* 2 *

 « Hey, Mélanie. »

Elle sentit une main caresser son front puis descendre jusqu'à la naissance des ses cheveux accompagnée d'une voix douce répétant son nom. Elle ne voulait pas pas se réveiller, ses paupières étaient trop lourdes et son sommeil trop agréable pour le terminer. Elle voulait rester ainsi encore longtemps.

« Mélanie! » hurla quelqu'un d'autre, si fort qu'elle ouvrit immédiatement ses yeux. Raphaël dont elle avait reconnu la voix délicatement tonitruante sauta sur le lit ne manquant pas de peser tout son poids sur les jambes de sa cousine. Il rit de sa surprise, fier de sa farce.

« Regarde Jim' ! C'est bien plus efficace ! Faut pas la ménager, la petite ! - il tendit une main vers elle et ébouriffa une nouvelle fois ses cheveux.

- Elle est fatiguée, Raph' ... Tu devrais la laisser tranquille. » répondit doucement la première voix.

Mélanie se retourna immédiatement : Jimmy était assis juste à côté d'elle, il ne l'avait pas quittée des yeux et lui souriait affectueusement.

« Oh mon Dieu ! Jimmy! - elle lui sauta au cou sans perdre une seule seconde – Ça fait tellement longtemps !

- Je sais Mélanie ! Me sers pas si fort ! - il referma malgré tout ses bras sur elle et s'amusa de son enthousiasme – Tu m'as manquée aussi. »

Elle était comme une enfant, collée à l'un de ses parents après une première journée d'école. Elle pressa son nez dans le creux de son cou ignorant sa remarque. Jimmy caressa ses cheveux retrouvant la douceur d'une enfance déjà trop éloignée. Ils se séparèrent en souriant :

« Quand es-tu rentrée ? Alex ne m'a rien dit. J'aurais pu venir te chercher à l'aéroport.

- Il a dit exactement la même chose. Je te pensais au dessus de lui. – se moqua-t-elle.

- Tu sais bien combien on t'aime... - se défendit-il.

- Non ! Pas moi Jimmy ! » intervint Raphaël.

Il n'avait pas bougé et faisait pression sur les jambes de la jeune femme en levant fièrement la main. Mélanie et Jimmy lui lancèrent tous deux un regard las, puis ignorèrent sa remarque.

« Bref... - il souffla puis afficha un visage ravi – Mélanie, tu es de plus en plus belle !

- Toi aussi, Jim' ! - répondit-elle sans hésiter, en pouffant gentiment plus par gêne que par moquerie.

- Oh trop chou ! - il passa niaisement un bras autour de ses épaules, elle savait qu'il était sensible à la flatterie. Sans doute la complimentait-il dans ce but, mais Mélanie n'était pas dupe et se prêtait volontiers au jeu.

- Vous me dégoûtez tous les deux... »

Raphaël fit une moue de retrait, et se leva, les deux acolytes tapèrent leurs mains droites ensemble, victorieux. Ils savaient que les surplus d'affection le dérangeaient au plus haut point, et le jeune grincheux sortit immédiatement.

« On l'a déjà fait fuir, Mélanie! On va bien se marrer, je le sens ! - se réjouit Jimmy en se levant – Prépare-toi, on va manger ! On part dans cinq minutes. »

Déterminée et joyeuse, elle repoussa vivement les couvertures, prise d'une nouvelle énergie.Mélanie s'assit, monta ses genoux contre sa poitrine et passa ses bras autour d'eux. Elle se sourit, Jimmy avait quitté la pièce.

Elle le connaissait depuis la première fois que Raphaël l'avait amené chez eux, très vite les deux jeunes hommes étaient devenus meilleurs amis et l'étaient restés depuis leurs huit ans. Mélanie avait seulement sept ans mais sa proximité avec son cousin lui permit de passer tout son temps avec eux. Temps qui avait créé une belle relation d'amitié entre Jimmy et elle. Il était le seul à la défendre dans la cour de récréation comme à la maison, puis ce qui était initialement de la pure préoccupation devint une habitude. Raphaël était trop peu sûr de lui et réservé pour jouer ce rôle même si l'homme qu'il était désormais n'en laissait rien paraître, et Alexis aussi compréhensif soit-il restait un frère, un parent à qui on ne pouvait pas toujours tout dire. Au delà de tout ceci, Mélanie et Jimmy se comprenaient parfaitement ; si elle était l'incarnation de le douceur, lui était sa version masculine.

Eux trois avaient fait son enfance, elle le savait parfaitement et se sentait entière à leurs cotés désormais. Les rejoindre, être ici, à cet instant n'avait jamais paru si juste, quelque chose d'incertain en elle l'avait tout de suite quittée en les retrouvant. Quelque chose qui la rongeait et la changeait, une inquiétude sans doute admit-elle. Et dire qu'il y a seulement quelques heures, elle était encore en train de déambuler dans un aéroport à l'autre bout du monde. Mélanie inspira profondément, enivrée d'une plénitude nouvelle, elle se sentait revivre.

Elle se leva, enfila une robe d'été puis rejoignit les autres dans le salon. Tout le monde était là, excepté Alexis ; Mélodie était penchée sur son téléphone assise sur le canapé et tenait fermement la main de Raphaël occupé à discuter avec son meilleur ami assis sur le fauteuil d'à côté.

Mélanie se pencha pour mieux voir la petite amie de son cousin qui ne quittait pas l'écran des yeux.

« Salut Mélodie.

- Salut – répondit-elle, stoïque.

- Ça fait longtemps.

- Peut-être. .. »

En vérité, elles ne s'étaient rencontrées que quelques fois, la dernière remontait à plus de deux ans tout comme Raphaël . La jeune femme n'avait pas beaucoup changé tant physiquement que dans son comportement froid et distant envers Mélanie. Pourtant ça faisait autant de temps qu'elle était en couple avec Raphaël, elle agissait toujours avec beaucoup d'indifférence. Mélanie était ça sur le compte d'une timidité mal exprimée ou sur la gêne qu'on pouvait avoir à être toujours en présence de la famille de son petit-ami.

Jimmy était le seul qui avait une relation privilégiée avec elle, le seul qui trouvait grâce à ses yeux, on ignorait pourquoi. Mélanie supposait que les élans spontanés de gentillesse naturelle de son meilleur ami et son charme naturel avaient eu raison de la paroi de glace de Mélodie. Après tout elle ne la connaissait pas beaucoup mais espérait tout de même se rapprocher d'elle à terme.

« Tout le monde est prêt ? » Alexis sortit de sa chambre, tous acquiescèrent et se dirigèrent derrière lui vers la sortie.

Le café se trouvait à quelques rues de leur appartement . Depuis l'extérieur, il était très attrayant moderne. C'était la première fois qu'ils la menaient ici, Mélanie était agréablement surprise : l'endroit était charmant, accueillant, elle n'avait qu'une envie ; en savoir plus. Elle sourit devant l'entrée de la terrasse observant la petite foule de clients rieurs en tout genre, qui bavardaient, mangeaient et buvaient gaiement sous le soleil revenu après l'orage de la matinée.

Jimmy prit la main de son amie, ses yeux émerveillés étaient rivés sur la façade du café . Mélanie avait toujours eu l'habitude de se réjouir pour les autres, inconnus ou non. Elle tourna son attention vers lui.

« Ce café appartient à ma mère. Elle est revenue avec ma demi-sœur après la mort de mon père, il y a quatre ans. Elles se sont installées ici. »

Il ponctua sa phrase en désignant le quatrième et dernier étage de l'établissement, les trois précédents étant le café. Les fenêtres portaient chacune des fleurs écloses dansantes au vent et aux rayons du soleil. Jimmy lui avait raconté comment sa mère était revenu après presque dix ans d'absence, comment elle avait décidé de s'installer en ville et de le soutenir. Son ami, avait vécu comme une perte le départ de sa mère, et n'avait plus aucune confiance en lui et ce sentiment se renforça dû à son abandon d'études puis à la mort brutale de son père,c'est alors que sa mère réapparut avec sa fille née d'une autre union et de trois ans la cadette de Jimmy. Elle déplaça son café de province à la capitale avec quelques investissements et redonna confiance à son fils très vite, en lui accordant tout ce qu'il lui avait toujours manqué ; une famille et un travail. Par la suite, et au vu du développement du commerce, elle avait embauché quasiment toute la colocation. Alexis qui travaillait à mi-temps dans un restaurant très réputé de la ville, aidait en cuisine régulièrement, Jimmy, et Alan, un autre colocataire, travaillaient en salle comme Nolan et Raphaël qui assuraient aussi les services à domicile.

Mélanie avait eut vent de leur organisation et travail régulier ; ils lui présentaient souvent comme un havre de paix et d'épanouissement. Il faut dire que les cinq amis qui étaient restés dans la ville de leur enfance, étaient en plus d'être très complices, très complémentaires, et mettaient toujours du cœur à l'ouvrage. Alors la mère de Jimmy semblait satisfaite. Mais Mélanie savait pertinemment que tout ceci s'était accompli au prix de travail acharné et de beaucoup de douleur pour Jimmy. L'absence subie restait une plaie qui ne cicatriserait sans doute jamais, bien que Mélanie, son cousin, son frère et leurs amis aient toujours tenté de l'apaiser.

Elle serra la main de son ami de longue date comme pour lui apporter son soutien. Ils entrèrent dans l'établissement qui affichait autant de bon goût au dehors qu'au dedans. Il était presque vide puisque l'horaire du service était passée et quelques individus partageaient encore une collation du côté bar mais le côté repas était désert et ils allèrent dans cette direction. Les murs étaient en partie recouverts de soubassements en bois marron foncé et d'un blanc cassé et étaient ornés de reproduction de tableaux célèbres, les tables d'un bois sombres, étaient flanquées de chaises et fauteuils aux tons harmonieux quelques unes de banquettes. Un long bar tout aussi sombre trônait au fond de la pièce, derrière lui se dressaient des étages de verres et coupes en tout genre. Juste derrière le mur, on devinait la cuisine aux bruits en provenant et au contraste de couleur. La pièce se déployant de deux côtés, l'un plutôt affecté au bar l'autre à la brasserie, on voyait aussi des escaliers s'ouvrir des deux côtés. Mélanie supposait qu'ils menaient aux étages supérieurs. Des bouquets de fleurs et des vases remplies de nature fleurissante avaient été éparpillés un peu partout dans la pièce laissant échapper un peu de parfum entre les tables et les mets. Bien que l'ensemble soit assez sombre, le lieu n'était pas pour autant lugubre, les larges fenêtres donnant sur la rue et le parc de l'autre côté de celle-ci promettaient luminosité et éclat. Mélanie suivit ses amis au fond puis ils s'assirent au fond de la pièce à une large table. Ils discutaient et plaisantaient lorsqu'une une femme à l'allure élancée s'avança vers eux. A sa tenue et démarche, on devinait qu'elle travaillait ici et même qu'elle y tenait une place importante.

« Salut, salut... – ils se tournèrent tous vers elle.

- Salut Daniela ! - professionnelle, la jeune femme au visage sérieux et fier sortit un calepin et un stylo – Avez-vous choisi ?

- Oui. » répondit Alexis pour tous, puis un par un ils lui adressèrent leurs choix.

Après avoir tout noté, Daniela les quitta et Jimmy expliqua à Mélanie qu'elle supervisait tout pour sa mère et qu'elle fût d'une aide précieuse ces dernières années. La jeune femme l'écoutait attentivement narrer les anecdotes autour du café remarquant bien la fierté qui se manifestait sur le visage et dans le ton enjoué de son ami. Bien que la bande de camarades du lycée dont ils faisaient tous partie ne soit pas complète, elle se réjouissait de leur petite réunion et espérait que les autres les rejoindraient. Ils étaient neuf en tout, sept garçons, et deux filles, elle et sa meilleure amie, Chloé. Mélanie était impatiente de tous les revoir, et en fit part au reste de la table mais Raphaël, toujours curieux lui demanda :

« Alors, Mélanie, pourquoi es-tu revenue ? Après tout ce temps, on pensait tous que tu resterais là-bas... »

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