Chapitre soixante-six


MILO

≈ ≈ ≈ ≈

Je les entends parler, mais mon esprit s'est arrêté sûr : Marcus est mort.

Mais pourquoi discutent-ils de sa mort ? Bien sûr qu'il est mort. Il s'est suicidé lors de son transfert pour la prison. Il ne peut donc pas crever deux fois ? Ce n'est pas possible ? Lucas doit faire erreur. Cela doit être un homme à Marcus.

Oui... Voilà, c'est ça. C'est forcément ça. Parce que son histoire de Lewis qui tire sur Marcus dans la chambre de Claire n'est pas une éventualité plausible, ça ne tient pas debout.

Claire était tenue de rester sous surveillance dans une chambre, le temps que tout soit sous contrôle. Le temps que la police soit sûre que l'on ne risquait plus rien et qu'ils aient été tous arrêtés.

Deux flics arrivent de la remise en tenant par le bras, un mec menotté. Le voilà le soi-disant cambrioleur ? Il n'a pas vraiment la gueule de l'emploi. Un grand mec balèze, en jean et baskets avec un tee-shirt affublé d'un drapeau américain. Il ne colle pas du tout avec la tenue noire que j'ai en tête pour passer inaperçu.

Ma mère l'interpelle :

— Jim ?

— Maman, lui demandé-je, tu le connais ?

— Bien sûr Milo, c'est notre jardinier, le fils de Nadège notre gouvernante. Tu as souvent joué avec lui quand tu étais enfant, tu te souviens ?

Je fixe le fameux Jim qui me fait un signe gêné de la tête avant de river ses yeux au sol. Et en effet, je me souviens de nos parties de foot, de nos jeux dans la cabane, de nos bagarres puis de notre éloignement quand il a appris que j'étais homo.

— Mais pourquoi l'avez-vous arrêté ? questionné-je le policier. Il doit y avoir erreur, non ?

— C'est un complice de Marcus.

— Jim ! s'indigne ma mère. Pas toi ?

— Je suis désolé Madame Paloma, je ne savais pas que Claire était votre fille.

Mais pourquoi parle-t-il de Claire ? Et pourquoi s'excuse-t-il ? C'est quoi ce bordel ?

— Je vous promets, se défend le fameux Jim, que je ne lui ai pas fait de mal.

— Tu as plutôt intérêt, sinon je t'aurai cassé la gueule, réponds-je sûr de moi.

— Mais pourquoi traînes-tu avec Marcus ? Tu sais bien que c'est un sale type, un truand !

Ma mère semble perdue, ne comprend pas ce qu'il est en train de se passer, et d'un côté, je ne peux pas le lui reprocher parce que moi aussi je suis paumé.

— Oui Madame, mais il paye bien pour le peu que j'ai à faire.

— Et c'est quoi ton travail ? le questionné-je à brûle-pourpoint.

— Lui servir de chauffeur ou surveiller des personnes comme ce soir, me répond-il du tac au tac.

Il se retourne vers ma mère, se penche et d'une voix basse, Jim ajoute :

— C'est Monsieur Fernand qui a voulu que je travaille pour lui et vous savez comme il est difficile de lui dire non.

— C'est mon mari qui t'a demandé de faire ça ?

— Oui ! Il m'a dit que c'était pour aider et que je serais bien payé en retour, et il a dit vrai.

— Combien ? sifflé-je.

— Il me donne mille euros par soir de surveillance.

— Je n'en reviens pas, Fernand et Marcus sont de mèche ? murmure ma mère.

— Je suis désolé Madame Paloma si je vous ai causé du tort.

— Tu n'y es pour rien Jim, tu ne pouvais pas savoir...

— C'est bon, on peut l'embarquer ? nous interrompt le flic. Ou vous avez encore des questions à lui poser ?

— Oui, vous pouvez. Ne t'inquiète pas Jim, je t'envoie notre avocat. Je... « Ce n'est pas un mauvais garçon », rajoute ma mère dans un murmure. Jim, promets-moi d'être honnête et dis tout ce que tu sais à ces messieurs si tu veux vraiment nous aider, d'accord ?

— Oui Madame Paloma, c'est promis.

Les policiers se dirigent vers l'extérieur avec lui. Je n'en reviens pas, Marcus travaillait pour Fernand ? Mais alors, ça veut dire beaucoup de choses, si c'est vrai.

— Maman, tu le crois ?

— Oui Milo, c'est un gentil gars qui voulait simplement gagner de l'argent facile, c'est tout !

— Mais si c'est bien Fernand qui dirigeait tout ça, il était au courant pour Marcus, pour Claire et pour moi !

Je suis tout autant horrifié par les mots que je viens de prononcer que par les pensées qui fusent dans ma tête.

— J'en ai bien peur, meu filho.

— Lucas, tu penses que c'est la vérité ?

— J'espère surtout que tout ce que vous avez vécu n'est pas dû à Fernand ! Sinon, ça voudrait dire...

Lucas s'arrête de parler en voyant les pompiers descendre les escaliers tenant le brancard de l'homme que Lewis a tué. Je me précipite vers eux, je dois absolument voir de mes yeux si c'est bien Marcus.

— Mon ange, tu ne devrais pas.

— Au contraire Lucas, cette fois-ci, je veux voir si c'est bien lui ! Je veux être sûr qu'on en est vraiment débarrassé.

Je soulève le drap et je suis bien obligé de constater que c'est Marcus qui gît là, allongé sur cette civière avec un impact au niveau du torse. Il nous a bien mené en bateau pendant tout ce temps où on l'a cru mort avec Claire, où on se pensait tranquille, en sécurité et débarrassé de lui. Mais en fait, il n'en était rien. Il préparait sa vengeance en douce, en surveillant nos allées et venues, en espionnant nos vies et surtout celle de Claire.

— Monsieur, on peut y aller ?

— Heu oui... Désolé de vous avoir retardés, dis-je encore sous le choc. Vous pouvez l'emmener, merci.

C'est bien Marcus. Je n'en reviens toujours pas.

— Meu filho ça va ?

Je prends la main rassurante que ma mère me tend et me laisse guider à la cuisine. Mon cerveau carbure à plein régime...

— Tu te rends compte Lucas, son suicide n'était qu'une fausse piste pour qu'il puisse avoir les mains libres et faire ce que bon lui semblait ! Tu te souviens de la fois où Claire nous avait raconté qu'elle avait l'impression d'être suivie, surveillée.

— Oui et même Lewis s'en était inquiété. Maintenant que l'on sait qu'il est flic, il avait dû la mettre sous surveillance sans doute.

— C'était bien la peine, quelle efficacité ! On voit bien le résultat ! Malgré la vingtaine de flics, il est quand même passé et a même enlevé ma mère ce matin !

— Marcus est très malin et fourbe, tu le sais bien plus que moi encore, ajoute Lucas et il a eu le temps de mettre au point son piège et sa vengeance.

Je déglutis fortement quand l'image de Marcus s'impose à ma mémoire. Dire que j'ai aimé cet homme... Dire que je lui ai accordé bon nombre de caprices de peur de le perdre... Dire qu'après quelque mois, cet homme est devenu mon pire cauchemar, qu'il a usé et abusé du peu d'amour qu'il me restait. Un amour qui s'est effrité un peu plus chaque jour, après chaque humiliation, après chaque abus, après chaque maltraitance, après chaque chantage. 

Je le hais de tout le mal qu'il m'a fait, je le déteste de m'avoir rendu aussi fragile et vulnérable, je le maudis pour des générations entières. J'abomine l'homme que je suis devenu par sa faute. Il se faisait un malin plaisir de piétiner du talon de sa chaussure ce petit bout de fierté que je m'employais à cacher bien profondément et qu'il m'a arraché le jour où il m'a violé...

Il était la pire espèce qui puisse exister et cet homme-là, a partagé la vie de ma sœur ainsi que la mienne pour nous faire vivre un véritable enfer.

— Et tout ça grâce à Fernand, ajouté-je en me prenant la tête entre les mains.

Je suis écœuré, sur le point de vomir en pensant à ce déferlement de violence, de haine, et à l'acharnement dont il a fait preuve pour bousiller nos vies. Je ne sais pas pour quelles raisons Marcus a fait alliance avec Fernand, mon soi-disant père.

Comment se sont-ils connus ? Qu'est-ce qui a motivé leur vengeance ? Quel intérêt avaient-ils à nous démolir. Est-ce que Marcus était l'homme de main de Fernand ? Si c'est ça, cela veut dire que c'est lui qui lui a donné ordre de m'anéantir, tout comme il l'avait fait avec Claire auparavant ? Pourquoi un châtiment aussi cruel ; et motivé par quoi ?

Je vois la flic redescendre mais Claire n'est pas avec elle. La peur due à son absence accentue mon sentiment nauséeux. J'essaye de museler ma colère mais sans grand résultat. Je fulmine et formule avec véhémence ma question.

— Où est ma sœur ?

Son regard froid me fusille. Elle ne doit pas être habituée à ce qu'on lui parle de la sorte. Mais je n'en ai rien à foutre de son ressentiment. On parle de Claire là.

— Avec Lewis.

Je pousse un ouf de soulagement en la sachant avec lui malgré tout. Par contre le ton sur lequel la policière m'a donné sa réponse m'interpelle. Je sais qu'elle est jalouse de Claire et qu'elle n'a qu'une idée, celle de récupérer Lewis. J'ai vraiment intérêt de la garder à l'œil et de vérifier ses faits et gestes. Je sais, je deviens parano sans doute, mais avec ce qu'on vient d'apprendre, il y a de quoi !

Mon père descend à son tour les escaliers, tête basse et épaules tombantes. Il semble porter toute la misère du monde sur son dos. Il regarde ma mère d'un air hagard avec des yeux rouges et larmoyants. Il lui fait signe « non » de la tête. Elle devient blanche, se laisse tomber sur la chaise. Ma mère pleure en silence, pourtant tout en elle crie sa détresse.

— Papa que se passe-t-il ? Réponds-moi !

Je le secoue par les bras, mais il n'arrive pas à prononcer un seul mot. Les larmes coulent sur son visage, sa tristesse me crève le cœur alors qu'il se dirige vers ma mère pour l'étreindre.

Mais ils pleurent pourquoi ?

C'est bon, ils ne vont pas me dire qu'ils sont tristes pour Marcus ? Ou bien, c'est parce qu'on sait à présent, que c'est Fernand qui a tout manigancé ?

J'ai pourtant la fâcheuse impression qu'ils me cachent quelque chose ?

Je me tourne vers Lucas. Lui, je sais qu'il répondra à ma question !

— Lucas, tu y comprends quelque chose ?

— Mon ange...

Sa voix s'étrangle dans un sanglot alors qu'il m'attire sur le côté de la pièce. Il veut me parler, m'expliquer les dires de Lewis mais les mots se bloquent.

Je me tourne vers la collègue de Lewis et lui réclame :

— Qu'est-ce que vous ne m'avez pas dit ?

Un bref sourire éclaire son visage contrastant avec les pleurs de ma famille.

— Très bien, vous ne voulez rien me dire ? Je vais aller voir par moi-même ce qu'il se passe, annoncé-je.

Dans la montée des escaliers, je croise l'équipe médicale ainsi que le docteur, qui m'adresse un :

— Désolé Monsieur.

Mais oui il est désolé, mais moi, je m'en fous que Marcus soit mort, je dirais même que je suis soulagé d'avoir vu son corps sans vie. Au moins cette fois-ci, c'est sûr, il ne pourra plus nous faire de mal !

Des pleurs venant de la chambre m'attirent et même de dos, je reconnais qu'ils proviennent de Lewis.

Un corps est allongé sur le lit, mais je ne vois pas son visage.

— Lewis, que se passe-t-il ? Claire va bien ?

Il se retourne vers moi, laissant apparaître la personne sur laquelle il pleure.

— Lucas t'a parlé ?

— Oui...



≈ ≈ ≈ ≈  

Alors qu'est-ce que tout le monde cache à Milo ?

On s'approche tout doucement de la fin !

Si bien, que j'ai écris un chapitre bonus...

Il reste donc deux chapitres, un de Milo et un de Claire.

Ainsi qu'un épilogue surprise ! 

≈ ≈ ≈ ≈ 

😘 Bisous mes Loulous 😘

KTY 

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top