Chapitre 40

Mon corps se reforma de façon totalement indolore dans un endroit humide et sombre. Une cave. La mousse couvrait les parois, assourdissant tous les bruits. Je regardai autour de moi dans l'espoir de discerner une sortie. Vainement. Il n'y avait qu'un boyau qui descendait plus profond dans la cave. Asmodeus, sous sa forme de serpent, s'y engageait déjà.

Je tentai de prier Meriel pour lui dire qu'il était encore en retard – et pour copieusement l'insulter – mais je sentis que la communication avec les Cieux était entièrement bloquée. Lorsque mon énergie tentait de sortir de la cave, elle heurtait une paroi invisible qui la retenait prisonnière.

Je n'avais plus qu'à suivre Asmodeus.

Prudemment, je marchai dans la trace laissée dans la terre humide par le long corps sinueux du démon. J'ignorais comment il était possible que je parvienne à voir quoi que ce soit du chemin puisqu'il n'y avait aucune source de lumière. Il faisait nuit noire et pourtant, j'étais capable de voir où je mettais les pieds. Ça devait être sympa d'avoir de vrais pouvoirs.

La lueur dansante d'un feu ne tarda pas à apparaître au bout d'un couloir.

Asmodeus partit à l'opposé, vers le noir complet.

Je soupirai. Ce n'était pas comme si j'avais le choix. Je serais bien parti de l'autre côté mais je risquais de faire une mauvaise rencontre et de ne pas m'en sortir. Donc, le choix le plus sûr demeurait de suivre le Roi des Enfers. Aussi aberrant que ça paraisse.

Nous finîmes par déboucher sur ce qui s'apparentait le plus à un hybride de salle du trône et de salle du conseil. L'humidité rendait l'air presque irrespirable. Tout sentait le moisi.

Une table ronde entourée de chaises occupait la majeure partie de la cavité. Tous les sièges étaient vides. Le trône était installé à l'autre bout de la pièce, misérable et dépouillé. Ava possédait des fauteuils avec plus de prestance.

Dedans, un ange.

Ses quatre ailes étaient immenses, d'une riche couleur prune dont il émanait une lueur irréelle. Deux d'entre elles s'enroulaient autour de ses jambes, rendant leur propriétaire encore plus imposant. Les deux autres s'étendaient de chaque côté de son buste, puissantes.

- Laisse-nous, Asmodeus.

Le serpent ne posa pas de questions et disparut. La voix du Chérubin résonnait encore dans la cave après le départ du démon.

L'ange se tourna vers moi. Je fis un pas en arrière par réflexe. Un sourire étira ses fines lèvres.

Ses yeux pourpres s'accrochèrent aux miens et m'empêchèrent de fuir. Pourtant, ce n'était pas l'envie qui me manquait. Sa présence était écrasante, étouffante. Elle m'oppressait malgré son faciès chaleureux et poupin, cordial et amusé. Il avait tout d'un ange et pourtant, je pouvais sentir combien son énergie était noire et dangereuse.

- Rahel. Enfin, je te rencontre.

Sa voix était chantante, légère et étonnamment fluette pour quelqu'un avec une telle carrure.

- Je n'ai pas dû retenir votre nom mais je suis flatté que vous ayez retenu le mien.

Je m'impressionnais moi-même. J'étais si terrifié au fond de moi que je ne me serais pas cru capable d'une telle verve.

L'ange se mit à rire et appuya un coude sur l'accoudoir du trône. Il me considéra avec un large sourire, le menton dans la main. La pose était nonchalante. Pourtant, je savais qu'il pouvait me sauter à la gorge au moindre mot de travers.

Une chance qu'il aime le sarcasme.

- Je m'appelle Samael. Je fais partie du Second Chœur de la Première Sphère.

- Dire que vous êtes un Chérubin n'aurait-il pas été plus court ?

- Je suis ravi de voir que tu connais la hiérarchie. Rares sont ceux qui s'en préoccupent.

- Pourquoi ? C'est une condition de recrutement ?

Il secoua la tête avec un sourire en coin. Je m'appuyai sur le dossier d'une chaise. Les pieds s'enfoncèrent de quelques centimètres dans la terre.

- Cet endroit n'est pas le plus... adapté pour aucun d'entre nous. Malheureusement, c'est le seul où ce cher Cassiel ne peut nous trouver. Nous sommes bien trop bas sous terre pour qu'il puisse sentir nos énergies bien qu'elles soient réunies au même endroit.

Génial.

Ni Meriel ni Ariel et, apparemment, ni Cassiel ne pourraient me retrouver. Je venais de sortir de la Serre et je me retrouvais déjà dans une merde noire. Le Trône allait finir par regretter de m'avoir fait tuer. Je lui apportais plus de soucis que de preuves pour son dossier.

Samael claqua des doigts. Le silence s'étira entre nous jusqu'à ce qu'un démon entre. En dépit de toute fierté, je fis un bond en arrière lorsqu'une araignée de taille humaine apparut à côté de moi. Même le plateau qu'elle tenait entre deux de ses pattes ne m'aida pas à ravaler la soudaine terreur qui m'oppressa la poitrine.

Je n'avais jamais eu peur des araignées mais là... Ses yeux noirs globuleux étaient à hauteur des miens ! Même le plus brave des hommes ferait dans son pantalon à la vue d'un tel monstre !

Le démon – j'espérais vraiment que c'en était bel et bien un – déposa son plateau sur la table avec une dextérité impressionnante au vu de la taille du bestiau. Ses mandibules claquèrent ; un frisson dévala ma colonne vertébrale.

- Tu mets mon invité mal à l'aise, énonça Samael.

Sa voix avait changé. Elle me fit froid dans le dos. Elle me faisait penser à ces voix enfantines dans les films d'horreur. Je ne comprenais toujours pas pourquoi les humains aimaient regarder ça. À cet instant, je comprenais mieux pourquoi les enfants étaient considérés comme les personnages les plus effrayants dans un film.

C'était la voix. Cette voix qui aurait dû être innocente et joyeuse, remplie de menace et de haine... C'était terrifiant.

Toujours fut-il que l'araignée-démon détala à toute vitesse, ses mandibules émettant un claquement rythmé tandis que ses pattes s'activaient sous l'énorme corps.

Je relâchai un souffle lorsque les portes se refermèrent.

- C'est quelque chose à quoi il faut s'habituer, admit Samael en se levant de son trône. J'ai encore du mal à les reconnaître les uns des autres quand ils n'ont pas de forme humaine.

- Je doute de pouvoir m'habituer à de tels monstruosités.

- C'est un moyen de survie. Ils n'ont pas le choix. Pour la plupart, c'est leur seul pouvoir. Ils l'utilisent pour gagner en force brute ou pour tirer profit de leur environnement. L'Enfer est loin d'être aussi chaud et douillet que les Cieux. La plupart des âmes qui y arrivent ne survivent pas aux conditions extrêmes et se désintègrent.

Je l'observai servir deux tasses de thé fumant. Pourquoi me disait-il cela ? Il m'offrait des informations sur mes ennemis sur un plateau d'argent. C'était totalement contre-productif. Tout ce qu'il se passait depuis que j'étais entré dans cet endroit était contre-productif.

Je me forçai à le rejoindre lorsqu'il me tendit ma tasse en porcelaine. D'accord, c'était un ange au milieu des démons. Mais quand même. Avait-il vraiment besoin de tasses en porcelaine ? N'était-ce pas un peu... excessif ?

- Ça ne me fera pas changer d'avis sur eux, j'espère que vous le savez. Je ne voudrais pas gaspiller votre temps. Je suis certain que vous avez une longue liste de futurs traîtres en tête.

- Je crois que tu n'as pas compris pourquoi je t'ai fait amener ici. Je ne cherche pas à te corrompre, contrairement à mon frère. Lucifer et moi avons des motivations différentes et, par conséquent, une façon d'agir différente. Notre but final, toutefois, demeure le même.

- Rouvrir les portes de l'Enfer.

- En effet. Il faut qu'elles soient rouvertes. Pour restaurer l'équilibre.

Je fronçai les sourcils. De quoi parlait-il ?

- Je ne suis pas sûr de comprendre.

Samael retourna sur son trône où il but une gorgée de thé avant de me répondre.

- Tout a besoin d'équilibre. La nature, les hommes, les âmes... La balance est fragile et un rien peut la briser. Par exemple, le loup n'existe pas parce qu'il fallait un prédateur pour terrifier les humains ou pour leur donner quelqu'un à blâmer en cas de besoin. Le loup existe parce qu'il régule les populations animales autour de lui, parce qu'il évite l'apparition d'épidémie... Il est là pour conserver l'équilibre dans son coin de nature. Il en va de même pour les araignées.

L'évocation de l'arachnide me fit frémir. Du thé arrosa la soucoupe autour de ma tasse. Je la reposai sur la table.

- Vois-tu, les araignées sont peut-être très laides et assez terrifiantes, elles ont aussi leur rôle à jouer.

- Je suppose que ce n'est pas de me donner des cauchemars ?

Samael pouffa en secouant la tête.

- Non, en effet. Leur rôle est de contrôler la population des insectes. Les mortels ont la sale tendance à les prendre pour un mauvais présage ou à les trouver trop disgracieuses pour rester sur leurs murs. Alors qu'elles leur sont utiles. Elles dévorent les moustiques, les mouches et autres petites bêtes qui rôdent dans leurs demeures. Dont certains peuvent être dangereux, aussi petits qu'ils soient.

Je commençais à voir où il voulait en venir. Il savait expliquer sa vision des choses pour qu'elle soit facile à comprendre, facile à envisager. Pour l'instant, je ne pouvais nier être assez d'accord avec lui. Je doutais qu'il en serait de même lorsque l'on atteindrait le moment de parler des portes de l'Enfer.

- La nature s'occupe d'elle-même. Elle est autonome. Tel qu'était censé être l'homme. Sauf qu'il a ses défauts et qu'il ne s'auto-régule pas comme la nature. Il y a les bons et les mauvais. On pourrait penser qu'il serait capable de garder la croissance de sa population sous contrôle. Au lieu de ça, il détruit tout autour de lui pour s'étendre toujours plus. Nous avons été créés pour ça. Nous étions... une barrière de protection pour l'encadrer et tenter de le contenir. Mais mes frères ont fermé les portes de l'Enfer.

Je fronçai les sourcils. Pour autant que je sache, les anges avaient été créés avant les humains. Les démons étaient arrivés après la chute de Lucifer. Donc, ce qu'il me racontait n'avait pas de sens. Que je crois en Dieu ou non, les faits étaient les faits.

- Je peux lire sur ton visage que tu as cessé de prêter la moindre crédibilité à ce que je te raconte. À quel moment t'ai-je perdu ?

- Au moment où vous avez déraillé de l'histoire de la Création.

Il fronça les sourcils, la tête penchée.

- Il semblerait que je ne me sois pas correctement expliqué. Comme les autres anges, j'ai été créé avant les humains. La raison pour cela était qu'il fallait que nous soyons prêts à prendre notre rôle dès que les humains apparaîtraient. Notre mission était de les guider, de leur donner cette petite poussée dans la bonne direction. Sauf que, comme tu le vois, ça a déraillé. L'être humain est défectueux. C'est pour cela que Lucifer a renoncé à son rôle. C'est pour cela qu'il a créé l'équilibre.

- Comment cela ?

Samael, à l'aide de son pouvoir, renvoya sa tasse sur la table. Il changea ses appuis dans son trône. Il se redressa et regarda droit vers moi.

- Avant la chute de Lucifer, il n'y avait de l'équilibre que dans la nature. Les humains sont censés s'équilibrer entre eux. C'est pour ça qu'il y en a des bons et des mauvais, des forts et des faibles. Le problème est qu'ils sont défectueux et notre rôle d'observateurs est devenu celui d'intervenants. La balance a été rompue. On ne peut pas avoir que de la lumière sans ténèbres pour la contrebalancer.

- Pourquoi ?

- Parce que, sans la nuit, le jour n'existerait pas.

Si l'expression de l'idée était bancale, je comprenais où il voulait en venir. Théoriquement, c'était acceptable.

Ce n'était pas la première que j'entendais ce raisonnement selon lequel, sans le noir, on ne pourrait pas voir le reste. Les humains utilisaient plusieurs expressions pour exprimer cela. Parmi les plus fréquentes, ils disaient que, sans les mauvais moments, il n'y en aurait pas de bons. Que sans la nuit, ils ne pourraient pas voir les étoiles. Ce genre de choses.

Cependant, de là à en faire une explication pour prôner la réouverture des portes de l'Enfer... Il y avait un gouffre.

Son argumentaire suivait un fil rouge qui aurait pu me convaincre pour autre chose. Pas quand il s'agissait de défaire quelque chose qui avait pour ainsi dire décimé la population angélique.

- Tu es très expressif. Tu n'as pas besoin de prononcer le moindre mot que je sais ce que tu penses.

Ça expliquait beaucoup de choses... Il allait falloir que je travaille sur ça si je voulais réussir à survivre.

- Je sens que tu ne comprends pas où je veux en venir. Tu ne vois pas combien le monde des humains s'est détérioré depuis la fermeture des portes. Surpopulation, épuisement des ressources, révoltes, famines, réchauffement planétaire... Sans compter toutes ces guerres, ces attentats, ces meurtres... Les maladies, les armes biologiques... Je pourrais continuer à te lister tout ce qui ne va pas avec les humains mais je pense que tu peux deviner le reste sans moi.

- Si l'être humain est défectueux, n'était-ce pas destiné à arriver ?

- Non car il y aurait eu l'équilibre du bien et du mal pour le guider. Les démons auraient empêché la surpopulation et, par conséquent, l'épuisement précoce de toutes les ressources. De notre côté, nous aurions pu arrêter des guerres, endiguer les famines. Imagine cela comme un échange de bons procédés. Pour le plus grand bien, il faut parfois éliminer quelques éléments.

Il leva un doigt pour m'empêcher de l'interrompre, de protester. Je pinçai les lèvres.

- Prenons un exemple simple. Dans une ville, il y a mille habitants. Parmi ces habitants, il y en a un qui est prêt à tuer quelqu'un et un qui est infecté par un virus hautement transmissible et toujours fatal. D'après toi, lequel est le plus dangereux ?

Je savais ce qu'il voulait que je réponde. Le malade. Le meurtrier ne pourrait tuer qu'un nombre limité de personnes avant d'être attrapé. Une épidémie ferait beaucoup plus de victimes d'un homme seul.

- Ce n'est pas dit que l'assassin s'occupera du malade, répliquai-je.

- Si les démons lui susurrent toutes les raisons à l'oreille, il pourrait. Après tout, un malade est une proie facile pour se faire la main.

- Et si le meurtrier est contaminé ?

- Les anges interviennent. Comme tu as dû t'en rendre compte, ils n'hésitent pas à faire tuer des gens si besoin est. Or, un meurtrier contaminé... Il suffira d'une bonne dose de culpabilité et de jeu mental pour qu'il se fasse sauter le caisson.

Je cillai, abasourdi par son raisonnement. Les anges feraient-ils réellement cela ?

Ils m'avaient fait tuer donc... La réponse était évidente. Oui. Ils le feraient sans hésiter.

L'idée était effroyable.

- Vois-tu pourquoi les humains ont besoin des deux ?

Je ne répondis pas. Cependant, je me doutais qu'il voyait sur mon visage que son exemple me faisait réfléchir. Bien malgré moi.

- Ce n'est pas la seule raison, cependant. Bien que ce qui m'a fait réagir fait partie de ce besoin d'équilibre que je viens de t'exposer.

- Qu'est-ce que c'est, dans ce cas ?

Je ne pouvais nier que j'étais curieux. Sa vision des choses était différente, unique et inattendue. J'avais envie de comprendre ce qui l'avait fait passer de l'autre côté de la ligne.

C'était un Chérubin, un gardien du Jardin d'Éden, de l'Arbre de Vie, l'incarnation de la puissance céleste, de la sagesse. Comment avait-il pu s'allier avec des démons pour le bien de l'humanité ?

- Au tout début, les Cieux ne ressemblaient pas à ce que tu connais. La hiérarchie existait mais elle n'était pas souvent prise en compte. Nous vivions dans un espace idyllique où notre seule responsabilité était de garder l'œil sur les humains. Ils s'en sortaient même s'il fallait que nous rectifions quelques petites choses de temps en temps. Les démons équilibraient nos actions de leur côté.

« Le problème est venu de l'intérieur. Gabriel et Michael n'ont pas accepté la chute de leur grand frère. Ils ne l'ont jamais comprise. Tous les trois étaient inséparables. Que Lucifer les abandonne... Ça a été un choc qui a laissé des séquelles. Ils ont contourné les Trônes par l'intermédiaire de Cassiel dont ils continuent de se jouer. Ils l'ont convaincu que Lucifer devait être puni pour les avoir trahis, pour avoir créé les démons.

- C'est pour cela qu'ils ont fermé les portes, devinai-je. Pour se venger de Lucifer.

- Oui. Ils n'ont pas réalisé ce que ça allait provoquer. Ils n'ont pas compris que si l'Enfer existait, ce n'était pas juste pour y abandonner les âmes humaines trop souillées pour être acceptées ailleurs.

- L'Enfer était supposé être un dépotoir pour les âmes ?

Samael grimaça.

- C'est vulgariser son usage mais je suppose que l'on peut le voir ainsi. Il devait être autonome. Plus ou moins. Certains d'entre nous devaient veiller à ce que tout se passe bien mais, globalement, c'était supposé n'être que de la supervision. Au lieu de ça, Lucifer se l'est approprié et en a fait son territoire. Gabriel et Michael ont retourné ça contre lui en fermant les portes.

- Je ne vois toujours pas où...

Il m'interrompit en levant la main.

- J'y viens. Nous en sommes donc arrivés à la fermeture des portes.

Je me sentis hocher la tête.

- Les choses ont mis du temps à se manifester. Ça s'est fait doucement. De plus, lorsque l'on est concerné, on voit difficilement ce qui se passe autour de nous, dans notre situation. Sortir de notre point de vue est un processus qui prend du temps. Je suis encore en train d'essayer de persuader mes frères et sœurs de regarder un peu plus autour d'eux. De voir la corruption décimer nos rangs.

Je me redressai, surpris par ses mots. Ses yeux observèrent chacun de mes mouvements. Leur éclat me laissa savoir qu'il savait qu'il avait toute mon attention. Que c'était écrit sur mon visage.

Il allait vraiment falloir que je travaille là-dessus. C'était embarrassant.

- Je suppose que tu vois cela comme la dynamique inhérente aux Cieux. Toutefois, comme je te l'ai dit, ça ne l'a jamais été. Avant que Gabriel et Michael ne décident de se venger de leur frère, les Cieux étaient unis et pleins de joie. Plus le temps passe, et plus ils se détériorent. Ton ami Baskiel en est un exemple.

- Baskiel ? répétai-je, la voix plus haute que normal tant sa remarque m'avait pris au dépourvu.

- Oui. Une âme si lumineuse, si pure. Un être absolument adorable. Les augures étaient pour qu'il reste longtemps parmi les gardiens et qu'il fasse un merveilleux travail sur Terre. Au lieu de cela, il s'est associé à Lucifer, comme beaucoup d'autres. Gabriel et Michael refusent d'entendre raison. C'est pour cela que Cassiel a décidé d'employer les grands moyens pour leur prouver que les portes sont en train de se rouvrir.

D'où ma mort.

- Ils ne comprennent pas que refermer les portes ne changera rien à ce qu'il se passe. Le monde a besoin d'équilibre et il le créera là où il peut s'il ne peut pas avoir l'ordre naturel. C'est pourquoi, peu à peu, les anges trahissent les Cieux, agissent à la manière d'automates dénués de la moindre étincelle et laissent les humains en subir les conséquences.

La voix du Chérubin monta en puissance, sa frustration évidente. Il ne montrait rien sur son visage mais le reste de son être était parlant lorsque l'on y faisait attention.

- J'essaie d'enrayer cette évolution qui mènera à notre perte, à l'extinction de la race humaine. Rares sont ceux qui se rendent compte de ce qui se passe réellement là-haut. Qui comprennent les raisons de mon association avec les démons. Avec Lucifer. Je sais parfaitement que c'est facile de se méprendre sur mes réelles alliances. Il m'a fallu faire des choses... atroces pour obtenir la confiance de Lucifer. Pour obtenir un nouveau nom.

- Un nouveau nom ?

Mon unique contribution à cette conversation était de répéter cequ'il disait. Il devait me prendre pour un crétin.

- Lucifer aime renommer ses recrues. Leur arracher ce qui les relie aux Cieux.

- Tout comme les Cieux nous renomment lorsque nous devenons des anges.

Enfin quelque chose qu'il ne venait pas de dire ! Je revenais sur les rails !

- En effet. Parmi les démons, je suis appelé Satan.

- N'était-ce pas déjà le nom de Lucifer ?

- C'est une fausse conception venue des humains. Certains d'entre eux qui sont parvenus à établir un contact avec les démons ont entendu mon nom et ont automatiquement assumé que c'était l'un des nombreux alias utilisés par Lucifer. Sauf que nous sommes bien deux entités différentes.

J'opinai du chef, acceptant son explication. Je conservai un doute, toutefois. Il fallait que je reste sur mes gardes. Il était doué pour tisser une histoire qui le faisait passer pour le gentil. Il demeurait un traître. Je ne devais pas l'oublier.

- Qu'est-ce que vous attendez de moi ? poursuivis-je. Que je rejoigne vos rangs ?

- Non. Que tu prennes conscience de ce qu'il se passe aux Cieux comme je l'ai fait et que tu partages le message. Tu as de l'influence. Les gens autour de toi t'écoutent. Si tu leur fais voir où se trouve la réalité, la seule solution pour nous sauver tous... Nous aurons une chance de nous en sortir.

- Et si je ne le fais pas ?

C'était un pari risqué. Il pouvait me tuer en un claquement de doigts. Il en avait le pouvoir. J'osais parier sur le fait qu'il appréciait que je le teste. À ses yeux, ça traduisait un intérêt déjà visible sur mon visage.

- Tu auras le déroulement des événements sur la conscience.

Simple, mais percutant.

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NdlA : Réfléchissez bien, les amis ! Dites-moi ce que vous en pensez ! Je suis curieuse de lire vos réflexions !

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