Chapitre 9: Le meilleur des mondes
Engageons dès lors une joute philosophique pour savoir qui des deux a raison. Celui qui croit ou celle qui doute? Serait-ce encore une question de perceptions?
Ce qui venait de me réveiller était un coup de langue un peu sale dans le cou qui me fit frissonner des pieds à la tête. Mes yeux ouverts se posèrent sur Arthur qui regardait avec un air courroucé... Luxie, nue, dans mon lit, à côté de moi, nue, aussi.
MAIS QU'AVAIS-JE FAIT???
Pourtant, il faut avouer que cette situation avait quelque chose de cocasse. Je me retournai vers ces deux lascars qui se regardaient en chien de faïence.
-Alors c'est comme ça? Commença Arthur, amer. Je pars une nuit et tu ramènes tes conquêtes? Et pas n'importe laquelle en plus! Simplement la femme la plus dangereuse que ce monde aie pu engendrer. Déjà, comment tu la connais? Et puis... Oh par Connor!
-C'est une drôle d'histoire! En fait, elle était venue pour t'assassiner et je...
-Attends, QUOI?
-ET JE me suis offert ses services contre... rétribution...
Je me relevai difficilement en couvrant ma poitrine de la couverture. Oh! le regard de merlan frit!
-Donc, tu te prostitue.
Cette remarque, étrangement, me fit hésiter. En un sens, il avait pas tout à fait tort.
-Si ta vie et la mienne n'avaient pas été en jeu, je ne l'aurais pas fait.
-Ah oui? Vraiment?
-écoute, je ne suis pas ce genre de femme.
La façon dont il haussait son sourcil commençait à devenir insupportable. ça me mettait en rogne. Cet énergumène se permettait totalement de me juger du haut de son sourcil volant. Si j'avais eu mes vêtements sous la main, je me serai levée pour le frapper. Lucie avait saisi la tension qui m'habitait et tentait de me caresser dans le sens du poil. ça ne fit que m'énerver un peu plus. Je frappai sa main un coup sec sans me soucier de son air offusqué et je me levai pour m'habiller.
-écoute moi bien le merlu! Si j'ai du faire ça, c'est parce que môssieur, après m'avoir larguée dans un hôtel est parti faire ses affaires secrètes! C'était ça, ou elle me violait! ET PUIS MERDE! Pourquoi TOUT LE MONDE essaye de me violer?
La pièce avait commencé à vibrer alors que je mettait pantalon par à-coups rageurs. Mais là, je venait d'exploser et toutes les fenêtres de la chambre aussi. Le premier réflexe d'Arthur fut de se jeter sur moi pour faire rempart de son corps tandis que Lucie se... perchait...au plafond?
Une fois les débris de verre plantés avec succès dans le dos d'Arthur, il m'aida à me relever.
-Tu n'étais pas obligé de faire ça. Maintenant, tu es blessé.
Il chancela un peu et se raccrocha à moi pour tenir debout. Lucie tomba du plafond juste devant lui.
-Colin m'a mandaté pour te tuer. Grace à cette femme, tu vas vivre. Grace à cette femme, moi je vais mourir. Alors traite la bien. Ma vie en dépend.
Arthur eut une réaction étrange quand il entendit ce nom.
-Qui est Colin? lançai-je innocemment.
-Tu te rappelles de l'homme qui a essayé de te violer?
à cette évocation, nous eûmes tous deux une mimique de dégoût. Arthur commençait à montrer des signes de faiblesse inquiétants. Lucie m'aida à l'allonger sur le lit et à retirer son t-shirt.
-Je suis désolée d'avoir fait imploser les fenêtres lui murmurai-je à l'oreille.
-Je... commence à avoir... l'habitude... souffla t-il dans un rictus de douleur.
Lucie se tourna vers moi, outrée.
-Attends... Tu peux faire ça toi? Et d'ailleurs pourquoi tu les a fait exploser vers nous et pas vers l'extérieur?
Arthur se releva un peu pour parler.
-C'est une chance. L'inverse aurait fait alerter toute la rue et on aurait eu la police sur le dos. Aucun de nous trois... n'aurait pu... s'accommoder de cela.
-Tu parles trop cingla lucie en lui assénant un coup dans le dos.
Il fallait effectuer une manœuvre fort périlleuse pour retirer les bris sans trop de douleur. Je pris une serviette trempée d'eau pour éponger le sang qui se répandait. Puis, il fut question de retirer les éclats avec les frissonnements du jeune douillet.
-Lucie, occupe le pendant que je le répare, je t'en prie.
Elle me lança une œillade sceptique avant de se pencher vers Arthur.
-Tu ne veux pas savoir pourquoi ton cher oncle souhaite ta mort?
-Trop de gens veulent ma mort... je n'ai pas le temps... de collecter tous leurs alibis...
-ça nous fait un point commun. Mais toi! T'as fait quoi exactement? Je suis curieuse.
-ça ne te concerne pas.
-Dis plutôt que tu as peur que ta petite protégée découvre quel monstre tu es. D'ailleurs, je ne connais pas encore ton nom, jeune beauté des îles...
Arthur ne prit pas la peine de répondre. Moi non plus. Lucie continua donc.
-Faisons quelque chose de drôle. Beauté fatale, dis moi une chose horrible que tu as fait dans ta vie.
-J'ai couché avec toi.
-ça ne compte pas. Pire.
Je n'avais aucune envie de raconter des fragments de mon passé, mais il fallait se rendre à l'évidence. Ici, je n'avais pas grand chose à perdre.
-J'avais une sœur. Mon père était un peu fou. Enfin, non un psychopathe pathologique. Il était persuadé que seul comptait ce qui brille. Ce qui a de la valeur. Ma sœur... n'était jamais assez précieuse à ses yeux, alors... Il croyait bien faire mais... il lui faisait du mal. Tout le monde savait et personne ne faisait rien. Elle était seule au monde. Prise au piège. Alors... alors, plusieurs fois... j'ai tenté d'abréger ses souffrances mais... je n'ai jamais réussi.
J'avais prit un ton trop concerné pour être crédible, alors pour détourner l'attention, j'arrachai un éclat d'un grand coup sec provoquant un couinement de douleur.
-Tu n'as pas de sœur, hein? demanda lucie, consciente de s'engager sur un terrain glissant.
Je préférais vraiment ne pas répondre à cette question. Lucie décida donc de continuer l'animation.
-Mais je sais! Cole! Je crois que je me rappelle d'une viiiiiiiieiiille histoire d'une famille de... terroristes je crois. Ah oui! Et on dit que leur progéniture porte le poids de leur péchés!
Arthur tapa d'un poing rageur alors que je m'attaquais à un morceau fiché dans l'épine dorsale.
-Je sais que c'est toi. Tout colle. Et puis, à qui veux-tu cacher ça? Moi aussi je suis une terroriste!
-"terroriste" n'est pas un nom particulièrement flatteur.
La besogne avançait vite car aucun endroit sensible n'avait été touché. L'hémorragie serait facile à contenir.
-Lorsqu'on trouble l'ordre publique, continua lucie, visiblement très bavarde ce matin, on est considéré comme un terroriste. C'est comme ça que ça fonctionne. Pas d'utopie sans répression.
-Qu'est-ce tu me parles d'utopie? Ce terme insinue que ce nous tentons de créer depuis tant d'années est vain, voué à être un but inaccessible.
-Alors selon toi, le monde que "vous" essayez de créer est réel? Ce n'est que le produit de l'esprit tordu d'une poignée d'illuminés!
Le ton montait, les esprits s'échauffaient et moi, en tant que juge impartiale, je me devais de tempérer le jeu.
-Tu te rends comptes que tu remets en question tout ce à quoi des milliards de personnes croient?
-Il n'y a que les imbéciles qui ne se remettent jamais en question!
-PARFOIS, IL EST BON D'AVOIR DES CERTITUDES!
Arthur avait levé sa tête pour lancer cette réplique assassine, je m'appliquai à lui enfoncer de
nouveau la tête dans les draps.
-On ne peut pas avoir des mensonges pour certitudes! Cela ne fait pas de ces mensonges des
vérités!
- Alors selon toi, ce monde est un mensonge?
Filtrée par les couverture, la voix d'Arthur était quasiment inaudible.
-Nan, ce monde est construit sur des mensonges. Et les gens qui le croient sont stupides. Mais, le PIRE, ce sont les gens comme toi, qui ont devant les yeux la lumière et qui refusent de la voir, plongeant toujours plus avant dans l'obscurité!
Arthur poussa un râle étrange tandis que j'arrachais le dernier bout récalcitrant. J'avais presque eu besoin d'y aller aux dents pour l'avoir.
-J'arrive, lançai-je à la cantonade, il faut que je trouve un truc pour désinfecter tout ça.
Une fois que Lily avait quitté la pièce, Arthur se retourna vers Luxie.
-Estime toi heureuse, il ne me faudrait qu'une seconde pour te tuer. Et pas parce que tu veux me tuer sur ordre de mon oncle, mais parce que cette fille là, tu ne peux pas en faire ce que tu veux. Je lui ai promis que je la protégerai de tout. Même de ce monde.
-Elle t'a prouvé qu'elle était une grande fille, non? T'as vu! elle sait faire exploser les fenêtres sur les gens!
Ils n'eurent pas le temps d'approfondir leur conversation secrète car le loup dont ils parlaient venait de se pointer.
Luxie se leva pour aller dans la salle de bain.
-Attention, ça va piquer un peu.
Je m'installai à califourchon sur son arrière train pour appliquer ma serviette imbibée d'eau sur son dos. Il frissonna un peu quand je commençais à essuyer son dos. Il avait un corps nerveux, des muscles saillants et quelques cicatrices... OH MON DIEU!
Je retins avec peine mon cri de surprise.
-Tu l'as vue hein?
J'acquiesçais de la tête comme s'il pouvait me voir.
-Si ce monde peut te faire de telles choses... je pense que...
Arthur chercha à saisir ma main.
-Cette fille n'a pas raison. Ce n'est pas le monde qui m'a fait ça. Ce sont des êtres humains et on ne peut contrôler la nature des êtres humains. Je crois en ce monde car il est fait de façon à nous pousser à devenir une meilleure version de nous-même.
Sa main caressait mon poignet droit et de ma main gauche je terminais ma besogne. Je pouvais la voir en entier à présent. Elle était belle. En quelque sorte. Peut-on qualifier une telle chose de "beau"?
Elle avait une étrange couleur de zircon orange, cette cicatrice et elle zébrait le dos d'Arthur de haut en bas. Les éclats de verre l'avaient un peu infectée mais je ne savais pas si j'étais habilitée à m'en occuper. Les cicatrices, par habitude, avaient une couleur rose foncée, rouge ou rose claire selon leur ancienneté. Celle là avait l'air... vivante dans les chairs d'Arthur et provoquait en moi une incompréhensible fascination. Je ne pouvais m'empêcher de faire courir mes doigts tout le long sans maîtriser tout à fait ce que je faisais.
Arthur, sans doute agacé, agrippa mon poignet et me fit tomber à côté de lui. Il se releva ensuite assez brusquement pour se pencher au dessus de moi. Très près. Très très très près.
Il avait un regard lapis-lazulis sous ses lentilles qu'il avait retiré. Ce regard, je ne lui connaissais pas. Et moi j'étais comme pétrifiée.
-Pourquoi elle et pas moi? me murmura t-il à l'oreille d'une voix grave.
-De quoi tu parles?
-Si tu avais envie de sexe, pourquoi elle et pas moi?
-Je n'ai jamais voulu faire ça. Je voulais simplement qu'il n'arrive rien. Elle venait pour te tuer et je ne pouvais pas laisser faire ça et...
Il interrompit mes justifications en plaquant ses lèvres sur les miennes. J'avais été prise au dépourvu, mais c'était pas désagréable. Mais c'était pas prudent non plus. Je le repoussai un peu à contre cœur.
-Tu n'es pas sensé avoir une copine?
Il émit un grognement sourd.
-Je t'expliquerai plus tard.
Il pencha sa tête de nouveau.
-Je ne coucherai pas avec toi. ça ne marche pas comme ça chez moi.
Il eut un sourire amusé mais ne bougea pas. De toute façon, peut importait, le mal était déjà fait. Ce fut mon tour de me jeter sur lui pour l'embrasser. C'était trop doux, c'était trop simple. Il avait ses mains sous mon haut, je perdais haleine et, croyez le ou non, c'était la première fois de ma vie que j'embrassais un garçon. Et puis cette nuit là aussi était une première. Trop de premières.
-Arthur, arthur, arthur... Stop! Qu'est-ce qu'on est en train de faire?
-Depuis la première seconde j'avais envie de faire ça.
-Lucie va revenir.
-Si tu y tiens, elle peut se joindre à nous.
-Je ne voulais pas que ça se passe comme ça. Surtout pas.
Il s'arrêta net.
-J'ai fait... quelque chose qu'il ne fallait pas?
-NON! non! non! non! C'est juste que... j'ai jamais connu ce genre de choses. Je...
Voyant mon embarras, il me prodigua un dernier baiser avant de m'étouffer dans ses bras.
Luxie entra sur ce spectacle de vie intime et fut tiraillée entre un sentiment de dégoût assez incroyable, de jalousie et de gêne intense. Encore une fois, elle ne savait pas ou se mettre.
-Visiblement, ça va mieux.
Les deux jeunes gens se séparèrent et ce fut au tour d'Arthur d'occuper la salle de bain. Pour ma part, je m'attelai à préparer les bandages. Lucie m'agrippa le bras fermement pour m'obliger à la regarder.
-Donc t'es comme ça toi?
Sa question était bizarre et sentait la frustration amoureuse et la jalousie mal camouflée.
-Je suis comme j'ai envie d'être. Tu es toi-même consciente de pourquoi j'ai fais ce que j'ai fais. Tu ne m'as pas laissé le choix. Et la seule personne qui compte pour moi pour l'instant, c'est Cole! Il a sauvé ma vie. Il a sauvé ma vie et a eu la délicatesse d'y donner un semblant de sens. Je ne le laisse pas tomber. En plus, toi je ne te connais pas.
-Tu as le culot de dire ça? Tu sais que je pourrais te tuer? Je pourrais vous tuer tous les deux!
-Vas-y.
Luxie, pour la première fois fut foudroyée sur place par un regard qu'on ne lui avait encore jamais adressé. Ce qui ne faisait que confirmer son opinion. Cette fille avait dans le regard une lueur folle et elle ne cessait de défier l'équilibre du monde en faisant toutes sortes de chose qu'une personne lambda aurait été incapable de faire. Elle avait un magnétisme insurmontable et dans son regard brûlait quelque chose d'invincible.
Tout bien réfléchi, Luxie avait peut-être eu raison de choisir de s'allier à elle. Peut-être qu'elle venait enfin de trouver son salut.
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