Chapitre 3

Steve tient le blond par les cheveux et s'applique à lui expliquer la vie à travers des murmures très malaisant. Il a voulu me faire essayer une fois pour me montrer et, depuis, j'évite de me friter à lui, comme je ne sais pas qui gagne au corps à corps entre nous. Le plus petit n'a pas l'air d'apprécier à en juger par son expression faciale. Il a l'air en stress et paniqué. Au bout d'un moment, il cherche la merde, il la trouve et il s'en prend dans la tronche. Je vais pas jusqu'à lui souhaiter du malheur, mais je vais certainement pas le défendre.

- ... Est-ce que c'est clair ? termine Steve.


L'autre n'a pas besoin de parler, on connaît la réponse. Sa tignasse est enfin laissée en paix et le plus grand sort des toilettes en dispersant la foule au passage. Il ne reste que le blond et moi dans la pièce. Je remarque qu'à cause de mon ami, il n'a plus sa capuche. Je ne l'avais jamais vu sans, ça fait bizarre. Je sais pas ce que lui a dit Steve, mais il a l'air tout bloqué.


Je commence à me diriger vers la porte tandis que lui se réveille enfin et court vers les lavabos pour essayer de sauver son pull. J'hésite à lui faire un croche pied, mais je pense qu'il a eu son compte. Il ouvre un robinet, remarque que je suis toujours là, semble hésiter, puis il murmure un "fait chier" avant de retirer son sweat pour le mettre dans l'eau. Et bah, plus de révélation sur lui ces cinq dernières minutes que depuis que je le connais, c'est à dire trois mois. Il porte sous son sweat un T-shirt à manches longues blanc plutôt moulant qui révèle un semblant de fine musculature.

- T'as fini de mâter ?! aboie-t-il. Barre toi !

- OK, OK ! Eh ! Si t'as besoin d'une excuse pour tes parents, tu leur dit que c'est à cause de ton petit ami !


Sur ces doux mots, je sors des toilettes en esquivant de peu le couvercle de la poubelle qui m'était destiné. Comme son pull est très large, je n'avais jamais eu l'occasion de savoir à quoi il ressemblait. Il pourrait avoir du succès s'il n'était pas aussi exécrable. En soi, tout le monde sait qui c'est. Mais je ne l'ai jamais vu être ami avec autre chose que la solitude et il n'est connu du lycée que comme "l'ennemi d'Ethan qui lui fait des coups de pute". Après, il se démerde, c'est pas mon problème, hein.


Je marche dans le couloir en attendant patiemment que la sonnerie me force à aller en cours. Elle ne tarde pas et je pars chercher mon sac dans le casier (j'ai changé le code au passage). Je grimpe les marches de l'escalier ouest une à une. C'est bête, on est pas si différents, en soi. On est tous les deux beaux, connus des autres élèves, d'éternels célibataires (moi par choix et parce que je n'ai pas encore rencontré la fille que je veux, je ne sais pas pour lui)... Bah il est con aussi. N'empêche qu'il est fort. Il m'a fait chier dès l'instant où il a passé la porte du lycée, à la rentrée de septembre. Il était nouveau donc je suis allé lui dire bonjour et il m'a royalement ignoré. Je pensais qu'il était juste timide donc j'ai un peu insisté après, et puis il a commencé à me jouer des sales tours. Depuis, c'est la guerre. Je rejoins ma salle juste avant que le prof ne me casse le nez avec.


Le reste de la journée passe tranquillement et, à 16h, je quitte finalement l'établissement pour retrouver mon bus. J'aperçois le blond pendant une dizaine de secondes. Il porte de nouveau son sweat qui est gris plutôt que noir à certains endroits. La peinture n'est pas partie. Il a un air de stressé sur son visage et se ronge les ongles en sortant du lycée. Je me surprends à ressentir une pointe de culpabilité. C'est vrai que, jusqu'ici, à chacun de ses coups, je m'énervais beaucoup et ça l'amusait, mais lui me jetait toujours un sourire narquois, voire un regard de colère, quand je lui renvoyais la balle, peu importe ma vengeance. Ça n'avait jamais vraiment dépassé ça. J'imagine que ça lui passera.


Je grimpe dans le véhicule et valide mon pass avant de, de nouveau, rejoindre une place libre. Le bus démarre et roule quelques mètres avant de freiner brutalement. La porte s'ouvre et le chauffeur se met à engueuler quelqu'un. Ce quelqu'un, qui n'est autre que Rachel, s'excuse rapidement, valide son pass et vient s'asseoir à côté de moi. Je la regarde sans comprendre.

- Je peux savoir ce que tu fais là ?

- Pourquoi je ne serais pas là ?

- Parce que c'est pas ton bus ?

- Oui, mais mon père ramène sa nouvelle copine à la maison, il l'aime vraiment, tout ça et il veut passer la soirée avec elle, tranquille. Du coup je crèche chez toi !

- Mais t'as même pas d'affaires !

- Ooh ! C'est pas la première fois que je débarque à l'improviste ! Ta mère est sympa, elle m'aidera.

- T'es pas possible, je murmure en souriant.


Le trajet se poursuit donc, avec Rachel qui parle extrêmement vite, comme si sa vie en dépendait, le plus souvent pour raconter des ragots. Je n'en ai rien à faire, mais ça me permet d'en apprendre plus sur les élèves du lycée, donc c'est toujours bon à prendre.

- T'as vu la nouvelle nana que s'est dégoté Steve ? Une vraie pute ! Elle a un air arrogant, je l'aime pas.

- T'aimes aucune de ses copines.

- C'est pas vrai, je les aimes quand il en a pas.

- Ironique venant de quelqu'un d'encore plus célib que moi.

- Oh là, là, Môssieur j'ai-pécho-UNE-fois-en-2nde, tu vas me faire le plaisir de redescendre de ton piédestal. Si je ne m'abuse, ça s'est fini trois mois plus tard et t'es seul depuis.

- Bah oui. Si j'étais juste célibataire, je serais pas attirant. Il faut être célibataire ET avoir été en couple il y a longtemps, mais pas trop, pour qu'elles se disent qu'elles ont une chance.

- T'oses me dire que tu t'es servi de Clara ?

- Non, je l'aimais, enfin je crois. Je me suis pas servi d'elle. Mais notre rupture nous a servi, regarde ! Elle peut se vanter d'avoir été la seule à être avec moi, et moi je suis le célib inaccessible.

- Toi et tes magouilles bizarres, là... Elle doit plutôt se vanter d'avoir vu Môssieur le célibataire inaccessible sous toute les coutures, c'est plus intéressant pour les ragots, si tu vois ce que je veux dire.

- Je te dis que j'avais rien prévu !

- Oui, oui !


Et elle repart sur ses critiques "constructives" pour rabaisser la copine de Steve. Je vous jure... On arrive à mon arrêt et nous descendons du bus. On marche jusque chez moi. Je vis dans une belle maison plus éloignée de la côte que le lycée. Rachel, quant à elle, habite dans un appartement de l'autre côté de la ville. Il n'y a qu'une école, un collège et un lycée, donc tout le monde se connait depuis plus ou moins longtemps.

- Aaah, vivemment les vacances ! Plus qu'une semaine ! lance soudainement ma meilleure amie.

- Déjà ?

- Et ouais !


Les vacances de fin d'année approchent, c'est l'hiver maintenant. J'aime bien ça, il fait froid, mais, comme on est plutôt au sud, ça fait du bien. Rachel continue.

- Eh, tu sais que je suis au CVL ?

- Oui.

- Et bah, on va essayer de faire une soirée au lycée, pour le nouvel an !

- Sympa !

- Moi je vais kiffer ! Par contre, toi tu seras comme un morceau de viande au milieu d'une troupe de lionne ! termine-t-elle en s'esclaffant.


Hhh... Je ne trouve pas d'intérêt à répondre, donc je ne dis rien. Une soirée pour le nouvel an, hein...

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