Chapitre 24

JERICO

Mes chaussures claquent sur le parquet en bois ciré, d'un pas assuré je m'élance à travers le couloir du dernier étage. Il me reste encore quelques mètres à parcourir afin d'atteindre la porte massive de mon bureau. Un brouhaha inexpliqué provenant de celui-ci m'irrite sévèrement les tympans, je n'apprécie guère les ambiances rythmées de cette façon. Un mélange d'opposition des comportements, d'une part, ceux qui sont impatients, excités, en permanence joyeux et d'autre part, les furieux, insolents, limite dangereux.

Mon équipe est un mixte de personnalités, composée d'hommes misant tout sur l'action ou au contraire sur la fiabilité d'un plan préparé en amont. Ils se complètent en apportant leurs points de vue sur les différentes missions que je leur confie et contrairement aux apparences, ils s'entendent à merveille, d'habitude.

Cependant, cette prise de tête n'a rien d'ordinaire, étant donné qu'elle concerne notre attachante petite brune. En revanche, impacté ou non, la règle s'impose à tout le monde, et j'ai horreur de me répéter.

- Je peux connaitre la raison de cette agitation ?! Haussais- je le ton afin de signaler ma présence

- Oh, heu.. patron vous êtes là.. c'est-à-dire que..

- Evidemment que je suis là ! Claqué- je vivement la porte. C'est mon bureau pour rappel, et je ne vous ai pas sollicité en urgence pour brayer de la sorte !

- On est pas d'accord sur la tactique à employer..

- C'est justement le but de cette réunion, on est là pour échanger nos points de vue et nos ressentis sur le plan à suivre.

- Mais Heliott veut tout faire brûler ! S'agace Ben en pointant du doigts son camarade

- Heliott, c'est à cause de toi tout ce bordel ? T'as quel âge sérieusement, c'est trop compliqué d'attendre en silence mon arrivée ?

- Ben il veut tout faire exploser, mais lui.. on lui dit rien ?! Se défend t-il, vexé d'une potentielle préférence

D'ordinaire ils sont tous silencieux, assis ou du moins avachis aux quatre coins de la pièce, en patientant calmement de recevoir mes ordres. Hors aujourd'hui ils sont intenables, agités, impulsifs, et en plus de ça, insolents ! Je dirige une mafia pas une putain de crèche !

J'oriente mon regard vers Alec, peu concerné par la situation, j'affirmerais qu'il trouve la scène plutôt divertissante s'il ne se frottait pas les yeux d'exaspération.

- Tu n'as pas trouvé utile de les contrôler un peu ? Accusais- je de la cacophonie ambiante

- C'est tes gosses, pas les miens.

Je ne suis pas d'humeur depuis l'enlèvement d'Elena, ma patience a dépassé ses limites il y a plusieurs jours de cela. C'est le dos droit, le torse bombé, les bras croisés, accompagné d'un regard à faire pâlir n'importe quel homme, que je m'apprête à sermonner mon second.

L'ambiance n'a plus rien d'agréable ou de détendu, il règne dans mon bureau cette atmosphère des mauvais jours. Celle où il vaut mieux éviter les gaffes ou de me prendre pour un con.

Alec modifie instantanément son comportement, il se redresse dans la foulée ne sachant plus où se placer vis à vis de moi. Son visage livide me confirme qu'il a compris le subtil changement dans ma manière de me tenir, ses yeux s'affolent en parcourant les traits tirés de mon visage.

- Tes hommes, déglutit t-il nerveusement, c'est tes hommes !

- Silence ! Hurlé- je à mon équipe, je veux que tout le monde se taise et m'écoute attentivement !

L'instant d'après, le calme règne dans mon bureau, visiblement mon irritation ne leur avait pas sauté aux yeux, même le son de leurs respirations n'ose pas se faire entendre. Les têtes sont basses, des paires d'yeux apeurés sont braqués vers le sol, suppliant que je n'en vienne pas aux mains, ou pire, que je pointe mon arme sur l'un d'eux.

- Puisqu'on peut dorénavant, enfin, s'entendre parler, nous allons pouvoir débuter cette réunion. Vous n'êtes pas sans savoir qu'Elena est actuellement ensommeillée dû à ses nombreuses séquelles. Des blessures, précisé- je amèrement les poings serrés, qui lui ont été infligé par le clan des Onzini.

- Ceux sont ces fils de putes qui ont délibérément atteint Elena ?!

- Et leur chef m'a gentiment dissimulé une lettre contenant son invitation, afin de me rencontrer en personne. Ne vous leurrez pas, ce n'est pas pour s'excuser ou établir une relation pérenne entre nos deux domaines.

- C'est de la provocation pure et dure. S'adresse Alec à l'ensemble de l'équipe, ce connard s'attend à ce que l'on débarque furieux et désorganisés, dans le but de nous tendre un piège et de nous contraindre à céder sous la pression.

- Patron, est-ce judicieux que vous y alliez ? Surtout si le risque d'une embuscade est garanti, l'honneur et la réputation du domaine sont en jeux, mais on peut facilement s'occuper d'eux.

- Ces enflures utilisent des femmes pour leurs trafics et touchent tellement de frics, rien que pour cette raison il est temps de les remettre en place. Mais ils ont surtout cette fois-ci manipulé la femme de trop, leur absence de respect et de morale s'arrêtent ce soir.

- Quel est le plan ?

- Ils souhaitent me voir, aucun problème, malheureusement pour eux, ils ont autorisé l'accès à la mauvaise personne en m'invitant ce soir.

- C'est-à-dire ?

- Seule la mort les accueillera à notre départ.

- On peut tout faire brûler alors ! Propose Heliott en s'agitant d'excitation sur sa chaise

- *Clac* Calme toi idiot, le corrige Ben d'une claque derrière la tête, ça nous servirait à rien de tout faire cramer.

Je réalise que nous sommes tous sur la même longueur d'onde, et avons pleinement conscience du danger tapi dans l'ombre ce soir. Face à moi se trouvent des hommes déterminés, courageux, mais principalement fidèles à eux même, dévoués au domaine ainsi qu'à ses valeurs.

Cette éthique vulgairement piétinée, sauvagement bafouée, dès lors qu'ils se sont attaqués à Elena. La seule femme interdite, à me rendre dépendant d'une élégante silhouette, d'une séduisante personnalité, d'un caractère mordant, d'une histoire complexe, d'un parfum enivrant, d'un corps irrésistible, d'une bouche provoquante, d'une voix sensuelle et de magnifiques iris noisettes.

- La rencontre a lieu chez eux, détaillé- je une fois assis dans mon fauteuil, dans un entrepôt à proximité de leur domaine. En cas de dérapage, les renforts débarqueront avant même que l'on puisse rejoindre nos voitures, il va donc falloir être méticuleux sur la marche à suivre.

- Voici une carte aérienne de la zone, dévoile Alec en déroulant le plan sur mon bureau, comme vous pouvez le constater, l'entrepôt se situe à 5 minutes de leur base. Cependant le bâtiment est ancien, par conséquent leur système de sécurité est obsolète.

- Il y a certainement une salle de contrôle sur place, si l'un d'entre nous réussit à s'y infiltrer pour désactiver les caméras et couper l'accès au réseau, réplique Ben, alors ils ne bénéficieront plus de moyens de communications.

- Laissez faire le pro du baratin ! S'exclame Heliott sûr de lui, une envie pressante et hop je maitrise leur système ! Alors, on en dit quoi de mon super plan ?!

- Qu'on est mort. Rétorquent- ils tous en cœur

- Au contraire, il paraît tellement naturel que personne ne se méfiera de lui.

- Patron, vous pariez nos vies sur Heliott..?

- Nos vies seront pariées sur chacun de nous, mais quoiqu'il arrive ne vous relâchez pas, jamais. Plus sérieusement, je vais vous développez les différentes étapes du plan, dès lors, on évaluera les conséquences de nos actions.

Sur ces mots, nous étudions en détail l'entrepôt, sous toutes ses coutures, le nombre de fenêtres, de portes, de pièces, d'étages, les potentiels recoins susceptibles d'abriter des hommes armés, tout y passe. De l'intérieur à l'extérieur boisé, en passant par les différents chemins d'accès, qui relient leur domaine au bâtiment. L'analyse des lieux est primordiale afin de prévenir de toutes les menaces éventuelles.

Au bout de 2 heures nous sommes fins prêts, chacun a son rôle à jouer ce soir, à divers niveaux d'importances ou de complexités. Tous les membres de mon équipe sont précieux, rien n'est laissé au hasard, y compris nos placements à l'intérieur, une fois rentrés chez l'ennemi.

On se déplacera légers, étant donné que nous serons automatiquement fouillés à notre arrivés. C'est dans ces moments là que je suis pleinement confiant des capacités physiques de mes hommes en cas de combat. Nous n'avons pas besoin de compter sur une arme pour nous défendre, couvrir l'un des nôtres ou encore protéger quelqu'un.

Je n'en reste pas moins méfiant quant à l'effectif qui nous accueillera sur place, leur chef avait prévu une poignée d'hommes pour se permettre de venir à bout d'Elena, quand sera t-il pour une équipe surentrainée ? Seul s'y rendre nous assurera la réponse à nos doutes.

L'heure des représailles a sonné, ma vengeance hurle sa rage, un cartel sombrera ce soir dans les abysses de la cupidité et de l'immoralité.

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