𝟏𝟐. 𝐀𝐥𝐜𝐨𝐨𝐥 𝐚 𝐠𝐨𝐠𝐨 (𝟐)


Je n'ai pas conscience que le temps s'est arrêté de tourner, les regards braqués sur ma piteuse personne au milieu de la salle de séjour. Je ne réalise pas non plus que Gabriel et Jaekyung se sont tous deux précipités vers moi, dès l'instant où je me suis mis à crier et à pleurer, submergé par la puissance de mes émotions dévastatrices. Je suis comme englouti dans mes pensées, revivant sans cesse les traumatismes de mon passé, bloqué dans une sorte de boucle temporelle causée par les effets néfastes de l'alcool.

Je ne les entends pas hurler mon nom par-dessus la musique, ni le fait qu'ils me touchent les bras pour attirer mon attention. Tout ce dont je perçois à travers ce brouillard épais, c'est que je me sens mourir intérieurement, mon cœur me donnant l'impression qu'il va me lâcher d'une minute à l'autre. Mon intestin se tord dans mon ventre, faisant remonter tous les liquides que j'ai ingurgités jusqu'à maintenant. Et comme je n'ai rien avalé de la journée, je suis devenu telle une éponge, absorbant l'alcool, imprégnant désormais tout mon organisme de son poison, potentiellement mortel à forte consommation. Jusqu'à la limite d'imploser, jusqu'à ce que je ne puisse plus accumuler plus d'alcool, finissant par rejeter le surplus.

Autrement dit, je vomis tout ce que je venais de boire, au point d'en perdre par moment partiellement connaissance.

J'aurais aimé mourir à cet instant.

Je ne suis pas loin du coma éthylique, un terme qui m'était inconnu jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à ma première, et quasiment sûr, dernière cuite. Le coma éthylique étant un stade gravissime de la consommation d'alcool, vous plongeant dans un coma duquel vous pouvez ne jamais vous réveiller et en mourir.

Dans ce genre de situation, la seule chose à faire pour éviter d'en arriver à cette catastrophe, est de vomir. Il faut faire sortir tout ce qu'on a bu pour limiter les dégâts sur notre organisme et plus précisément sur notre foie, si l'on veut éviter une cirrhose qui peut, elle aussi, nous mener jusqu'à la mort si ce n'est pas traité à temps.

Évidemment il faut une certaines consommations excessives et constantes pour arriver à ce stade.

Tous ces termes sont effrayants et pourtant, ils font malheureusement partie de la vie courante, là où les gens s'empoisonnent pour soulager une douleur, pour combler un vide, un manque. Au point de se donner la mort à petit feu. Jusqu'à ce que les effets de ces substances ne prennent le dessus et nous embarquent avec elles dans une torture psychologique, nous faisant halluciner, nous faisant voir et entendre des choses qui ne sont pas réelles.

— Joshua, mon cœur, est-ce que tu m'entends ? s'écrie Gabriel, peinant à retenir ses larmes, en m'empêchant de m'écrouler dans mon propre vomi.

Je commence à entendre très vaguement que l'on est en train de m'appeler, les sons me semblent si lointains.

— Joshua ! crie à nouveau mon meilleur ami.

— Il faut le faire sortir d'ici, commente Jaekyung avec de l'inquiétude, en me voyant dans cet état déplorable.

Il s'apprête à me porter dans ses bras, au même moment où j'ouvre les yeux, poussant un cri déchirant à son encontre.

— Ne me touche pas ! hurlé-je terrifié, en le voyant, lui, devant moi, repoussant immédiatement son toucher, en manquant de perdre l'équilibre en arrière.

Vu que je suis assis, je ne vais pas tomber bien loin.

— Joshua... C'est moi, Jaekyung ! me répond-il avec de la confusion dans son regard, dont je suis incapable de discerner sur le moment, car je ne vois que son visage, je ne vois que lui.

Il est là, en chair et en os.

C'était ce que je croyais.

— Mais qu'est-ce qui lui arrive ? s'enquiert Jaekyung en détournant son attention sur Gabriel, dans l'espoir d'avoir une réponse. Il ne me reconnaît pas ?

— Je ne sais pas, je ne sais pas ! s'exclame Gabriel, lui aussi désorienté de sentir cet alcool émaner de moi. Il ne boit jamais d'alcool, jamais ! Je ne comprends pas comment ça a pu arriver ! s'affole-t-il, en tentant de m'approcher, craignant de se faire rejeter à son tour.

Tout ceci se produit autour de moi, sans que je n'en aie la moindre conscience.

J'étais bloqué dans une putain d'hallucination qui me faisait revoir mon ex-petit-ami. Ce monstre avec du sang sur les mains.

— Joshua, mon cœur... reprend mon meilleur ami d'une douce voix, en prenant délicatement mon visage en coupe pour me forcer à le regarder.

Mais mon regard reste bloqué sur lui.

Je suis tétanisé, terrorisé.

— S'il te plaît, regarde-moi, Joshua , insiste-t-il, en embrassant mon front pour attirer mon attention sur sa personne.

Chose qui fonctionne sans encombre, car aussitôt que je sens ses lèvres humides par les larmes se poser sur ma peau, mon attention se détourne subitement vers lui. En l'espace d'un instant, je vois son visage se superposer sur celui de Gabriel, me faisant crier à nouveau.

J'étais littéralement un cauchemar éveillé.

— Joshua, c'est moi, Gabriel ! hurle-t-il pour me faire reprendre mes esprits, avant qu'une main ne vienne s'écraser soudainement contre ma joue, le choc provoquant un coup d'électricité dans mon corps.

Il vient de me gifler. Pas par plaisir, bien au contraire. C'est un putain de crève-cœur pour lui de devoir lever la main sur moi, mais il n'a pas eu d'autre choix que de le faire, pour que je retrouve mes esprits.

— Gabriel... bégayé-je, en le regardant, tandis que ma vision qui s'est troublée suite au choc, commence peu à peu à se stabiliser, me permettant plus facilement de le reconnaître.

Un frisson d'effroi remonte le long de mon épine dorsale. C'est calme, beaucoup trop calme. Un silence également étrange et pesant pour une soirée universitaire. La musique s'est arrêtée, le brouhaha incessant n'est plus. Sans que je ne puisse le contrôler, mon corps se met à trembler en balayant la salle de séjour de mes yeux se noient instantanément sous un torrent de larmes, en voyant tous ces regards posés sur moi.

De la compassion, du mépris, du dégoût. Toutes les émotions sont parfaitement visibles.

J'étais redevenu cette bête de foire qui amusait la galerie.

— Joshua, murmure Jaekyung, pour ne pas me brusquer, comprenant très bien que je ne suis pas dans mon état normal.

— On va t'emmener dehors, d'accord ? Tu as besoin de prendre l'air, ajoute Gabriel.

Qu'ils arrêtent de me regarder... marmonné-je d'une voix aussi basse qu'un murmure, me rappelant cet horrible souvenir dans les vestiaires du lycée.

— Qu'est-ce que tu dis, mon cœur ? rétorque Gabriel, encore choqué par ce qui vient de se passer sous ses yeux, ne m'ayant jamais vu dans un tel état de détresse.

— Qu'ils arrêtent de me regarder comme si j'étais une putain de bête de foire ! m'écrié-je, en fondant en sanglots, avant d'être saisi par des haut-le-cœur, posant immédiatement ma main sur ma bouche pour ne pas vomir.

Même si le mal était déjà fait.

— Gabriel ! intervient Connor, qui avait disparu de mon champ de vision durant quelques minutes. J'ai garé la voiture devant la maison, on va le ramener à l'appart.

En entendant ses mots, je suis soudainement pris par la vision de mes parents, à qui j'avais menti ouvertement pour pouvoir aller à cette soirée. Mentir étant devenu ma seule arme de défense pour pouvoir avoir un semblant de vie, un peu d'interaction sociale, même si la foule m'effraie. Et s'ils ont le malheur de me voir rentrer à la maison dans cet état, s'en est fini pour moi et du peu de liberté que je pouvais encore m'octroyer.

— Non ! Non ! Pas chez moi, s'il te plaît, ne me ramène pas chez moi ! paniqué-je, rien qu'à l'idée d'imaginer la colère de mon père à mon égard.

— Calme-toi, mon cœur, on te ramène chez nous ! répond Gabriel pour me rassurer, tout en voulant m'aider à me relever.

Mais je suis tellement inapte à me tenir debout sur mes jambes, que je manque de m'effondrer de plus belle, ma tête s'écrasant durement contre le torse de Jaekyung, amortissant ma chute.

— Je vais le porter jusqu'à la voiture, dit-il, en glissant délicatement ses bras sous mes cuisses pour me soulever sans difficulté.

Même si j'essaie de lutter tant bien que mal pour tenter de garder un semblant de lucidité, les effets de l'alcool ne cessent de me tourmenter, me faisant perdre connaissance, ne serait-ce le temps de quelques malheureuses secondes, avant de reprendre mes esprits, et de sombrer à nouveau dans une absence lointaine. Je ne suis donc pas totalement conscient, lorsque Lucas nous rejoint dans la foulée, après avoir été prévenu de mon état catastrophique.

— Je suis désolé, sincèrement désolé ! s'exprime-t-il à l'égard de Gabriel, de la culpabilité dans le timbre de sa voix. Je ne savais pas qu'il ne buvait pas d'alcool ! Je lui ai juste donné un verre de bière, juste un seul...

Puis, j'ai aussi brièvement entendu Jason et Brice dire qu'ils vont s'occuper de nettoyer la salle de séjour. Qu'ils prendront de mes nouvelles plus tard dans la soirée, lorsque Gabriel m'aura raccompagné chez lui.

Ce ne sont que de simples bribes de souvenirs que j'arrive à percevoir par-dessus ce mal de crâne, qui s'est transformé en migraine fulgurante. Et lorsque je reprends entièrement connaissance, ayant été absent durant un certain nombre de minutes, je me suis redressé brusquement du canapé sur lequel on m'a allongé, vomissant par mégarde sur le t-shirt de mon meilleur ami, en train de me déchausser.


❃ ❃ ❃ ❃


— Hésite pas à me dire si l'eau est trop froide, dit Gabriel, tout en prenant le pommeau de douche et ouvrant le robinet d'eau pour me laver.

Sans que je ne puisse m'opposer à sa demande, ou plutôt son ordre, Gabriel m'a forcé à me mettre assis dans la baignoire pour éviter tout risque de chute potentielle, encore un peu défoncé par les effets de l'alcool, menaçant de me faire tomber dans un profond sommeil non désiré. Et lorsque l'eau, délicieusement tiède, s'écrase sur mon épiderme, je réprimande un hoquet de surprise, me réveillant d'un coup de ma légère léthargie.

— Est-ce que tout va bien ? questionne-t-il d'une voix douce, pour s'assurer que la température de l'eau me convient.

— Oui, tout va bien... réponds-je, en détournant mon regard brumeux vers lui. Je suis sincèrement désolé...

Il arque un sourcil, d'un air confus.

— Pourquoi est-ce que tu t'excuses ? Tu n'as rien fait de mal.

Je n'en étais pas convaincu. Puisque je venais très clairement de détruire la soirée de Lucas. D'autant plus que je venais à peine de rencontrer.

— Est-ce que je peux te poser une question ? me demande-t-il, tout en venant mettre le pommeau de douche au-dessus de ma tête pour me mouiller les cheveux.

A ce doux contact, je ferme les yeux pour savourer l'eau dévalé le long de mon visage, apaisant la migraine persistante dans mon crâne.

— Tu veux savoir ce qui m'a pris de boire de l'alcool, n'est-ce pas ? deviné-je tout en gardant les yeux clos et la tête basculée en arrière, pour lui permettre de verser du shampooing dans mes cheveux.

Gabriel se contente de fredonner en guise de confirmation, frottant délicatement ses doigts sur mon cuir chevelu, soulagent ces foutues céphalées.

— Je me rappelle que Lucas est venu me voir et qu'il a remarqué que mon verre était vide, lui raconté-je, en me souvenant parfaitement bien de ce moment. Il ne savait pas que c'était un verre de jus de fruit que je m'étais servi et il l'a tout simplement rempli avec de la bière, avant de disparaître comme par magie.

Gabriel m'écoute attentivement, sans intervenir, tout en continuant de me frotter le cuir chevelu avec le shampooing, rinçant ce dernier par la suite.

— Puis... j'ai fixé mon verre, dont j'ai senti à l'odeur que ça devait être de la bière, et je me suis dit qu'un verre ne pourrait pas me faire de mal, au final, poursuis-je, en me sentant encore quelque peu nauséeux. Alors, je l'ai terminé en plusieurs gorgées et je me suis senti étrangement comblé...

— Comment ça, comblé ? Qu'est-ce que tu as ressenti exactement ? questionne-t-il, en prenant un gant toilette qu'il vient recouvrir de gel douche à la pêche, s'attardant à frotter délicatement mon dos en premier, pour faire disparaître l'odeur de la cigarette, de l'alcool et du vomi de mon corps.

— Je ne saurais pas comment te l'expliquer... dis-je en peinant à trouver mes mots. Mais je crois que c'est le degré d'alcool qui a réchauffé tout mon corps et qui m'a fait du bien... Je ne me sentais plus vide, je n'avais plus froid... J'étais bien.

— Vide ? répète-t-il sur une petite intonation de surprise. Tu te sentais... seul ? voulut-il savoir, en essayant de cacher son émotion.

— Pas dans le sens que tu imagines, Gabi... rétorqué-je immédiatement pour ne pas qu'il ne se fasse de mauvaise idée.

Cependant, ses yeux brillent déjà d'une vive effervescence.

— Je t'ai dans ma vie et je suis tellement heureux que tu sois mon meilleur ami, mon confident, mon frère, mon âme-sœur... Mais j'ai l'impression qu'il n'y a que toi qui arrive à me voir tel que je suis... Qu'il n'y a que toi qui m'aime réellement... ajouté-je, en sentant mes lèvres vaciller. Et quand tu n'es pas là, je me sens terriblement seul et je sais que tu ne pourras pas toujours être là pour moi...

Gabriel, tout comme moi, est en train de pleurer en écoutant mes mots. Il est conscient que je traîne en moi un mal-être étouffant, sachant mieux que quiconque ce que j'ai pu traverser. Mais jamais, il n'a imaginé que je souffre autant au fond de moi, malgré les années qui se sont écoulées entre le lycée et l'université.

— Pourquoi... pourquoi tu ne m'en as jamais parlé ? murmure-t-il, en m'enlaçant fermement dans ses bras. Même si maintenant je suis en couple, jamais, au grand jamais je ne te laisserai de côté ! Je ne suis pas comme ces faux amis qui t'abandonnent quand on se met en couple. Et même si je ne suis pas présent directement à tes côtés, tu peux toujours m'appeler, m'envoyer des messages, ou des vocaux. N'importe quand, à n'importe quelle heure, je serais toujours là pour toi...

Ses paroles me touchent profondément. Elles me frappent si fort en plein cœur, réalisant à quel point notre amitié est soudée et inébranlable, se trouvant presque au même pied d'estale que son couple. Mais c'est ça aussi le problème pour moi. Ce n'est pas quelque chose de péjoratif, loin de là. Cependant, je ne veux pas que cela brise leur couple sur le long terme. Car même si Connor semble très compréhensif sur le fait que j'ai besoin de réconfort, besoin de la présence de Gabriel auprès de moi, il en a tout autant besoin, lui aussi.

Tout comme leur intimité, importante dans un couple, et qui est la raison pour laquelle j'ai refusé de venir vivre chez lui, en colocation.

— Je ne voulais pas t'imposer plus... rétorqué-je, en enfouissant mon visage dans le creux de son cou. Tu as déjà tellement fait pour moi jusqu'à maintenant, tu en as tellement bavé pour me protéger de mes bourreaux, que je ne voulais pas t'infliger plus de mon malheur... Tu mérites aussi de penser à toi. Tu mérites de souffler un peu... Je ne peux pas toujours compter sur toi, je finirais par te détruire...

— Ne dis pas n'importe quoi, Joshua ! s'emporte-t-il, en relevant mon visage vers le sien. On s'est toujours promis d'être là l'un pour l'autre ! Toujours ! Qu'importe les circonstances, qu'importe la situation dans laquelle on se trouve, on s'est toujours promis de tout se dire et de s'aider !

Il m'est impossible de détourner mon regard du sien, vu qu'il tient fermement mon visage dans ses mains, m'obligeant à le fixer droit dans les yeux. Je sens inévitablement les larmes remonter dans le coin de mes yeux, dévalant en de petites perles de cristal le long de mes joues.

Et pour rendre les choses encore plus réelles dans ce récit, j'avais de la morve qui s'écoulait de mon nez, à force de pleurer. Charmant.

— On se l'est promis, oui... affirmé-je, en ne pouvant retenir mes sanglots plus longtemps. Mais tu as toujours été le seul à le faire. Tu as toujours été celui qui m'a écouté, qui m'a réconforté, qui a toujours tout fait pour que je puisse m'amuser, passer du bon temps sans me soucier de rien. Celui qui a toujours trouvé des plans B quand tu t'apercevais que je n'allais pas bien.

En débitant ces paroles, je viens poser ma main sur l'une de ses joues, humide par ses larmes.

— Et moi dans tout ça ? Qu'est-ce que j'ai fait pour toi ?

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

— Tu sais très bien ce que je veux dire... gloussé-je ironiquement, en sentant mon cœur se comprimer dans ma poitrine. Je n'ai jamais rien fait de tel pour toi, parce que tu étais tellement occupé à tenter de recoller les morceaux de mon cœur, que t'en as fini par t'oublier. Je m'en veux tellement, d'avoir abusé de toi et de ta gentillesse... Je suis tellement désolé...

— Josh... souffle-t-il, en secouant sa tête. Je ne sais pas où tu vas chercher tout ça, mais tu t'imagines des choses tellement fausses.

Surpris, je le vois enjamber la baignoire pour me rejoindre.

— Même si j'ai aussi traversé des épreuves difficiles de mon côté, le simple fait d'avoir ta présence auprès de moi a joué un rôle important sur mon moral. Je n'avais même pas besoin de parler pour être compris, pas besoin de me confier sur mes douleurs, parce que tu les comprenais mieux que quiconque en un seul regard.

J'avais envie de parler, pour lui dire que cela n'était pas comparable avec ce qu'il avait fait pour moi. Mais il ne me laissa aucune chance de m'exprimer. Petite merde.

— Tu ne te rends pas compte à quel point tu es un ami extraordinaire. À quel point j'ai de la chance de t'avoir aussi dans ma vie, de tout ce que tu m'apportes au quotidien, reprend-il, en venant embrasser mon front de plusieurs petits baisers. Tu n'es pas seul, mon cœur. Tu n'es pas seul, compris ?

— Mais toi... tu as aussi Connor, dis-je, en baissant les yeux. Tu as quelqu'un d'autre qui t'aime... Alors que moi, personne ne m'aimera, à part toi...

— Tu as peur de ne pas trouver quelqu'un ? émet-il d'une voix douce, en caressant mes joues. Regarde-moi, Joshua.

Je lève les yeux sur lui, me sentant totalement mis à nu.

— Pourquoi penses-tu une telle chose ?

Parce que c'était ce qu'il m'avait dit. Que personne ne m'aimera. Que je serais toujours seul, à jamais.

C'est ce que j'aimerai pouvoir dire à Gabriel. Mais aucun mot ne souhaite sortir d'entre mes lèvres.

— Hé, mon cœur, pourquoi tu penses ça ? réitère-t-il, en s'éloignant un peu de moi pour attraper une serviette qu'il vient enrouler autour de mon corps, en s'apercevant que mon corps s'est mis à trembler de froid. Il... Ne me dit pas qu'il s'est passé quelque chose avec Ha-joon ?

À l'entente de son nom, mon âme se fige. Mon regard se perd dans le vide, chose que mon meilleur ami remarque immédiatement.

— Joshua, qu'est-ce qu'il s'est passé avec Ha-joon ? prononce-t-il sur une intonation un peu plus sèche, pour me faire réagir. Dis-moi ce qu'il t'a fait ?

Je ne peux plus y échapper. Il est temps que je parle pour soulager ma conscience, pour apaiser les hurlements de mon cœur.

— Il... il me disait que je n'étais pas assez bien pour lui, que j'étais nul... finis-je par lui avouer, en me souvenant parfaitement de ses mauvaises paroles. Il me disait que personne ne m'aimera, que personne ne voudra de moi...

Je ne mens pas, mais je ne dis pas non plus toute la vérité.

Car malheureusement, à ce moment-là, je ne savais pas encore exactement ce que j'avais réellement subi dans mon couple, plus précisément, sexuellement parlant. Et pourtant, c'était beaucoup plus courant que je ne le pensais.

J'étais loin, très loin de réaliser la gravité de la chose.

— Mais quel enfoiré ! s'écrie Gabriel d'un air furieux. Pourquoi se mettre avec quelqu'un, si c'est pour lui dire de telles choses aussi absurdes ? Non mais donne-moi son adresse à cet enfoiré, je vais aller lui casser la gueule à ce connard de merde !

— Laisse tomber, Gabi... s'il te plaît... lui dis-je d'une faible voix, en venant me blottir dans ses bras, à la recherche de réconfort. C'est du passé...

— Que je laisse tomber ? rétorque-t-il avec sarcasme, en enroulant ses bras autour de ma taille, me serrant contre lui dans une forte étreinte. Que je ne croise même pas son chemin à ce fils de pute, sinon il va très vite savoir comment je m'appelle, et il ne va jamais l'oublier !

Ma tête se pose contre son épaule. Mes yeux se ferment, tandis qu'une puissante et soudaine fatigue se propage dans mon organisme, résultat de ma cuite encore bien présente dans mes veines. Malgré tout, je parviens à entendre quelques bribes des paroles de mon meilleur ami, se faisant de plus en plus lointaine dans mon esprit.

— Je vais vraiment lui niquer sa race, jusqu'à lui faire bouffer son arbre généalogique ! poursuit Gabriel dans sa lancée, sans se rendre compte que je suis en train de m'endormir dans ses bras.

Ha-joon... Comment se fait-il que j'ai pu oublier son prénom ? Comment est-ce possible d'oublier la personne dont je suis tombé amoureux, lors de ma dernière année de lycée ?

La réponse était simple. Et j'aurais préféré ne jamais m'en souvenir.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top