Chapitre soixante-quatre

Lewis

  ≈ ≈ ≈ ≈ 

Je suis dans le jardin avec tous les autres, assis sur un rocher, je ne quitte pas des yeux la fenêtre de sa chambre. Je le sais, parce que c'est la seule pièce du premier étage à s'être allumée. Je l'imagine dans cette chambre en train de réfléchir, de se poser dix mille questions à la seconde et peut-être même de pleurer.

Claire peut paraître dure par moments, et même virulente, mais après tout ce qu'elle a vécu il n'y a rien d'étonnant. Claire a du mal à faire confiance de peur d'être trahie à nouveau. Malgré tout elle tient à moi, sinon, elle ne se serait pas emportée de la sorte et ne serait pas jalouse de ma collègue.

Parce que Carine n'est rien d'autre que ma coéquipière.

Bon d'accord, il nous est arrivé de se rapprocher une ou deux fois après avoir bouclé une enquête, mais rien de plus et cela remonte à plus de deux ans. J'ai vite mis les choses au clair avec Carine et elle sait qu'il ne se passera plus rien entre nous, mais elle continue à me brancher, pourtant ce n'est pas faute de lui dire non. Je ne suis pas intéressé et je le suis encore moins, depuis que Claire est rentrée dans ma vie.

Oui je peux le dire, elle est rentrée par effraction. Parce qu'il n'était pas question que je la baise et encore moins que j'en tombe amoureux. J'ai accepté cette mission pour pouvoir me rapprocher de ma petite sœur, je n'avais pas prévu tout ce qui est arrivé avec Claire. D'ailleurs comment j'aurai pu l'imaginer ? Je mets un point d'honneur à ne pas mélanger le travail avec la vie privée, et encore moins, quand c'est une mission importante.

Et puis, l'amour ce n'était pas pour moi. Je ne voulais pas de ce sentiment dans ma vie ! Être dépendant affectivement d'une autre personne, en prendre soin, se soucier d'elle, lui donner plus d'importance qu'à soi-même...

Tout ça, ce n'était pas pour moi et encore moins avec mon travail, et mes missions. La vie de célibataire avec des conquêtes dans chaque ville où je posais mes valises m'allait très bien.

Jusqu'à ce que...

Jusqu'à ce que Claire déboule comme ça dans ma vie, avec son merveilleux sourire, ses lèvres délicates et frémissantes au contact des miennes, son corps qui me fait fantasmer et bander dès que je la vois. Claire a cette façon de me regarder comme si j'étais la personne la plus importante pour elle. Mais elle a aussi, un sacré culot, un mauvais caractère, une belle insolence et que dire de ses blessures... Je n'ai pas pu lui résister et le vouloir, encore moins. Il ne m'en fallait pas plus pour tomber sous son charme.

Mais voilà, il y a cette enquête, mes non-dits, mes secrets.

Lesquels nous ont conduits droit dans le mur !

Claire est persuadée que je me suis servi d'elle, et je la comprends. Tout joue contre moi, je lui ai menti, j'ai profité d'elle, d'appartenir à sa vie pour avoir des informations utiles pour l'avancée de l'enquête. Pour pouvoir approcher Milo et en apprendre un maximum sur nos suspects.

Parce que mon ordre de mission était d'en apprendre le plus possible sur Marcus et du coup sur notre gros poisson Fernand, le père de Milo. Enfin, avant que j'apprenne cet après-midi, qu'il n'était même pas son fils en fait. Cette nouvelle information explique beaucoup de choses.

En attendant, grâce à cette infiltration, j'en ai appris de belles sur cette ordure de Marcus. Il est en fait le bras droit de Fernand et il exécute pour lui toutes les basses besognes. Parce que son business ne se limitait pas qu'à reprendre l'entière possession de l'entreprise familiale.

Grâce à Marcus et à son équipe, il a dépouillé son frère Léon, il a fait croire à un incendie accidentel, ce qui lui permettait de le supprimer avec sa femme et ainsi d'avoir la mainmise sur Judith et surtout sur son héritage. Étant sa seule famille, il est devenu son tuteur et s'est occupé de ses biens en faisant en sorte de récupérer petit à petit tout ce que ses parents lui avaient légué et c'est comme ça que Claire s'est retrouvée sans le sou, et marié sans d'autre choix à Marcus. Encore une brillante idée de Fernand qui en voulait à mort aux enfants de Paloma et qui s'est servi du sadisme de Marcus pour d'abord détruire Claire et ensuite Milo.

Tout ce qui leur est arrivé, n'est en rien dû au hasard. Je me pose la question de savoir qui est le plus tordu entre Fernand et Marcus ?

Mes collègues m'ont appris que forcément, c'était Marcus qui avait enlevé Paloma. Qu'ils avaient profité lors de l'arrestation de Fernand pour faire passer l'information qu'ils allaient conduire tout le monde ici, à la maison des pins. Une souricière comme il nous arrive souvent d'en mettre en place pour les attirer dans notre piège.

Sauf que là, ceux qui vont servir d'appâts, sont la femme que j'aime et des personnes à qui je tiens. Je leur ai dit que je n'étais pas d'accord, qu'il était encore temps de tout arrêter. Mais bien sûr, comme toujours, boucler cette investigation policière passe avant tout. Et l'on se doit de s'en tenir au plan comme le pense notre chef, parce qu'il est persuadé qu'on ne trouvera jamais une aussi belle occasion pour mettre la main sur Marcus et ainsi démanteler toute l'organisation. Car il s'agit aussi de faire tomber les taupes qui se trouvent dans nos rangs. Fernand avait corrompu certains flics, ce qui lui permettait d'avoir les mains libres à chaque fois qu'il devait faire des transactions frauduleuses.

C'est ainsi qu'on a découvert que les flics en charge du viol de Milo étaient à la botte de Fernand et que c'est encore eux, qui avaient maquillé l'évasion de Marcus en suicide. Ils veulent les coffrer en même temps que Marcus en les faisant venir ici. Je sais que c'est ce qu'il y a de mieux à faire pour enfin tous les arrêter mais cette mission va trop loin et il risque d'y avoir des dégâts. Je ne veux pas que Claire fasse partie des dommages collatéraux.

Il faut que je lui parle, que je lui dise ce qui se passe et pourquoi, sinon c'est sûr, je vais la perdre pour de bon et il n'est pas question que je mette sa vie en danger.

Bien sûr, son nouveau chien de garde montre les crocs dès qu'il me voit me lever.

— Tu vas où comme ça ? m'interpelle Milo.

— Je vais boire et pisser un coup. C'est bon je peux passer ?

Milo s'est placé en plein milieu de l'entrée comme si cela allait m'empêcher de rentrer.

— Bon, tu bouges ou je te bouge ?

— Essaye toujours Lewis, je ne te laisserai pas passer !

— Milo, arrête tes conneries. Il veut juste aller pisser, le réprimande Lucas.

— Merci Lucas. Bon, tu te pousses ?

— À condition que tu foutes la paix à ma sœur.

— Lucas, tu veux bien me rendre un service, emmène-le avec toi avant que je demande à ma coéquipière de se charger à nouveau de lui !

— Très drôle Lewis, et tu veux me faire croire que ce n'est pas ta nana ?

— Je m'en tape royalement de ce que tu penses, la seule femme que j'aime est ta sœur. Et elle est assez grande pour savoir ce qu'elle veut et maintenant, dégage de mon chemin !

Lucas le tire par le bras juste avant que je ne force le passage en lui mettant un coup d'épaule. Je dois passer coûte que coûte et lui parler.

— Espèce de connard, m'invective Milo.

— Mon ange, il a raison. Claire est assez grande pour l'envoyer chier elle-même si elle ne veut pas de lui.

— Mais...

— Il n'y a pas de mais, laisse la faire, elle est adulte !

C'est la dernière phrase que j'entends de Lucas avant de me rendre à la cuisine. Il a raison, Claire sait ce qu'elle veut et ne veut plus dans la vie. J'espère juste qu'elle m'écoutera et que j'arriverais à lui prouver que mon amour pour elle est sincère.

Un bruit de verre cassé me sort de ma réflexion alors que je suis aux toilettes, je prends mon téléphone et appelle tout de suite Carine.

— Prends deux hommes avec toi et faites le tour de la maison, je viens d'entendre du bruit. Dis à Adam et Mathis de me rejoindre au plus vite à la cuisine... Il n'y a pas de mais, c'est un ordre Carine, alors obéis ! Je raccroche et me dirige vers la cuisine, quand je remarque une ombre se faufiler dans le couloir qui mène à la remise. Je le suis, mon arme à la main, quand mes collègues me rejoignent. Je leur fais signe de ne pas faire de bruit et de contourner la cuisine pour qu'on bloque l'intrus dans la remise en lui ôtant toutes possibilités de sortir.

— Pas un geste, les mains en l'air. Dépêche-toi, j'ai dit lève les mains.

Il s'exécute quand il voit mes collègues et ils n'ont plus qu'à lui passer les menottes.

— Tu es qui ? Et tu faisais quoi ici ?

— Je suis le pape et je faisais du tourisme, me nargue-t-il.

— Tu veux te la jouer, rigolo de service. C'est toi qui vois !

— Adam fouille-le et toi Mathis va chercher le chef. Dis-lui qu'on a mis la main sur le pape, il va adorer !

— Tiens Lewis, voici ses papiers, un bandana et son flingue.

— Place l'arme et la pièce de tissus, chacun dans une poche, on les fera analyser en rentrant à la brigade.

— Alors voyons à qui on a affaire.

J'ouvre le portefeuille, vérifie le contenu et le vide sur la table. J'attrape ses papiers et les examine. Ce mec fait partie des noms que l'on avait sur la liste, bon il est tout en bas, car c'est juste un pion, mais peut-être que je pourrais en tirer des infos.

— Donc tu t'appelles Jim Morra, tu as vingt-cinq ans et tu fais quoi dans la vie ?

— Suceur de boules !

— Très élégant comme réponse. Bon Jim tu vas arrêter de me raconter des conneries. On sait que tu bosses pour Marcus. Ce que je veux savoir, c'est pourquoi il t'a envoyé ?

— Regarde le pedigree de ce cher Jim, me dit Adam en me montrant son téléphone.

— Intéressant, tu es en liberté conditionnelle, donc un coup de fil et on t'envoie en prison !

— C'est bon, vous voulez savoir quoi ?

Ce mec est vraiment un faible et un suiveur. Pas étonnant que Marcus ne lui est confié que des basses besognes insignifiantes. Lorsque je vois à quelle vitesse il va nous lâcher les informations dont nous avons besoin.

— Pourquoi Marcus t'a fait venir ici ? Tu vois ce n'est pas compliqué comme question!

Il relève la tête, un sourire narquois naît sur ses fines lèvres avant de répondre ironiquement :

— Pour surveiller quelqu'un.

— On peut savoir qui ? Parce que là, je ne suis pas convaincu de ton aide. Alors c'est qui ?

— Je devais surveiller une nana le temps qu'il arrive. Putain, elle est bandante et je...

Je l'attrape par le col, l'oblige à se mettre à genoux et pointe mon flingue sur son front.

— Son nom !

Il tremble de tout son corps et devient blanc comme un linge. Je ne plaisante pas et il le sait, il doit voir la détermination dans mes yeux.

— Claire, répond-il difficilement tellement je lui serre le cou.

Je le repousse de rage en arrière en le mettant en joue alors qu'il tombe au sol.

— Putain, si tu lui as fait du mal, tu es mort, dis-je enragé.

— Je ne lui ai rien fait, mais lui, il ne va pas se gêner du con.

— Qu'est-ce que lui a fait Marcus ? Où l'a-t-il emmené ? réponds, hurlé-je.

Je lui balance un revers de main dans sa gueule. Il crache du sang et en me narguant me lâche :

— Ils sont là-haut.

— Putain de merde !

Je pars en courant vers l'intérieur de la maison, grimpe les escaliers quatre à quatre, pourvu que je n'arrive pas trop tard, pourvu qu'il ne lui ait rien fait. J'ouvre la porte en grand et le vois à genoux entre ses jambes.

Tout va très vite entre le coup de feu, son corps qui s'effondre sur Claire et elle qui se débat. Je me dirige vers mon amour pour la détacher pendant que mes collègues qui m'ont suivi, retirent le corps sans vie de ce salaud. Elle est couverte de sang et je ne sais même pas s'il est à elle, à lui, aux deux ?

Tout ce que je sais, c'est qu'elle est en vie, vue comme elle a bougé quand il s'est écrasé sur elle. Je détache ses bras et les lui descends avec précaution, parce qu'elle doit avoir mal vu le filet de sang qui s'en échappe. Je lui retire les menottes de ses poignets atrocement marqués avec le plus de douceur dont je dispose.

— Mon Dieu, mon bébé, qu'est-ce qu'il t'a fait ?

Je ne peux retenir mes larmes en voyant dans quel état elle se trouve, je la recouvre vite, parce qu'elle est pratiquement dénudée. Je défais son bâillon et cherche son regard qui fuit le mien. J'ai besoin de ce contact pour me rassurer et savoir que la femme que j'aime est toujours là et que ce salopard n'a pas tout éteint en elle.

Son regard brouillé de larmes capte le mien et elle cligne des yeux quand j'ouvre mes bras pour l'accueillir. Elle ne m'a pas repoussé et c'est un grand ouf de soulagement que je pousse, quand enfin, je peux la prendre délicatement dans mes bras. Elle n'a plus aucune force ou énergie et elle me laisse lui caresser les cheveux comme elle aime temps, je la berce autant pour la rassurer que pour me calmer.

Ces secondes rien qu'à nous deux sont précieuses, pour nous, pour notre amour, pour notre futur...

Je l'aime tant, que je n'arrive pas à supporter que cette vermine lui ait encore fait du mal. J'essaye de lui transmettre tout mon amour dans cette étreinte. Je la sens bouger et se décoller de mon corps.

Non, non, non... Je ne veux pas qu'elle me repousse, qu'elle me quitte. Mais au lieu de ça, elle fait un effort surhumain pour relever sa tête, me regarder et me chuchoter :

— Merci bébé, je t'aime...

Ses yeux se ferment, sa tête part en arrière, tandis que le corps de mon amour devient tout mou dans mes bras.

≈ ≈ ≈ ≈

😍 Bisous mes Loulous 😘

Kty

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top