Chapitre soixante-neuf : Épilogue du Tome 1
MILO
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Un mois plus tard
Claire est sortie de l'hôpital depuis dix jours mais elle est encore bien amochée. Certaines blessures sont plus longues que d'autres à cicatriser. Il lui faudra du temps, de la ténacité et beaucoup de persévérance pour surmonter ce nouveau traumatisme. Mais Claire est une femme forte qui possède un caractère bien trempé qui lui a permis de se relever à chaque fois. Je suis persuadé que cette fois encore, elle y arrivera... Et puis nous serons là pour l'aider. Nous sommes une vraie famille à présent.
C'est le premier week-end où nous pouvons tous nous retrouver. Nos parents ont enfin trouvé une maison qui leur convient et ont terminé d'emménager il y a trois jours seulement. Avec Lucas nous avons cherché, fouillé et retourné tous les quartiers de la ville pour leur dénicher la perle rare. Afin qu'ils vivent au mieux cette nouvelle vie qui s'offre à eux.
Je regarde autour de moi et toutes les personnes que j'aime sont là. Ma mère, en bonne maîtresse de maison a organisé un barbecue, dont elle seule a le secret. Mon père rayonne. Aujourd'hui, il sera impossible de lui retirer son sourire tant il est heureux et j'en suis le premier à m'en réjouir.
Nous sommes tous installés autour de la grande table sous l'important pin parasol du jardin. Avec Lucas, nous avons pris d'assaut le seul banc de disponible pour pouvoir rester le plus proche possible l'un de l'autre, ce qui a fait rire tout le monde. « Les inséparables ». C'est notre nouveau surnom et ce n'est pas pour nous déplaire même s'ils pensaient nous taquiner en nous comparant à un couple d'oiseaux. Mais ce diminutif nous représente exactement, si bien que nous l'avons l'adopté et en jouons même.
Il est assis à ma droite, nos jambes accolées et sa main posée sur ma cuisse. Il y dessine des formes abstraites tout en effleurant ma jambe à chaque mouvement. Une délicieuse caresse que j'apprécie, dont je me délecte et à laquelle je ne renoncerais pour rien au monde. Cette mésaventure, nous aura permis de resserrer notre lien et de renforcer notre amour indéfectible de l'un pour l'autre. Ma main rejoint la sienne, nous entrelaçons nos doigts et sans un mot, nos yeux clament un « je t'aime ».
Claire, à ma gauche, est allongée sur une chaise longue pour éviter qu'elle ne se fatigue de trop pour sa première sortie. Elle a râlé pour la forme bien sûr. En précisant, que si elle avait pu venir en voiture, ce n'était pas pour jouer à l'handicapée de service. Personne n'a relevé, car nous savons tous à quel point elle souffre. Alors pour ménager sa susceptibilité, nous nous sommes tus et avons changé rapidement de sujet de conversation. Enfin de compte, voyant que personne ne la regardait, Claire, prit place sur le transat, avec difficultés et retenant avec force des jurons entre ses dents.
L'envie d'aller l'aider ne m'a pas quitté une seconde. Mais la main de Lucas s'est resserrée tellement vite en m'intimant de ne pas bouger, que je suis resté spectateur de ce triste spectacle. Tout comme ma mère. Ses yeux humides attestant de sa peine et de sa résignation à ne pas pouvoir intervenir. Seul mon père osa s'approcher d'elle avec un coussin en mains pour excuse. Le lui glissa sous la tête tout en l'aidant à mieux s'installer. Claire, voulu protester, mais le baiser de mon père sur son front l'y en a empêchée.
A la demande de ma mère, je me lève pour l'aider a apporté le reste des plats à table. Fini les domestiques, les femmes de chambre et tout le personnel de maison. Ma mère n'a jamais été à l'aise avec ce style de vie. La seule personne qui lui est restée indispensable, c'est Nadège. Mais pas en tant qu'employée, mais bel et bien en tant qu'amie. La voici d'ailleurs qui arrive les bras chargés de nourriture. Je la soulage en portant son panier bien rempli et je ne peux m'empêcher de penser à son fils... Jim.
Je jette un coup d'œil vers le portail quand je l'aperçois derrière le volant de sa voiture. Il m'adresse un signe de la tête avant de démarrer sur les chapeaux de roues.
En une fraction de seconde, il me ramène à cette fameuse soirée où ma sœur a failli y laisser sa vie.
Tout ce qui s'est passé me revient.
La mort de Marcus sortant à tout jamais de nos existences.
La réussite de notre mission avec Lewis et Lucas.
La peine de mes parents envers notre mensonge.
Leur colère vite oubliée quand Claire s'est réveillée.
Cette soirée, nous aura à tous marqué à vie et encore plus depuis que j'ai reçu cette lettre.
Je connais enfin la vérité.
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« Lettre écrite depuis la prison de Saint Michel
En date du 14 juillet 2017 »
« Sylvain,
Je n'ai pas ajouté « fiston » parce que je sais que j'ai perdu le droit de t'appeler ainsi depuis longtemps.
J'espère que les nouveaux flics auront les couilles de te filer cette lettre, n'ayant plus mes taupes à ma disposition, je ne peux compter sur aucun passe-droit. Putain, ceux-ci ressemblent plus à des blancs-becs qu'à des poulets. Par contre j'espère que toi, tu les auras pour lire tout ce que j'ai à te raconter.
Tu as sans aucun doute des questions, et je sais que tu voudrais bien des réponses. J'ai posé le pour et le contre en me demandant si tu méritais de les avoir. Tu comprends ici je n'ai que ça à foutre ; réfléchir.
J'ai donc deux options :
- Soit je te réponds et tu apprends tout !
- Soit je garde tout pour moi !
Je me suis demandé ce qui était le mieux et j'ai envie de me vanter et de vous montrer à quel point mon plan était machiavélique, alors voici les réponses !
Tu as compris que j'étais malade et qu'il ne me restait que peu de temps à vivre. Ma carcasse doit en avoir ras le bol de me supporter et comme je la comprends. J'ai même dû mal, à me supporter moi-même. À accepter tout le mal que j'ai pu te faire ainsi qu'à ta sœur.
Je voulais que tu saches que je n'ai pas toujours été ce salaud que tu as connu. Je le suis devenu par la force des choses. Mon père ne m'a jamais aimé, ni démontré que j'avais une quelconque importance à ses yeux.
Il n'y en avait que pour Léon. Il était l'aîné donc tout lui revenait. Léon était le fils prodigue. Celui qui réussissait en tout. Léon était tout désigné pour lui succéder.
Léon. Léon. Léon.
Toujours Léon.
Il n'avait que son nom à la bouche.
Toute mon enfance, ton grand-père m'a rabaissé, m'a dénigré. J'ai grandi dans l'ombre de Léon. Je ne me cherche pas d'excuses. Je n'en ai plus besoin vu mon état. Je suis juste à un moment de ma vie où la mort frappe à ma porte et essaye de rentrer par tous les moyens.
Certains appellent ça une confession, mais pour cela, il faut croire en Dieu.
Toute ma vie, je n'ai jamais cru en rien d'autre qu'en moi. J'étais tout-puissant, alors je n'ai pas eu besoin d'une quelconque divinité à la con. Tu veux des réponses. Hé bien, tu ne vas pas être déçu !
Sache que tout ce que j'ai fait n'avait que pour but de me venger, pour leur faire du mal, pour leur faire payer leur amour. Et pour ça, quoi de mieux que de s'en prendre à leurs progénitures.
Vous étiez, Judith et toi, des cibles faciles pour exécuter ma vendetta contre vos parents. Je n'avais rien contre vous. Mais il m'était plus facile de m'en prendre à vous...
Tu dois te demander pourquoi tant de haine ?
Tout simplement parce que tes parents m'y ont poussé en ne respectant pas notre pacte. Le jour où je les ai surpris dans ce bar, se tenant la main et se bouffant des yeux, j'y ai vu l'opportunité de me venger. De faire payer à mon frère tout ce que mon père m'avait infligé.
Ce jour a sonné leur fin et a couronné mon début.
Les rôles s'inversaient et je détenais enfin toutes les cartes.
Paloma était une très belle femme et je n'ai eu aucun problème à proposer ce marché à mon frère. Rien de bien compliqué. J'épousais Paloma, je faisais passer son bâtard pour mon fils et le tour était joué.
Ton père devait juste respecter une règle.
Une seule.
Tu vois Sylvain, je n'en demandais pas trop. Je ne voulais plus qu'ils soient intimes. Léon ne devait plus toucher celle qui deviendrait ma femme sous peine de la renvoyer au Brésil.
Ils ont accepté.
Remarque, je ne leur ai pas laissé le choix. Ils étaient obligés d'être d'accord.
Ton père ; pour ne pas perdre l'amour de sa vie, sa fille et son fils à venir. Ainsi que son mariage imposé avec miss frigide afin de préserver la viabilité du cabinet d'avocat.
Ta mère pour ne pas retourner au Brésil sans le sou en abandonnant son amour, sa fille et son bébé.
Tu vois tout était simple, limpide et tout le monde y trouvait son compte.
Et moi ? Eh bien, j'y gagnais une belle femme et un fils. Enfant, que je n'aurai jamais pu avoir sinon...
Et pendant quatre ans tout s'est bien passé.
Nous formions une vraie famille comme je l'avais toujours rêvé. Mon frère à mes côtés et soumis à mes exigences. Paloma quant à elle était ravie de pouvoir s'occuper de ses deux enfants régulièrement et miss frigide, elle, attendait que la vie se passe. Toutes les photos de Judith et de toi petit font partie de ces quatre années.
Mais ton père et ta mère n'ont pas pu réprimer leurs désirs et résister l'un à l'autre. Je les ai surpris en train de baiser dans un des lits de la maison des pins. Ils n'avaient jamais arrêté de se voir. Ils devaient me payer cet affront, ce manque à notre pacte.
Alors j'ai sévi face à leur trahison.
Je me suis attaqué à tout ce que mon frère possédait et je les lui ai arrachés au fur et à mesure. Et en tout premier, je lui ai pris le plus précieux... Sa tendre et charmante Paloma. Je lui ai interdit de revoir mon traître de frère ainsi que ta sœur et si elle ne souhaitait pas te perdre aussi, elle se devait de m'obéir.
Tu vois les coupables, ce sont eux.
C'est de leurs fautes si on en est arrivés à de telles extrémités. Léon s'était toujours cru supérieur. Il me prenait pour un faible... Ils n'auraient jamais dû comploter dans mon dos ni recoucher avec Paloma et tout aurait pu être parfait. Mais non, ton père voulait me reprendre ma femme et mon fils. Il n'en était pas question.
Je ne pouvais pas les laisser partir au Brésil avec vous deux.
Vous étiez à moi.
Vous étiez ma famille.
Alors j'ai tout fait pour détruire sa vie devenue sans saveur en perdant sa panthère sauvage.
Après les biens immobiliers, je m'en suis pris à sa fille en mettant Marcus sur sa route. Il devait tout faire pour être charmant avec elle. Lui faire croire qu'il l'aimait et l'amener à lui offrir sa virginité puis faire en sorte que ses parents l'apprennent. Je n'avais pas prévu d'incendier la maison. C'est miss frigide qui me l'a demandé, quand elle a su pour ta sœur. Elle voulait laver ce déshonneur par les flammes.
Grâce à son idée, je me débarrassais définitivement de mon frère et il ne pourrait plus me prendre ma famille. J'ai préféré garder ma nièce en vie afin de pouvoir la dépouiller de tout son héritage.
Marcus, encore une fois, a fait ce qu'il avait à faire. Il a incendié la maison avec ton père et miss frigide à l'intérieur. Puis il s'est occupé comme bon lui semblait de Judith, je lui avais laissé carte blanche.
Jusqu'au jour où il m'a appris qu'elle était enceinte.
Ma nièce attendait un bébé. Un gamin qui aurait pu prétendre à mon empire et ça, ce n'était pas possible. J'ai donc demandé à Marcus de la convaincre d'avorter. Mais cette tête de mule ne voulait pas en entendre parler.
Elle ne nous a pas laissé le choix.
Il devait mourir et je me foutais royalement du sort de Claire tant que je pouvais rester tout-puissant.
Marcus à fait ce qu'il devait faire pour qu'il disparaisse.
Ce soir-là, j'avais rendez-vous avec lui dans un bar pour qu'il me fasse son rapport et qu'on puisse passer une bonne soirée tous les deux, enfin débarrassé de ce morveux.
Mais il a fallu que tu te pointes.
Que tu ramènes ta jeunesse, ton sourire, tes jolies fesses et ta belle gueule.
Marcus n'avait plus d'yeux que pour toi.
Il m'a délaissé... Pour toi espèce de bâtard.
Après Léon qui m'avait pris l'amour de mon père, il fallait que tu me prennes la seule personne qui comptait vraiment à mes yeux.
Tu es bien le fils de ton père.
Alors quand j'ai su que vous alliez vous installer ensemble, je ne l'ai pas supporté. Tu devais payer au centuple chacune de mes douleurs.
J'ai fait pression sur Marcus, j'ai accédé à certaines de ses demandes, que je lui avais jusque-là refusées. Et petit à petit, je l'ai reconquis et il m'est revenu.
Chaque fois que tu te refusais à lui, c'est vers moi qu'il retournait.
Et oui Sylvain...
J'ai eu Léon, sa femme, son pouvoir, son argent, le cabinet et même sa peau.
J'ai eu Paloma, cette magnifique femme si raffinée que tout le monde m'enviait. Et je peux te dire que c'était le gros lot que j'avais touché en l'épousant. Elle avait un corps à se damner et des seins... Je ne t'en parle même pas. Elle a toujours été très obéissante... De toute façon, elle n'avait pas le choix et je me faisais un malin plaisir de ne pas le lui laisser.
Le choix ?
Personne ne l'a jamais eu. J'ordonnais et on m'obéissait. Quel plaisir jouissif de se savoir à ce point puissant.
J'ai aussi eu Judith, en lui prenant ses parents, son héritage, son fils et j'ai presque eu sa vie.
Et cerise sur le gâteau.
Je t'ai eu toi !
Après avoir pourri ton enfance, t'avoir jeté de chez moi dès que je l'ai pu, en me servant de l'excuse que tu étais gay pour te couper les vivres et que ta mère ne te voit plus. Je devais aussi me venger de ce que tu m'avais pris.
MARCUS ÉTAIT À MOI.
Tu n'avais pas le droit de me le voler, sale merde de petit pédé.
Et tu l'as payé comme il se devait.
J'avoue que de te voir chialer et de t'entendre hurler comme une petite fiotte pendant que Marcus te prenait de force, était vraiment jouissif pour moi. Combien de fois, on s'est branlé avec Marcus en regardant les vidéos qu'il faisait de ses parties de baises avec toi, parce qu'il savait qu'en suite, je serais tout à lui. Que moi, je serais à la hauteur de ses envies, de ses attentes et de ses désirs. Il n'est resté avec toi que pour mieux me posséder.
J'avais toutes les raisons de te détester, de te haïr, de te maudire et de t'exécrer.
Alors maintenant que vous avez tué Marcus, mon amour, ma vie...
Je vais aller le retrouver, heureux d'avoir fait de vos vies un enfer sur terre.
Une dernière chose.
Franchement Sylvain...
Tu t'attendais à des excuses ?
Ou que je te supplie de me pardonner ?
Si tu savais comme je m'en branle de ton pardon.
Tu resteras toujours qu'un petit con, naïf et crédule.
J'ai honte d'avoir espéré que tu sois digne d'être mon fils.
Sache Sylvain, qu'après mon départ, je ne serais jamais loin.
Je vais continuer à te hanter...
Alors n'oublie jamais de regarder derrière ton épaule la tafiole.
Embrasse ma veuve.
FERNAND LE GRAND
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Je déglutis avec force.
Je ravale ma rage et range la lettre dans ma poche. Ce n'est ni le bon moment ni le bon endroit pour en parler... Je n'en suis plus à quelques jours près. Rien ne presse après tout. Elle va rester secrète encore quelque temps.,
Je jette un œil à la piscine. Je fixe l'eau limpide et prends le temps de calmer ma respiration avant de rejoindre tout le monde.
Je me lève du transat quand Lucas vient à ma rencontre.
— Mon ange ? Tu vas bien ?
— Oui Amour. Tout va pour le mieux.
J'encercle sa taille de mes bras et lui demande d'une voix rauque :
— Embrasse-moi !
Lucas s'exécute, mais je sens que quelque chose cloche.
— Lucas ?
— Jim est là !
FIN
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« Si nous survivons à cet enfer, pourrons-nous un seul jour l'oublier ? Aurons-nous le droit de revivre comme des gens normaux ? »
Les enfants de la liberté
Marc Levy
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