🫶🏻

Much love,

Chloe ❤️

🎶 Insomnia - Faithless 🎶

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