poème 38


Ses pieds foulaient le sol à une vitesse folle, les cailloux lui écorchaient la peau, la poussière lui embrumait les poumons et le froid lui mordait le visage. Son sang rouge vif, ou celui d'un autre, elle ne savait plus, tachait sa longue robe blanche. De ses yeux couleur émeraude des perles gelées s'échappaient par millier. Elle trébuchait, ses genoux rencontrèrent le sol avec fracas, elle tremblait. Son cœur la brûlait, mais elle ne savait pas si c'était à cause des kilomètres parcourus ou de la scène à laquelle elle venait d'assister. Les images étaient encore floues, des corps, des cris, des flammes, et cet homme, ce regard inhumain, emplit de haine et de violence qui la fixait. Ses larmes formaient désormais une petite mare, le reflet de l'eau ne lui renvoyait que l'image d'une petite fille au visage bien trop triste pour son âge. Attiré par l'eau, si rare dans le royaume, un loup s'approcha d'elle. Elle ne se releva pas, trop épuisée, ou peut-être qu'elle était tout simplement fatigué de se battre. A quoi bon menée une bataille s'il n'y a point de victoire possible. Le fauve, excité par l'odeur du sang commença à tourner en rond en gémissant, il semblait en proie à un dilemme intérieur. Elle le regardait, amusée par son comportement, finalement ces animaux n'étaient pas aussi impressionnants que ceux dans les histoires contées. Il semblait même plutôt stupide avec ses yeux jaunes enfoncés, et son vilain pelage noir. Innocente elle lui tendit la main, curieuse la bête vint la sentir avec méfiance, elle ne bougeait pas, l'observant avec curiosité. Mue par un sursaut de courage elle se mit a lui caresser la tête, en lui murmurant de belles phrases. Envoûtée la bête ne fit que se rapprochait encore plus. Elle se mit à rire en imaginant l'image que renvoyait cette scène, une jeune enfant, dans une robe bien trop cérémonieuse pour elle, une longue chevelure blonde parfaitement peignée, un teint parfait, une princesse brisée, apprivoisant un loup a la silhouette décharnée. Au loin une hurlement vint briser ce court instant de paix. Ils l'avaient retrouvé. Elle n'eût pas le temps d'avoir peur, ils étaient déjà là. Ils l'entouraient, perchés sur leur immenses chevaux, leur lame de fer la menaçant. Ils lui parlaient, mais elle n'entendait pas, seul son loup comptait. Elle ne supportait pas l'idée qu'ils lui fassent du mal, alors quand quand elle vit un de ses monstres s'approchait d'elle elle lui ordonna de s'enfuir. La bête sembla hésité, elle recula d'un pas, tous se figèrent. Durant une seconde le temps sembla s'arrêter, puis le rire de l'enfant brisa cet instant. Ces soldats armés les épées les plus tranchantes, forgées par les plus habiles des doigts, étaient terrorisés par un pauvre loup trop maigre. Elle se releva, la bête s'enfuit, deux hommes fondirent sur elle. Ils la remirent à genoux. Elle ne les écoutait pas, encore plongée dans son instant de paix. Mais quand elle sentit le métal froid lui traversé le cœur un cris lui échappa. Elle hurlait, se débattait en sentant sa vie lui échapper. Ses yeux commençaient à se fermer, son corps à sombrer, mais soudain sortant de nul part son loup bondit sur les soldats. Il était transformé, bête féroce, il déchiquetait, mordait, tuait. Puis une fois que le dernier homme fut à terre, le vint se loger dans ses bras. Il lui chuchota une phrase à l'oreille avant de disparaître à nouveau. Une main lui saisit le bras, le soldat luttant pour sa vie lui lançait un regard emplit de peine et de tristesse. Et alors qu'ils sombraient tous deux dans la mort, elle entendit ses derniers mots, des mots qu'il prononça avec une douceur surprenante. « Ton âme est si noire mon enfant et ton cœur si obscur que tu as su séduire le diable. Peut-être sera tu plus heureuse dans son monde de misère. »

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