* 12 *

L'après-midi était largement entamé lorsque Mélanie et Alan rebroussèrent chemin vers l'appartement. Ils avaient marché un peut peu puis avaient grignoté un peu plus loin, ils ne voulaient pas vraiment quitter cet endroit coupé du temps, des autres et des problèmes qui les attendaient en rentrant.  Pour Alan, ces moments à deux ne faisaient que confirmer et amplifier les sentiments qu'il éprouvait et Mélanie apprenait à connaître réellement Alan et se sentait évoluer à côté de lui. Cependant le temps filait et tous deux savaient qu'ils devraient rentrer et faire face aux difficultés mais désormais, ils les voyaient différemment; ils pouvaient compter sur l'autre.
La jeune femme jeta un dernier regard vers le parc comme pour l'imprimer précisément dans son esprit. Même si elle était peu venue ici elle avait toujours aimé cet endroit ; pour sa tranquillité quotidienne et son activité enfantine lors des weekend-end et des jours fériés. Et cela la réagissait qu'Alain ait pensé à cet endroit pour eux deux comme refuge et comme lieu de tête à tête.

« On reviendra si tu veux...

- Non, peu importe, je...

- J'ai deviné que tu aimais cet endroit. - devant son étonnement, il s'expliqua comme pris sur le fait – Je t'observe un peu.

- Demain ?

- Demain. »

Ainsi l'accord tacite fut-il passé que ce parc deviendrait leur lieu de rencontre et d'isolement car a la vue de tous, ils seraient à l'abri des leurs.

Les rues étaient toujours aussi chaudes et bruyantes mais l'esprit soulagé, Mélanie n'entendait plus que des murmures aux alentours et souriante, elle semblait désormais savoir où elle irait. De son côté Alan ne pouvait être plus ravi ; celle pour qui, il nourrissait un immense attachement s'ouvrait peu à peu à lui et il se sentit assez confiant pour prendre sa main dans la sienne. Leurs doigts caramels et opales s'entrecroisèrent aussi naturellement qu'il l'espérait et il aurait voulu ne jamais atteindre l'appartement.

Une fois arrivés, ils séparèrent leurs mains et retrouvèrent Joseph et Chloé en compagnie de Nolan en peine discussion. Le couple était prêt à partir. Mélanie oublia quelques instants l'accalmie qu'il l'avait remise d'aplomb grâce à Alan et eut une secousse au cœur devant la mine lourde de sa meilleure amie. Elle semblait porter toute sa culpabilité en des poches noires sous les yeux, ses épaules d'habitude si droites avaient perdu leur vigueur et elle ne pouvait parler sans lâcher des souffles meurtris. Mélanie comprit que Chloé n'avait pas dormi depuis la veille et qu'en plus d'être exténuée par les événements, tout ceci lui rappelait que trop bien ce qu'elle tentait d'oublier. Joseph ne la quittait pas d'une semelle et la couvait d'un regard tendre comme il en avait l'habitude. Pour une fois, elle acceptait qu'il se tienne aussi près d'elle et ne refusait pas que sa main trouve son épaule ou sa taille. Chloé n'appréciait pas vraiment les élans d'affection amoureuse en public surtout devant son frère, mais cet après-midi là, elle n'avait ni l'énergie ni l'envie de s'y opposer et par instants y trouvait ce dont elle avait besoin: un certain réconfort. 

Pourtant, elle souriait, lorsque Nolan faisait un trait d'esprit ou lorsque Joseph lui adressait un sourire, elle parvenait à leur rendre ce peu de joie. Bien que fatiguée et honteuse,  elle ne pouvait se résoudre à paraître totalement abattue. Les deux amies savaient qu'elle regagnerait d'une manière ou d'une autre, l'énergie et l'audace qui la caractérisaient. Mélanie se sentir un peu rassurée devant la force de caractère de Chloé et l'admira un plus.
En les voyant arrivés côte à côte,  Chloé soupçonna qu'il se passait quelque chose entre Alan et Mélanie et s'en réjouissait particulièrement. Depuis le premier jour, elle avait décelé l'attachement d'Alan et avait jamais découragé le jeune homme pour aller dans ce sens. Mais Mélanie s'était montrée aveugle ou peu touchée car trop jeune ou naïve, Chloé ne saurait le dire. Même si elle était au plus mal et la seule dans un tel état, elle fut la seule à déceler ce rapprochement: Nolan étaient trop pris dans leur discussion pour s'apercevoir de quoique ce soit. Et pendant qu'ils discutaient, elle envoya un regard significatif à Alan et il sût qu'elle avait comprit et qu'il devrait lui rendre des comptes assez vite.

Contrairement à d'habitude, les garçons étaient les seuls a échanger; ils évitaient de parler de la veille . Ils se sentaient concernés mais préféraient attendre et riaient gaiement. Les deux amies ne se parlaient pas. Il n'y avait pas grand-chose à dire, chacune se reprochait l'incident de la veille. Les garçons faisaient toujours la conversation pendant qu'ils prenaient un verre ensemble, et elles y participèrent lorsqu'on s'adressait à elle mais elles écoutaient à peine. Mélanie apprit que son frère avait quitté l'appartement peu de temps après elle et qu'il ne reviendrait pas avant la nuit, Jimmy ne donnait aucune nouvelle tout comme Raphaël et Mélodie. Aucun d'eux ne réagit à l'évocation de leurs noms. Mélanie s'inquiétait pour eux; Jimmy était facilement joignable d'habitude et elle ne savait toujours pas comment allait Mélodie mais elle n'avait pas le cœur à demander à Raphaël, elle avait peur de sa réaction. Son cousin pouvait tout lui reprocher, tout comme souffrir autant qu'elle et se reprocher de ne pas être intervenu. Elle l'appellerait sûrement dans la soirée. Pour ce qui était de son frère, il s'absentait rarement sans dire ou il allait ou ce qu'il y faisait et si cela ne l'inquiétait pas vraiment, observatrice, elle nota cette exception.

Puis vient le moment des adieux, Chloé et Joseph devaient rentrer pour le travail du lendemain, et Mélanie eut un pincement au cœur plus douloureux que d'habitude. Elle était habituée aux séparations mais revoir Chloé lui avait envie de ne plus la quitter, la voir partir aussi vite lui pesait. Au moment de se séparer, Chloé dit appelle au revoir à son frère puis surprit Mélanie en la prenant dans ses bras et en la serrant très  fort contre elle. Elle étouffa un sanglot et chuchota à son oreille de sorte qu'elle fût la seule à l'entendre ;

« Pardonne-moi. »

Puis, elle monta dans sa voiture sans laisser à Mélanie la possibilité de répondre. Joseph lui jeta un regard douloureux, il comprenait la situation et souffrait avec sa petite-amie, comme souvent il semblait porter la moitié de sa peine. Mélanie fut surprise: Chloé ne pleurait que rarement et d'habitude planifiait toujours une date pour qu'elles se revoient mais là, elle n'avait rien dit. Elle se dit qu'elle voulait sans doute fuir au plus vite cet endroit et elle comprenait cela mais elle aurait aimé savoir avec certitude qu'elles se reverraient. Une sorte de distance indéfinie s'était glissé entre elles et le cœur de Mélanie se brisa à la pensée que plus rien ne serait comme avant.

Puis la voiture quitta leur horizon laissant Mélanie, Alan et Nolan dans une tristesse incompréhensible. 

* Ce chapitre est un peu plus court mais je dois m'arrêter là. Normalement un chapitre plus consistant demain.
Ema *

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