Chapitre 5



Avait-elle bien entendue ?

Rosa le dévisagea longuement avant de sentir sa main froide se saisir de la sienne.

Un frisson parcourut son corps entièrement alors qu'il l'entraînait sur la piste.

Qu'est-ce qu'il lui prenait ?

L'avait-il reconnue ?

Rosa se vit pâlir alors que sa main se glissa lentement dans son dos.

- Je ne sais pas danser la valse monsieur le comte. Répéta-t-elle avec plus de force.

- Alors nous danserons un slow.

- Sur une valse ?

Pour toute réponse, il lui prit la main pour la refermer autour de la sienne.

Rosa retint son souffle en essayant de chercher des yeux Stacy. Seulement les couples valsaient si vite qu'elle en eut le tournis.

- Je suis trop petite.

- Et moi trop grand je présume ? Est-ce encore l'une de vos théories stupides comme pour le mariage ? Répliqua l'homme en l'attirant plus près.

Rosa se laissa guider tant bien que mal dans ce slow qui prit tout son sens lorsque la musique changea.

- Je faisais juste la remarque et je n'avais pas spécialement envie de danser. Se défendit-elle en levant la tête pour le regarder.

Seigneur ! Il avait tellement changé en sept ans qu'elle se demandait encore comment elle avait pu le reconnaître.

- Max l'un de mes amis avait pour projet de faire de vous son dessert. Lâcha-t-il d'une voix plus amène. Je crois qu'une danse avec moi saura lui faire lâcher l'idée.

Choquée, Rosa cilla.

- Et vous pensez avoir assez de persuasion en vous pour l'en dissuader ?

Il resserra ses doigts autour de sa main le regard totalement dénué de toutes émotions.

- Assez oui. Dit-il de sa voix dure.

Eberluée, Rosa s'efforça de ne pas laisser son visage la trahir.

Du haut de son un mètre soixante-deux, elle rabaissa sa tête et se retrouva nez à nez avec un torse robuste, large, enfermé dans un smoking noir.

Honteuse de se laisser trahir une nouvelle fois par des images du passée, Rosa n'osait presque poser sa main sur son épaule.

- Alors je vous remercie de voler à mon secours mais j'aurai pu le repousser seule.

- J'en doute.

Rosa releva vivement la tête en réprimant l'envie de se détacher de lui et de s'en aller.

- Je sais me défendre. Rétorqua-t-elle sèchement.

Les muscles de ses mâchoires tressautèrent.

- Peut-être mais ne vaut-il pas mieux laisser un homme défendre l'honneur d'une femme que de la laisser s'épuiser pour rien ?

Rosa, bouche bée, ne sut quoi répondre. Elle aurait bien voulu se dire qu'il baignait dans l'arrogance mais aucun sourire susceptible d'appuyer son raisonnement s'afficha sur ses traits.

Il la fit tournoyer sur la piste de danse avant de continuer.

- Les relations d'un soir n'apportent rien de bon pour une femme, seulement la désillusion.

- Vous parlez en connaisseur de cause ? Demanda Rosa avec un sourire crispée.

- Oui, avoua-t-il en plongeant son regard dans le sien. Sauf que ces femmes avaient assez d'arrogance pour ne rien laisser paraître.

Était-il en train de lui faire comprendre qu'elle n'était pas taille pour passer une nuit avec un homme sans s'imaginer déjà un mariage et des enfants ?

Rosa sentit ses mains devenir moites.

Il la voyait comme une jeune femme inexpérimentée.

Izar Darcy ne l'avait certes par reconnue, mais n'avait rien perdu de ses phrases assassines.

- Vous êtes comme un agneaux dans une bergerie mademoiselle Ludington il était de mon devoir de vous avertir. Compléta l'homme aux yeux gris argenté.

- Vous êtes aussi chevaleresque avec tous vos invités ou seulement avec les jeunes femmes qui vous font de la peine.

Une lueur dangereuse éclaira ses yeux gris.

- Si j'avais de la peine pour vous, je ne serais pas en train de danser avec vous miss Ludington.

Pendant un moment, Rosa avait l'impression que plus rien n'existait dans la salle de bal. Qu'il n'y avait plus qu'eux sur cette piste.

Soudain elle réalisa ce qu'elle était en train de faire. Elle dansait avec le fiancée de Kelly John. Elle dansait avec l'homme qu'elle avait tenté d'éviter toute la soirée. Celui qui l'avait abandonné dans cette bibliothèque sept ans plus tôt.

Elle s'écarta brusquement.

- N'ayez plus aucune crainte monsieur le comte, soyez tranquille je repars demain.

Elle s'inclina respectueusement.

- Merci pour la danse.

Rosa tourna les talons au plus vite.

Il était minuit, l'heure pour elle de retourner à la réalité.

Une heure plus tard, Izar consultait son ordinateur portable tout en pianotant son pouce sur le rebord de la table de nuit.

En proie au doute et à la colère Izar ne parvenait toujours pas à oublier cette danse.

Il en venait même à regretter son choix de la faire venir ici.

Fixé sur la page d'accueil de sa petite entreprise de mariage, Izar n'avait même pas entendu Kelly se glisser dans le lit.

- La soirée était merveilleuse tu ne trouves pas ? Dit-elle en venait caresser son torse.

- Assez oui.

Kelly tenta de descendre sa main vers son bas-ventre mais Izar attrapa son poignet avant.

- Pas ce soir, j'ai du travail.

- Il est une heure du matin !

- Je sais mais c'est ainsi.

Kelly souffla de rage.

- Ça va faire des mois que..

- À l'époque de mon grand-père, les futures mariées étaient vierges jusqu'au mariage. Coupa-t-il en fermant la page d'accueil du site. Ainsi les hommes patientaient des mois voir des années avant de toucher leur promise. Mais nous savons tout les deux que tu n'es ni vierge ni sainte ?

Celle qui s'était emparée de son miroir de poche rougit en cherchant ses mots.

- La question est de savoir si la grande Kelly John n'a pas d'amant à ce jour ?

- Que vas-tu chercher là enfin ! Tu m'accuses d'avoir un amant le jour de nos fiançailles ?

Izar ne l'accusait pas, il le savait.

- Comment pourrais-je faire une chose pareille alors toutes les femmes rêveraient d'être à ma place ? Ajouta-t-elle avec arrogance.

Izar ne préféra rien dire.

Il avait rencontré Kelly lors d'une soirée caritative. Au début il avait décidé de lui donner une chance et surtout éteindre les rumeurs qui chaque jour enflaient un peu plus.

Il ne se passait pas un jour sans qu'un magasine ne lui trouve une nouvelle maîtresse qui n'existait même pas.

Le monde entier était passionné par sa vie personnelle. Sauf qu'Izar avait depuis longtemps oublié ce que c'était de coucher avec une femme susceptible de lui faire ressentir quelque chose.

Comment était-ce possible de ne plus ressentir le désir charnel pour une femme ?

Avait-il un problème ?

L'armée lui avait-elle appris sans s'en rendre compte ce qu'est l'abstinence ? Lui qui adorait pourtant soumettre ses conquêtes au plaisir des sens ?

Izar serra les mâchoires et ferma son ordinateur d'un geste sec.

- Je n'en reviens pas que Rosa Ludington est eu le culots de venir jusqu'ici ! Lança Kelly en se mettant de la crème sur les mains.

- Elle m'a semblé très charmante. Dit-il en faisant mine d'être désintéressé.

- Sauf que je n'ai pas le souvenir de l'avoir invité.

Izar sourit intérieurement. Car c'est lui qui l'avait invité en faisant des recherches méticuleuses sur le passé de Kelly.

- En tout cas j'ai hâte qu'elle s'en aille. Dit-elle en un soupir de soulagement.

- Elle ne partira pas Kelly.

Cette dernière tourna vivement la tête vers lui en cessant de se frotter les mains.

- Et pourquoi ça !

- Parce que j'en ai décidé ainsi. Je trouve qu'elle peut apporter aux préparatifs du mariage. Expliqua-t-il en se levant du lit.

- Tu n'es pas sérieux ? S'esclaffa Kelly.

- Oh si je suis sérieux ! Affirma-t-il avec force. Je veux l'engager pour le mariage.

Si bien qu'il y en est un ! Songea Izar.

- Tu veux mettre notre mariage dans les mains d'une gamine de vingt-deux ans ? J'espère que tu blagues Izar. Dit-elle en haussant le ton.

Izar plongea son regard dans le verre qu'il venait de se servir et ne comprenait pas pourquoi il voulait qu'elle reste. Il suffisait de laisser Rosa partir maintenant qu'il l'avait revue et qu'il était sûr qu'elle était épanouie dans sa vie.

Soudain son visage s'imposa à lui.

Pour l'heure, elle ne l'avait pas reconnu. Il désirait la revoir et mettre un mot sur cette colère qui l'animait depuis sept ans. De ce trouble qui l'habitait...

- C'est moi qui décide. Dit-il enfin en la regardant droit dans les yeux. Et j'ai décidé qu'elle resterait.

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