11 | 'APPRÉHENSIONS'
Tu sortis de la salle de bain de chez Isagi avec une serviette sur les cheveux, ébouriffant ta tignasse et entraînant tes épis à se faire plus vigoureux. Son t-shirt flottait sur tes épaules, un peu trop ample pour toi, et quand tu retournas dans sa chambre, tu le trouvas étalé en étoile de mer au milieu de son matelas. Ta playlist jouait encore dans ses enceintes, assourdissante dans son silence. Son regard était rivé vers l'écran de son téléphone, et quand tu apparus dans l'encadrement de la porte, il le lança à l'opposé du lit.
« J'ai pas retiré la musique, t'informa-t-il en se décalant dans son lit pour t'y laisser de la place.
— J'entends bien. On peut baisser le son, par contre. »
Il acquiesça, et alors que tu te blotissais dans ses bras, il réduisit drastiquement le volume ; les basses ne faisaient plus vibrer la plante de tes pieds, et les pics aigus de la chanson n'atteignaient plus tes tympans avec autant d'hargne.
Yoichi enfouit son visage dans ton cou, et, vos bras et jambes s'entremêlant, il vint déposer un baiser contre ta peau, se frotta contre toi et te caressa la nuque.
« Tu sens comme moi.
— Logique, j'ai utilisé ton savon. »
Et c'était enivrant ; son odeur t'asphyxiait, te submergeait, t'empêchait de penser correctement. Il sentait bon, un mélange frais de menthe et de citron artificiel. C'était rafraîchissant, une bouffée d'air nouveau alors même que tu succombais dans son étreinte. Tu sentais comme lui, dorénavant, et tu avais cédé à l'envie de prendre une grande inspiration dans son t-shirt une fois que tu l'eus enfilé.
« J'aime bien sentir comme toi, lui avouas-tu alors, J'aime ton odeur. »
Il soupira simplement de satisfaction en t'entendant, et se libéra de vos embrassades pour déposer sur tes lèvres un baiser aussi léger qu'une plume.
« J'espère qu'on pourra continuer de se voir au Blue Lock, marmonnas-tu contre lui, On y retourne dans si peu de temps.
— J'ai tellement hâte.
— J'ai trépigné d'impatience, hier, quand j'ai reçu le mail, il pouffa de rire face à ta déclaration.
— Mais ne t'inquiète pas, même si on n'est pas dans les mêmes dortoirs comme on a pu l'être avant, on aura forcément le moyen de se voir, sa voix était confiante. Tu ne pus que le croire. »
La chambre retomba dans le silence, et tu en profitas. Tu t'y baignas, comme tu te baignais dans les câlins amoureux de Yoichi, appréciant votre moment de pause, votre moment de repos mérité. C'était apaisant : sa respiration était stable, chatouillant et titillant ta clavicule, opposés aux battements de son cœur que tu avais l'impression d'entendre à travers sa cage thoracique. Tu n'étais pas sûrement mieux. Tes paupières étaient lourdes, et malgré l'heure encore jeune, tu avais du mal à les maintenir ouvertes. Presque contre ton gré, elles finirent par se clore ...
Jusqu'à ce que ton téléphone se mette à vibrer contre sa table de chevet. Ton corps tressaillit, et tu te redressas rapidement pour révéler qui était la personne au bout du fil. Sous le regard inquisiteur d'Isagi, tu grimaças, puis décrocha avec un soupir ennuyé.
« Allô, maman ?
— Où es tu ? On devait vider le grenier ensemble aujourd'hui, tu devais rentrer pour quinze heures. Il est seize heures.
Tu levas les yeux au ciel, et passa une main irritée dans tes cheveux encore humides.
— Je suis chez–
— Les Isagi ? te coupa-t-elle. Tu fronças les sourcils.
— Oui, c'est ça.
— Tu rentres maintenant, t/p. Faut qu'on parle.
Ton agacement vacilla alors qu'une vague de désarroi renversait tes émotions.
— J'ai fait quelque chose de grave ? bredouillas-tu, la voix tremblante.
— On en parlera une fois que tu seras rentré. En attendant, je veux que tu reviennes. Déjà que je n'aime pas ce projet Blue Lock, si je dois en plus te perdre quand tu es à portée de main ...
— Tu ne me perds pas, maman, soufflas-tu timidement, Et arrête de dire que tu n'aimes pas le Blue Lock, j'ai compris.
— Je ne suis même pas sûr que toi tu l'aimes, alors comment pourrais-je avoir confiance en ce truc ? »
Tu fus incapable de répondre. Les lèvres pincées, tu jetas un œil paniqué à Yoichi, qui n'était plus du tout allongé en attendant que tu finisses. Il était assis à tes côtés, visiblement tout aussi concerné que toi.
« J'aime le projet Blue Lock, maman, ta voix était petite, peut-être trop oscillante pour que tu prouves une confiance que tu te savais inexistante. Les doutes sur ta place au Blue Lock, tu avais été le premier à en avoir.
— Tu mens, et je le sais. T'es sûr que tu veux y retourner ?
— É-Évidemment ! tu tentas de t'indigner, mais c'étaient dorénavant les sanglots qui essayaient de ravager tes phrases, Ne parle pas pour moi, je sais ce que je dois faire, conclus-tu en baissant les yeux, avant de maugréer, Je rentre. »
Elle te salua, ce à quoi tu répondis en raccrochant. En silence, tu n'osas d'abord pas bouger sous le regard pesant de ton petit ami. Il était insistant, trop lourd et oppressant pour toi à cet instant.
« Ça va, t/p ? finit-il par murmurer.
— Ça va, tu essayas de le rassurer, Je vais devoir rentrer.
— Tu ne viendras pas ce soir, du coup ? s'enquit-il, pressé en te voyant te relever.
— J'essaierai de négocier, mais je ne pense pas. Si je peux venir, je t'enverrai un message. »
Avec un autre long soupir, tu t'étiras puis te frottas les yeux. Tu étais fatigué, et devoir rentrer pour confronter ta mère t'épuisait encore plus. La main sur la poignée, tu t'apprêtais à l'abaisser quand Yoichi vint t'enlacer par derrière. Tu restas statique, incapable de partir ou de te forcer à le quitter. Te laissant aller contre son étreinte, il murmura contre ton oreille.
« T'es sûr que ça ira ?
Cette fois, tu hésitas.
— Je sais pas ... finalement, tu te confias à lui, J'ai peur. Je réfléchis trop, j'appréhende. Par rapport à ma mère, par rapport à ce qui va se passer après.
— Ça t'angoisse ? il déposa un baiser dans ta nuque. Tu acquiesças.
— J'ai l'impression de pas être assez passionné. Quand je te vois jouer ... Je me dis que je ne pourrais pas être aussi déterminé que toi, lui révélas-tu. Tu ne le lui avais jamais dit avant.
— À cause de ta peur du ballon ? sa tête reposa contre ton épaule.
— Pas que ... J'ai juste l'impression de pas avoir autant de motivation. J'ai peut-être pas assez d'ego.
— C'est vrai que t'as jamais été un connard comme Rin ou Baro, fit-il remarquer, Mais pour autant, j'ai toujours trouvé que tu te débrouillais très bien. Ego aussi, sinon tu n'aurais jamais été en remplaçant pour le match contre les U-20. Et puis ... Je pense que tu finiras par trouver la manière de jouer qui te plaira vraiment. Et quand ça sera le cas, tu t'amuseras vraiment.
— J'ai déjà l'impression de m'amuser, pourtant. J'aime l'adrénaline. Mais juste ...
— Je pense que ce que j'ai dit marche quand même. T'as juste pas encore trouvé ton truc, il plaça un autre baiser dans le creux de ton cou.
— Et si j'étais pas fait pour être un buteur ? ça y'est : le doute. Encore, toujours, il persistait. Tu sentis Yoichi se tendre dans ton dos.
— Si t'étais pas fait pour ça, tu serais pas là, n'est-ce pas ? déclara-t-il. Il n'avait pas l'air pour autant assuré, et tu soupiras.
— Merci Yoichi.
— Je ne pense pas être calé pour te donner des conseils là dessus ... Mais je te fais confiance. »
Tu te retournas, et l'embrassa. Ses mains posées sur tes joues, il se colla contre toi, et tu dûs le forcer à se séparer.
« Je dois vraiment y aller.
— On se reverra avant de retourner au Blue Lock ?
— J'espère. Tu m'appelleras ?
— Bien sûr. Et tu me tiens au courant aussi.
— Promis. »
Tu plaquas tes lèvres une dernière fois contre les siennes avant d'enfin baisser la poignée de la porte, pour descendre les escaliers quatre à quatre. Arrivant dans l'entrée en dérapant, tu sautas dans tes chaussures.
« Tu t'en vas t/p ? s'étonna sa mère en te voyant faire tes lacets de manière un peu trop frénétique.
— Oui ! Merci de m'avoir accueilli, madame Isagi ! t'écrias-tu avant d'ouvrir la porte en coup de vent. »
Tu courus jusqu'au train, te dépêchas et te pressas pour rentrer chez toi avant que ta mère ne te rappelle. Si elle devait te rappeler, c'était signe que ta maison allait gronder sous ses reproches une fois que tu poserais un pied à l'intérieur.
Quand tu ouvris la porte, tu dûs la retenir pour ne pas qu'elle claque contre le mur et laisse une marque indélébile de ton empressement. Le souffle court, tu passas une main sur ton front pour en essuyer la sueur. Ton regard se figea en croisant l'œil dur de ta mère. Elle t'avait attendu.
« J'ai fait au plus vite, entre deux respirations saccadées, tu réussis à prononcer ces mots.
— Je sais.
— Pardon ? tu clignas des yeux, confus. En train de retirer tes chaussures, elle te fit signe de venir t'asseoir. »
Tu déglutis, et la suivis jusque sur le canapé, mal à l'aise. Ton père travaillait encore, ta sœur était sortie. C'était toi, ta mère, et son insistance. Tu étais crispé à ses côtés. Elle le remarqua, mais ne te rassura pas.
« Qu'est-ce que tu sais ? lui répétas-tu.
— Ce Isagi. C'est plus qu'un ami. Je me trompe ?
Tu blêmis.
— Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
— Déjà, le t-shirt. Et j'ai entendu, devant ton regard perplexe, elle se trouva obligée d'élaborer, Une fois, quand il était là. Vous aviez mis de la musique, mais j'ai entendu malgré ça.
— Entendu quoi– ? Attends, tu nous as écoutés ?!
— Je m'étais dit que c'était louche, la première fois qu'il était là. Je devais vérifier, vu que tu ne me dis jamais rien.
— T'as entendu quoi ? tu étais bloqué sur cette information, peut-être parceque prendre en compte l'entièreté de la situation était de trop pour toi.
Elle ouvrit la bouche, chercha ses mots.
— Vos gémissements, conclut-elle dans une hâte embarrassée. Les mots avaient fui ses lèvres en un éclair. Peut-être avait-elle voulu les sortir le plus rapidement possible, afin qu'ils ne s'imposent pas de plus dans la conversation.
Tu enfouis ta tête entre tes mains, jurant sous ton souffle, priant bêtement, alors que tu savais pertinemment que c'était ridicule.
— On n'a rien fait, l'informas-tu, sans oser scruter ses réactions, Ne t'imagine rien, parcequ'il ne s'est rien passé.
— Je m'en fiche.
— Je te jure ! t'exclamas-tu, la voix étranglée. Tu relevas finalement la tête pour plonger ton regard dans le sien. Elle resta stricte.
— Je m'en fiche, articula-t-elle plus lentement.
— Tu ... Je te dégoûte ? tes lèvres tremblaient, et quand elle se leva du canapé, s'éloigna de toi, un sanglot bruyant t'échappa.
— Non. Fais ta vie. Ça ne me regarde pas.
— Maman ! les larmes commencèrent à rouler sur tes joues. Elles brûlaient ta peau sur leur passage, laissaient une trace luisante et brûlante, S'il te plaît !
Parcequ'elle avait beau dire que ça ne la regardait pas, la sécheresse glacée dans son ton te dévastait.
— Que veux tu que je dise ?
Debout derrière elle, tes épaules tréssaillaient. Entre deux hoquets, tu réussis à croasser :
— N'importe quoi.
Elle soupira, une moue apitoyée sur le visage.
— Tu ne me dégoûtes pas. Tu restes mon fils, même si tu fricotes avec d'autres hommes.
Elle restait froide, plus ferme et rébarbative que d'ordinaire. Tu éclatas en sanglots, tes mains frottant ton visage. Elles agissaient de leur plein gré, inutiles et tremblantes, étalant tes larmes. Elle resta à deux mètres de toi, ne se rapprocha pas.
— Je t'en supplie maman ! Je t'en supplie !
— C'est un footballeur aussi ?
Tu hochas la tête vivement.
— Qu'il prenne soin de toi, là bas, en un soupir, elle se rapprocha, Ton état m'inquiète.
— Mais c'est de ta faute ! Regarde comment tu réagis en apprenant que j'aime les hommes !
— Tu me l'as caché je ne sais combien d'années. Forcément, j'ai du mal. Tu n'aimes pas les femmes, du coup ?
— C'est pas le sujet.
— Un peu. Je n'aurais jamais de petits enfants ?
— Arrête ! tu suffoquais, Arrête, on s'en fiche de ça ! Et au pire, Ai aussi a un petit ami. Elle finira par en avoir, des gosses.
— D'accord, d'accord, elle commença à te caresser les cheveux, et te serra contre elle, Pardon.
— On est ok ? reniflas-tu.
— On est ok. »
Son silence réussit à te calmer, sa main douce dans ton dos. Ta respiration s'apaisa lentement. Elle choisit ce moment pour reprendre.
« Et du coup, vous avez fait quoi, dans ta chambre ?
— Maman, non ! t'écrias-tu en la repoussant brusquement. Elle gloussa, mais tu savais tout autant qu'elle que la situation restait tendue.
— Tu m'excuseras, j'aurais besoin de temps pour m'y faire. Tu restes mon bébé, ça fait bizarre.
— Hmm. »
Tu n'osas pas lui demander de te laisser sortir à nouveau, pas après la scène que tu lui avais fait, ce que tu avais subi.
Et alors que tu rangeais des cartons dans le grenier avec elle, perdu dans le temps et les souvenirs, te noyant dans les piles de papiers et de poussière, tu reçus une notification sur ton téléphone. Venant de Bachira, une photo de Yoichi qui tentait désespérément de manger un chamallow grillé avant qu'il ne tombe devant un Raichi aux airs énervés. Ils étaient encore en maillot de bain, et tu savais qu'ils étaient allés à la piscine. Tu souris, et alors que ta mère t'appelait pour que tu l'aides à trier des vieux vêtements, il t'envoya deux autres messages, qui restèrent non lus.
> Bachira
Isagi nous a dit que t'étais pas bien :( la prochaine fois, tu viendras avec nous !! On espère tous que ça va mieux, et on se revoit au Blue Lock ♪ \(^ω^\ )
> Bachira
Isagi veut aussi que je te dise qu'il t'aime, mais en fait il est en train de te tromper avec un chamallow alors je préfère te prévenir 〜(꒪꒳꒪)〜
NDA : t/p durant toute la conversation be like
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