Chapitre 17
Deux heures du matin, et Stiles laissa sa tête se poser sur l'épaule de son confident, dont les paupières étaient fort lourdes. Mais il résista, il en était capable. Continuer de rester éveillé n'était pas raisonnable, d'autant plus qu'il se devait de faire attention : Stiles avait beau lui avoir dit qu'il ne comptait plus mettre fin à ses jours, Derek continuait d'avoir peur.
Et la confession qu'il lui avait faite concernant l'épisode de la cuisine ne le rassurait pas le moins du monde concernant sa santé mentale. Quoiqu'il s'était montré plutôt lucide lorsqu'il le lui avait raconté avec ses mots, ses ressentis. Après coup, Stiles avait eu parfaitement conscience du fait qu'il n'avait pas vraiment vu sa mère, qu'elle... N'avait été rien d'autre qu'une hallucination. Le seul élément qui le turlupinait réellement concernant cette histoire... C'était cette douleur aussi intense qu'étouffante qui l'avait comme... Eteint. Ça, ce n'était pas quelque chose qu'il oublierait de sitôt. Parce qu'elle avait été si forte qu'il n'avait rien pu faire. Rien, à part s'effondrer. Stiles, avec le recul, trouvait cela terrifiant, et il l'avait avoué à Derek.
Le voilà maintenant qui somnolait contre lui, la tête sur son épaule. Il avait cessé de parler depuis peu, mais il lui avait assuré qu'il mettrait du temps à s'endormir. Mensonge. Derek savait que Stiles était tout aussi épuisé que lui... Simplement, de manière différente. Si c'était le corps du loup qui lentement lâchait, concernant l'humain, il s'agissait plutôt de sa tête. Dans les deux cas, ils feraient mieux de se reposer. Ainsi, lorsque Derek décida que rester ici ne servait à rien, il secoua doucement Stiles, qui peina à ouvrir les yeux.
- On va dormir ?
La question de Derek n'en était pas vraiment une, mais il avait pris ce ton par réflexe. Il le trouvait plus doux, plus ténu, plus agréable à entendre pour Stiles, dont les sens devenaient plus sensibles à cause du sommeil. Là où le corps s'endormait, les sens s'éveillaient, avait-il coutume de penser.
L'hyperactif se redressa doucement et lâcha spontanément, en s'étirant :
- J'étais bien, avec toi...
Si la réaction de Derek fut discrète et consista en un battement irrégulier de son cœur, celle de Stiles à ses propres paroles s'avéra plus... Visible. Car dès lors qu'il prit conscience de ses propres mots, il rougit et esquissa un sourire mêlant nervosité et gêne.
- Ce n'est pas ce que je voulais dire, je... Ta présence me rassure. Tu es calme, tu...
- Tu veux monter ? Le coupa Derek.
Stiles avait malgré lui lancé une perche... Que la part animale du loup-garou avait saisie par instinct. L'humaine, elle, se demanda ce qu'il lui avait pris, mais se rendit compte qu'il était trop tard pour revenir sur ses paroles... Encore plus lorsque Stiles le regarda, les joues toujours rosies, et lui répondit sans trop d'hésitation :
- Ça, je... Si ça ne te dérange pas.
- Je te le propose, Stiles.
- Alors, je... Oui.
xxx
Derek n'avait que rarement dormi autrement que seul. Dans son lit ? Cela n'arrivait quasiment jamais. Mais il n'allait jamais dans celui de l'autre chambre, et... Il aimait beaucoup le sien. S'il avait eu quelques conquêtes par le passé, rares étaient celles qui avaient foulé ses draps pour n'y faire que dormir.
Et puis, il y avait Stiles. Un collègue de meute. Un jeune homme dont il avait sauvé la vie de justesse. Un humain à qui il accordait le droit d'entrer dans cette intimité spéciale, plus privée encore qu'un acte sexuel. Et maintenant qu'il prenait le temps de réfléchir, Derek comprenait pourquoi sa part lupine avait pris le contrôle, pour lui proposer de dormir avec lui. Parce qu'elle s'était rappelée avant lui du fait que Stiles s'était instinctivement réfugié dans cette chambre après la réunion. Parce qu'il était resté anxieux, même après la discussion durant laquelle il lui avait tout expliqué concernant ce qu'il s'était passé dans la cuisine. Parce qu'il avait été fébrile. Pas parce qu'il lui avait avoué s'être senti bien, à somnoler contre lui. Non, non. Disons que Derek refusait de se dire que c'était peut-être aussi pour cette raison qu'il l'avait accepté dans son lit.
En fait, Derek avait également pris conscience du fait – qui avait son importance – qu'ainsi... Stiles serait plus facile à surveiller et qu'en cas de nouvelle crise hallucinatoire... Cette fois, il serait là. D'ailleurs, il avait un peu tardé à s'endormir à cause de cela : ses pensées étranges et furtives mises à part, il s'inquiétait réellement pour l'hyperactif. L'avoir dans son lit – en tout bien tout honneur –, le rassurait. Ainsi, il pouvait veiller sur lui sans aucun problème.
C'était d'ailleurs encore plus simple dans la mesure où Stiles se collait instinctivement à lui, dans son sommeil. Et Derek ne le repoussait pas parce qu'il se disait... Que l'hyperactif avait besoin de chaleur, d'une proximité rassurante. Oui, mais l'ancien alpha ne l'imaginait pas se coller ainsi contre Isaac, ou Scott. Cette vision, aussi saugrenue soit-elle, le rendit un peu bougon sans qu'il ne cherche à comprendre pourquoi. Mais sa main, elle, trouva sa place sur le ventre du jeune homme, bien évidemment par-dessus son haut. Elle était bien, là. Comme s'il était inconsciemment d'accord avec cette idée, Stiles se pelotonna davantage contre le loup, qui s'efforça de ne pas réagir. Stiles était... Il dormait, et recherchait inconsciemment du réconfort, quelque chose de familier qui le rassurait. C'était, aux yeux de Derek, le plus logique. Disons qu'il ne trouvait pas d'autre explication ou en tout cas, rien de froidement logique.
Dormir avec Stiles avait été étonnamment agréable, si Derek mettait son inquiétude de côté. C'était ça le pire : la partie loup-garou avait autant apprécié la chose que son homologue humaine. Là encore, Derek aimait sentir le jeune homme ainsi allongé contre lui. Abandonné à ses bras qui pourtant ne l'enserraient pas. Son visage parsemé de grains de beauté – comment pouvait-il en avoir autant ? – était détendu à un point tel que le cœur de Derek s'en retrouva réchauffé malgré lui. Cela faisait des jours que Stiles avait un air morne, qu'il alternait entre pleurs, moments de tranquillité et ruminations... Alors retrouver l'harmonie de la sérénité peinte sur son visage faisait du bien.
Mais fut un moment où Derek choisit de se lever, histoire de commencer à préparer le petit-déjeuner et de faire quelque chose de sa fin de matinée. Bien évidemment, le loup ne partit pas sans mettre ses sens en alerte : à la moindre variation suspecte de son odeur ou de ses battements de cœur, il accourrait. Derek savait toutefois qu'il devait relativiser... Sauf qu'il considérait toujours Stiles comme instable et qu'il n'avait aucune garantie que la vision qu'il avait eue soit orpheline. Alors, il faisait attention. La peur qu'il avait eue lorsqu'il l'avait retrouvé inconscient dans la cuisine ne le quittait pas.
Mais au moins, ils avaient pu en discuter. Tard dans la nuit, certes, mais au moins... Derek comprenait un peu mieux ce qu'il avait vécu sur le moment. Il n'irait cependant pas jusqu'à dire que ça le rassurait, loin de là. Néanmoins Stiles s'état confié à lui et ça, ça allait parfaitement à Derek.
Un quart d'heure plus tard, Stiles pénétra dans la cuisine en se frottant les yeux. Bien sûr, Derek l'avait entendu se réveiller et se lever – mais les signaux étant au vert, il avait attendu qu'il arrive. Là encore, le visage de l'hyperactif lui paraissait détendu : juste encore un peu ensommeillé. Les cernes sous ses yeux témoignaient de cette fatigue qui continuait de l'alourdir, comme si les heures de sommeil qu'il avait eues se révélaient insuffisantes – et c'était sans doute le cas.
- Tu pouvais dormir plus, fit Derek en guise de bonjour.
Ce faisant, il retourna les deux tranches de bacon qu'il était en train de faire cuire. Du coin de l'œil, il vit Stiles esquisser un sourire timide en s'asseyant à table.
- Tu n'étais plus là, fit simplement l'humain.
Il n'y avait pas la moindre once de reproches dans ses mots, qui sonnaient comme une réponse en eux-mêmes.
- Tu peux dormir sans moi, rétorqua Derek, pas vraiment certain de ce qu'il disait.
Stiles eut un léger rire peu assuré.
- Quand tu es collé à un radiateur et que ton radiateur s'en va, tu te rends compte qu'il fait froid, lâcha-t-il, les joues légèrement rosées.
Derek interpréta l'image de bien des manières, et l'une d'elles, étonnamment chaude, l'obligea à se reconcentrer sur son bacon en grognant.
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