Chapitre 6 : "Mais tu le fais exprès ou quoi?"
O.D - Nekfeu-
"Quand t'es pas là j'suis un junkie, j'attends qu'les aiguilles tournent"
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Pdv Ken
Mardi 06 Octobre 2015
Après avoir raccompagné Gabrielle chez elle, Deen m'a posé chez moi. Je la sens super mal cette conv' avec Alya. Alya c'est typiquement le genre de fille qui te fait te remettre constamment en question quand t'es avec elle. Grande, belle, sur d'elle. Rien ne l'arrête. Et surtout, il n'y a rien qu'elle n'aime plus que son travail. Elle est mannequin pour différentes marques de luxe et photographe quand elle trouve du temps libre dans son emploi du temps.
On s'est rencontré il y a deux ans quand Flav s'était mis en tête que ce serait bien qu'on boost un peu notre image en faisant des collab' avec des marques un peu "hype" comme il dit. Évidemment, ces fameuses marques n'étaient pas très chaudes pour faire quelque chose avec une bande de rappeurs qui passent leurs vies en jogging.
On avait rencontré Alya en sortant des locaux d'une de ces marques après qu'on nous ait, une fois de plus, ri au nez. On avait discuté vite fait et le courant était très bien passé. Elle venait elle aussi d'un milieu modeste et s'était battu pendant longtemps afin de se faire accepter dans celui de la mode. Elle avait passé au moins un quart d'heure à se plaindre des marques qui ne voit pas plus loin que le bout de leur nez et de leur à priori sur les gens comme elle et nous qui venaient d'un milieu modeste, voir défavoriser. Elle m'avait tout de suite plu, avec ses cheveux brun foncé et sa petite taille. Alya avait les mêmes convictions que nous et on avait sympathisé autour d'un verre. Elle m'avait invité à passer la voir à l'hôtel où elle logeait et, disons qu'on n'avait pas passé la soirée à joué au scrabble.
À partir de là c'est un peu partit en couilles. On se voyait de temps en temps, on couchait ensemble puis on discutait pendant des heures des problèmes de la société, de politique, de son métier ou du mien, puis on recouchait ensemble. Cet arrangement tacite qu'on avait passé m'arrangeait très bien. Pas d'attache, pas de sentiments, pas de problèmes. Seulement, au bout de plusieurs mois à ce régime-là, on a fini forcement par développer quelque chose. Dès que je rentrais sur Paname, elle était la première personne que je venais voir et c'était la même chose pour elle. C'est quand j'ai refusé pour la énième fois de sortir avec mes gavas pour aller la voir que Hakim m'a fait comprendre qu'Alya était plus qu'une sex-friend. À partir de ce moment-là, j'ai coupé les ponts. Je suis un gros phobique des sentiments et de l'engagement alors forcement, j'ai flippé. Le pire, c'est que je l'ai très mal vécu et je sais qu'elle aussi. Comme deux cons, on a préféré fermer les yeux sur nos possibles sentiments plutôt qu'en parler ensemble.
Ça a duré pendant au moins deux mois jusqu'à ce que les gars qui en avaient marre de me voir déprimé aillent la voir pour l'obliger à me voir. J'avais cru halluciné quand je l'avais vue devant ma porte ce soir de mars. On avait discuté pendant au moins deux heures et on avait finalement décidé de tenter quelque chose. Évidemment, on a eu pas mal de dispute, mais on a toujours fini par se réconcilier. Jusqu'à "Feu".
Elle n'a pas du tout apprécier "Égérie" et on a eu une dispute incroyable qui s'est fini par la porte qui claque derrière elle. Le problème, c'est que j'avais la tournée des festivals tout l'Été alors je n'ai pas eu énormément de temps à lui consacrer. Je rentrais dès que je pouvais pour passer du temps avec elle, j'ai fait le canard au possible, je me suis excusé des millions de fois. J'ai cru qu'elle m'avait pardonné. Puis elle est partie deux semaines en Espagne pour un shooting. Je n'ai pas eu de nouvelles pendant toute cette durée et ce n'est pas faute d'avoir essayé de la joindre. Elle est rentrée hier, mais quand je suis passé chez elle, il n'y avait personne.
Je me commande un grec quand la porte s'ouvre sur Sneazz et Alpha.
- Yo! Alors ça s'est passé comment avec Gabrielle ? Me lance Mo'.
On discute pendant un petit moment en bouffant comme des porcs lorsque Sneazz évoque une soirée chez Daryl.
- Je peux pas mec, je soupire, Alya doit passer à l'appart.
- Comment elle va ? Ça fait un bail qu'on l'a pas vu! Elle t'en veut encore ?
- Je croyais que c'était fini cette histoire, mais apparemment pas, dis-je en passant mes mains sur mon visage. Askip', elle doit prendre ses distances.
- Nek désolé de te le dire, mais t'es dans la de-mer là gros !
- Merci Alpha, j'avais pas capté, je lance ironique.
- Ba bon courage poto ! Passe lui le salam et puis nous, on va partir parce qu'avec vos caractères de merde l'appart va vite se transformer en Bagdad!
Aux mots de Sneazz', les deux se lèvent, me tchèck et s'en vont sans plus de cérémonies. Au risque de me répéter, je la sens mal cette conversation.
Pile au moment où je commence à me dire que je pourrais peut-être me barrer avant qu'elle n'arrive et lui faire croire que je l'ai oublié le bruit de la clé dans la serrure me fais me relever et un juron se fait entendre dans l'entrée.
- Putain Ken ! Tes chaussures qui traînent là ! J'ai failli me casser la gueule !
Bon. Elle est énervée. Je me dirige vers l'entrée où elle est en train de poser sa veste et son sac.
- Hello, je dis d'une voix douce.
Elle se tourne vers moi et me fusille du regard.
- Désolé, je reprends.
- Pour quoi ?
- Pour tout.
Elle me jette un regard vide et se dirige vers la cuisine pour se servir un verre d'eau. Je souffle un coup avant de la suivre.
- Tu m'en veux encore pour "Égérie" en fait...
-Tu croyais quoi ? Que puisque tu t'étais excusé, j'allais pouvoir tirer un trait sur cette foutue chanson ? Que personnes n'allait en parler ? Putain, mais Ken ! On n'écrit pas comme ça sur les gens sans leur demander leur avis !
Et voilà. Comme d'habitude, on dit rien, on garde tout pour nous, jusqu'au jour où ça explose. Et là, on ne peut rien faire fasse à la tempête qui s'abat sur l'autre. Ça a toujours été comme ça entre nous. On s'engueule, on se sépare, on se manque et on revient vers l'autre en s'excusant et se disant qu'on s'aime. Sauf que cette fois, ce n'est pas la même chose. D'habitude même dans nos plus grandes disputes, elle avait toujours une étincelle d'amour dans le regard. Cette fois j'ai beau chercher je ne la vois plus, et ça me fait putain de peur.
- Franchement, je ne vois pas le problème. C'est pas comme si j'avais cité ton nom.
- Mais tu le fais exprès ou quoi? Tu ne peux pas essayer de me comprendre un peu ? T'as révélé toute notre putain d'histoire ! T'aurais aimé que je fasse ça moi ?
Je ne réponds pas. Non je ne comprends pas et franchement ça ne m'aurait pas déranger plus que ça si elle avait fait la même chose. Elle doit voir dans mes yeux que je ne capte pas parce qu'elle souffle bruyamment avant de s'asseoir sur le canapé.
- Ken... Ça t'aurais vraiment posé aucun problème que je lâche des phrase comme "elle a mordu l'oreiller, comme si c'était un cheesecake" ?
- Non.
- Et bah moi ça me dérange.
- Mais qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Merde Alya ! Je me suis excusé des millions de fois et ça n'a rien avancé ! Qu'est-ce que t'attend de moi ?
Elle se lève, tout à coup, furax.
- Mais tu comprends vraiment rien en fait !
- Mais qu'est-ce qu'il faut que je comprenne ? Tu m'aimes plus c'est ça ?
Elle baisse le regard.
- Putain, j'en étais sûr.
Je me retourne et cogne de toutes mes forces contre le mur.
- Tu sais quoi, Alya ? Va te faire foutre. Cette musique, c'est une putain de déclaration et toi tu beug sur une seule phrase. J'en étais sûr qu'on n'aurait jamais dû se mettre ensemble!
- Arrête Ken. Ça me soûle autant que toi.
Un rire nerveux me prend.
- Je t'aime encore, mais c'est plus comme avant. Déjà avant "Feu" Je commençais à avoir du mal à supporter tout ça.
- Tout ça quoi ?
- La distance, les disputes. Franchement, j'avais l'impression qu'on était revenus au début de notre relation. On se voit une semaine par mois, on baise, on se dispute et on rebaise pour se pardonner. Au moins au début, on pouvait discuter. Et puis quand ton album est sortit avec cette putain de chanson ça m'a juste foutu un coup. Je te voyais plus de la même manière. Dans un couple, on est sensé pouvoir se parler non? Est-ce que tu m'as parlé de cette chanson ? Absolument pas. Alors oui, j'ai plus l'impression de t'aimer comme au début. Et crois moi je ne veux pas ça, mais c'est la seule solution.
- C'est quoi la solution ?
- M'oblige pas à le dire s'il te plaît.
- Alya. C'est quoi la solution?"
Étrangement je suis très calme. Elle baisse la tête et je fixe un point au loin.
- Je... Je crois qu'on devrait se séparer.
Elle l'a dit.
- Ken, je suis vraiment désolé, j'aurais voulu que ça se passe autrement.
- Pars.
-Quoi ?
- Alya, je ne déconne pas. J'ai besoin de casser des trucs et je n'ai pas envie qu'il t'arrive quelque chose.
Elle me jette un regard désolé et attrape ses affaires avant de sortir en refermant doucement la porte.
- Putain !
[...]
C'est Sneazz' qui m'a trouvé, une heure plus tard. Apparemment, elle s'inquiétait et elle l'avait appelé en sortant de chez moi.
J'étais assis à mon bureau, le casque sur les oreilles et j'écrivais comme un dingue, la main en sang après avoir trop frappé contre le mur. Je ne l'avais vu qu'au moment où il m'avait enlevé mon casque me faisant sursauter. Il ne m'avait pas engueulé ni rien. Il ne m'avait pas parlé non plus. Il s'était contenté de nettoyer ma main avant de me faire un bandage grossier puis il m'avait tendu ma veste et m'avait entraîné sur les quais, toujours sans rien dire. On avait marché pendant une heure avant de finir par se poser sur le banc d'un parc, fermé à cette heure, mais bon, ce n'est pas un grillage qui allait nous arrêter.
- Donc... C'est vraiment fini ?
J'avais renversé ma tête en arrière en fixant les quelques étoiles qu'on pouvait apercevoir entre les nuages de pollution recouvrant le ciel de la capitale. C'est quand j'avais senti une larme couler le long de ma joue que j'avais compris que j'étais bien plus atteint que ce que je pensais. Mo' n'avait rien dit, mais il avait compris. Il était resté avec moi, sans rien dire, pendant je ne sais pas combien de temps. Et moi, je continuais de pleurer comme un enfant, sans bruit.
"L'amour on n'le fait pas, l'amour, on le subit."
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