☠ Chapitre 24 ☠
- Je vais mieux, merci.
Il semble surpris. Quoi de plus normal ? Je ne lui avais jamais répondu en un mois de rendez-vous interminables.
- Que s'est-il passé ? Une prise de conscience ? me demande-t-il, en posant ses deux mains sur son bureau.
- Je dirai plutôt une visite au cimetière. Enfin... J'ai commencé à faire mon deuil et je me persuade que mes amis sont heureux là où ils sont. Mais...
Je m'enfonce un peu plus dans ma chaise, presque honteuse.
-Je ne serai jamais heureuse si l'état de Nathan ne change pas. Je veux dire... Je ne supporte plus de le voir allongé sur ce foutu lit, branché à des dizaines de machines ! S'il doit perdre la vie, j'en serai affectée mais je pense que ce sera toujours mieux que cette situation. Je ne le supporte vraiment plus...
Les larmes coulent d'elles-mêmes sur mes joues mais docteur Murray à l'habitude. Ainsi, il garde son silence apaisant habituel.
- Je veux juste que ça change. Qu'il revienne à la vie ou qu'il meurt. Je ne peux plus le voir comme ça...
***
Ma séance est enfin terminée et, étonnement, elle m'a fait beaucoup de bien. Simplement parler, m'exprimer, m'a fait un bien fou !
- Allison ! j'entends hurler derrière moi alors que je m'apprête à sortir des cabinets de psychologies.
Je me retourne vivement et vois Noémie arriver en courant sur moi. Je la prends dans mes bras, pendant que sa mère règle quelque chose à Emma, la jeune femme à l'accueil.
- Comme on se retrouve Noémie ! Ça va bien ma belle ?
- Non ! déclare-t-elle, vivement
Je la repose à terre et nous nous asseyons, moi sur une chaise, elle sur mes genoux.
- Et bien, que se passe-t-il ma puce ? je l'interroge en lui touchant affectueusement la joue.
- Le docteur fait que de me poser des questions bizarres. Il m'inspecte et tout... Il me fait peur en plus !
Ses grands yeux noirs s'ouvrent en grands et je lis une réelle appréhension dans ses yeux. Elle se resserre contre moi et dis doucement, au bord des larmes :
- Je vois des fantômes...
Je la regarde attentivement, essayant de chercher un détail qui signifierait une blague mais non. Elle a l'air complètement bouleversé.
- Comment ça ? Qu'est-ce que tu vois vraiment, Noémie ?
- Je... Je vois des gens qui volent. Souvent ce sont des inconnus, des gens qui me font du mal. Alors je crie et... Maman et le docteur croient que je suis folle. Mais non !
Elle crie cette dernière phrase et se tourne vivement vers moi :
- Mais non, je les vois. Ils sont là. Ils me touchent. J'ai tellement peur Allison !
Elle me prend dans ses bras et je lui caresse le haut du crâne. Elle tremble de tout son corps. Noémie a vraiment peur, elle me fait tellement de peine. Je la trouve tellement mignonne ! Comment peut-on vivre tout ça à cet âge là ?
- Dis-moi, tu as déjà parlé de ce que tu vois en particulier à tes parents ou au docteur ? je la questionne doucement, comme pour être sûre.
- Non. Y a que toi qui sait...
Ses larmes arrêtent d'un seul coup de couler lorsque sa mère revient vers nous.
- Rebonjour, Allison ! Je suis désolée, j'espère que Noémie ne t'a pas trop embêté ? Elle est toujours bizarre lorsque nous sortons d'un rendez-vous.
- Non, non, ne vous inquiétez pas. Elle n'a rien fait de travers. Elle est tellement adorable, vous savez !
- Tu as bien de la chance Allison ! Tu es la seule personne avec qui elle est aimable. Vraiment. Je ne comprends pas pour quelles raisons et le médecin pas plus que moi.
Je vois qu'elle est légèrement dans la Lune mais, lorsqu'elle revient à elle, elle attrape la petite main de sa fille et me souhaite une bonne soirée. Noémie me fait un bisou et s'en va, elle aussi. J'attends qu'elles soient loin pour partir à mon tour. Je cogite encore et encore sur ce que Noémie m'a dit. Elle m'a complètement laissé perplexe. Pourquoi s'est-elle confiée à moi ? Que s'est-il passé dans sa vie pour qu'elle soit dans cet état ? Je n'ai aucune réponse à mes questions.
Je repars d'un pas lent et traînant et choisis d'emprunter les escaliers au lieu de l'ascenseur. Lorsque je reviens à la chambre de Nathan, je retrouve Margaux, accoudée à la fenêtre, calme. Je toque doucement à la porte, pour ne pas lui faire peur.
- Coucou ma belle. Alors ? je demande.
- C'était étrange... Mais agréable. Ça m'a fait beaucoup de bien. Merci Allison...
Je la prends dans mes bras en lui frictionnant le dos.
- Tu veux que je te laisse seule avec lui ? m'interroge-t-elle en prenant sa veste.
- Non. C'est bon, on s'en va.
La vue de Nathan dans cet état m'est de plus en plus difficile. Je lui jette un dernier regard, embrasse ses lèvres glacées et m'en vais en compagnie de mon amie. Je souffle à grandes bouffées l'air frais lorsque nous sortons de l'hôpital. Je commence à saturer de cette routine.
- Alors ? Tu peux dormir chez moi ce soir ? je la questionne en m'asseyant sur un des bancs en bois.
- Oui, j'ai prévenu mes parents. Par contre, il faut que j'aille chercher quelques affaires. Surtout pour la cérémonie de demain.
Je hoche la tête et m'empare du portable de Margaux pour appeler mon père.
- Oui, papa, c'est moi. C'est juste pour te dire que tu n'as pas besoin de venir nous chercher. On va chez Margaux lui chercher des vêtements et on rentre en bus après... Oui, oui, je passerai le bonjour à ses parents de votre part... bisous, à tout à l'heure !
Je le lui rends en déclarant :
- C'est bon, on peut y aller !
On commence à marcher dans le froid hivernal et Margaux engage la conversation :
- Alors, comment ça s'est passé chez le psy ?
- Je ne parle jamais de mes rendez-vous.
Je réponds peut-être un peu trop froidement mais je ne peux m'en empêcher. C'est vrai, je ne parle jamais de mes visites quotidiennes chez le psychologue.
- Changeons de sujets..., je propose. Tient ! Vos BAC blancs ce sont bien passés ?
- Euh..., Allison ? Tu es sûre de vouloir en parler ?
Voyant son ton et son incitation à ne pas en discuter, je hoche aussitôt la tête. Complètement d'accord avec elle. Nous traînons d'un pas lent jusqu'à chez elle. Arrivée là-bas, ses parents m'accueillent joyeusement, ainsi que le reste de la famille. Ils me connaissent. Et ils m'adorent autant que moi je les aime. Mais nous parlons peu, sachant que demain sera un jour insupportable. Dix minutes plus tard, nous voilà reparties en direction de chez moi.
- Euh... Ça te dérange si je fume ? me demande Margaux en posant son sac près de l'arrêt de bus.
- Non, non, vas y.
Je la vois prendre son briquet et allumer sa cigarette avec un doigté de professionnel. Et ça me fait du mal. Ça me fait du mal parce que je sais que Margaux n'est pas de ce genre de filles-là. Elle n'est pas censée boire ou fumer. Non. Elle a tellement à vivre qu'elle ne s'en rend pas compte.
- Je peux te poser une question, Allison ?
- Oui, bien sûr, je réponds en relevant la tête.
- Est-ce que tu raconteras un jour ce que tu as vécu ? Je veux dire... Vraiment tout. Dans les moindre détails. C'est peut-être un peu tôt pour poser la question mais je m'interrogeais.
Bizarrement, aucune larme ne vient poindre son nez. Non. Je regarde simplement mon amie dans les yeux et lui dis :
- C'est compliqué... Ces souvenirs me hantent depuis un mois et... Je sais que je m'en remettrai un jour, je pense. Enfin, j'espère. Mais oui, je pense qu'un jour je le raconterai. Mais ce jour-là signifiera que je tournerai enfin la page.
- C'est courageux de ta part ma belle.
Son sourire chaleureux retire mes appréhensions et nous prenons le bus quelques temps après qu'elle ait fini sa cigarette. Nous marchons ensuite les dizaines de mètres qui séparent l'arrêt de bus de chez moi. Je toque alors trois fois et entre. J'entends des voix s'élever des chambres ainsi que du salon. Je devine automatiquement que mes frères sont revenus avec Clément et ma sœur. Néanmoins, je n'entends pas la voix de mon père mais celles de deux femmes dans le salon. Je jette alors d'un seul coup mon manteau par terre et cours dans la pièce adjacente en hurlant :
- MAMIE !
Ses lèvres s'étirent autant que les miennes et je la prends dans mes bras en la serrant fort. Je respire l'odeur de son parfum qu'elle porte depuis ma plus jeune enfance.
- Tu m'as tellement manqué Mamie.
Je me détache alors d'elle et lorsque je vois son visage je pleure de joie. Je suis tellement heureuse de la voir devant moi. En chair et en os.
- Oh, Mamie... !
Je la serre une nouvelle fois dans mes bras et elle me susurre à l'oreille :
- Je t'aime ma petite Alli.
Ses mots me vont tout droit au cœur. Je voudrais ma grand-mère près de moi pour toujours, malheureusement c'est impossible. Les problèmes de famille ont fait qu'elle ne peut pas venir vivre dans le nord de la France avec nous. Elle doit rester dans le Sud.
Ma grand-mère m'embrasse les deux jours et se lève pour se rendre à la cuisine boire un verre d'eau, après avoir claqué une accolade à Margaux.
- Bonjour Maman, je déclare en m'asseyant à côté d'elle.
- Bonjour ma puce. Alors ?
- Le psy ? Ou Nathan ?
- Comme tu veux.
Je m'enfonce dans le canapé, sachant que ma mamie écoute notre conversation.
- Tu sais que je ne parle pas de mes rendez-vous chez le psychologue. Et Nathan... Aucun changement, comme d'habitude.
À ce moment, les larmes me viennent aux yeux, mais je ne les laisse pas tomber. Je refoule tout et souffle lentement. Je décide alors de changer de sujets, en essayant de changer au mieux mon expression.
- Euh... Margaux dort à la maison, mais ça tu le sais déjà. Du coup je vais l'aider à ranger ses affaires. A tout à l'heure !
Malheureusement, je passe devant ma grand-mère et elle me dit, sans chercher à chuchoter :
- Tu redescendras après, nous avons à parler, Allison.
Je hoche la tête, lui claque un bisou et monte avec mon amie. Une fois dans ma chambre et les affaire de Margaux sur mon lit, elle me regarde et me demande :
- Tu entretiens une relation fusionnelle avec ta grand-mère si je me souviens bien ?
- Oui... C'est toute ma vie, ma grand-mère. Je lui disais tout jusqu'aux attentats... Elle est venue pour me parler et me permettre de me libérer. Et puis... Juste savoir qu'elle est avec moi, ça me rassure.
- Elle est magnifique votre relation ! Mais... Ta mère n'en est pas un peu jalouse ? Je veux dire...
Mais je la coupe, légèrement agacée.
- Oui. Elle est jalouse. Mais elle n'y peut rien. Elle ne peut pas m'empêcher de la voir et si c'est pour mon bien, elle ne dira jamais non.
Ensuite, nous rangeons ses affaires dans un de mes placards vides et nous allons toquer à la porte de la chambre de Matthew. A ma grande surprise, Lylou s'y trouve aussi.
- Euh, les garçons, je vais sortir avec Mamie, du coup, est-ce que je peux vous confier Margaux ?
- Il n'y a aucun soucis Alli ! s'exclame Erwan, enthousiaste.
Lylou attrape alors la main de notre invitée et la place à côté d'elle sur le lit. Je lui lance un dernier sourire et m'en vais. Je redescends et vais à la rencontre de ma grand-mère.
- Prête ? me demande-t-elle.
- Prête.
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Mes plus plates excuses pour ce retard énormissime ! 😕 trop de travail encore une fois et j'étais penchée sur mes autres fictions 😍
Merci quand même pour ceux qui sont toujours là 😜
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