Chapitre 46 : "Papa poule"

Avant tu riais - Nekfeu

"Un sourire éternel qui traîne en elle
Comme si cette vie n'était qu'une triste blague"

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Pdv Gabrielle

Vendredi 04 mars 2016

- Gabrielle ? Ouhou ?

Les doigts de Mo' claquent devant mon visage me faisant sursauter.

- Tu ne m'écoutes absolument pas en fait ?

- Désolé, je suis un peu ailleurs en ce moment, je grimace. Tu disais quoi ?

- Rien d'intéressant, Alex qui me fait ramer, c'est tout.

Sneazz' et sa pianiste, c'est quelque chose. Ils me font marrer les deux. Enfin, d'après ce qu'il me raconte parce que je ne l'ai jamais vraiment vue ne personne.

- Ça me casse les couilles, râle-t-il. Si elle ne veut pas de moi, elle me le dit et puis basta au lieu de me faire chier comme aç.

Je rigole doucement.

- Tu sais Sneazzou, nous les femmes, on adore vous faire chier.

- Ouais, bah tu sais quoi Gabinette ? Nous les hommes, on finit par se barrer parce que vous nous faîtes chier.

- C'est le but. Si vous vous barrez, c'est que vous ne nous méritiez pas, dis-je en haussant les épaules.

- Sérieux ?

- Bah oui.

- Ah, mais je comprends mieux, marmonne-t-il.

J'éclate de rire tandis qu'il se renfrogne.

- Bon, au lieu de te foutre de ma gueule, tu penses quoi de ça, dit-il en me montrant une robe bien trop moulante et décolletée pour moi.

- Tu m'as pris pour une meuf dans tes clips ?

Il secoue la tête en levant les yeux au ciel.

- T'es irrécupérable. Je prends de mon temps pour te trouver une tenue de ouf pour ma super soirée, et toi, tu refuses tout ce que je te propose.

Effectivement, Sneazz' avait débarqué chez moi à dix heures du matin pour me traîner dans toutes les boutiques possibles et inimaginables pour me "faire une garde-robe digne de ce nom".

- Sérieusement, t'es la première meuf que je rencontre qui n'aime pas le shopping.

- C'est pas ma faute. Je trouve ça trop long. J'ai mal aux pieds après.

Il me regarde, un air faussement choqué sur le visage et une main sur le cœur.

- Arrête, je vais faire un arrêt cardiaque là.

- P'tite nature va.

- Bon, Gabi, ça fait une heure et demi qu'on est là et t'as rien trouvé. Ça va pas du tout.

- Mais stop. Je suis très bien comme ça.

Il jette un regard vers mon jean droit qui tombe sur mes habituelles Doc Martens et à mon sweat délavé que je traîne depuis le lycée.

- Moi vivant, jamais je te laisse venir ce soir fringuer comme ça.

- Mais tu sais que tous les gars seront en jogging hein ?

- Non mais eux c'est des cas désespérés. J'ai abandonné depuis longtemps l'idée de faire quelque chose, dit-il en roulant les yeux.

- Tu sais, je me rappelle d'un certain tee-shirt avec des chatons, associé à un foulard des plus élégant dans le clip de 'Renégat', dis-je en me tapotant le menton.

- Non mais laisse tomber, dans ce clip on devait tous être défoncé vue nos fringues.

- Le pire, c'est que je suis sûr que vous vous trouviez trop frais, rigolais-je.

- Surtout Nek, avec son vieux catogan pourri et sa chemise ouverte là.

- M'en parle pas, j'essaye d'éviter d'y penser, dis-je en secouant la tête.

- Le respect est tellement mort, rigole-t-il.

Vingt minutes plus tard, on sort enfin de cet enfer sur terre, j'ai nommé les centres commerciaux. On file s'acheter des grecs, gros dalleux que nous sommes, et on se dirige tranquillement vers mon appart' en discutant. Ça faisait longtemps que je n'avais pas pu discuter comme ça avec lui.

- Tu sais quoi, ça me fait chier, lâche-t-il alors qu'on discutait, encore, d'Alexandra. Je ne vais pas passer ma vie à l'attendre.

- T'abandonnes ?

- Ouais. J'en ai marre des meufs.

- T'as qu'à sortir avec des mecs, dis-je en mordant dans mon kebab. Moi c'est ce que je fais et franchement, c'est pas mal.

Il rigole et me donne un coup dans l'épaule.

- J'en conclus que ça se passe bien avec Nek ?

- Oui, ça va.

- Tu n'as pas l'air très sûr de toi, me fait-il remarquer.

- Si, c'est juste que je me prépare psychologiquement à ce que les huit prochains mois vont être chaud.

- Pourquoi ? Parce qu'il part à L.A ?

- Pas que. Entre mes problèmes de travail, l'album du $, le sien et Lyla qui branle je ne sais pas quoi avec le frère de Deen, on risque d'être pas mal sur les nerfs tous les deux. Je ne me berce pas d'illusion, je sais que ça va sans doute partir en couilles. Mais bon, on s'est promis qu'on restait concentré sur le présent et pas sur le futur ou le passé. Donc je vois ce qu'il se passe et j'improvise, dis-je en haussant les épaules.

- Tu peux me promettre un truc, me demande-t-il soudainement.

- Bien sûr.

- Si, et j'insiste sur le "si", vous vous séparez, tu me promets que tu ne nous laisseras pas tomber ?

- Mais jamais de la vie. Avant d'être les potes de mon mec vous êtes mes potes à moi aussi. Et puis on était amis avant que je sorte avec lui.

Il sourit et me tends son poing que j'entrechoque avec le mien.

- Lyla vient ce soir ?

- Je préférerais pas mais j'imagine qu'elle est assez grande pour prendre une décision toute seule, dis-je en haussant les épaules.

- Il se passe quoi avec Jehkyl ? J'ai pas bien compris.

- Elle jure qu'il ne se passe rien mais bon, je ne suis pas aveugle. Y a des regards qui ne trompe pas. Par contre je ne comprends pas comment c'est possible qu'ils soient aussi proche alors que ça ne fait même pas une semaine qu'ils se connaissent.

- Le coup de foudre.

- Je crois pas au coup de foudre. On vit pas dans un conte de fée Sneazzou.

- Arrête de m'appeler comme aç.

- En parlant du loup, dis-je en indiquant Lyla et Maxime à quelques mètres de nous en bas de l'immeuble.

Il semble lui montrer un truc sur son téléphone, une main posée sur sa taille. Et après elle ose me dire qu'il ne se passe rien.

- On vous dérange pas, je lance, une main sur la hanche en leur adressant un sourire goguenard.

- Ouais, renchérit Sneazz'. Je peux savoir pourquoi t'as ta main posée sur la petite reuss de tout L'entourage et de l'entourage de L'entourage ?

Je ricane tandis que le visage de Lyla se colore de rouge du menton jusqu'aux racines. Jehk' ne semble pas être très impressionné puisqu'il se contente de nous sourire.

Je lève les yeux au ciel et tape le code pour rentre dans l'immeuble, Mo' sur mes talons.

- Sortez couvert les jeunes, crie-t-il quand la porte se referme derrière nous sous mes éclats de rire.

[...]

Je rigole. Je fais que ça depuis tout à l'heure. En fait depuis toujours. Ma mère avait l'habitude de dire que même en naissant je rigolais déjà. "Une petite fille pleine de vie" comme disais les profs. Donc je rigole. Encore et encore. Je rigole tellement que c'est devenu un automatisme. J'ai toujours prôné le rire et l'humour comme moyen pour relativiser, pour éviter de trop se concentrer sur ce qu'il se passe de pas super dans notre vie. Sauf que, depuis le début de la soirée, mon rire n'a pas la même saveur que d'habitude. J'ai l'impression de me forcer. C'est con hein ? Tout ça à cause de cette histoire de merde avec ma librairie. Enfin, c'est plus vraiment la mienne mais bref.

- Atá ?

Je me tourne vers Ken qui me regarde en fronçant les sourcils.

- Oui ?

- T'avais pas dit que Lyla venait ?

- Si pourquoi ? Elle n'est toujours pas là ?

- Bah non.

- T'inquiète pas, elle va pas tarder. Appelle-la si tu veux, papa poule.

- Nique toi, grommelle-t-il et je rigole face à son air renfrogné.

- Les gars, vous avez vu ce qu'a posté mon frère sur insta, dit Deen en surgissant à côté de nous.

Il nous montre son téléphone ouvert sur la dernière publication de @jehkyloneal. C'est une photo du coucher de soleil sur le pont de Bir-Hakeim et la silhouette d'une fille de dos. Et comme légende il s'est contenté de mettre un emoji cœur.

- On est d'accord que c'est Lyla, demande-t-il.

- On est d'accord, je chuchote.

- Je vais m'le faire, grogne Ken.

- Oh que non, dis-je en le retenant par le bras. Tu ne vas rien faire du tout. Tu te prends pour qui ? Son père ?

- Me parle pas de lui ça va juste m'énerver encore plus.

- Et je peux savoir pourquoi tu t'énerve, dis-je en croisant mes bras sur mon torse.

Il hausse un sourcil et m'adresse un regard équivoque.

- C'est clairement pas une raison. Tu devrais être heureux pour elle au lieu d'aller la faire chier.

- C'est pas elle que je veux aller faire chier, grogne-t-il. C'est l'autre.

- Ouais, bah l'autre c'est mon frère alors on se calme, intervient Deen.

- Elle n'est même pas majeure, elle sait pas comment ça marche tout ça, continue Ken sans prêter au ton froid de Deen.

- J'ai 24 ans et j'ai toujours pas compris comment ça marche non plus donc je pense que tu peux te taire.

- Sympa pour moi, murmure-t-il. Si ça se trouve il veut juste se foutre de sa gueule et jouer avec elle.

- Nek t'exagère là. Tu connais Jehk', il ferait jamais de mal à personne, s'énerve Deen.

- Ouais, bah non justement, je le connais pas des masses ton frère moi.

- Bah moi si.

- Et t'avais pas dit qu'il avait une copine par hasard, ironise-t-il.

- Il l'a quitté mercredi mais c'est parce qu'elle l'avait trompé.

Je vois la détermination dans ses yeux vaciller. J'imagine que ça doit lui rappeler des mauvais souvenirs. Au début de sa relation avec Alya ils passaient leur temps à se tromper mutuellement.

Du coin de l'œil je vois la porte s'ouvrir pour laisser passer les deux tourtereaux et j'attrape rapidement la main de Ken.

- Pas de scandale, dis-je fermement. Compris ?

Il lève les yeux au ciel avant d'acquiescer rapidement.

- Je rigole pas Ken. Je suis pas d'humeur à jouer aux médiateurs.

- Ok, grogne-t-il.

Je le lâche et lui jette un dernier regard d'avertissement avant d'aller voir Max et Lyla.

- Vous deux, balcon, tout de suite.

Ils se regardent, surpris, mais m'emboîtent le pas sans poser de questions. Une fois dehors je m'appuie contre la rambarde et ferme les yeux.

- T'aurais pas de quoi fumer Max par hasard ?

- Si, tient.

Il me tend son briquet et une cigarette mais je secoue la tête.

- T'aurais pas quelque chose d'un peu plus fort ?

- T'es sûr Gabrielle ?

- Ecoute mon grand, je pense que j'ai passé l'âge pour qu'on s'inquiète pour moi. Surtout venant de toi. Je fume quasiment jamais, c'est pas un joint qui va me tuer.

Il hausse les épaules et me tend un joint déjà rouler. Je l'allume et soupire d'aise en exhalant la première bouffée. Ken ne va surement pas apprécier, mais actuellement, j'en ai vraiment rien à faire.

- Bon, les enfants, vous m'expliquez, finis-je par dire.

- T'expliquer quoi, me demande Lyla d'une petite voix.

Mon doigt fait un aller-retour entre eux deux et elle grimace.

- Rien de spécial.

- Ah ouais ? Donc le post de Maxime c'est rien de spécial ?

- Quel post ?

Elle se tourne vers lui mais il évite son regard pour se concentrer sur moi.

- C'est pas ton problème il me semble.

- Je suis entièrement d'accord. Sauf que Ken ne partage pas entièrement mon point de vue.

Je soupire et me passe une main sur le visage.

- Vous êtes ensemble ? Répondez-moi sincèrement s'il vous plait. Moi je m'en fous. Je suis contente pour vous.

- On n'est pas ensemble, répond Lyla d'une petite voix.

- Vous n'êtes pas ensemble mais vous êtes un peu plus que des amis c'est ça ?

Elle acquiesce et je prends une longue taff du joint de Max. L'enfoiré, il l'a bien chargé. Ce dernier tend d'ailleurs la main pour que je lui repasse et recrache sa fumée vers le ciel. J'observe un moment les volutes de fumée qui s'échappe dans la nuit.

- Bon, vous savez quoi ? Ça me soûle, dit soudainement Max. S'ils ont un problème, ils viennent me voir. On discute y a pas de problèmes. Je comprends qu'ils s'inquiètent pour Lyla mais faut pas exagérer.

- Je ne veux pas que vous vous disputiez à cause de moi, intervient-elle.

Le visage de Max se radoucit immédiatement et il prend ses mains dans les siennes.

- Eh, t'inquiète pas. On va pas se disputer. Il faut juste qu'ils comprennent que je ne compte pas te traiter comme de la merde.

- J'espère bien, dis-je en les fixant.

- T'inquiète même pas, dit-il en posant ses yeux sur Lyla qui fixe ses mains, toujours dans celle de Max.

Il a vraiment l'air de tenir à elle. C'est tellement flagrant que je ne comprends pas comment Ken pourrait douter de ses bonnes intentions. Et quand elle relève les yeux vers lui je me rends compte que c'est également le cas de son côté. J'avoue, ils sont vraiment trop mignons.

Je me racle la gorge, les sortant de l'espèce de bulle dans laquelle ils étaient plongés.

- Faut que vous alliez parler avec Ken.

- Je sais, dit Max.

- Je viens avec toi, intervient Lyla. Il ne s'énerve jamais quand je suis là.

- Je plains vos futur enfant Gabi, surtout si vous avez des filles.

Je lève les yeux au ciel et ouvre la porte vitrée. Je me dirige directement vers Ken qui est assis sur le canapé, en train de fixer le fond de son verre.

- Rassure moi, y a pas d'alcool dans ton verre ?

Il relève la tête vers moi et secoue négativement la tête. Il me prend la main pour me faire asseoir sur ses genoux et m'embrasse doucement. Je l'observe, intrigué.

- T'es plus énervé ?

- Non, je suis désolé pour tout à l'heure. C'est juste que j'ai du mal à imaginer Lyla avec un gars. Y a deux mois elle était à l'hosto à cause de son daron et maintenant elle est en couple ? Vas-y, c'est chelou.

- Je comprends, mais elle est grande tu sais ? Elle sait s'occuper d'elle-même.

- Je sais, grogne-t-il en enfouissant sa tête dans mon cou.

Sa main caresse distraitement ma taille et je pose mon menton sur sa tête.

- Faut vraiment que tu fasses quelque chose pour tes cheveux chéri. Ça va pas du tout là.

- Laisse mes veuch tranquille. Ils sont très bien comme ça.

Je soupire et ferme les yeux deux minutes, le temps de souffler un peu. Je déteste ma situation actuelle. Il se passe que des merdes.

- Atá ?

- Hmm ?

- C'est quoi ces fringues ?

- Tu remarques que maintenant ?

- Non, mais j'ai pas vraiment eu le temps de te poser la question avant.

- C'est l'œuvre de notre très cher Mohamed Amine Khemissa. Il m'a traîner faire du shopping ce matin. Et il a tout payé.

Après presque deux heures d'aller-retour dans les boutiques j'avais fini par le laisser me prendre un jean foncé et serré, contrairement à mes habituels qui sont plutôt informe, un débardeur rouge bien trop décolleté à mon gout et des bottines à petit talon. Pour changer de mes Doc. Ah oui, et une veste de tailleur noir. J'avoue que j'aime bien le rendu. Mais c'est pas pour autant que je vais m'habiller comme ça tous les jours. J'ai déjà mal aux pieds.

- J'aime bien, souffle Ken en posant sa main sur ma joue.

- Tu m'étonnes que t'aime bien.

Il rigole et m'embrasse. Je passe mes mains dans ses cheveux trop long et répond à son baiser.

- Bon, le fennec, t'arrêtes de bouffer ma pote là, intervient Fram' en s'asseyant à côté de nous.

- T'es jaloux ?

Je ricane et tire la langue à Fram' avant de déposer un baiser sur les lèvres de Ken.

- Bon, va parler à Maxime toi.

- J'ai la flemme.

- Ken ! Tu te bouges et tu vas parler au mec de ta sœur.

- Ah, parce que c'est officiel entre eux, demande Fram.

- Pas exactement.

- Je peux pas y aller, t'es sur mes genoux.

Je me lève et lui indique du menton nos deux tourtereaux qui discutent avec un mec que j'identifie comme étant Georgio, un autre de leur pote rappeur. J'adore ce mec, je crois que je vais aller fangirler un peu.

Ken se lève à son tour et va vers eux en soupirant. Les trois compères disparaissent dans une chambre et j'attrape le verre que tenait Fram' dans les mains pour le boire d'une traite. Je grimace, j'aime pas le whisky.

- Tu fous quoi Gabrielle ?

J'évite son regard interrogateur et me laisse tomber à ses côtés.

- T'as prévu de te bourrer la gueule, c'est ça ?

- Carrément.  

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