Chapitre 21 - Réunion Cataclysmique

Coucou !

Ah voui me revoilà plus tôt que prévu lol J'ai profité du fait que mon chéri regarde la finale de Into the wild pour écrire ce chapitre, qui me titillait depuis des semaines ! Il est très long je m'en excuse d'avance ! 🙈

Du coup, suite au petit sondage d'hier, vous avez été unanimes pour un tome 3 ! Il y en aura donc un, reste plus qu'à réfléchir à tout ça

Bonne lecture !

***

Chapitre 21 – Réunion cataclysmique

LOLA

Le soleil brillait haut dans le ciel, comme pour nous rappeler que malgré l'horreur, malgré les rôdeurs, malgré cette apocalypse, il fallait continuer à avancer, car le monde, aussi immonde était-il, continuait de tourner...sans se soucier de nous.

Armée de ma hachette, récupérée la veille sur l'un des cannibales, je sortis du motel pour retrouver Daryl prostré sur la tombe fraîchement creusée. Nous étions rentrés quelques heures plus tôt, au moment où le jour avait commencé à se lever, laissant derrière lui les événements morbides de la nuit. Abraham et l'archer s'étaient occupés de la sépulture de Tyreese, à jamais enterré dans les bois, près d'un hôtel miteux en bord de route. C'était ça désormais notre quotidien.

L'afro américain avait souffert le martyr avant de succomber à ses blessures. Depuis que nous avions fui le théâtre macabre, où nous avions assisté à ce que la nature humaine pouvait offrir de pire, il ne se passait pas une seconde sans que son abominable calvaire ne me revienne en pleine figure. A bien y réfléchir, je commençais sincèrement à m'interroger sur ma capacité à poursuivre. Plus les jours passaient, plus les drames s'accumulaient et finalement, je réalisais que la mort n'était rien en comparaison de ce que nous vivions. Plutôt que de la craindre, peut-être valait-il mieux l'accueillir comme une délivrance ?

Laissant derrière moi mes pensées philosophiques un brin déprimantes, je m'approchai silencieusement, observant le chasseur en me mordillant la lèvre inférieure. Le premier réflexe que j'avais eu en le voyant arriver la veille, avait été une envie démesurée de me jeter dans ses bras. Et puis, la réalité m'avait rattrapé.

La colère m'avait abandonné à l'instant même où il était apparu...parce qu'il avait été là...une nouvelle fois. Et même si ses paroles m'avaient blessé, il était tout ce qui faisait mon existence. J'avais déjà perdu la danse, je ne pouvais pas le perdre également. Parce que sans Daryl Dixon, Lola Collins n'était plus qu'une chose insignifiante. Je l'aimais...à en crever. Et me résoudre à ce que notre histoire se termine ainsi, j'en étais incapable...surtout après ce qui était arrivé à Tyreese. Ne devions-nous pas plutôt profiter de chaque instant au lieu de nous déchirer ? L'archer avait encore de belles années devant lui. De mon côté, j'étais lucide. Je ne ferais pas long feu. Je n'étais pas assez forte, pas assez dure pour survivre à ce monde dans lequel la fragilité n'avait plus sa place. Ouais...j'avais le cœur en miette...et mon humeur s'en ressentait.

Daryl leva les yeux en entendant mes pas. Visiblement, ma discrétion laissait plutôt à désirer. Il me dévisagea quelques secondes pendant que je m'installais à une distance raisonnable...enfin, me semblait-il. Il reporta son attention sur le monticule de terre avant de porter une cigarette à ses lèvres. Les genoux ramenés contre ma poitrine, je gardai le silence, réfléchissant à ce que j'allais lui dire. Putain de merde, Lola ! Tu aurais pu y penser avant, me réprimandai-je.

- T'es pas blessée ? demanda-t-il après une seconde.

Je fixai un instant mes poignets meurtris par les liens qui m'avaient dévoré la chair avant de secouer la tête en signe de négation.

- Non, j'ai...rien, répliquai-je.

Il inspira une nouvelle bouffée de tabac puis reprit en rongeant l'ongle de son pouce.

- Tant mieux. J'suis pas d'humeur à te rafistoler.

J'encaissai. En silence.

- Je...suis pas venue pour ça, murmurai-je.

- Alors t'es v'nue pour quoi ?

- Je voulais essayer de discuter calmement pour...

- Pour quoi ? Arranger les choses ? Y a plus rien à arranger, marmonna-t-il.

Ma gorge se noua sensiblement pendant que mon cœur recevait sa remarque de plein fouet. Je sentis mon barrage lacrymal se fissurer mais tentait malgré tout de refouler sa déferlante. Je ne voulais pas me mettre à pleurer. Pas devant lui.

- Dis pas ça, on peut encore essayer. La vie est trop courte, putain de merde.

- Être avec quelqu'un, c'est pas pour moi. C'est trop d'emmerdes.

Je baissai la tête et m'acharnai laborieusement sur l'un des fils de mon jean, histoire de détourner mon attention de ces larmes qui me brûlaient furieusement. Il ne pouvait pas penser ses paroles...pas après tout ce que nous avions vécu, essayai-je de me convaincre. Mais en y réfléchissant bien, il avait raison. Depuis que notre amitié avait pris ce tournant, je ne lui avais strictement rien apporté de bon. J'avais passé mon temps à accumuler les catastrophes, et ça nous avait détruit. Parce qu'au fond, c'était ce que j'étais. Un aimant à emmerdes. Je le détaillai silencieusement, écrasant d'un geste discret une goutte salée perlant au coin de mon œil droit. Pas une fois, il ne me regarda. Il se contenta de garder les prunelles baissées, comme pour ignorer délibérément ma détresse et mieux me repousser.

- Ok, finis-je par chuchoter en me levant.

Je tournai les talons, incapable de riposter, incapable de me battre contre l'homme que j'aimais.

- Attends ! lança-t-il en me rejoignant.

Je m'essuyai les yeux avant de me retourner, tentant malgré tout de garder un semblant de dignité.

- J'peux pas être avec toi Lola, dit-il comme pour mieux enfoncer le clou.

- Pourquoi ? Tu...ne m'aimes plus ?

Génial. Je tombai dans les réparties pathétiques. Ce qu'il avait fait de moi me révoltait. Comment pouvais-je me montrer aussi faible ? Aussi...nulle ? Je me sentais tellement pitoyable, c'en était presque ridicule.

- Le problème c'est...c'est que j't'aime trop, soupira-t-il en mordillant sa lèvre inférieure.

Ok. Là j'étais larguée. Il n'allait quand même pas me sortir le couplet du bon vieux « je t'aime trop et du coup j'arrive pas te protéger », songeai-je en fronçant les sourcils.

- Où tu veux en venir ?

- J'suis incapable de t'protéger parce que ces foutus sentiments me bousillent le cerveau, Casse-Noisette. J'peux pas tout gérer, j'y arrive pas.

Putain de bordel de merde ! Il avait osé ! Une furieuse envie de le gifler me traversa subitement l'esprit. Je me retins toutefois, au prix d'un effort incommensurable.

- J'espère que tu te fous de moi ? m'écriai-je, hors de moi. Tu passes ton temps à me protéger de tout et de tout le monde !

- J'ai pas réussi avec J.C, répliqua-t-il.

- Je croyais que c'était moi la responsable de ce qui s'est passé avec lui ? C'est bien ce que tu m'as balancé y a deux jours, non ?

- J'le pensais pas et tu l'sais très bien ! aboya-t-il.

- Alors pourquoi ?! C'était quoi ton but ? Me faire mal pour que je me barre, c'est ça ?

Il ne répondit rien, se contentant de me fixer nerveusement. C'était donc ça.

- Bah c'est raté, rétorquai-je. Si tu veux me larguer pour ton pseudo chemin de croix à la con, t'as qu'à le faire toi-même ! Parce qu'en ce qui me concerne, j'ai aucune envie d'assumer ta connerie de culpabilité en plus de la mienne.

Il jeta son mégot sur le bitume chauffé à blanc par les rayons dorés de cette fin de matinée et soupira. Il luttait, je le voyais bien. Mais que pouvais-je y faire ? Le forcer ? Ça ne rimait à rien. S'il voulait sauver ce qu'il restait de nous deux, il devait le faire de son plein gré.

- C'est fini, Lola.

J'encaissai. Difficilement. Et mon barrage lacrymal vola en éclats, devant lui. A ce rythme là, j'allais remplir toutes les nappes phréatiques de la planète.

- Tu vois, dis-je à voix basse tout en me maudissant intérieurement de n'être qu'une idiote gouvernée par ses émotions, c'était pas si compliqué.

Comme deux andouilles incapables de s'aimer normalement, nous restâmes immobiles à nous observer pendant de longues secondes. Dévorée par le chagrin, je me perdis brièvement dans ses prunelles bleues avant de m'éloigner, sans un regard en arrière.

***

DARYL

Ça va faire une semaine qu'on s'est barré d'ce motel à la con. Putain. Cet endroit me manquera pas. Entre ce qui s'est passé avec Casse-Noisette, ces enculés de cannibales et la mort de Tyreese, j'commence à croire que ce trou à rat porte la poisse. Carol m'a engueulé hier. Pour elle, j'ai fait une connerie. J'pense pas. J'crois que j'ai fait ce qu'il fallait. Même si j'peux pas m'empêcher d'avoir mal à chaque fois que j'pose les yeux sur elle. Je l'ai blessé. Volontairement. Mais ce sera plus facile pour Lola d'me détester...On s'parle plus. Ça nous est jamais arrivé. Et j'déteste ça. J'peux m'en prendre qu'à moi. J'le sais. Mais j'préfère qu'elle me haïsse plutôt que d'la perdre pour de bon. Ça, j'y survivrais pas. Elle retrouvera le sourire. Tôt ou tard. Parce que quoique j'en dise, même si on est plus ensemble, elle reste ma gonzesse. Et ma gonzesse, c'est une foutue survivante.

Il fait humide. Limite froid. Le temps a changé rapidement ces derniers jours. L'hiver est pt'être pas loin ? On crapahute dans les bois depuis des plombes. Rick pense que c'est mieux d'éviter la route. J'lui fais confiance. C'est un peu grâce à lui si on est encore presque tous là. Et puis, faut bien que quelqu'un prenne les décisions. Et j'me vois pas confier cette tâche à quelqu'un d'autre. Quoique, Hershel en a dans l'froc. Il ferait un bon leader. Il l'a prouvé pendant l'épidémie de grippe. Ou pt'être Glenn. Même s'il vit encore un peu trop dans le monde des Bisounours. Ou Carol ? Ouais. En fait, tout le monde sauf moi. Et Barry. Et l'abruti avec sa coupe mulet. Même Carl du haut d'ses...il a quel âge d'ailleurs le môme maintenant ? Douze ? Treize ans ? J'en sais que dalle. J'sais même plus depuis combien d'temps cette merde d'épidémie a commencé.

Je m'éloigne un peu du reste du groupe. On crève la dalle. Faut que j'trouve à bouffer. Si on doit encore passer la nuit à la belle étoile, autant avoir quelque chose à grailler. Surtout si les températures continuent de chuter comme ça. Je m'enfonce un peu plus dans la forêt. Je dégomme un rôdeur. La routine. On en a croisé pas mal depuis qu'on s'est tiré. Plus les jours passent, plus y en a. Et c'est pas près de s'arranger.

J'continue d'avancer. Le plus silencieusement possible. J'repère un opossum. J'tire...j'rate. Fais chier. Je récupère mon carreau planté dans la terre. J'en ai ma claque de ce périple à la con. Le shérif est un bon leader. Mais la vérité, c'est qu'il est aussi paumé qu'nous. On avance parce qu'il nous dit d'avancer. Mais on sait même pas vers quoi on avance. J'commence à croire que Washington ça pourrait être pas mal. On pourrait repartir de zéro. Et laisser toutes ces merdes derrière nous. J'repense à Merle. A Beth. A Tyreese. A Lori. A tous ceux qu'on a perdu. Y a plus rien qui nous retient ici. A quoi bon s'entêter ? Faut que j'lui en touche un mot. Quoiqu'il en soit, j'me rangerai à son avis. Parce que c'est mon frangin. Et que j'lui fait confiance. Mais au moins, il saura c'que je pense de tout ça. Et pt'être qu'il m'écoutera. Ou pas.

Après quelques minutes, j'chope un écureuil, un deuxième et encore trois autres un peu plus loin. Lola va faire la tronche, elle les trouve mignons...pourquoi j'pense à ça ? Pourquoi j'pense à elle ? Pt'être parce qu'elle est là. Elle est tout le temps là. Mes entrailles se tordent. Faut que j'lui trouve autre chose. Elle me manque. Putain de merde ! J'vais jamais réussir à me désintoxiquer d'elle. Surtout si j'dois la voir tous les jours. D'un autre côté, si j'veux continuer à veiller sur elle, j'peux pas m'barrer. Dans tous les cas, même si j'le voulais, j'le ferais pas. D'abord pour Lola, mais aussi pour les autres. J'les entends qui discutent pas loin. Pas étonnant qu'on s'fasse toujours repérer. Entre Barry qui hurle comme une gonzesse à chaque fois qu'il croise une bestiole, Carl qui s'marre dès qu'il ouvre la bouche, la pt'ite dure à cuire qui braille parce qu'elle a la dalle et les autres qui discutent comme si on était en vacances, j'ai l'impression d'avoir à faire à une bande de gamins. Mais c'est ma famille. Alors j'ferme ma gueule. J'déboule comme si de rien n'était et putain de merde ! Ils pointent tous leurs flingues sur moi. Ouais, sont pt'être pas autant en vacances que ce que je pensais en fait. Je lève les bras et les écureuils en signe de capitulation.

- On s'rend !

J'peux pas m'empêcher de la voir sourire à ma vanne. Ça ne dure qu'une seconde. Mais ça m'suffit. Parce que maintenant, j'me contente de ce que j'ai. Et du peu qu'elle veut bien m'offrir. Même si c'est minime.

Rick range son Python. On l'a retrouvé avec le sabre de Michonne sur ces fils de pute du Terminus. C'est bien la seule chose positive qui soit arrivée ces derniers jours.

- T'as repéré un endroit où on pourrait passer la nuit ? demande Rick.

- Nan mon vieux, y a que dalle.

- On fait une pause ! il déclare.

J'redresse mon arbalète sur mon épaule. Il s'tourne vers moi. Michonne rapplique aussi. Glenn. Et Maggie. C'est quoi ce bordel ? C'est un complot ? Pourquoi ils se ramènent tous ?!

- Qu'est-ce-qu'on fait ? chuchote la fille Greene. Mon père va pas pouvoir continuer comme ça pendant des jours.

- Il est épuisé Rick, j'ai peur qu'il finisse par nous claquer entre les doigts, murmure l'asiatique.

Putain. J'suis soulagé. Enfin, pas pour l'état d'Hershel. J'ai cru que j'allais devoir me farcir une foutue leçon de morale ou j'sais pas trop quoi. J'deviens complètement parano. J'reporte mon attention sur le vieux. C'est vrai qu'avec sa patte folle, les conditions sont pas idéales pour lui. Un hurlement retentit. Une voix d'homme. J'dévisage Rick.

- Au secours ! Que quelqu'un me vienne en aide !

Carl s'précipite sur son père. L'inconnu continue de brailler. On peut pas l'laisser. C'est pas nous. On aide les autres...normalement. Mais depuis cette histoire avec ces connards du Terminus, on devient méfiants. Rick hésite. Alors le gosse le secoue.

- Faut qu'on y aille ! On doit aller l'aider !

- Le môme a raison, je réplique.

- Ok, ok on y va !

On s'élance tous en direction des hurlements. Le type est pas loin. Une centaine de mètres tout au plus. Toute façon, pour le moment, on a rien de mieux à faire. Abraham part en tête. Il bombe le torse. Fièrement. L'ancien militaire fait pas dans la dentelle. Ça m'plaît. Quelque part, son franc parler, m'fait penser à mon frangin. Même s'ils ont qu'ça en commun. Merle était qu'un pauvre con. Ça a pas l'air d'être le genre de c'mec.

- Aidez-moi, je vous en supplie !

Je m'immobilise. Dites moi que j'rêve ?! Un foutu curé black, planté comme un abruti sur un putain de caillou, gémit et se tortille pour échapper à un seul et unique rôdeur. C'est quoi cette blague ?! Abraham s'occupe du mort vivant. Et l'autre serviteur du seigneur s'écroule, tremblant comme une fillette.

- Vous n'êtes pas armé ? constate Carol, aussi ahurie que moi.

- Le seigneur me protège, répond le prêtre.

- Ouais, ça a vachement bien marché, j'remarque.

- Vous êtes là.

Ok. Ce mec a réponse à tout. Il me gonfle. Rick le toise de toute sa hauteur. Il lui fait son regard arrogant. Celui qui gèlerai sur place n'importe qui en sachant qu'il est capable d'arracher la carotide d'un enfoiré pour protéger son môme.

- Tu t'appelles comment ?

- Gabriel.

Comme l'archange. Génial. Tu parles d'un cliché. Un poète, un scientifique...et maintenant un curé.

- T'as tué combien de rôdeurs ?

J'soupire. J'le laisse poser ses questions. Elles sont débiles. Mais il y tient, alors je ferme ma gueule. J'me retourne vers Lola. Elle discute avec Tara. J'crois qu'elles s'entendent bien. Sa mère la surveille du coin de l'œil. Putain. J'repense à ce qu'elle m'a balancé l'autre soir. Son histoire de coma. Encore une bonne raison de m'être éloigné d'elle. J'aurais jamais pu lui cacher un truc pareil. C'est déjà compliqué en étant séparé...Elle se marre. Ça me rassure de la voir comme ça. De l'entendre rire. J'me dis que finalement, j'ai eu raison. Elle est définitivement mieux sans moi. Tant pis si j'ai mal.

***

LOLA

Les sourcils haussés, une moue dubitative collée au visage, je contemplai l'église paumée au beau milieu des bois. La maison du seigneur me toisait de toute sa hauteur, presque aussi menaçante qu'une horde de rôdeurs affamés. Je n'avais jamais été très à l'aise avec tout ça. Ma vie de merde en était probablement la cause. Je jetai un coup d'œil à ma mère, postée un peu plus loin en compagnie de Carol. Elles avaient l'air de bien s'entendre toutes les deux. L'âge peut-être ? Ou leur passé de femmes battues ? La deuxième option était certainement la plus probable. On ne s'était pas adressé la parole, depuis ce fameux soir. J'étais en colère. Terriblement en colère. Et j'ignorais comment me comporter avec elle. Alors en attendant, aussi puéril que c'était, je l'évitais.

Rick et Michonne sortirent de l'édifice dans lequel Hershel avait été installé, m'arrachant par la même occasion à mes questions existentielles. Le patriarche montrait des signes de fatigue depuis plusieurs jours. A sa décharge, il fallait admettre qu'entre le poids des années et son unique jambe, crapahuter en pleine forêt avec en prime des températures en chute libre n'avait rien d'une promenade de santé.

- Comment il va ? s'enquit Sasha tandis qu'ils arrivaient à notre hauteur.

- Il a besoin de repos, répliqua le shérif, les deux mains posées sur les hanches.

- Et lui ? On peut lui faire confiance ? s'inquiéta Glenn en désignant le Padre d'un signe de tête.

Rick soupira, détaillant discrètement le prêtre, prostré devant la lourde porte en bois. Je n'avais rien contre les hommes d'église. Mais il fallait admettre, que celui-ci en tenait une sacrée couche. Il avait tenté de détendre l'atmosphère un peu plus tôt en sortant une vanne au sujet de son intention de dérober les écureuils de Daryl...cela avait été un échec cuisant. Sans compter que depuis notre rupture, l'archer était d'une humeur massacrante. Moi aussi d'ailleurs. Sauf qu'en ce qui me concernait, je ne passais pas mes nerfs sur les autres.

- Restons méfiants, répondit notre leader, il cache quelque chose.

- Il a parlé d'une banque alimentaire à quelques kilomètres, reprit Michonne.

- On va y aller tous les deux, avec Bob et Barry. J'emmène le prête, je veux garder un œil sur lui. Sasha, tu te sens de nous accompagner ?

L'afro américaine acquiesça silencieusement tandis que Rick faisait signe à Daryl d'approcher. Je gardai les yeux baissés, incapable d'affronter le regard glacial qu'il me jetait à chaque fois que nos prunelles avaient le malheur de se croiser.

- Nos réserves d'eau sont presque à sec, tu peux t'en occuper ? lui demanda Rick.

- Sûr, j'pars tout de suite, marmonna-t-il en s'éloignant.

- Prends Lola avec toi !

Il s'immobilisa pendant que j'ouvrais la bouche pour protester.

- Il est hors de question que j'aille quelque part avec lui, déclarai-je en croisant les bras d'un air buté.

- J'peux m'en occuper tout seul, ajouta le chasseur. J'ai pas besoin de l'avoir dans les pattes.

- Tu n'y vas pas seul. Avec ce qui s'est passé ces derniers temps, on ne part plus en solitaire.

- Elle va m'servir à rien, j'peux pas plutôt embarquer Carol ?

Je retins un rire nerveux et une remarque des plus cinglantes quant à mon inutilité tandis que Glenn nous observait avec un petit sourire en coin. Cette histoire était montée de toutes pièces, réalisai-je, agacée.

- Carol ! interpella Rick. Tu peux aller chercher de l'eau avec Daryl ?

- Non pas aujourd'hui, répondit-elle en s'étirant faussement avant de simuler un bâillement très légèrement exagéré, je suis épuisée.

- C'est une blague ? grogna Daryl. Glenn ?

- T'as qu'à demander à Eugene tant que t'y es, grinçai-je entre mes dents.

- Hey ! Me compare pas à lui Lola, s'esclaffa l'asiatique. Mais je passe mon tour mon pote, Maggie a besoin de moi pour s'occuper d'Hershel.

- Abraham et Rosita veulent retaper le vieux bus des paroissiens, reprit le shérif.

- Tara surveille Eugene, Carl et Judith, quant à Dolorès, elle est infirmière, il faut qu'elle reste avec le père de Maggie, sourit la samouraï.

- C'est un complot ou quoi ? m'exclamai-je.

- Vous êtes deux adultes, non ? intervint Rick. Comportez-vous comme tels, faites-le pour le groupe, ajouta-t-il avec un haussement de sourcils amusé.

C'était la meilleure ! Ils s'étaient réunis pour parler de nous ou quoi ? Ils essayaient de jouer les entremetteurs ? Mais putain de merde, j'avais l'impression de me retrouver dans l'Apocalypse des cœurs brisés. Extérieurement, je fulminais. Intérieurement...j'étais morte de trouille. Daryl et moi ne nous étions pas retrouvés seuls depuis que nous avions quitté le motel. Et vu la rancœur qui nous animait l'un comme l'autre, notre escapade hydraulique ne se ferait certainement pas dans la joie et l'allégresse.

***

- Magne-toi Casse-Noisette, j'ai pas envie d'passer la nuit dehors.

- Moi non plus et encore moins avec toi !

- Ferme ta gueule et avance !

Faites-le pour le groupe...faites-le pour le groupe...mais vas te faire foutre Rick Grimes, songeai-je, exaspérée.

- Si t'es pas content t'as qu'à me laisser derrière, je m'en porterais pas plus mal, rétorquai-je en trébuchant sur une racine de la taille d'une musaraigne.

- Tu s'rais capable de t'péter encore un truc, marmonna l'archer tandis que le soleil se couchait.

Non seulement nous n'avions pas trouvé d'eau, mais en plus, nous avions passé des heures à nous balancer des saloperies à la figure. La situation était d'un pathétique ! Si Rick et les autres pensaient qu'en nous obligeant à passer du temps ensemble, nous allions remettre le couvert...ils se fourraient le doigt dans l'œil jusqu'à l'os...expression plus que dépassée, certes, mais j'avais le cerveau en bouillie à force de m'en prendre plein la tronche.

- Me fais pas croire que ça t'inquiète, déclarai-je en levant les yeux au ciel.

Je le percutai de plein fouet, surprise par sa soudaine immobilité.

- Putain mais t'es con ou quoi ?! m'écriai-je.

- J'aurais jamais dû t'embarquer !

- Rick nous a pas laissé le choix, remarquai-je en croisant les bras sur ma poitrine.

- J'parlais pas d'aujourd'hui, cracha-t-il.

Ignorant sa remarque blessante, je me remis en route, le laissant planté sur place comme l'abruti qu'il était. J'en avais marre. Vraiment marre. Les joutes verbales, aussi stimulantes étaient-elles, m'épuisaient. J'avais mal partout, mon cœur était en miettes, j'essayai de me remettre des derniers traumatismes en date...alors m'écharper la gueule avec mon ex commençait sérieusement à me taper sur les nerfs...surtout qu'au fond je n'arrivais même pas à être réellement en colère contre lui. Et putain ! Ça me gonflait plus que tout ! Le haïr aurait été tellement plus simple ! Mais non. Il suffisait que Monsieur Dixon mordille sa lèvre inférieure pour que la faible femme que j'étais se liquéfie sur place. Je détestais être amoureuse. Et je détestais encore plus être amoureuse de lui. Si l'on devait résumer le terme pathétique à une seule et même personne, alors Lola Collins, trente et un ans, en était la parfaite incarnation. Le tonnerre retentit bruyamment, m'arrachant de force à ma petite séance d'auto flagellation quotidienne. Merde de merde de merde ! Manquait plus que ça. La pluie se mit à tomber, son volume hydraulique augmentant rapidement à mesure que les éclairs zébraient le ciel.

- Amène-toi, marmonna l'archer en s'élançant devant moi.

- Ah bah voilà, on voulait de l'eau ! On est servi ! criai-je pour couvrir le bruit de l'orage.

- J'reste pas là dessous, c'est un foutu déluge !

- Et tu veux faire quoi ? Rentrer à l'église ? Je ne te savais pas aussi proche du Seigneur !

- Putain mais jamais tu t'tais ?!

- Je suis censée faire quoi ?! Tu me regardes même plus, quand tu m'adresses la parole, c'est pour me gueuler dessus ! J'en ai ras le cul ! J'ai froid, j'ai faim, je suis crevée et en plus maintenant, je suis trempée ! m'écriai-je au bord de l'hystérie.

- T'as tes règles ou quoi ?!

- Mais ta gueule, putain !

- Toi ta gueule ! hurla-t-il en se plantant devant moi, ses prunelles devenues noires de rage.

Nous nous toisâmes de longues secondes, fulminant l'un comme l'autre. On en était arrivé à un stade qui flirtait dangereusement avec le ridicule. Nous n'étions plus ensemble. Ok. Certes. Mais était-ce une raison pour se comporter comme deux andouilles ? Ne pouvions nous pas nous montrer un minimum civilisés ?

- Tu m'fais chier, Lola.

Visiblement...on ne pouvait pas. Je levai les yeux au ciel pour la dixième fois depuis que nous avions quitté les autres. La communication n'avait jamais été notre fort...mais là, on atteignait des sommets. La pluie tombait en masse, éclaboussant la végétation de ses énormes gouttes, imbibant mes fringues au passage.

- On fait quoi ? tentai-je de me radoucir.

- On y voit pas à deux mètres, on trouve un abri et on attend qu'ça s'calme, grogna-t-il.

J'acquiesçai d'un signe de tête avant de lui emboîter le pas, en silence cette fois. L'esprit embué par cet orage cataclysmique, j'avançai, tête baissée pour me protéger du vent qui s'était levé. C'était le pompon...à croire que tous les éléments s'étaient rassemblés pour assister à notre explosion. Je les imaginais un instant, réunis dans leur bureau météorologique, en pleine séance de rainstorming. « Hey les gars ! Regardez ! Lola et Daryl se disputent encore ! Chouette ! J'veux voir ça de plus près »...ok. Je touchais le fond.

***

- Par là ! cria Daryl en se dirigeant vers une vieille cabane de chasse.

Grelottant des pieds à la tête, je le suivis jusqu'à la masure, remerciant silencieusement tous les chasseurs, vivants ou pas, et ce, malgré mon aversion pour cette pratique barbare...enfin, à l'époque des supermarchés en tout cas. Je m'engouffrai dans la bicoque, trempée jusqu'aux os, mes cheveux ruisselant dans ma nuque. Je détaillai un instant l'intérieur au confort modeste mais réconfortant, compte tenu de la situation. Un vieux fauteuil défoncé, un canapé ayant connu des jours meilleurs. L'endroit était spartiate. Mais parfait en attendant que l'orage s'apaise. Je récupérai les bidons vides que l'archer venait de poser dans un coin.

- Tu fais quoi?

- Je vais les mettre devant, on était censé rapporter de l'eau, tu te souviens ?

Il ne répondit rien, se contentant de hausser les épaules dans une attitude proche de l'arrogance. Je ressortis une seconde, accueillant avec mauvaise humeur une rafale de vent glacé. Après avoir ouvert les jerricans et les avoir calé du mieux possible, je retournai à l'intérieur.

Avachi dans le vieux fauteuil, son arbalète à portée de main, l'archer leva les yeux sur moi.

- Y a une couverture, dit-il en désignant le bout de tissu posé sur la banquette d'un signe de tête. Prends-la.

Je me laissai tomber sur les coussins bouffés aux mites, ramenai mes genoux contre ma poitrine avant de m'enrouler dans la couette, mes vêtements trempés collant désagréablement sur ma peau.

- Tu devrais retirer tes fringues, remarqua-t-il.

- Ça risque pas d'arriver, répliquai-je.

- Tu vas attraper la mort si tu restes comme ça, marmonna-t-il.

- Je ne me déshabillerai pas !

- C'est pas comme si je t'avais jamais vu.

- T'es vraiment abruti quand tu t'y mets.

- Fais c'que tu veux, j'en ai rien à foutre...

Je soupirai, exaspérée.

- Et toi ? Tu gardes tes fringues ?

- Vas te faire foutre, Lola.

Trop épuisée pour répondre quoique ce soit, je m'allongeai sur le flanc, lui tournant délibérément le dos.

Les minutes s'égrenèrent lentement, à mesure que l'orage prenait de l'ampleur. Les éclairs se répercutaient sur les murs en bois, illuminant la bicoque à intervalles réguliers. Le vent s'engouffrait en courants d'air glacials par tous les interstices de notre abri apocalyptique. Incapable de me réchauffer, je resserrai mes bras autour de ma poitrine tandis que mes muscles endoloris tremblaient. Je sursautai en le sentant se coucher près de moi pour me serrer contre lui. Putain de merde. Je ne l'avais même pas entendu se lever.

- Qu'est-ce-que tu fais ? m'écriai-je en le repoussant.

- T'es gelée, se justifia-t-il.

- J'ai pas besoin de toi, je peux très bien me réchauffer toute seule !

- Ouais, c'est pour ça qu'tu claques des dents ?

Je me retournai, prête à l'envoyer bouler lorsque je rencontrai ses prunelles tourmentées. Une fois encore, mon petit cœur se fissura face à cet homme qui me rendait folle.

- Avoue qu'en fait tu veux la couverture, souris-je finalement.

- T'es conne.

- Je sais.

L'espace d'une seconde, avoir retrouvé un semblant de complicité me ramena quelques semaines en arrière, dans l'espace confiné de notre cellule. Je nous revoyais, arpentant les couloir bétonnés, se chamaillant comme deux gosses bousillés par la vie qui avaient enfin fait connaissance avec le bonheur.

- Tu me l'as jamais dit, déclarai-je soudain.

- Quoi ?

- La strip-teaseuse de Las Vegas, sourcillai-je, tu lui as fait quoi ?

J'ignorais pourquoi je lui posais la question. Au fond, je n'en avais rien à faire de ce qui avait pu se passer. Disons qu'il s'agissait d'une façon comme une autre de rétablir le dialogue...en quelque sorte.

- Des trucs que j'aurais jamais fait avec toi, Lola.

- Pourquoi ?

- Parce que...c'était dégradant et humiliant pour elle.

- Alors pourquoi tu l'as fait ?

- Parce que j'suis qu'un connard...

- T'es pas un connard, soupirai-je en me redressant sur un coude.

- Bien sûr que si.

Je déglutis, ne sachant quoi répondre. Son manque de confiance en lui m'exaspérait. Et d'un autre côté, il me brisait. Si je n'avais pas une grande estime de moi-même, c'était pire pour Daryl. Il était passé maître dans l'art de l'auto flagellation.

Soulevant la couverture, je l'invitai timidement à se rapprocher. Après une seconde d'hésitation, il s'exécuta en silence. Perdus dans les yeux l'un de l'autre, nous nous observâmes longuement. On était paumé. Tous les deux. Comment deux êtres qui s'aimaient autant pouvaient se faire tant de mal ? Je louchai un instant sur sa lèvre inférieure qu'il ne cessait de mordiller, luttant contre l'envie irrépressible de la capturer.

- Essaye de dormir, marmonna-t-il en replaçant une mèche de mes cheveux derrière mon oreille.

- Et toi ?

- J'bouge pas.

- Je...je veux plus qu'on se prenne la tête Daryl, murmurai-je.

- Je sais. Moi non plus.

- Tu me manques.

Il se crispa sensiblement, resserrant son étreinte autour de ma taille. Sur le point de m'effondrer en larmes, je fermai les yeux et laissai ma tête reposer sur son épaule. Nous n'étions plus. Je le savais. Mais quelque part, au cœur de cet orage de fin du monde, une lueur d'espoir s'alluma, me laissant entrevoir un avenir un peu plus lumineux pour nous deux. Enfin, je l'espérais.

A suivre...

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Il vous a plu ? 🙈

Merci de m'avoir lue ❤

Cette fois-ci, je vous dis à la semaine prochaine ! ❤❤

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