CHAPITRE N°2
Sur la route - Vendredi 10 Février 2017
Louis Tomlinson
Zayn me regarde avec de grands yeux, m'interrogeant du regard et je secoue la tête. Si Harry lui a confié son collier pour me le donner, c'est qu'il veut que j'aille le retrouver ! J'en suis certain.
Je sais que je dois me dépêcher parce qu'il n'y restera pas longtemps. Il ne voudra sûrement pas prendre de risques inutiles. Seulement, je suis étonné de son comportement. Il a été le premier à me dire de ne surtout pas le chercher s'il venait à disparaître. Et là, il donne l'ancre à Zayn ? Il doit sûrement savoir que la police est venue sur le domaine ce matin et j'espère qu'il me donnera des explications.
J'ai envie de le croire lorsqu'il me dit qu'il n'y est pour rien dans la mort de ses parents et qu'il est une victime lui aussi. Je ne pense pas qu'il mente, il ne m'aurait pas fait ça. Mais, si c'est le cas... je ne pourrai sûrement jamais lui pardonner.
C'est la voix de Zayn qui me ramène à la réalité. Je sursaute en l'entendant répéter mon prénom. Je relève les yeux vers lui, mets quelques secondes à sortir de mes pensées et je lui réponds.
-Je sais où il est... je ... je vais y aller.
-Louis, à toi aussi il t'a dit de ne pas le chercher s'il venait à disparaître, non? Ce pendentif n'est peut-être pas un indice du lieu ou tu dois le retrouver, mais juste un rappel pour te dire de l'attendre.
-Il ne m'aurait pas laissé ce collier Zayn. Je refuse de croire qu'il me l'aurait laissé si c'était uniquement pour me demander de l'attendre. Il a une signification et je sais où il se cache.
-Louis ! Je pense que tu es la dernière personne qu'il a envie de perdre, ce n'est pas prudent.
Je le regarde avec des yeux ronds, à deux doigts de lui hurler dessus comme un fou ! Je suis à deux doigts de craquer.
Des flics ont débarqué chez moi pour embarquer Harry à cause d'une histoire de meurtre, quelques minutes après qu'il ait fui le domaine. ALORS, putain, je crois que j'ai droit à des explications. Le temps des secrets a assez duré. Je suis autant en colère que je suis inquiet je crois ! J'ai besoin d'en savoir plus. Il doit me raconter son histoire pour que je sache à quoi m'attendre. Je ne le pensais vraiment pas sérieux quand il se disait en danger. J'aurais sûrement dû insister pour qu'il me raconte tout, bien plus tôt. Dans un sens, je lui en veux de nous avoir mis, nous aussi, en danger.
Maintenant que je sais qu'il fait partie de la Mafia, je sais qu'il ne s'agit pas simplement de flics. Son ancienne famille pourrait débarquer sans crier gare ! Et je ne suis pas certain qu'il soit aussi courtois que les agents que nous avons eu la chance de rencontrer ce matin. Je dois aussi lui parler de l'agent spécial Gemma Lucciani que je soupçonne être sa soeur. C'est à ne rien y comprendre ! Moi qui la pensais du côté de la mafia. Il doit savoir tout ça !
-Je dois le voir, la police a débarqué chez moi ce matin pour l'arrêter.
-La police ? Pour l'arrêter ? s'exclame Zayn en faisant les gros yeux.
-Oui. Je dois lui parler ! Si, comme tu le dis, ce pendentif est juste un rappel pour que je l'attende, je ne prends aucun risque à aller le chercher où je pense qu'il est. S'il n'y est pas, je n'aurai pas le regret de ne pas y être allé, je réplique en le regardant.
Zayn se pince les lèvres et inspire profondément. Il finit par hocher la tête. Je vois une lueur de panique dans son regard. Je ne sais pas ce que Harry lui a dit ou fait, mais il lui a fait peur ! Je le vois. Je le sens. Pourtant, mon Harry est le garçon le plus doux que je connaisse. Je n'ose pas imaginer ce qu'ils se sont dit. Je vois qu'il s'inquiète pour lui, pour moi... mais pas seulement.
-Zayn, ça va aller ?
-Il est armé, Louis. Harry... il avait une arme avec lui, me dit-il simplement les lèvres pincées.
Je hoche la tête de haut en bas en prenant sur moi pour ne pas sombrer dans la panique, moi aussi. Je sais que je dois garder la tête haute et surtout ne pas craquer devant Zayn. Je le vois bien assez agité comme ça, il n'a pas besoin de moi pour aggraver son cas. Je reprends donc, de la voix la plus calme possible, bien que je sente mes mots trembler à chaque fois qu'ils sortent d'entre mes lèvres.
Je suis une vraie calamité. Il serait temps que j'arrive à garder mon sang-froid plus de trois secondes. Je suis à deux doigts de fondre en larmes. Harry. MON HARRY, armé !
-Nous ne devons pas avoir peur de lui, Zayn.
-Tu lui fais vraiment confiance, Louis ?
-Plus que tout au monde.
Il me répond dans un signe de tête et il ajoute finalement :
-Si tu le trouves, tu pourras me prévenir ? Je m'inquiète vraiment pour lui.
-Evidemment, Zayn. Evidemment, j'affirme en acquiesçant avant de glisser l'ancre autour de mon cou.
-Merci, Louis. Tu sais, même si... tous les deux, nous ne sommes pas amis, j'apprécie que tu ne me mettes pas à l'écart.
Je me pince les lèvres en le regardant.
De nous deux, je ne pense pas être celui qui ai repoussé l'autre à un moment donné. Je comprends Zayn de m'avoir détesté. Lorsqu'il était avec Eleanor, il devait vivre sa relation avec mon fantôme dans le dos. Ce qui l'a d'ailleurs rattrapé, malgré lui.
-Tu me remercieras le jour où Harry reviendra.
Il hoche la tête et je le salue avant de partir.
Je dévale les escaliers pour sortir de leur immeuble et je bondis dans ma voiture. Je pianote rapidement sur mon téléphone pour mettre le GPS, et Wase par la même occasion. Pas question de me faire arrêter pour excès de vitesse. D'où je suis, il me faudrait presque 2h30 pour aller jusqu'à la maison d'Arcachon. Si je pousse un petit peu mon Macan, je peux l'atteindre en 1h45.
Je mets tout en place et prends rapidement la direction de la sortie de la ville pour me rendre jusqu'à l'autoroute A89 vers Bordeaux. J'ai à peine passé le péage que mon téléphone portable sonne dans l'habitacle. Je décroche grâce à la commande sur mon volant, et la voix de Liam m'interpelle.
-Lou, putain, tu es où ? Ca fait une heure que tu es parti ! On s'inquiète !
Merde... je n'ai prévenu personne que je partais pour retrouver Harry à Arcachon.
-Merde, merde, merde... désolé ! Quand je suis arrivé chez Harry, il était déjà parti. Zayn m'a donné une piste et je suis parti à la recherche de Harry.
-Tu QUOI ? Mais tu es malade ! La police vient frapper à ta porte pour arrêter ton petit-ami qui est accusé de meurtre et tu fonces à la recherche de...
-MAIS TU VAS LA FERMER ?! Harry n'est pas un meurtrier !
-MAIS JE N'AI PAS DIT CA !
Je soupire, me concentre sur la route et appuie sur l'accélérateur avant de reprendre la parole. Je ne dois pas monter dans les tours et exploser. Si même Liam s'y met, je ne vais pas pouvoir assumer longtemps. Je ne dois pas craquer avant mon arrivée à Arcachon. Il n'en est pas question.
-Liam. J'ai besoin de le voir. Je veux juste m'assurer qu'il est en sécurité et qu'il ne risque rien. Et je veux savoir toute son histoire ! Je crois que j'ai assez attendu ! Il nous a tous mis en danger ! Il nous doit bien ça .
-Louis... tu es certain que tu vas le trouver?
-Oui. Il a laissé le pendentif que je lui ai offert à Noël à Zayn pour qu'il me le donne.
-L'ancre ? Tu penses qu'il est à Arcachon ?
Je hoche la tête comme s'il était en face de moi et je réponds hâtivement.
-Je ne vois pas d'autre endroit où il pourrait être. Si son collier est un indice du lieu où il se cache, ça ne peut être que là.
-A moins que ce ne soit qu'un signe pour te dire de l'oublier, Louis.
-NON. Je refuse ça ! Si c'est un autre signe que l'endroit où il est, c'est uniquement pour me dire de l'attendre. Pas de l'oublier ! je réplique un petit peu trop abruptement.
-Louis, calme-toi... tu es au volant j'te rappelle. Tu n'as pas besoin de battre un record de vitesse !
Je pose le regard sur mon compteur, 210 km/h.
Effectivement, je dois me calmer. J'appuie doucement sur la pédale de frein pour arriver à 180 km/h et je reprends la parole en essayant de paraître plus calme et détendu. Même si je sais que c'est peine perdue.
Je dois ressembler à un allumé à l'autre bout du fil.
-C'est bon j'ai ralenti.
-Bien. Une fois que tu seras là-bas, si Harry y est... tu comptes faire quoi ?
Je n'en ai pas la moindre idée. Est-ce que je dois me jeter dans ses bras, soulagé qu'il soit encore là ? Ou est-ce que je dois lui en mettre une en pleine figure, de colère, à cause de la peur que nous avons tous eu ? Je pense que je me souviendrai toute ma vie le regard lourd et angoissé de ma grand-mère, quand elle m'a demandé si Harry était un délinquant ou un meurtrier.
-Je ne sais pas. M'assurer de ce qu'il va faire et lui demander des explications. Enfin, je suppose, je réponds dans un murmure.
-Ok... Louis, tu sais, personne ne pense que Harry soit vraiment impliqué dans cette histoire, mais... si c'est le cas, s'il a vraiment tué ses parents et qu'il nous a menti depuis le départ... je t'en prie, fuis.
Je sens mon coeur se serrer dans ma poitrine et mon regard s'embrumer aux mots de mon ami. Je sais qu'il a raison. Si Harry nous a menti, je vais devoir partir, mais je ne sais pas si j'en serai capable. Harry pourrait se révéler être le pire psychopathe du monde, je serai quand même capable de faire n'importe quoi pour lui !
-Oui...
-Louis, tu dois me le promettre !
-Oui, je fuirai. Mais... pour l'heure, nous n'en savons rien.
-Je peux te laisser ? Je vais aller rassurer ta grand-mère et Charlotte. Essaie de revenir rapidement. Avec ou sans lui, mais essaie de faire vite, Louis, parce que Charlotte et Elisabeth sont mortes de trouille.
-Je fais aussi vite que je peux, j'affirme en me pinçant les lèvres.
-Bon, je peux te laisser ou tu vas t'écraser dans une pile d'autoroute parce que tu roules à 250 km/h ?
-Je ne suis qu'à 180, je réplique en roulant des paupières.
-C'est bien ce que je dis ! Fais attention, Louis.
-Oui.
-Appelle-moi dès que tu en sais plus. Ok?
-Promis Liam.
-Fais attention à toi.
-Merci.
Et il raccroche en me laissant seul avec mes pensées.
*
Il est presque midi quand je me gare enfin devant la villa d'Arcachon. Je descends de voiture en claquant la portière, le coeur battant dans ma poitrine. Seulement quelques mètres me séparent encore de Harry !
Je fonce jusqu'à la porte d'entrée et me retrouve face... à une porte verrouillée. Je fronce les sourcils, fais un pas en arrière et regarde autour de moi. Les fenêtres sont toutes fermées et la maison semble vide. Putain ! Il n'a pas pu me donner ce médaillon pour rien ! Je refuse de le croire !
Je secoue la tête et vais jusqu'à ma voiture pour y chercher les clés de la porte d'entrée, avant que je ne réalise que je ne les ai pas. En effet, elle sont bien sagement à la maison, suspendues dans l'armoire de l'entrée, au domaine.
Je donne un grand coup sur le capot de ma voiture de colère et me retourne vers la maison en secouant la tête.
-Non non non... non ! je m'énerve en courant vers l'entrée, tremblant.
Je bombarde la porte de coups, je sens mon regard se voiler, les larmes ne tardent pas à ruisseler le long de mes joues.
Non, Harry n'a pas le droit, il ne peut pas m'avoir fait ça ! Je refuse de croire qu'il n'y a personne dans cette maison. Il est là, il est forcément là ! Je retourne les pots de fleurs autour de l'entrée. Pas de clé. Je laisse pourtant une clé de secour ici ! Il y a toujours une clé, là, sous le pot de fleurs à gauche de la porte !
Je me redresse en tremblant, réalisant que je n'ai rien pour pénétrer à l'intérieur de la maison quand j'entends du bruit venir de la porte. Je me redresse d'un geste, fais les gros yeux en voyant la porte s'ouvrir lentement et Harry apparaît dans l'entrebâillement de celle-ci.
-OH PUTAIN. Tu es là ! Je m'exclame en me jetant dans ses bras.
Mes larmes redoublent, je fonds entre ses bras et il les referme autour de moi. J'enfouis mon visage dans son cou, laisse son parfum me transporter, m'enivrer. Je ne me calme pas, je continue de pleurer encore et encore. Je suis presque inconsolable. J'ai eu tellement peur... peur de le perdre, de ne jamais le revoir. Pendant un court instant, j'ai cru qu'il m'avait donné ce pendentif pour me demander de l'oublier. Mais non. Il me demandait vraiment de le retrouver !
-Tu m'as trouvé... tu m'as trouvé, je l'entends murmurer à mon oreille, la voix aussi teintée et brisée que la mienne.
Je me redresse difficilement, prends son visage en coupe et l'observe un instant. Je ne réfléchis pas et je colle alors ma bouche à la sienne. Il me soulève dans ses bras, referme la porte d'un coup de hanche derrière nous et je l'entends la verrouiller d'un geste rapide.
Notre baiser est fiévreux, il a un goût de fin du monde. Comme si nous savourions notre dernier moment, notre dernier échange, notre dernier baiser. Je l'embrasse comme si ma vie en dépendait, mes larmes roulent le long de mes joues et je sens Harry me porter jusqu'à l'étage. Il me dépose sur le lit où nous dormons à chaque fois que nous venons ici et il se penche sur moi. Il glisse une main sur ma joue, la caresse et essuie les larmes ruisselantes de son pouce et plante son regard émeraude dans le mien. Je voudrais mourir ainsi, avec Harry contre moi, m'embrassant, me cajolant et me réconfortant.
Je ne sais pas combien de temps il a mis à me calmer. Mais lorsqu'il me pénètre, je suis toujours en train de pleurer. Pourtant, il a tout fait pour que je retrouve la sérénité durant notre étreinte. Murmurant des mots doux, m'embrassant et me caressant pour me décontracter. Je le sens dans ses gestes, dans ses coups de bassin. Il est lent, attentionné et profondément amoureux. Je le sens dans la danse de ses reins. Plus rien ne compte, à part moi. Lorsque mes yeux sèchent, je sens sa bouche se coller à mon cou, son bassin aller et venir en moi avec toujours autant de tendresse et de douceur. Il me dit des "je t'aime" que je n'oublierai jamais.
Il finit par me retourner et m'allonge sur le ventre contre le matelas. Mon regard se voile lorsque je le sens relever mon bassin pour me prendre dans cette position. Il s'allonge au dessus de moi. Il recommence sa longue et délicieuse danse en continuant de me parler avec douceur. Je ferme les yeux, laisse ses mains venir à bout de ma virilité et de mon désir.
Je crois que je n'ai jamais ressenti autant de sentiments en faisant l'amour.
Jamais...
*
Arcachon - Vendredi 10 Février 2017
Harry Styles
Quand j'ai donné le pendentif à Zayn pour qu'il le remette à Louis, je n'ai eu aucun doute sur le fait qu'il viendrait me rejoindre à Arcachon. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé à Périgueux mais le voir dans un état pareil à son arrivée m'a fait mal au coeur. Il tremblait et pleurait d'une telle force que j'ai mis un temps infini à le détendre malgré nos tendres caresses. Il a mis une éternité à se laisser totalement aller et à venir pour moi.
Ce n'est qu'une fois l'orgasme passé que j'ai réalisé où nous venions de faire l'amour. Mon pistolet se trouvait à quelques centimètres de son visage, les billets de cinq cents euros étaient étalés ça et là autour de nous, mes papiers, mes cartes, et mes munitions éparpillées sur le lit. Je me redresse lentement en voyant Louis me regarder. Il ne m'a pas quitté des yeux une seule seconde depuis qu'il est arrivé. Je m'apprête à me lever pour quitter le lit, mais une de ses mains attrape mon bras pour m'en empêcher. Je l'interroge du regard et il secoue la tête.
-Lou... je voudrais seulement ranger tout ça, je lui dis en montrant le foutoir autour de nous.
Les draps sont à moitié renversés, nous avons mis la moitié de mon argent par terre et je ne crois pas que Louis soit très rassuré de se reposer avec une arme à ses côtés.
-Non... range juste...ça, dit-il en me pointant du doigt mon pistolet.
Je me pince les lèvres, me penche au dessus de lui et attrape mon arme. Je la désenclenche, la désarme et enlève le chargeur. Je pose les deux morceaux sur la table de nuit de mon côté et je sens Louis venir se blottir contre moi. Je passe mes bras autour de lui, embrasse son front et je suis certain de l'entendre recommencer à sangloter.
J'agite rapidement la tête de gauche à droite en glissant mes mains dans ses cheveux et il se serre contre moi en marmonnant des mots que je suis incapable de comprendre. Je masse tendrement et doucement son cuir chevelu le temps qu'il se calme et je l'entends finalement articuler, quelques minutes plus tard.
-J'ai cru t'avoir perdu.
-Jamais. Dis-moi ce qu'il s'est passé pour que tu arrives dans cet état Louis...
-Des agents... des agents sont arrivés au domaine ce matin pour t'arrêter dans le cadre d'une enquête pour meurtre.
QUOI ?
Je me redresse d'un geste, faisant basculer Louis sur le dos mais il se redresse bien rapidement pour me regarder. Il s'assied en tailleur face à moi et hoche lentement la tête de haut en bas. Je le vois hésiter, comme s'il cherchait ses mots. Il me cache quelque chose. Je fronce les sourcils, l'interroge du regard et il se pince les lèvres en baissant le regard.
-Lou...
-C'est l'agent Gemma Lucciani qui est venu toquer à notre porte, Harry.
-Oh putain de merde, je murmure en faisant les gros yeux. Ma soeur ? Mais...
-Les yeux et les cheveux bruns, elle te ressemble comme deux gouttes d'eau.
-Oui... c'est vrai que nous nous ressemblons, je murmure sans réellement y croire.
-Donc... Lucciani ? C'est ton nom de famille ? m'interroge-t-il.
Je hoche lentement la tête de haut en bas. Ma soeur... agent spécial ? Mais pour qui ? Pour quoi ? Et depuis combien de temps ? Ma soeur a toujours été la plus fidèle à mon père dans la famille. Depuis qu'elle est née, elle ne pense qu'à prendre sa place ! Je n'ose imaginer le nombre de fois où elle m'a répété, lorsque nous étions gamins, que c'était une chance et un honneur d'être né dans notre famille ! Comment est-ce possible ?
-Elle a toujours été la personne la plus proche de mon père. Je ne comprends pas, je réponds à Louis en le regardant.
-Je crois qu'il serait temps que tu me dises la vérité, Harry. Aujourd'hui, des gens qui t'en veulent sont venus à ma porte pour te chercher. Ma famille a été en danger aujourd'hui ! commence Louis en élevant la voix.
Je secoue rapidement la tête, avant d'attraper ses mains et de l'attirer contre moi quand il recommence à trembler. Je vois bien que toute cette situation lui fait du mal ! Je m'en veux tellement de l'avoir impliqué là-dedans. J'aurais mieux fait de partir après son départ en décembre. Nous n'en serions pas là aujourd'hui, j'aurais fui une fois de plus, et tout le monde serait en sécurité. J'ai été égoïste de penser que je pouvais avoir une vie normale. Je serai toujours recherché, traqué et ... je risque de finir par être tué. Alors que je n'ai rien fait.
-Harry... ils te cherchent pour t'arrêter dans le cadre de l'enquête de la mort de tes parents.
-Je suis accusé de leur meurtre ?! je m'étrangle en faisant les gros yeux.
Louis hausse des épaules et je comprends qu'il ne sait pas vraiment. Mais s'ils m'ont cherché, c'est pour cette enquête. En sachant que j'ai fui, je suis donc la première personne à mettre sur la liste des suspects. Je ne pouvais pas rester de toute façon ! Gemma le sait ! Même si je ne sais pas si je peux encore croire aux souvenirs que j'ai d'elle ! Cette femme forte, froide et droite, toujours prête à tuer de sang froid quiconque se mettant en travers de son chemin ! Non ce n'était pas elle l'agent spécial ! Ce n'est pas possible ! Pas Gemma !
-Harry. J'ai besoin de savoir, reprends Louis en attrapant la couette pour la ramener sur lui et cacher ses parties intimes.
Je soupire, baissant le regard sur ma nudité et je glisse mes mains dans mes cheveux courts. La première chose que j'ai faite en arrivant ici tout à l'heure, a été de les couper. J'ai pratiquement toujours porté les cheveux longs en Corse... sûrement une manière de me protéger de mon passé ! J'inspire profondément et prends alors finalement la parole en reposant le regard sur lui.
-Tu me promets de ne pas m'interrompre?
-Oui.
Je hoche la tête, satisfait, parce que je ne pense pas qu'il soit réellement en accord avec lui-même.
Je m'apprête à lui raconter ma vie, ma famille de mafieux, leur barbarie et tout ce que cela implique. Ce n'est pas une belle histoire et je n'ai pas envie qu'il prenne ses jambes à son cou à l'issue de cette dernière.
-Ma mère était anglaise, comme je te l'ai déjà dit. Elle a fait un programme d'échange à l'université et s'est retrouvée en Corse au lieu d'être à Marseille. Le cursus qu'elle avait demandé là-bas était complet et elle a été transférée sur l'île. Elle ne connaissait pas vraiment la Corse, ni même sa réputation. Elle y est allée les yeux fermés, sans se douter de quoi que ce soit. Elle a commencé son année, et s'est rapidement fait des amis. Elle a commencé à sortir, rencontrer des gens et elle a fini par rencontrer mon père. D'après tout le monde, ça a été le coup de foudre. Il n'a pu la repousser malgré les obligations qu'il avait. Tu sais, chez moi, on se marie "en famille". Pas question de fréquenter un étranger. Français compris. Mais mon père a fait cette exception pour ma mère. Si bien qu'à la fin de l'année scolaire, il lui a demandé de rester. Je crois que c'est la pire erreur qu'elle ait faite, je murmure en me pinçant les lèvres.
Je vois Louis m'interroger du regard alors que je prends le temps de trouver les bons mots pour continuer mon histoire. Il s'accorde même à souffler un "pourquoi". Je lui souris rapidement et enchaîne.
-Elle ne savait pas qui il était. Ses amis de la fac n'étaient pas Corse, pour la plupart, et les autres, persuadés qu'elle était au courant de l'appartenance de mon père à la Mafia. Sauf qu'elle ne savait même pas qu'il y avait une Mafia Corse. Tu parles, elle a grandi à Londres dans les quartiers bourgeois... Et si elle a accepté de rester en Corse, c'est parce qu'elle est tombée enceinte. Tu sais, chez nous, nous sommes très religieux. Mon père a insisté pour qu'ils se marient avant la naissance du bébé. Ils se connaissaient depuis un moment déjà, fous amoureux l'un de l'autre, ma mère n'a pas réfléchi, elle a dit oui. Elle a téléphoné à ses parents et ils ne l'ont pas accepté. Elle a dû faire un choix. C'était eux, ou la Corse. Elle a choisi la Corse. Un mois plus tard, elle devenait Madame Lucciani et ma grande soeur Gemma n'a pas tardé à arriver. Mon père a réussi à lui cacher la vérité pendant un moment puis elle a fini par apprendre le pot aux roses en tombant sur une mallette de drogue bien cachée, chez eux. Mon père n'a pas eu d'autres choix que de lui avouer la vérité, et ma mère, trop amoureuse, n'a pas eu le courage de partir.
-Il a réussi à lui cacher tout ça si longtemps ?
Je hoche la tête à sa question. Moi-même, je n'y ai pas cru quand ma mère m'avait raconté cette histoire. Lorsque nous étions à la maison, la mafia était omniprésente ! Il était impossible de le manquer ! Même si j'imagine qu'à l'époque mon père faisait tout pour ne pas que ça se voit.
-Oui, elle l'a appris quand Gemma devait avoir un an environ. Elle se doutait que quelque chose ne tournait pas rond, mais elle n'arrivait pas vraiment à savoir quoi. Quant à moi, je suis arrivé quatre ans plus tard. Ma mère ne s'est jamais trop impliquée dans les affaires. Elle était une étrangère de toute façon, donc on ne lui faisait pas assez confiance.
-Je vois...
-En grandissant, Gemma s'est affirmée comme l'héritière du trône, je dis en soupirant.
Qu'est ce qu'elle a pu me faire chier avec ça lorsque nous étions enfants. Je n'étais pas assez bien pour le faire selon elle. Sinon, je serais né en premier, et je serais à sa place, pour prendre le pouvoir après la destitution ou la mort de notre père. Elle n'avait que ça à la bouche. Elle rêvait de lui succéder. Je savais qu'elle ferait bien pire travail que mon père. Car bien que Parrain de la Mafia, je n'ai jamais vu mon père être injuste. C'était un homme droit, prêt à tout pour faire régner sa loi, mais il n'a jamais agi injustement à mes yeux.
-Et toi dans tout ça ?
-On ne nous a jamais caché la Mafia à Gemma et moi. Nous avons grandi autour des sachets de drogue, des trafics d'armes, des prostitués, et ça nous semblait normal. Enfin... ça semblait normal à Gemma. Personnellement, vers l'âge de dix ans, j'ai commencé à comprendre que non, ce n'était pas normal. J'ai continué à le penser silencieusement. Et à quatorze ans, il y a une sorte de test, un rituel pour entrer définitivement dans la famille. Il est effectué par les enfants de cet âge-là et les nouveaux entrants. Nous avons un an pour le faire... et j'ai repoussé l'échéance jusqu'à son maximum.
-Un an pour faire quoi ?
-S'impliquer dans la mafia. Y'en a qui commence gamin et qui n'ont pas besoin de prouver leur loyauté. Je crois que Gemma avait déjà tiré sur un homme à bout portant à l'âge de treize ans. Alors, autant te dire que ce test, elle ne l'a pas passé. Mais moi, je n'avais rien fait ! Je m'étais tenu éloigné de tout ça pendant tout ce temps-là ! J'ai repoussé, repoussé et repoussé jusqu'à ce que je me retrouve devant le fait accompli. Mon père m'a mis un flingue entre les mains, enfermé dans une pièce avec un gars qu'il séquestrait depuis un moment. Il avait fini par avouer ce que mon père voulait et il ne manquait plus qu'à lui mettre une balle dans la tête. Le voila mon rite de passage.
-C'est une blague ? s'offusque Louis en faisant un bond en arrière.
-Je ne l'ai pas touché. J'ai posé le flingue à terre, je me suis assis, le dos contre la porte de la cellule, et j'ai attendu. Ils m'ont laissé là pendant une semaine. Le gars a fini par mourir de faim et je me suis fait tailler par mon père. Ma soeur n'a pas manqué de faire remarquer que j'étais qu'une putain de tapette, et elle ne pensait pas si bien dire à l'époque, je murmure en rigolant légèrement jaune.
J'inspire profondément en sentant ma gorge se nouer. Je glisse une main dans mes cheveux, prends le temps de reprendre mes esprits. Je me mordille les lèvres en baissant les yeux sur mes doigts que je triture. Je vois la main de Louis se poser sur les miennes, et je pose le regard sur lui. Il se veut réconfortant.
-J'ai quand même suivi l'entraînement qui découle de ce test. J'ai appri à me battre, à tirer au pistolet et quand j'ai eu dix-huit ans, je me suis barré de la maison. Mon père n'a cessé de me tanner pour que j'entre en affaires. Contrairement à ma soeur, j'avais un sang froid à toute épreuve qui lui était indispensable selon lui. Mes parents ont tout fait pour que nous ayons une véritable vie de famille malgré tout. Nous partions en vacances, nous sortions avec Gemma... si bien que, vu de l'extérieur, il était impossible de savoir qui nous étions. Avec l'âge, en grandissant, nous avons fini par plus ou moins bien nous entendre avec Gemma. Elle a compris que je ne me voyais pas entrer dans le cercle, donc elle m'a foutu la paix de ce côté-là. Je n'ai plus vraiment prêté attention à ce qu'ils faisaient. J'allais à la pêche avec mon père tous les dimanches. Nous avions de longues discussions sur la vie, l'avenir, la Mafia revenait pour le plus souvent... mais je n'y faisais pas attention. Je ne l'entendais pas. Ou tout du moins, je faisais comme si.
-Mais alors... si tu n'étais pas proche de tes parents, pourquoi tu as fui à leur mort ?
-Je n'ai pas eu le choix. Quand j'ai appris leur mort, j'étais chez... mon petit ami de l'époque.
-Attends, attends... tu m'as dis que tu es directement parti quand tu as appris la mort de tes parents, tu vivais avec un gars ?! s'exclame Louis en faisant les gros yeux.
Nous y voilà... je grimace légèrement et hoche la tête. Oui, j'étais avec un gars quand j'étais en Corse. Je vivais avec Michael depuis quelques années. Deux ans je crois, ou trois... ou peut-être quatre ? Je ne sais plus vraiment. Mais tout ce dont je me souviens c'est qu'à la fin, nous vivions plus comme des colocataires qu'autre chose. Je me souviens même que nous avions commencé à parler du fait que nous pourrions peut-être... voir d'autres personnes. Mais je suis parti entre-temps et je l'ai laissé là-bas.
-Tu m'en as voulu pour t'avoir abandonné, alors que tu as fait exactement la même chose ?!
-Oui, enfin, personnellement, je risquais ma vie. Toi, tu avais juste peur de t'engager, je réplique en roulant des yeux. Mais là n'est pas la question ! C'est le fiancé de ma soeur qui m'a appelé pour m'annoncer la mort de mes parents ! J'ai pas réfléchi bien longtemps avant de plier bagage et de disparaître.
-Tu as laissé quelqu'un là-bas... mais tu t'imagines qu'il t'attend peut-être ?! continue Louis en me foudroyant du regard.
-Quoi ? Tu es jaloux ? Tu as peur qu'il te vole la vedette ? Redescends sur terre, Louis, on ne parle pas de toi là ! Mais de moi !
Il se pince nerveusement les lèvres en se raclant la gorge et je secoue la tête. Je sais qu'il a envie de continuer sur ce chemin mais, il n'est pas question que nous parlions de Michael. Je ne l'aime plus depuis des années... il n'y a que Louis dans ma vie. Uniquement lui, alors il n'a pas à s'en faire. Le fait qu'il s'inquiète plus de ma relation avec Michael que tout le reste me déstabilise quelque peu. Je viens tout de même de lui avouer toute mon histoire ! La torture que j'ai vécu à quatorze ans, en voyant un pauvre gars mourir de faim et de soif, devant mes yeux, agonisant des jours durant ! Il s'en rend compte de ça ?
Il se rend compte que j'ai été élevé au milieu des putes, de l'argents, la drogue et des armes ?
Je ne crois pas qu'il s'en rende compte !
-Tu te préoccupes visiblement plus de savoir si j'étais toujours avec ce gars que de tout ce que je t'ai raconté avant, je marmonne en plongeant mon regard dans le sien.
-Mais je savais à quoi m'attendre Harry! Je savais que tu avais grandi dans un putain de film de Coppola ! A ta place, je serais déjà fou à lier et totalement psychopathe. Et je crois que je commence à le devenir parce que je me suis laissé baiser au milieu de billets de cinq cents balles et d'un flingue. UN PUTAIN DE FLINGUE !
-Et tu veux que je me défende comment ?! S'ils étaient arrivés chez moi pour me buter avant de venir au domaine ?! Tu veux que je les attende les bras ouverts ?! Ce n'est pas parce que je suis catholique que je suis obligé de tendre l'autre joue !
-Ca n'a rien à voir ! réplique Louis les yeux noirs.
Je serre les dents en secouant la tête avant de me redresser d'un geste. J'attrape un caleçon pour cacher mes attributs masculins et je me retourne vers Louis. C'est à ne rien y croire. Nous venons de nous retrouver après avoir eu tous les deux la peur de nous perdre à jamais ! Nous avons fait l'amour, je lui ai raconté mon histoire, le coeur au bout des lèvres et nous trouvons le moyen de nous engueuler. Parfois, j'ai l'impression qu'à part faire l'amour, nous sommes incapables de faire quoi que ce soit correctement ! N'avons-nous pas commencé par nous détester avant de finalement baiser et de continuer encore et encore inlassablement ?!
Alors qu'il s'apprête à se lever pour me sauter dessus en me hurlant sûrement les pires atrocités du monde, je secoue la tête et tends une main en avant, les lèvres pincées.
-Je ne veux pas me battre avec toi, Louis. Je n'en ai pas la force.
-Pourquoi ?
-Parce que je veux profiter de toi, Louis. Je veux pouvoir passer un dernier moment avec toi. Je ne veux pas que nos derniers échanges soient des cris.
-Comment ça nos derniers échanges, de quoi tu parles ? Qu'est-ce qu'il va se passer ? Pourquoi tu dis ça ? Qu'allons-nous faire ?
-Pas ce que nous allons faire Lou... ce que je vais faire.
-Quoi ? Qu'est-ce que TU vas faire?
-Je vais disparaître.
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#ARBHfic _ Et voila, le passé de H est dévoilé. Je dois dire que ça n'a pas été une partie facile à écrire. Toute la première partie où L court après le temps pour le retrouver, son désarroi de retrouver la maison fermée et finalement les nerfs qui lâchent quand il retrouve H. J'ai eu tellement mal au coeur pour eux deux, et surtout pour L en fait je crois...
H n'a donc pas eu une enfance comme les autres et il aurait très bien pu devenir un véritable sociopathe avec tout ça. Mais surtout on le découvre de plus en plus dure et froid et nous ne savons pas qui est la véritable personne qui se cache derrière tout ça, Andrea ou Harry?
Et H qui finit par dire qu'il va devoir partir et disparaitre.. quelle sera la réaction de L ?
Je tiens à remercier Amélie pour ses corrections ! :)
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