La semaine passée, Rachel est beaucoup venue chez moi, d'une part parce que c'est les vacances, d'autre part et surtout parce que selon elle je n'étais pas prêt à séduire une fille. Elle m'a filé tous ses tuyaux pour toutes les situations. "Si elle rougit, fais ci", "Si tu la vois pleurer, fais ça" et encore une liste interminable de conseils utiles mais un peu casse-pieds à la fin. On est vendredi, il est 19h45 et elle m'a dit tout à l'heure, je cite, "mon Dieu, je sais trop bien enseigner la drague, Ethan, si t'étais pas mon meilleur ami, je te demanderais de sortir avec moi tout de suite". Je pense pouvoir gérer un minimum tout à l'heure.

Je me regarde une énième fois dans le miroir. Je porte une chemise blanche et un pantalon noir, ainsi qu'une veste accordée au bas. Je n'ai pas de cravate et j'ai déboutonné les deux premiers boutons pour laisser apparaître le début de mes clavicules bien dessinées. Je sens qu'il ne va pas faire froid et j'aime bien me mettre en valeur. Mes cheveux sont coiffés un peu différemment de d'habitude, j'ai tenté de les rabattre en arrière, sans trop de succès, mais ça me donne un style. Pour finir, j'ai des Docs aux pieds, ce qui me donne un charisme incroyable, je trouve. J'ai également opté pour une petite chaîne en or autour du cou. Bon, j'ai l'air pas trop mal.

Soudain, ma porte s'ouvre sur ma mère. Il faudrait vraiment qu'elle apprenne à frapper avant d'entrer. Elle était encore plus enthousiaste que moi à l'idée de ce bal, lorsque je lui en ai parlé, et elle voulait absolument m'y conduire. En même temps, je ne vois pas comment j'y serais allé autrement. Elle me détaille de la tête aux pieds, sans aucune gêne.

- Ethan, tu es magnifique ! T'as intérêt à te trouver quelqu'un d'ici la fin du lycée !

- J'y travaille, Maman.

- Un nom, peut être ?

- Un jour, peut être. Bon, c'est pas tout ça, mais je vais être en retard si on décolle pas maintenant.

- Ah, mais oui ! Va dans la voiture, je me chausse et j'arrive.

Elle sort en trombe de ma chambre, sans fermer la porte, évidemment. Je stresse un peu, je l'avoue. Je ne sais pas quoi faire à propos de Mary, si je dois tenter ou pas, mais j'ai peur d'aller trop vite. Je sors de la pièce, éteint la lumière et me laisse glisser sur la rambarde, jusqu'en bas des marches. Je me dirige vers la petite voiture de ma mère et m'installe à la place du mort. La proprio me rejoint en moins d'une minute et met la clé dans le contact. Elle démarre, et nous voilà lancé sur la route en direction du lycée. Rachel, Steve et moi avons rendez-vous devant la grille. Lorsque nous arrivons, dix minutes plus tard, j'aperçois mon pote à l'endroit prévu, mais aucune trace de ma meilleure amie.

Je descends de la voiture et dis à ma mère que je lui enverrai un message pour rentrer qu'elle sache quand venir me chercher. Elle repart et je vais voir Steve. Il est habillé à peu près de la même manière que moi : costard, mais avec chemise ouverte au premier bouton seulement.

- Où est Rachel ? je demande.

- Elle est derrière toi.

Je n'ai pas le temps de me retourner, que je sens quelqu'un me sauter dessus. Rachel descend de mon dos et va se poster à côté de Steve. Comme au dernier bal, elle magnifique. Elle sait comment se faire briller. Elle a choisi une robe noire sans manche avec un bustier rose, évasée en bas avec une longue fente lui remontant jusqu'en haut de la cuisse gauche. Elle a pris un vêtement accordé à ses cheveux. Elle porte également une paire d'escarpins noirs en plus du reste de sa tenue qu'elle a additionné avec des bijoux tous plus beaux les uns que les autres. Elle est à couper le souffle. Mais ce n'est pas celle que j'attends ce soir.

- Wouaaah, Ethan, elle va te tomber dans les bras !

- Merci, tu es très jolie aussi, comme toujours.

- Attends, tu rigoles ? intervient Steve. J'avais pas pu venir au dernier bal, mais Rachel, t'es une vraie bombe en robe de soirée !

- Merci !

Elle semble toute heureuse du compliment. Ça me fait sourire. Une jeune fille nous rejoint et je reconnais la copine de notre ami. Elle est brune aux yeux noisettes et elle porte une robe blanche à manches longues serrée au niveau de la taille et très, très courte. Elle a beaucoup de maquillage très visible, et, de ce que j'ai vu d'elle la semaine dernière, elle m'a l'air superficielle. J'ai quand même parié à Rachel qu'elle resterait jusqu'à la fin des vacances.

- Hey, Tiff ! s'exclame Steve.

- Salut !

Je la salue poliment, tandis que Rachel roule des yeux, se retenant de l'insulter. Je me demande quand même ce qui fait qu'elle déteste autant les nanas de Steve.

- On y va ? demande ce dernier.

Sur ce, nous entrons dans le bâtiment. Le hall est décoré de ballons colorés et de banderoles "bonne année". Il y a un buffet au milieu et je peux voir un arche de ballons dehors. L'ensemble est très festif et je dois dire que Rachel et ses compagnons se sont plus que bien débrouillés. J'ai lu dans le message sur l'ENT que nous aurions accès au hall, aux couloirs du rez-de-chaussée et à la cour. Ça ne me concerne pas, mais il y avait une centaine de place limitées pour les personnes externes. Je vois en effet quelques têtes que je ne connais pas. Nous avançons parmi les élèves, tous plus beaux les uns que les autres. Nous nous dirigeons vers un coin plutôt tranquille.

- Alors ? demande notre amie, très fière.

- Vous avez géré, je la complimente.

- Ouais, c'est génial, renchérit Steve.

Rachel sourit d'un sourire sincère. Je souris à mon tour, heureux de la voir comme ça. Je scrute les élèves qui passent devant moi. Ils ne me voient probablement pas, un pilier me cache à leurs yeux. Par contre, moi, je les vois très bien. Je guette une présence très attendue. Léna m'a dit qu'elle avait convaincu sa correspondante de venir au bal avec elle. Étant officiellement inscrite au lycée jusqu'à mi-janvier, elle a pu y aller sans problème de place. Quelques élèves se dirigent vers la cour. J'aperçois au loin Léna qui entre, suivie de près par Mary. Wouah, je dois dire qu'elle est juste magnifique. Elle a opté pour une robe verte à paillettes du même style que celle de Rachel, mais avec des bretelles. Elle est accordée à ses yeux et le résultat est juste magnifique. Je sens mon visage chauffer.

C'est alors que j'ouvre grand les yeux. Mon visage refroidit. Je cligne plusieurs fois des yeux pour m'assurer que c'est bien la réalité. Non je ne rêve pas, non seulement en chair et en os, mais aussi en jean, chemise et bonnet noir passe devant moi la face d'ange avec une fille inconnue au bras.