Chapitre vingt-sept


MILO

Nous sommes là, debout dans la cuisine à boire notre café. Aucun de nous deux ne prend la parole, n'ose lever les yeux de peur de rencontrer ceux de l'autre. J'ai horreur de cette situation. On dirait deux bœufs qui attendent d'être conduit à l'abattoir. À cet instant, j'ai envie de tout, sauf de parler et encore moins d'expliquer à Lucas ce que je pense ressentir pour Claire. En plus, il va me faire part de son attirance pour Poppy et rien que de le savoir, j'en ai mal au bide. Je ne suis pas sûr d'être aussi fort que le suppose Lucas.

Comment puis-je oublier mes sentiments pour lui ? Même le temps d'une discussion. Comment peut-on compartimenter les sentiments ? Genre, comme si nous pouvions les ranger dans des tiroirs, et, en fonction des situations, nous en sortons l'un ou l'autre, tout en gardant cachés certains...

C'est du n'importe quoi !

— Lucas, je sais que l'on doit discuter. Que l'on doit se dire des choses qui ne vont pas nous plaire et rien que d'y penser, ça me rend malade. Je n'arrive pas à mettre de côté mon amour pour toi et faire comme si tu n'étais qu'un copain qui vient boire une bière pour discuter de la pluie et du beau temps.

— Pourtant sans même t'en rendre compte tu viens peut-être de trouver la solution. Tu te souviens de nos jeux de rôle à la fac ?

— Oui je m'en souviens très bien. Mais où tu veux en venir ?

— On va jouer un rôle Milo, comme ça, tu n'auras pas l'impression que c'est toi qui me parles et ça ne sera pas moi que tu écouteras. Tu es d'accord ?

Je hoche les épaules tout en bougonnant.

— Si tu penses que ça sera plus simple.

— Tu veux bien essayer d'y mettre de la bonne volonté Milo.

— Déjà j'essaye de me contenir, alors pour la bonne volonté, on verra plus tard.

Lucas souffle en croisant ses bras sur son torse avant de me réprimander.

— Tu es pire qu'un gamin Milo.

— Et pourquoi ça ? m'offusqué-je.

— Tu boudes comme si je t'avais privé de ton jeu préféré.

— C'est un peu le cas ! Et puis je boude si je veux.

Il ne me manque plus que de taper des pieds et Lucas aura entièrement raison.

— Je t'ai privé de ton jeu ? accentue-t-il.

— Oui.

— Et je peux savoir, quel est ce jeu dont je suis censé, t'avoir privé ?

— Celui-là, dis-je en me rapprochant de lui.

Je dépose un baiser sur sa bouche pour tester son humeur et voyant qu'il ne me rembarre pas, je l'intensifie en passant mes bras autour de sa taille. De ma main je remonte doucement le long de son dos en griffant doucement de mes ongles chacune de ses vertèbres pour arriver jusqu'à sa nuque en entendant ses gémissements croître tout au long de ma montée. Je le pousse un peu pour le bloquer contre le plan de travail et je m'attends à ce qu'il me pousse en arrière. Mais il n'en fait rien. 

Au contraire, Lucas décroise ses bras, plonge ses mains dans mes cheveux et je suis tellement soulagé qu'il ne me repousse pas, que pour la première fois, je n'ai pas de mouvement de recul envers son geste. Il balade ses doigts dans mes boucles, entoure une mèche autour de son index et tire légèrement sur celle-ci me laissant échapper un gémissement. Il stoppe notre baiser et fixe intensément mes prunelles des siennes dilatées par le désir.

— Tu acceptes que je te touche et en plus tu aimes ça ?

— Oui. Tu veux bien... Hum, qu'on réessaye... Pour voir si ce n'était pas juste...

Il ne me laisse pas le temps de finir ma phrase, qu'il a repris notre baiser à sa manière, c'est-à-dire, douce et langoureuse. Sa langue caresse la mienne dans une danse lente et envoûtante. Il s'autorise même à me plaquer contre le meuble tout en replaçant ses mains dans mes cheveux. Il sait exactement quoi faire pour me faire bander et le frottement de son sexe tendu contre le mien est un vrai délice et une torture tant je suis à l'étroit. Il n'a pas oublié mes points sensibles, et se délecte de pouvoir enfin y avoir accès.

Quand sa main arrive au niveau de mes reins, il me sonde du regard ayant sans doute peur d'aller trop loin ou trop vite. Pourtant ses caresses et ses mouvements sur mes fesses sont d'une douceur et d'une délicatesse qui me laisse sans voix.

Je ne pensais pas que j'y arriverai.

Mais c'est Lucas.

Et lui ne me fera jamais de mal.

Il se rend compte que je suis un peu absent et me demande inquiet :

— Tu veux que j'arrête mon ange ? Tu sais, c'est déjà bien tout ce que tu viens d'accepter venant de moi.

— Continue... Lucas, soufflé-je.

Mes yeux exprimant mieux que mes mots toute l'envie et la passion, qu'il a réveillée en moi.

— Viens...

Il me prend par la main et je me laisse faire par cet homme qui n'est que tendresse et délicatesse pour que je réapprenne ce qu'est le désir, et le plaisir avec lui. Alors je lui abandonne toute résistance. Il nous entraîne jusqu'à ma chambre et je marque un temps d'arrêt devant le seuil.

— Tu préfères qu'on aille dans ma chambre ? me questionne-t-il.

— Heu... Non... C'est juste que d'habitude...

— Oui d'habitude tu me baises dans ma chambre, je sais. Mais moi, je veux te faire l'amour. Et pour ça, je veux que ça soit dans ton univers, dans un endroit où tu n'as pas encore de souvenirs.

Il m'entraîne lentement jusqu'à mon lit et m'embrasse à m'en faire perdre la tête. D'ailleurs je pense que c'est son but, pour éviter que je réfléchisse. Il glisse ses mains sous mon tee-shirt et son contact déclenche en moi toute une série de sensations que je n'avais plus ressenti, depuis...

Il le retire en douceur, croise mon regard enflammé et reprend possession de ma bouche instantanément en mordant ma lèvre au passage puis, en la léchant de la pointe de sa langue qui termine sa caresse jusqu'à retrouver la mienne. J'avais oublié à quel point, c'était bon d'être aimé par Lucas et je me détends de plus en plus à chaque caresse. 

Surtout quand il suit cette ligne invisible de bisous qui le mène directement à mes tétons qu'il titille de sa langue puis qui les suce de sa bouche avide. Tout mon corps est en ébullition et quand il les mordille, j'en perds l'équilibre et me laisse tomber sur le matelas. Je n'ai pas retiré la couette et à ce moment-là, je m'en fous royalement de la salir. Tout ce qui compte c'est Lucas, sa bouche, ses mains et les sensations qui vont avec.

*******

Nous sommes étroitement enlacés sous les draps de mon lit. Ma tête repose sur le torse de Lucas, ma jambe sur les siennes et je respire d'aise d'avoir retrouvé mon cocon. Mon chez-moi, celui où je suis moi et où tous les deux nous ne faisons qu'un tout. Là où l'amour règne et où il ne peut rien m'arriver de mal. Au contraire.

Lucas a été doux, prévenant et même s'il est encore trop tôt pour qu'il me pénètre. Nous avons fait un bon de géant aujourd'hui.

— Ça va mon ange ?

— Oui je me sens tellement bien là dans tes bras. J'avais oublié à quel point c'était bon de te laisser me donner du plaisir. De me sentir aimé, désiré et protégé... Tu es mon Ancre, murmuré-je en resserrant mes bras autour de sa taille.

— Tu as dit quoi ?

— Tu es mon Ancre, mon Roc, ajouté-je légèrement stressé sans oser le regarder.

— Mon ange... Regarde-moi, me supplie-t-il avec des larmes dans la voix.

Je me redresse sur mon bras et plonge mon regard dans le sien. Des larmes bordent ses cils et ça me poignarde le cœur. Je pose ma paume sur sa joue et lui demande :

— J'ai dit quelque chose de mal ?

— Oh non mon ange... Au contraire.

— Pourquoi tu pleures alors ?

— Tu te rends compte de ce que tu viens de me dire.

— Oui Lucas et je m'en rends compte et je le pense. Sans toi je ne m'en serais jamais sorti et un bon nombre de fois. Et malgré toutes mes conneries, tu es toujours là pour moi. Alors oui, tu es mon Ancre. Car je suis comme un bateau qui revient toujours au port à son point d'ancrage. Tu es mon Roc, car malgré toutes les tempêtes que nous traversons, je peux toujours compter sur toi, sur ta force et ton amour. Tu es mon Phare qui dans la nuit, me ramène toujours à toi et c'est pour tout cela que je t'aime.

Il baisse la tête, sans doute par pudeur pour ne pas que je vois les larmes coulées de ses magnifiques yeux.

— Je n'aurais jamais imaginé que tu me voyais de la sorte et que j'étais si important à tes yeux. C'est tellement beau mon ange. Tu m'as touché au plus profond de mon cœur. Si tu savais à quel point je t'aime mon ange. Je serais toujours la pour toi... Quoi qu'il arrive dans le futur.

Il place ses mains autour de mon visage avant de m'embrasser tendrement. Nos sentiments sont aussi nus que nous.

Nous nous faisons face et je sens que le moment de lui parler est venu.

Je lui attrape les mains afin de les serrer pour qu'il sente tout mon amour malgré ce que je m'apprête à lui dire.

Je déglutis, mais ma gorge reste serrée. Mais il faut que je me lance.

— Lucas... Je suis encore plus peiné pour ce que j'ai ressenti pour Claire.

— Tu as ressenti quoi ? me souffle-t-il.

— Une attirance, des sensations à son contact, des envies... Je ne sais pas pourquoi et je suis paumé face à tout ça.

— Tu as eu des envies de quoi Milo ?

— De la prendre dans mes bras, de la rassurer et... De l'embrasser, avoué-je en baissant les yeux.

— Milo, l'as-tu embrassée ? s'inquiète-t-il.

— Non Lucas, rassure-toi.

— Je peux savoir ce qui t'en a empêché ?

— La peur de lui faire du mal... Je ne sais pas comment on agit avec une femme parce que je suis gay et ce, depuis toujours. Et puis, je n'aurai répondu qu'à une pulsion et ensuite je l'aurai laissé, blessé...

— Tu es sûr de toi quand tu dis que ce n'était qu'une pulsion ?

— Eh bien oui, que veux-tu que ce soit d'autre ?

— Je ne sais pas moi. Mais depuis que tu connais Claire tu agis bizarrement avec elle. Tu te plies en quatre pour lui trouver un appart dont tu t'es porté garant. Tu l'as suivie parce que tu as peur pour elle. Tu la consoles comme si elle était tout pour toi. Sa peine devient la tienne. Et maintenant tu m'avoues que tu as du désir pour elle et que tu as failli l'embrasser... Et tu trouves toujours que ce n'est qu'une pulsion ? Sois honnête Milo, tu sais que je ne te jugerais pas. Je t'aiderais du mieux que je peux, à comprendre. Mais tu dois être honnête envers moi et surtout envers toi.

— Tu me connais Lucas, je n'ai jamais été attiré par les femmes.

— Je suis d'accord tu ne l'as jamais été... Jusqu'à Claire.

— Je n'arrête pas de tourner cette phrase dans ma tête.

— Laquelle ?

— Celle où tu me dis, que ce n'est pas une question de sexe mais de personne.

— Et je le pense toujours Milo.

— C'est ce qu'il se passe avec Poppy ?

— Si on veut, oui.

— Là c'est toi qui manques de précisions. Elle te plaît, ne me dis pas le contraire.

— Mais je ne le nie pas Milo, contrairement à toi.

— Ok, c'est vrai que la discrétion de Claire me touche.

— Sa discrétion, sourit-il.

— Claire est douce, fragile, et elle a ce truc au fond des yeux qui me bouleverse. Et puis nous avons vécu des choses similaires. On se comprend sans parler.

— Tu vois, tu progresses dans ta réflexion.

— Mais ça ne m'explique pas pourquoi pour la première fois de ma vie, j'ai eu envie d'une femme. Je suis gay et ça ne peut pas m'arriver.

— Ok tu es gay, tu n'as eu que des relations gays, donc forcément tu es comme tu dis 100 % gay. C'est ça ?

— C'est ça !

— Tu te souviens de John ?

— Oui mais pourquoi tu me parles de lui ?

— D'après toi, il est quoi ?

— Tu es con ou tu le fais exprès. John est gay et je peux t'assurer que c'est un bon coup, ajouté-je en souriant.

— Donc vu que tu as baisé avec lui. John est 100 % gay et tu n'as aucuns doutes la dessus Milo ?

— Aucun. Mais tu vas m'expliquer à la fin où tu veux en venir ?

— Je veux en venir au fait que John a été marié et qu'il a même un fils.

— Tu déconnes là ?

— J'en ai l'air ?

Je me gratte le crâne comme si ça allait m'aider à comprendre ou m'apporter une quelconque solution dans la façon de me comporter avec Claire.

— Donc tu affirmes que John est gay, mais qu'avant il a été hétéro et a eu un mioche et si je suis bien ton raisonnement, un hétéro peut devenir gay. Donc d'après toi, le contraire est aussi possible ?

— Oui Milo un gay peut devenir hétéro s'il trouve la bonne personne. Mais je dois admettre que souvent les hétéros qui deviennent gays par la suite sont des gays refoulés.

— Tu veux dire qu'ils se cachent le fait qu'ils sont gays par rapport à leur famille ou à la société ? Comme l'a fait Marcus, c'est ça ?

— C'est ça, Marcus a été marié et ensuite il a été en couple avec toi. Il a avoué à la police qu'il avait toujours été gay mais que pour récupérer le garage de son père, il avait dû se marier.

J'ai besoin d'une pause là. Toutes ses informations tournent dans ma tête et je suis encore plus paumé. Je me lève, j'attrape un caleçon dans la commode, je le passe et je me dirige vers la cuisine pour me faire un café.

Lucas m'y rejoint quelques minutes plus tard le temps de s'être habillé.

— Ça va Milo ?

— Non !

— Tu me fais un café, s'il te plaît ?

À mon avis on n'est pas rendu avec cette histoire. Je tends son café à Lucas et on s'installe sur le canapé.


*******

Pensez-vous qu'un jeu de rôle va les aider à discuter ?

Milo laisse Lucas le toucher et lui faire l'amour, c'est un grand pas !

Milo fait une belle déclaration d'amour à Lucas.

Ils doivent tout de même discuter de la situation avec Claire et Poppy.

Est-ce que Lucas a raison quand il dit qu'un gay peut devenir hétéro et inversement ?

*******

Bisous mes Loulous

Kty

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